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saint-nazaire - Page 2

  • Madeleine Massonneau

    Madeleine Massonneau est connue des Nazairiens pour avoir réalisé les fresques de l’ancien hall de l’ancienne école Jean Jaurès, 25 boulevard Victor Hugo, devant la Médiathèque Etienne Caux, restaurée en 2019-2020 par trois membres de l’équipe de restauration de Géraldine Fray, et à laquelle l’une des capsules d’Instant Patrimoine Ville de Saint-Nazaire a été consacrée :

     

    Mais qui était Madeleine Massonneau, cette artiste de grands talents, que les conservateurs et les DRAC redécouvrent depuis moins de dix ans ? Sa biographie est encore énigmatique, car pleine de questions sans réponses. Cependant, nous avons tenté de reconstituer celle-ci.

     

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    Madeleine Massonneau dans L'intran du 22 novembre 1932.

     

    Madelaine Massonneau, essai biographique :

    Madeleine-Valentine Massonneau, est née à New York le 21 mai 1901, de parents français : Fernand Massonneau, et son épouse LouiseBelaud, qui se déclara dans les recensements comme née à Angers en 1870, mais qu'on ne retrouve pas dans les registres de cette commune. L’origine angevine de sa mère a fait croire aux conservateurs que Madeleine serait issue de la famille de banquiers angevins Massonneau ; en réalité son père est né à Dampierre-sur-Boutonne en Charente-Maritime, le 12 mars 1870. Il était le fils de Valentin Massonneau, cultivateur à Saint-Hillaire en Dampierre sur Boutonne, et de Pélagie Pradon. Ils quittèrent leur condition paysanne pour se faire vendeurs de primeurs et étaient domiciliés à Saint-Maurice, en Val-de-Marne, en 1914. Fernand Massonneau fut d’abord voyageur de commerce à new York, où il fut « dispensé de service pour une varicocèle à gauche très prononcée », il rentra en France avec sa famille à la veille de la Première-guerre-mondiale et exerça le travail de courtier. Il prit logement à Levallois, au 44 rue de Villiers, appartement haussmannien qui occupait tout le premier étage de l’immeuble, avec domestiques à demeure. Fernand fut engagé pour la guerre le 22 août 1914 à Paris au 129e régiment d’infanterie, enregistré comme soldat de 2eme classe le 24 août 1914, passé au 2eme escadron le 15 octobre 1915, maintenu à l’armée après conseille de réforme à Marseille le 11 novembre 1916, il fut démobilisé le 16 décembre 1918. Fernand et Louise avaient aussi un fils ainé, Jacques-Robert, né à New-York le 18 août 1894. Les bombardements de Paris et de ses banlieues par les zeppelins et la Grosse Bertha, obligèrent Louise et ses enfants à se replier à La Traguée d’Availles dans les Deux-Sèvres. Jacques partit au front quand il eut 21 ans ; à l’Armistice il partit à New-York comme employé de commerce, où il épousa Marcelle, née à New-York en 1899, et dont il eut un fils né en 1921 à New York lui aussi : Pierre. Il revint avec sa famille à la naissance de son fils, et emménagea chez ses parents à Levalois.

    Madeleine bénéficia d’une éducation bourgeoise, avec l’ouverture d’esprit étasunienne d’alors, qui permettait aux filles la pratique des sports et des arts. De son enfance elle dira dans L’Intran – Match du 22 novembre 1932 : « Aimant la musique, le chant, la peinture, on hésita dès mon âge entre le conservatoire et les Beaux-Arts. Je me décidai toutefois pour la peinture. […] Depuis ma tendre enfance je pratique les sports : la bicyclette et, plus tard, le patinage à roulette au Vel’d’Hiv’. »

    Voici chronologiquement ce que nous savons de Madeleine Massonneau (sous réserve d’une réponse future des municipalités et DRAC que nous avons contacté depuis un an) :

     

    1923 - Inscrite à l'École nationale supérieure des Beaux-Arts, (AN AJ/52/1170), admise à la section de peinture de l'École nationale supérieure des Beaux-Arts – elle eut pour professeur Louis-François Biloul, (1874-1947), Paul Baudoüin (1844-1931), et Ferdinand Humbert, (1842-1934). ;

    1925 - Expose au Salon des artistes français ;

    1926 - Est déclarée dans le recensement de Levallois en comme artiste peintre ;

    1927 – Exposition d’Arts féminin, premier prix pour ses toiles (cf Journal des Arts du 2 février 1927) ;

    1928 – Elle est second-prix de Rome – Elle relatera dans L’Intran – Match du 22 novembre 1932 : « après avoir obtenu quelques médailles dans diverses expositions, dont celle de la ville de Paris, je montai en loge en 1928 ou j’obtins la seconde place. Je ne peux me présenter, étant atteinte par la limite d’âge. » - Elle intègre l'association La Fresque, (tout comme Paul Lemasson membre du Groupe Artistique de Saint-Nazaire), fondée par Paul Baudoüin ;

    1929 – Pratiquant le cross, elle se met à pratiquer le Basket-ball et l’athlétisme. – Peinture monumentale de Sainte Bernadette (300 H x 240 L) et Procession à Notre-Dame-des-Dunes, en l’église paroissiale Notre-Dame du Rosaire de Pornichet « Les peintures couvrent le mur du fond de la chapelle, en plein cintre, autour d’une niche d’autel, et les murs latéraux avec leurs niches, sur trois registres séparés par un appareillage de briques ». Elle reçoit sur votes le Prix biennal Troyon (1.100 fr), au concours de l’Académie des Beaux-Arts ;

    1930 - Expose au Salon des Indépendants – participe au cycle de fresques commandées par la Ville de Paris pour Le préau fermé de l’école de la rue Beauregard, sur le thème des Fables de la Fontaine, avec Margaret Baer Austin, et Margaret Ann Dorson. « Aucun document ne subsiste plus à propos de cette décoration, si ce n’est une lettre de Madeleine Massonneau sollicitant un emploi en 1936 et rappelant les fresques exécutées à cet endroit « avec quelques-uns de mes camarades » (Archives de Paris, VR 573, dossier « école rue Littré » ; Marc Verdure, La peinture murale : héritage et renouveau ; In Situ, Revue des Patrimoine, 2013) ;

    1931 – Madeleine devient membre du Cercle Féminin de Paris comme internationale de cross et remporte la Coupe Suzy et se classe seconde au Championnat de France de cross-country en Cross long. Elle profite des entrainements sportifs pour faire des croquis des championne Suzanne Lenoir et Renée Trente. Elle expose au Salon des Artistes Français ;

    1932 – Se classe encore en seconde au Championnat de France de cross-country en Cross long – Elle reçoit la commande par la Ville de Saint-Nazaire de fresques qui couvre les quatre murs du hall de l'ancienne école Jean Jaurès, au 25 boulevard Victor Hugo pour la somme de 18.256 fr (soit 400 fr du m²) (cf. article du L'Ouest Éclaire du 5 novembre 1933) – Exposition au Salon des Artistes Français : « 1679 - Portrait de Mlle Marie Olivier » - Interview pour des raisons sportives dans L’Intran – Match du 22 novembre 1932 et L’Auto-Vélo du 22 décembre 1932 ;

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    Madeleine Massoneau dans L’Auto-Vélo du 22 décembre 1932

     

    1933 – Commande d’un cycle de fresques pour le hall de l’école Jean Jaurès, œuvre réalisée est restaurée en 2020 dans le cadre de Saint-Nazaire Ville d’Art et d’Histoire. Le 4 novembre, la Ville lui commande une autre fresque pour le Stade du Plessis, œuvre perdue, (Registre des délibérations du conseil municipal de la ville de Saint-Nazaire, 1931-1933, Archives communales, Saint-Nazaire, cote 1 ADM 24) ;

    1934 – Janvier-février, exposition au Salon du Groupe Artistique[1] de Saint-Nazaire auquel elle a adhéré en 1933. Paul Bellaudeau[2], l'illustrateur du Courrier de Saint-Nazaire, y signa le 20 janvier, sous le pseudonyme d’Aristarque, un article dans lequel il dressa la liste de ce qui n'allait pas en matière de dessin, (seul art qu'il maitrisait), dans l'ensemble des œuvres accrochées, allant chercher le moindre détail secondaire pour cela, démolissant finalement chaque travail, à l'exception de ceux d'Alexis de Broca et de Charles Beilvaire. Ecrit dans son style habituel et reconnaissable entre tous, il y distilla du fiel, et s'attaqua à Charles Perron, professeur aux Beaux-Arts de Nantes, deuxième Grand prix de Rome en 1921, et plus particulièrement à Madeleine Massonneau qui exposait alors quatre toiles, dont un portrait de Mlle C..., c'est à dire mademoiselle Isabey Campredon, la fille du chimiste et industriel. Bellaudeau écrivit : « Mlle Massonneau est-elle portraitiste ou caricaturiste ? Elle expose sur fond bleu charron une interprétation rappelant Mlle C… Un si charmant modèle méritait mieux. » Ce fut la seule participation de Madeleine au Salon de Saint-Nazaire, et, elle ne renouvela pas son adhésion au Groupe ! - Madeleine quitte le domicile de ses parents, on ignore où elle emménage.

    1938 – Achat par l’Etat d’une esquisse pour décoration murale, (Inv. : FNAC 15857) ;

    1939 – Réalisation de « Ronde d'enfants », peinture murale 737 x 278 cm à Saint-Gratien, Val d'Oise, en l’école de filles ; livrée 5 janvier 1940 ; Inv. : FNAC 16339 – 29 décembre commande par l’Etat d’une huile sur toile, « Nymphe », 81 x 65 cm, livrée en 1940 – (Femme assise de 3/4 dos, héron, tortue), Inv. : FNAC 16472 - En dépôt depuis le 26/09/1946 : Ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (Paris) ;

    1941 – Achat par l’Etat de la fresque en demi-coupole sur escalier « Les nouvelles se répandent sur la terre par la voie humaine » pour le bureau de Postes Paris-Central Paris 18ème ; Livraison en juillet 1942- Mariage avec Jean-Robert Naudin, originaire de Fontainebleau, (aucune réponse de la Mairie de Fontainebleau le concernant), elle est dès lors « madame Massonneau » dans les commandes d’Etat ;

    1942 – Achat par l’Etat d’une peinture non décrite ; (renseignements extraits des répertoires et non des dossiers à Pierrefitte-sur-Seine) ; Illustration, avec  G. Marjollin et J. Ovens, du livre de Roger Dévigne, Le légendaire de France ;

    1943 – Achat par l’Etat « Marine, un coin de Saint-Nazaire », esquisse au crayon et à la gouache de la fresque de Saint-Nazaire en l’ancienne école. Achat à l'artiste en 1943 ; (Inv. : FNAC 18833). Commande par la municipalité de Fontainebleau et du Comité d'entr'aide aux artistes, d'un cycle de 9 fresques pour le groupe scolaire Saint-Merry (Paris), présentées au public les 13 et 14 juin 1943, (cf. L'Informateur de Seine et Marne du 11 juin 1943). L'ensemble de cette commande se poursuivra en 1946, et ne sera achevé qu'en 1948. Réalisé au pastel dur sur mortier (Léo Couzmine maçon), il se compose de : Panneau n°1 : 125 x 350 cm refait en 1980 M Massonneau et J.M. L'Helgoualc'h, maçon ; Panneau n°2 : 125 x 213 cm « La grande sœur » ; Panneau n°3 : 125 x 467 cm refait en 1980 par Massonneau et J.M. L'Helgoualc'h, maçon ; Panneau n°4 : 125 x 433 cm « Charité » ; Panneau n°5 : 125 x 127 cm (1ère partie) ; et 125 x 264 cm (2ème partie) « Aux champs » ;Panneau n°6  « Hymne à l'Enfance » ; Panneau n°7 « Hymne à l'Enfance », faisant partie de l'ensemble de 9 panneaux, au pastel dur sur mortier (Léo Couzmine maçon) ; Panneau n°1 : 125 x 350 cm refait en 1980 M Massonneau et J.M. L'Helgoualc'h, maçon ; Panneau n°2 : 125 x 213 cm « La grande sœur » ; Panneau n°3 : 125 x 467 cm refait en 1980 par Massonneau et J.M. L'Helgoualc'h, maçon ; Panneau n°4 : 125 x 433 cm « Charité » ; Panneau n°5 : 125 x 127 cm (1ère partie) ; et 125 x 264 cm (2ème partie) « Aux champs » ; Panneau n°7 : 125 x 500 cm) « Jardinage » ; Panneau n°8 : 125 x 96 cm « La cuisine » Panneau n°9 : 125 x 100 cm ; « Les arts d'agrément » Surface totale : 29m2. (Inv. : FNAC 20183 (1 à 9) : 125 x 500 cm) « Jardinage » ; Panneau n°8 : 125 x 96 cm « La cuisine » Panneau n°9 : 125 x 100 cm ; « Les arts d'agrément » Surface totale : 29m2. (Inv. : FNAC 20183 (1 à 9) ;

     

     

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    « Marine, un coin de Saint-Nazaire », esquisse au crayon et à la gouache pour la fresque de l'ancienne école Jean Jaurès à Saint-Nazaire, (Inv. : FNAC 18833).

     

    1944 – Achat par l’Etat des esquisses de « Hymne à l’Enfance », commandée en 1943 pour le groupe scolaire Saint-Merry (Paris), (Inv. : FNAC 19140) ;

    1946 – Février, réalisation de « Hymne à l'Enfance », 6e panneau du groupe scolaire Saint-Merry ;

    1947 – Février livraison de 8 des 9 panneaux des fresques du groupe scolaire Saint-Merry et ensemble de 8 panneaux en pastel dur sur mortier - Panneau n°1 : 125 x 490 cm : les panneaux - Panneau n°2 : 125 x 289 cm : « Paon » - Panneau n°3 : 125 x 750 cm : « Marabout » - Panneau n°4 : 125 x 340 cm : "canards" - Panneau n°5 : 125 x 420 cm : « Forêt » - Panneau n°6 : 125 x 132 cm ; « Tourterelles » - Panneau n°7 : 125 x 66 cm ; « Goûter » - Panneau n°8 : 125 x 66 cm « Jeux » - Surface totale : 32 m2 environ - S.D.B.DR. : (panneau n°3) : MADELEINE MASSONNEAU - / mortier : LEO COUZMINE / MAI 1943, (Inv. : FNAC 20711 (1 à 8) - Exposition au Salon d’Hiver : « Maternité ».

    1948 – Février, livraison du 9ème panneau au Groupe scolaire Saint-Méry. - Achats par l’Etat de « Le mont Bouligny avril 1947 », 28,5 x 27 cm, (Inv. : FNAC 21109) ; et « Les bouleaux avril 1945 » 41 x 35 cm, (Inv. : FNAC 2111), ces deux toiles sont en dépôt : depuis le 18 juillet 1950 à la Mairie d'Argenton-sur-Creuse – Achats par l’Etat de « La forêt de Fontainebleau » 37 x 45 cm, (Inv. : FNAC 21112), en dépôt depuis le 4 février 1949 à Ambassade de Turquie en France ;

    1958 - Etablissement à Fontainebleau chez sa belle-famille durant le printemps et l'été ; elle peint de nombreux paysages et sous-bois dans la région. Septembre, du 26 au 28 réalisation à Fontainebleau d'une série de portraits au fusain des membres de la famille Naudin, dont celui de son beau-frère, Claude, (époux de Jeannette...), et de son beau-père, « Papa Naudin », (nombre de ses dessins et tableaux furent vendus/bradés aux enchères dans le cadre de la succession Naudin) ;

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    Autre attitude de Papa Naudin, 28 septembre 1958, Fonds et Collections Odoevsky Maslov.

     

    1959 - Achat par l’Etat de « Les environs de Clamecy 1958 », 37 x 44,5 cm, en dépôt depuis le 14/10/1960 : Mairie de La Capelle-Bleys - Inv. : FNAC 26747 – « Sous-bois en forêt de Fontainebleau » (Inv. : FNAC 26748), en dépôt depuis le 30 octobre 1970 à la Mairie de Plerguer ;

    1963 – Madeleine Massauneau-Naudin a son atelier au 22 rue Tourlaque, Paris-18e, dans la Cité des Fusains. - Exposition au 8eme salon de Montrouge 1963 : « Portrait de M. R. Bergeron, Président du Salon Violet » ;

    1972 – Exposition au salon des Beaux-Arts. Elle reçoit les Prix Bonnat et Henri C. Parke ;

    1974 – Elle reçoit le Prix André Peuvrier section peinture Salon des Beaux-Arts de France ;

    1975 – Exposition au salon des Beaux-Arts de « Par l'absurde » ;

    1978 – Elle est mentionnée dans La Revue moderne des arts et de la vie ;

    1980 - Réintervention pour restaurer et refaire des panneaux de « LHymne à l'Enfance », avec le maçon J.M. L'Helgoualc'h du groupe scolaire Saint-Merry.

     

    On perd ensuite sa trace… elle décéda le à Boissie-La-Bertrand, dans la maison de retraite où elle s'était retirée. Son époux est encore vivant à son décès.

     

     Signalons aussi qu'elle peignit pour le docteur Luzuy à Blois, en son appartement, un décor mural à une date non connue. Ces décors persistent encore, rue du Docteur Luzuy à Blois, et sont protégés au titre des monuments historiques, Arrêté du 10 juillet 2020, avec attestation rectificative du 27 octobre 2020, parties protégées : les parois peintes à la fresque de Madeleine Massonneau situées dans le lot 109 de l'ancienne résidence du Docteur Luzuy ; propriété privée (société civile). (La DRAC de Loir-et-Cher et la Mairie de Blois n'ayant pas daigné nous répondre à propos du dossier qui semble vide d'informations précises).

     

     

    [1] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2018/07/30/le-groupe-artistique-de-saint-nazaire-et-le-groupe-de-indepe-6069504.html

    [2] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2021/03/06/paul-bellaudeau-6301877.html

     

     

  • Les Lera : Une famille de diplomates nazairiens venus du Mexique

    On l’oublie trop souvent, Saint-Nazaire, au temps où il était encore un port de voyage et de commerce, était une ville d’une telle importance qu’elle était le siège de plusieurs consulats. Dès 1857, la Prusse et le royaume de Suède-et-Norvège, eurent leurs représentants, rejoints par l’Espagne en 1859, etc.

     

    En 1939, il restait encore dix-neuf représentations consulaires en notre cité, et parmi celle-ci, le Mexique était la seule nation à avoir conservé en permanence son consulat depuis son ouverture en 1866[1]. Parmi les différents envoyés ayant reçu leur exequatur, deux ont la particularité d’être père et fils : Carlo Americo Lera Macías, et Ramón Lera Borrell.

    Le nom de Lera[2] résonne encore pour les Nazairiens, et n’est pas inconnu de l’ensemble des lecteurs de ce Blog ou de la Revue Histoire & Patrimoine ; en effet, Marc Hélys[3], en réalité Marie-Hortense Héliard, fut la seconde épouse de Carlos Américo. Après avoir fait le portrait de cette étonnante personnalité, parlons un peu plus des Lera, famille qui se consacra à la diplomatie, et qui reste attachée à Saint-Nazaire[4].

     

    Carlos Americo Lera Macías

     

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    Carlos Americo Lera Macias, en 1910 en uniforme d’ambassadeur, portant, à sa droite, la médaille commémorative du traité commercial de 1909, la plaque de l’Ordre de Sainte-Anne, la plaque de l’Ordre de la Légion d’honneur ; en travers, le cordon de l’Ordre de Sainte-Anne ; à sa gauche : la croix d’officier de l’Ordre de la Légion d’honneur, la plaque de l’Ordre du Soleil Levant, la plaque de l’Ordre du Double Dragon. (Collection famille Lera)

     

    Carlos Americo Lera Macías naquit espagnol à La Havane le 4 novembre 1855, à l’époque où Cuba était encore colonie esclavagiste4[5] de la reine Isabelle II. Ses parents, Fernando Lera et Elvira Macías, originaires de Valladolid, ne nous sont connus que de nom, et semblent être arrivés à Cuba peu avant sa naissance[6]. Son enfance est un mystère, la lecture des courriers de ses enfants nous laisse penser qu’il n’en avait jamais parlé. Carlos Americo, père doux et aimant, ami fidèle et dévoué, était un homme secret, à la vie intérieure forte ; un homme charismatique et intimidant, auquel on n’osait poser de question et qui pouvait se montrer abrupt si cela touchait à son intimité.

    Jeune, c’était un homme brun, mince, mesurant 1 m 60, aux yeux myosotis, et pourvu d’un magnétisme propre aux créoles hidalgos, qualité qui, même âgé, blanchi et dégarni, ne laissait pas les femmes indifférentes, et maintenait une distance de respect chez les hommes, persuadés d’avoir à faire à un grand seigneur de la race des guépards dépeinte par Lampadousa[7].

    Diplômé en droit civil et canonique à l’université de La Havane en avril 1875, il partit à Madrid pour se former en droit international, où, dans la chambre qu’il occupait, il nourrissait chaque soir une souris avec un reliquat de son dessert[8].

    Son nouveau diplôme en poche, il rentra en 1877 à La Havane, où il y épousa au début de l’année 1878 une Mexicaine, Edelmira Borrel Borrá, née à Guanajuato en 1855, fille de Ramón Borrell Can, entrepreneur en fournitures militaires, et d’Edelmira Borrás Many[9].

     

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    Empreinte du tampon du consulat du Mexique à Saint-Nazaire, en 1899. (Collection Joëlle Bontempelli)

     

    Ce mariage fit que le gouvernement mexicain le sollicita comme avocat pour le défendre dans le cadre d’un procès avec la couronne d’Espagne. Carlos Americo gagna le procès en 1879, et fut rapidement victime de représailles de la part des autorités espagnoles mécontentes, qui finirent par le bannir de l’île avec son épouse enceinte, et leur premier fils, Carlos Americo, dit Carlos, né à La Havane 8 novembre 1878. Carlos Americo Lera partit pour le Mexique avec sa famille, où il réclama auprès d’Ignacio Mariscal, (1829-1910), secrétaire aux affaires étrangères, les honoraires qui ne lui avaient pas été payés par le gouvernement mexicain.

    Ignacio Mariscal le fit engager comme avocat-conseil au ministère. Naquirent alors à Mexico deux autres fils : Ramón Federico, le 3 mai 1880, et Fernando, le 11 février 1882, ainsi qu'une fille, María-Edelmira-Delfina-Elena, qui naquit le 28 septembre 1883, mais elle décéda le 16 avril 1884 à Mexico.

     

    Le 4 février 1884, Carlos Americo reçut l’exequatur de consul des États Unis du Mexique, à Saint-Nazaire. Il s'y établit en mais, et prit un appartement rue de Villès-Martin (avenue Général de Gaulle), la rue à la mode, et loua, comme tous les membres de la bonne société nazairienne, une villa sur la corniche, à Bonne Anse.

     

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    Lettre d’exequatur de Carlos Americo Lera Macias comme consul des États-Unis du Mexique en date du 4 février 1884. (Collection Joëlle Bontempelli)

     

    Edelmira, gravement malade depuis son arrivée (probablement de la tuberculose), fut à nouveau enceinte, elle accoucha le 26 mai 1885 à Saint-Nazaire, d’une fille, Edelmira-Delfina-Amelia.

    L’accouchement se passa très mal, Edelmira Borrel Lera resta entre la vie et la mort durant un mois. Elle décéda le 26 juin 1885 et fut inhumée au cimetière de La Briandais. Carlos Americo fut si perturbé par cette situation, qu’il en oublia de déclarer la naissance de sa fille à l’état civil. Il fallut un jugement du tribunal civil de Saint-Nazaire, en date de 28 juin 1901, pour qu’un acte de constatation de naissance soit constitué le 21 juillet 1901 sur le registre des naissances de 1901, avec ajout en marge dans le registre de 1885, entre deux déclarations, constituant dans nos registres un exemple fort curieux d’insertion. L’enfant garda aussi en famille le surnom de « Bébé ».

    Parmi les gens que Carlos Americo Lera fréquentait, il y avait les avocats de Saint-Nazaire, dont Aristide Briand, qui venait à Bonne Anse jouer au billard, mais aussi les capitaines au long court de la Compagnie Général Transatlantique.  L’un d’eux, François Héliard (Granville, 26 juillet 1829 – Saint-Nazaire, 16 mars 1901), un Normand qui avait épousé une Nazairienne, Marie-Philomène Laborde (Saint-Nazaire, 15 août 1836 - Saint-Nazaire, 2 mars 1918)[10]. Le capitaine Héliard lui donna en mariage sa fille aînée, Marie-Hortense, beauté, châtain aux yeux noisette, menue, mesurant 1 m 55, qui avait écarté pour Carlos Americo la foule de ses prétendants. Depuis plusieurs mois, ils étaient subjugués mutuellement l’un par l’autre.

    Ce second mariage eut lieu à Saint-Nazaire le 10 août 1886. Le témoin de Carlos Americo fut son beau-frère, Frederico Borrell, âgé de 22 ans, sous-lieutenant de cavalerie de l’armée mexicaine, chancelier du consulat du Mexique à Saint-Nazaire[11]. Le nouveau couple fut le plus en vue de la ville. Mais Marie avait des ambitions mondaines, et persuada Carlos Americo de prendre demeure à Nantes, rue Gigant. Tant pis s’il fallait pour lui prendre le train pour le consulat de Saint-Nazaire, et y demeurer certaines nuits. C’est à Nantes que naquit leur fille, Marguerite-Marie-Amélie, le 5 novembre 1888, envers qui, Marie n’eut jamais la fibre maternelle, moins encore envers les enfants de son époux, même si, à sa décharge, les mères de la bourgeoisie ne s’occupaient pas en personne de leurs enfants en ce temps-là.

    Le 6 novembre 1890, Carlos Americo Lera fut promu secrétaire d’ambassade de première classe au Guatemala. L’arrivée dans ce pays, avec sa famille, manqua de tourner au drame.

    Débarqués au port de Puerto Barrios, en étant mis dans des filets de cordes tels des bagages afin d’atteindre le quai, ils furent attaqués sur la route qui les conduisait à Nueva Guatemala de la Asunción, la capitale, par une bande armée qui se disait nationaliste, et qui cultivait cette haine envers les Mexicains, née de l’annexion que ce pays avait fait du Guatemala de 1821 à 1839. Ils ne durent leur salut qu’à l’arrivée de la troupe d’honneur venue de la capitale à leur rencontre[12].

    Marguerite, qui n’avait que deux ans, fut si marquée par l’événement, qu’à plus de 90 ans, elle se souvenait avec exactitude et émotion de la chaleur du corps de sa mère contre laquelle elle s’était réfugiée[13]. Carlos Americo fut nommé chargé d’affaires du Mexique pour l’Amérique centrale le 6 septembre 1891. Le 12 août 1893, il devint secrétaire d’ambassade de première classe et chargé d’affaires à Rome. Le 14 novembre 1894, il fut rappelé de son poste à Rome pour devenir député le 14 décembre 1894 au Parlement mexicain. Il s'y rendit avec ses enfants, son épouse, la plus jeune sœur de celle-ci, Amélie Héliard, qui avait des problèmes relationnels avec sa mère. Ses fils furent renvoyés en novembre à bord du Normandie à Saint-Nazaire pour y poursuivre leurs études le 24 novembre 1894. Carlos fut nommé secrétaire privé d’Ignacio Mariscal, le 18 décembre 1895. Marie ne se plaisait pas au Mexique, elle fit de nombreuses bourdes par méconnaissance de la langue espagnole. À un dîner officiel, elle se trouva placée à la droite du Président José de la Cruz Porfirio Díaz Mori, (Oaxaca, 15 septembre 1830 à - Paris, 2 juillet 1915), et pensant lui montrer son savoir, alors que celui-ci parlait parfaitement le français, elle l’entretint dans la langue de Cervantes. De l’autre côté de la table, Carlos Americo lui donna des signes du pied, mais n’y prêta pas attention. À la fin du repas, Carlos Americo s’approcha d’elle et dit : « Sais-tu que tu as fait ? Tu as tutoyé le président pendant tout le repas ». Heureusement, ce dernier, homme du monde, n’en avait pas fait remarque[14].

    L’entente dans le couple se dégrada, Marie devenant impossible. Un jour, elle prit la fuite, laissant Marguerite à son époux, et rentra en France. Elle prétendit à sa famille que sa sœur Amélie avait séduite Carlos, ce qui était faux, et fit que la pauvre Amélie ne revit jamais son père, et ne revit sa mère que sur son lit de mort. En réalité le secret était impossible à révéler : elle avait pris conscience de son homosexualité. Catholiques  tous deux pratiquant, ils ne divorcèrent jamais ; Carlos Americo versa une pension à son épouse, et elle usa et abusa de son passeport diplomatique pour mener une vie aventureuse dont nous avons donné les détails dans le numéro précédent, ne venant rendre visite à sa fille que quelques jours par an.

    Resté à Mexico, Carlos Americo s’activa pour inciter Cuba, en révolte contre le gouvernement de Madrid, à s’unir au Mexique, allant jusqu’à suggérer au Congrès de procéder à une annexion. Il publia un livre intitulé « Cuba mexicana » en 1896, dans lequel il fit la liste des avantages à la fusion des deux pays. À nouveau chargé d’affaires pour l’Amérique centrale en septembre 1896 en résidence au Guatemala ; il s’y établit avec Edelmira, ayant envoyé Marguerite un temps chez ses grands-parents maternels à Saint-Nazaire, et placé ses fils en pensions dans la même ville, afin qu’ils puissent poursuivre leurs études.

    Au Guatemala, Carlos Americo eut une aventure avec une femme mariée, qui fit que le Gouvernement guatémaltèque demanda au Gouvernement mexicain de le rappeler, ce qui ne fut pas exécuté[15]. Au contraire, le 24 décembre 1897, il fut promu ministre résidant au Guatemala ; le 19 février 1899, il devint ministre à Tokyo, puis à partir de mai 1904 ministre plénipotentiaire.

    Il fut aussi ministre plénipotentiaire auprès de l’empereur Yixin à Pékin en août 1904, mais resté en résidence à Tokyo, il assura cette fonction jusqu’en octobre 1905, la légation ayant été confiée au chargé d’affaires Moricio Wolheim.

     

    Durant ce double emploi, il passait par le port de Shanghaï afin de se rendre à Pékin. Appréciant les spectacles de cirque, il profita de l’un de ses voyages pour assister à un spectacle sous chapiteaux. À l’entracte, il sortit fumer une cigarette. Retournant à sa place, il se perdit dans ses pensées, et ne réalisa pas qu’il entra sur la piste, il ne réalisa sa distraction qu’à l’instant où les gens mirent à applaudir, pensant que le spectacle reprenait[16].

    Il publia à Tokyo, en 1903, « Nacionales Por Naturalización », et, en 1905, « Primera relaciones sociales entre el Japon y Espana tocantes a Mexico ». Il quitta sa fonction de ministre au Japon le 1er février 1907, étant nommé ambassadeur auprès de Leurs Majestés l’empereur Nicolas II de Russie à Saint-Pétersbourg. Il se rendit dans la capitale impériale en empruntant le Transsibérien, dans un voyage de onze jours. Son appartement de Saint-Pétersbourg nous est connu par les photographies qu’il en fit faire, suivant alors la mode locale en cours dans le milieu diplomatique. C’est un intéressant témoignage, tenant en huit vues intérieures, qui nous montre sa collection de meubles chinois et japonais, mais aussi de portraits officiels[17].

    Carlos Americo négocia, en août 1909, la convention commerciale et maritime entre le Mexique et la Russie, qui fut signée le 2 octobre 1909[18].

    En 1910, le Mexique fut pris dans une tourmente révolutionnaire et de tentative de coup d’État, qui déboucha sur le départ en exil en France du président Porfirio Díaz qui préféra éviter une guerre civile. Francisco Ignacio Madero González (Parras, 30 octobre 1873 – Mexico, le 22 février 1913), décida de le démettre de ses fonctions 26 juillet 1912.

    Il tenta à la suite de l’assassinat de Madero González, de récupérer un poste diplomatique, mais José Victoriano Huerta Márquez (Jalisco, 22 décembre 1850, - El Paso Texas, 13 janvier 1916), éphémère nouveau président, se disputa avec lui. Carlos Americo se cacha dans Mexico, puis, au bout de quelques jours, prit la fuite vers Veracruz, où il embarqua sur un cargo[19]. Il loua le château de Sainte-Marie à Cormeray, où il s’y déplut fortement, n’ayant vécu que dans des villes. Devenu bougon, il commentait « en grommelant » que la seule activité qui était possible à Sainte-Marie était « jouer à la plume »[20]. Son exil dura jusqu’en 1915. Son fils ainé, Carlos, étant mourant de la tuberculose, il s’installa avec ses filles au Lutétia. Après la mort de Carlos, il loua un appartement au 21 rue Ferdinand Fabre dans le 15e arrondissement. Sa situation financière se dégrada, la dévaluation du Franc, l’inflation d’après-guerre, et un train de vie trop luxueux, l’entretien de son épouse qu’il s’obstinait à poursuivre, avaient épuisé ses ressources. Il tomba alors malade. Un cancer de l’estomac le fit souffrir durant des années, l’obligeant à subir plusieurs opérations. Edelmira et Marguerite se mirent à travailler. Les relations de leur père leur permirent de trouver en 1921 un emploi à la Commission d’application des traités de paix. Edelmira y resta jusqu’en 1923, année où elle partir vivre à New York ; Marguerite y travailla jusqu’en 1925.

    Mais les revenus étaient insuffisants, la santé de leur père nécessitait des frais importants, aussi, Marguerite se mit à confectionner des bijoux fantaisie, qu’elle vendait à ses amies plus fortunées qu’elle. Carlos Americo s’en aperçut et se fâcha. Marguerite lui répondit « mais comment pensez-vous que nous puissions manger ? » Carlos Americo vivait à la fin de sa vie dans son propre univers, et ses enfants l’y entretenaient. Il se consacra à l’écriture de nouvelles, publiées dans La Revue mondiale, à l’action se déroulant en Chine : Le Fong-Choué, 15 mai 1924 ; Lieou-yen chez les barbares, 1er septembre 1924 ; L’Ile du Bonheur céleste, 1er décembre 1924 ; Les Déboires de Ning-Ling, 15 juin 1925 ; Un dieu bien servi, 1er juillet 1925 ; Des barbares dialoguent, 1er octobre 1925 ; Un mort tombé du Ciel, 1er août 1925 ; Entretiens sous le Chaume, 15 septembre 1925.

    Il ignora jusqu’au bout la réalité de son cancer ; une lettre bouleversante de Marguerite à son neveu Robert, fils de son frère décédé Carlos, en date du 20 mai 1926, nous apprend qu’il ne réalisait pas qu’il était mourant alors qu’il était déjà alité depuis des semaines. Le 15 juillet 1926, il décéda à son domicile parisien. Son corps fut ramené à Saint-Nazaire. Une messe eut lieu en l’église Saint-Nazaire, en présence du corps diplomatique. Le consul de Belgique, Henri Gustin-Stoll ; celui cumulant Danemark, Guatemala, Portugal et République dominicaine, Max La Touche ; et le consul de Cuba, Luis Valdes Roigt, doyen du corps diplomatique nazairien, tinrent les cordons du poêle, suivit d’une foule immense.

    De la famille n’était présente que Marguerite, qui assista son père jusqu’au bout, avec Ramón, son épouse, leur fils, et leur neveu Robert, fils de feu Carlos, qui chaque année venait de Lyon passer ses vacances à Saint-Nazaire. Fernando vivait à Mexico, et Edelmira à New York. On le plaça dans le caveau qu’il avait fait construire à La Briandais, où l’attendait sa première épouse.

    Sa plaque mortuaire mentionne qu’il était grand officier de la Légion d’honneur, mais il était aussi grand cordon de Sainte-Anne de Russie, grand cordon de l’Ordre du Soleil Levant, et du Double Dragon de Chine, et Officier de l’Instruction publique (Palmes académiques).

     

    Carlos Americo Lera Borrell

    Carlos Americo Lera Borrell (La Havane, 8 novembre 1878 - Paris, 18 juin 1915) passa son baccalauréat à Saint-Nazaire en août 1899, fut comme son père avocat. Nommé consul à Lyon de 1904 à 1908, il s’y maria avec Henriette-Alphonsine Lavenir (Lyon, 12 décembre 1888 - Lyon, 16 septembre 1969), dont il eut un fils, Roberto Lera Lavenir (Lyon, 20 août 1909 - Lozanne [du Rhône], le 10 avril 1992). Tuberculeux, il était en fonction à Paris quand son état s’aggrava durant l’année 1915. Il était officier de l’Ordre du Nichan Iftikhar (Tunisie), officier de l’Instruction publique.

    Roberto Lera Lavenir, son fils, dit « Bobby » homme doux et artiste, très attaché à sa famille, qui fut le lien constant entre les différents cousins éparpillés à travers le monde, se maria avec Gabrielle Versaud, dont il eut Danielle, Lera-Versaud (Villefranche sur Saône, 27 octobre 1939 - 4 juin 2015), épouse de Gérard Dubault, (décédé le 16 décembre 2013). Il divorça en 1954, puis se maria avec Odette-Simone Violet (Lyon, 10 juin 1925 - Chambéry, 8 septembre 1985), dont il eut deux filles, Joëlle et Christine.

     

    Ramón Federico Lera Borrell

    Ramón Federico, né à Mexico le 13 mai 1880, fut consul du Mexique à Kobé, à Yokohama, à Brême de 1909 à 1915, où il eut à charge les affaires françaises au début de la Première Guerre mondiale. Il accorda des passeports mexicains aux Français établis dans le district de Brême, afin qu’ils puissent fuir l’Empire allemand. Le gouvernement français le décora en remerciement de la Légion d’honneur.

    Il fut ensuite consul à Saint-Nazaire de mars 1923 à novembre 1927, à Beyrouth, puis à nouveau à Saint-Nazaire de 1935 à 1939. De la fratrie, il était probablement le plus pudique, devant maladroitement cassant avec ses proches. À Saint-Nazaire, il habitait au 27 rue de l’Océan (actuelle rue Vincent Auriol), à l’angle de la place Carno (Quatre Horloges), au premier étage d’un immeuble, dont le balcon filant donnait sur le Grand Café.

    Il avait épousé la fille d’un industriel, Suzanne Buchy (Mulhouse, 15 décembre 1889 – Saint-Nazaire, 27 octobre 1932). Marguerite la décrivit en 1977 comme étant sa meilleure amie, « pleine de sensibilité et de cœur, d’une timidité maladive (du moins entre 17 et 25 ans) plus tard elle semble avoir pris plus d’assurance »[21] , et issue d’une famille qui « était un exemple de bonne entente, d’amour et de droiture »[22]. C’est par l’intermédiaire de sa sœur Marguerite que Ramón en fit connaissance, durant un séjour à Saint-Pétersbourg. Son décès prématuré fut un drame pour son époux et son fils, mais entraina aussi une brouille définitive avec Marguerite, dont les tenants et aboutissants ne sont pas connus, mais qui marqua la famille. Remarié avec Lisette Gouret, il se réfugia au Mexique en 1940, où il pris la direction de l'Hôtel Fundición à .Zimapán, où il décéda d'une crise cardiaque le 15 novembre 1943. Il fut le père d’Enrique Lera Buchy (Brême, 19 octobre 1910 - Saint-Nazaire, 5 avril 1997), pédiatre, homme aussi charismatique que l’était son grand-père, dont il avait hérité plusieurs traits de caractère, doté d’un humour féroce, qui pouvait d’une phrase laisser son interlocuteur K.O. Après des études de médecine à la Pitié-Salpêtrière à Paris, s’établit à Mexico en 1937, Enrique se maria cinq fois. De sa première union avec Marie-Georgette Moret (Saint-Nazaire 22 septembre 1911 – Montréal 2002), fille d’un lieutenant de vaisseau, le 9 février 1937 à Paris, naquit Mary. Sa cinquième épouse fut Marion Frey (1945-1982), finlandaise, fille de diplomate, rencontrée au Mexique, dont il eut : une fille, Annette, traductrice-interprète, et un fils : Enrique Rodolfo Lera Frey (Mexico, 18 mars 1968 – Saint-Nazaire, 4 mai 2018), qui fut traducteur et écrivain public à Saint-Nazaire. Dans les années 1970, la situation au Mexique devenant inconfortable, Marion persuada son époux de s’établir à Saint-Nazaire auquel elle trouvait les charmes des lumières et architectures des cités balnéaires de Finlande.

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    L'Hôtel Fundición à Zimapán dans l'Etat d'Hidalgo

     

    Fernando Lera Borrell

    Fernando, né à Mexico le 11 février 1882, fut avocat comme son père. Il fut secrétaire de la légation du Mexique à Tokyo en 1907, puis, en 1915, à Oslo. Il dut avancer les frais du voyage et traverser l’Allemagne pour gagner la Norvège. Il s’arrangea avec le journal Le Progrès pour la prise en charge de ses frais en échange d’articles décrivant cette traversée. Il s’amusa à envoyer « une série d’interminables articles tous fabriqués par lui suivant son imagination en y intercalant les renseignements qu’il avait obtenus du consul d’Espagne à Berlin »[23].

    [ajout du 31 octobre 2023] D'après l'Instituto de Investigaciones Históricas -Universidad Nacional Autónoma de México , il épousa en Norvège Nydia Díaz Legizamón, née en 1896, dont il eut un enfant, mais aucun document concernant ce mariage et cette naissance ne figurent dans les archives familiales. [fin de l'ajout]

    Il fut promu ministre du Mexique à Stockholm de 1918 à 1919. En 1921, il reçut la Légion d’honneur, et devint chef du protocole au Ministère des Affaires étrangères à Mexico. À la suite de l’assassinat du général Alvaro Obregón, président du Mexique, le 17 juillet 1928, il quitta la diplomatie et fonda son cabinet d’avocat en association avec Jerónimo Diaz. Il fut chargé plusieurs fois de défendre le Mexique dans des procès internationaux, et aussi le représenter à La Commission interaméricaine en février 1931.

    Homme méticuleux, il avait eu charge de gérer les différents procès qui avaient fait suite au décès d’un frère de sa mère, puis avait géré sur place les avoirs de cet héritage, qui se composait d’actions et d’immeubles datant de l’époque coloniale répartie entre les différents cousins.

    Par-delà l’océan, il veilla sur son neveu Roberto, sans jamais le revoir depuis qu’ils s’étaient sa discrétion était proverbiale, et son intimité mystérieuse. Il est décédé à Mexico le 14 août

    1. Ramón se rendit au Mexique pour régler sa succession et reprendre la gestion des avoirs familiaux.

     

    Edelmira Lera Borrell, madame Ernest E. Beauvais

    Edelmira-Delfina-Amelia Lera Borrell, surnommée « Bébé » née à Saint-Nazaire le 26 mai 1885, et à propos de laquelle nous avons déjà donné de nombreux détails, avait quitté le domicile paternel en 1923 pour s’établir à New York, où elle travailla pour la légation française, en 1940. Depuis Manhattan, elle entretenait des relations épistolières avec le reste de sa famille de façon décousue, tout en le leur reprochant, à chaque courrier qu’ils ne lui écrivaient.

    D’après son frère Fernando, qui lui rendit visite en 1930, elle était très prise par sa vie mondaine.

    À la fois indépendante et très conservatrice dans ses principes, elle épousa, en 1943, un capitaine de la marine marchande des États-Unis d’Amérique, Ernest E. Beauvais, et s’établit à New Bedford dans le Massachusetts. Veuve en avril 1959, elle prit pension dans une famille, et refusa en 1962 la proposition de sa sœur à venir s’établir chez elle à Genève, se considérant trop âgée pour quitter ses habitudes étasuniennes, ce qui fit commenter Marguerite, à la fois soulagée du refus, et rageuse, que sa sœur considéra « l’Europe [comme] un repaire de bandits »[24]. Elle décéda en octobre 1974 à New

    Bedford.

     

    Marguerite Lera Héliard, baronne Eynard

    Marguerite-Marie-Amélie, dite « Guiguitte », née à Nantes le 5 novembre 1888, est la personnalité la plus contrastée de la famille Lera.

    Elle fut traumatisée par l’abandon par sa mère, créature perverse et narcissique, qui ne réapparaissait que ponctuellement que pour jouer la comédie de la maman qui pense à sa petite, mais qui est trop égoïste et indifférente pour avoir de vrais sentiments maternels, et n’était là que pour le plaisir de provoquer des pleurs et du stress à son époux qu’elle calomniait sans raison, pour le plaisir d’être méchante. Marguerite développa un caractère d’amour exclusif, exprimé par un attachement viscéral à certains êtres choisis. Les premiers furent son père auquel elle se dévoua jusqu’au bout, avec une admiration de petite-fille émerveillée et respectueuse ; ses frères et sa soeur, avec lesquelles elle avait, ou pensait avoir, un amour fusionnel, et qu’elle prolongea à ses neveux. Cette attitude se transporta par la suite sur ses amitiés, ayant l’attitude de l’exclusivité de la relation et du dévouement amical au-delà du raisonnable. Le problème avec ce genre de caractère est qu’ils ne supportent pas le moindre signe de fléchissement de l’idéalisation qu’ils se font de la relation affective. Cela fait des gens entiers, parfois manichéens dans leurs raisonnements, ce qui, chez Marguerite, était épaissi par l’art du drame latino-américain et l’art breton de l’abordage en cuirassé celui qui a le tort d’avoir endossé la tenue de l’ennemie. Il en résultait un sentiment d’injustice de sa part dès qu’un différend nuisait à la bonne entente, ce qui provoquait une fâcherie définitive, et une haine viscérale. Elle se fâcha plusieurs fois avec sa fratrie après le décès de leur père, et définitivement en 1932 avec Ramón au moment du décès de son épouse, fâcherie qui s’étendit à son neveu Enrique. Seul son frère Carlos conserva dans sa mémoire une image idéale.

    Nous devons cependant lui reconnaître que fléchie par son neveu Roberto et une approche de l’épouse d’Enrique en 1977, elle avait invité à séjourner chez elle sa petite nièce Annette qui faisait des études de traductrice interprète, mais cela ne se réalisa jamais. Elle tendait ainsi une main par principe vers les gens avec lesquels elle s’était fâchée ; ainsi, en 1961, elle proposa à sa sœur de quitter les États-Unis pour venir vivre chez elle, mais « en espérant quand même qu’elle refuse... mais elle aurait pu ne rien dire ! »[25].

    Ce type de caractère est d’autant plus déstabilisant qu’il est aussi associé à une capacité à être ultra conventionnelle, tout en pratiquant l’autodérision[26] et en faisant preuve d’attitudes fantasques. Ainsi, d’un côté, Marguerite, nous l’avons écrit, n’hésita pas à rompre avec les usages du milieu dont elle était issue en travaillant et aussi en fabriquant dans sa chambre des bijoux fantaisies qu’elle vendait à ses amies et relations, pour pourvoir aux besoins de son père, dont elle fut la garde malade, à Paris, mais déjà, plus jeune, à Saint-Pétersbourg, elle secondait son père comme maitresse de maison, se pliait au cérémonial de cour en assistant au mariage de la grande-duchesse Maria Pavlovna avec le prince Guillaume de Suède, duc de Sudmeranie, le 20 avril 1908, ou en étant présentée le 13 mai 1910[27] à l’impératrice douairière, avec les trois révérences d’usage à exécuter depuis son entrée, jusqu’au trône, mais elle trouva le moyen un jour de cérémonie d’enjamber un balcon pour aller rejoindre ses frères qu’on avait placés dans une pièce différente.

    Plus âgée, elle rapporta un jour dans son appartement des grenouilles, pour lesquelles elle demanda aux enfants du quartier du lui apporter des mouches, et pour ses 90 ans fit réaliser des pochettes chargées de sa photographie d’identité, tout en rappelant, tant par son maintien, que par quelques allusions qu’elle était fille d’ambassadeur et baronne.

    Femme extraordinaire que Marguerite, autant détestée qu’aimée, qui épousa le 6 septembre 1930, à Genève, le baron Eynard, dandy et « homme à femmes », qui avait l’âgé d’être son père, mais qu’elle sut stabiliser avec son caractère d’amoureuse exclusive et dévouée, si ce n’est soumise.

    Camille Alois Eynard, né à Dresde le 2 juillet 1864, était issu d’une famille noble auvergnate passée en Suisse au moment de la révocation de l’édit de Nantes, dont la filiation remonte à un compagnon d’armes de François Ier à Marignan.

    Vers 1830, son grand-père s’était établi à Dresde, où il avait fait enregistrer ses lettres de noblesse en 1840 afin que son fils puisse entrer à l’école militaire. Le père de Camille avait fait sa carrière dans l’armée, et reçu en 1863 le titre héréditaire de baron[28].

    Camille avait été lui-même officier de cavalerie, il avait été marié trois fois, avait divorcé deux fois et était une fois veuf d’une Etasunienne dont il avait un fils et une fille alors majeurs.

    Il était riche au moment de sa rencontre avec Marguerite, mais il avait perdu presque toute sa fortune placée par son père dans une banque allemande, qui fit faillite. À la majorité de ses enfants, la fortune de feu son épouse devant leur revenir, il avait alors géré au mieux ces avoirs, renflouant sa trésorerie en vendant notamment son château de Combertault.

    Ils se rencontrèrent à Paris, mais Gabriel, le fils de Camille, ne fut pas content que son père s’entichât d’une femme plus jeune que lui, jamais mariée malgré ses 46 ans, et qui plus est sans fortune. Il se montra immédiatement désagréable avec elle, et du haut de ses 22 ans, la rencontrant pour la première fois, il lui demanda abruptement :

    – « Quel âge avez-vous, madame ?

    – Le même âge que vous, monsieur », lui répondit

    Marguerite avec acidité.

    Au grand dam de Gabriel, l’Amour ne se tarit jamais entre Camille et Marguerite.

    Ils s’établirent à Genève, et Camille acheta pour elle à Menton, la villa « Zezette », où ils reçurent leurs familles respectives et leurs relations mondaines. Ils n’eurent pas d’enfant, mais Marguerite endossa pour les fils de sa belle-fille, Suzanne-Marie-Antoinette Eynard (Château de Combertault 9 octobre 1909 - Genève, 8 décembre 1998), épouse d’André Pierre Fontana, président de la Cour de justice à Genève, le rôle de grand-mère de substitution, devenant pour eux « Mamita»[29], et leur laissant de merveilleux souvenirs, tous comme elle en laissa aux filles de son neveu Robert.

    A la naissance d’Adalbert Fontana, en 1932, elle lui adressa une carte postale commençant par :

    « Voici, mon chéri, la première carte de ta vie. Je voulais qu’elle te soit envoyée par ton grand-père et par ta " Mamita " qui t’aiment tendrement sans te connaitre. Quand tu la verras plus tard, tu trouveras que les femmes avaient de drôles de mots l’année de ta naissance. »

    La Seconde Guerre mondiale fit perdre à Camille ses derniers avoirs. Devenu fortement malade, il nécessita des soins constants prodigués par son épouse, qui se remit, comme au temps de la maladie de son père, à confectionner et à vendre des bijoux fantaisie. Camille décéda à Genève le 27 août 1942, laissant Marguerite dans un grand désarroi affectif, et une situation financière délicate. Elle fut contrainte à vendre la villa de Menton alors occupée, obtenant du notaire que le contenu soit déposé en garde-meuble, mais celui-ci fut pillé. Elle conserva cependant suffisamment de relations à Menton pour pouvoir y séjourner chaque été chez des amis jusque dans les années 1980.

    Elle devint traductrice aux bureaux genevois de l’O.N.U., puis professeur de français pour adultes, menant une vie modeste, mais confortable. Marguerite eut à s’occuper de sa mère, vivant à Paris, rue de Cadix. Devenue aveugle vers 1950, cette femme, dont elle rechercha toujours un signe d’amour, lui infligeait une caresse entre quatre coups de griffes. Ne pouvant plus la laisser seule, elle fut contrainte de la placer dans une institution religieuse à Bron, à côté de Lyon, afin de ne pas être trop loin d’elle, mais suffisamment pour ne pas avoir la possibilité de la voir régulièrement.

    Marguerite ne parlait jamais, mais continua à en faire entretenir et fleurir la tombe à Bron. Un jour, elle fit au petit-fils de son époux, Adalbert Fontana, le commentaire qu’elle voulait vivre plus longtemps qu’elle. Or, sa mère était décédée à l’âge de 98 ans.

    Entrée dans une maison de retraite de la ville de Genève, le Val Fleuri, elle y gagna son pari en y fêtant ses 100 ans. La ville de Genève a pour habitude de demander à ses centenaires ce qu’ils désirent pour l’occasion, et traditionnellement on les pousse à demander un fauteuil, mais Marguerite, à la grande surprise des autorités, demanda une caisse de champagne. Elle savait encore par cœur réciter l’acte premier d’Athalie de Racine. Elle décéda le 22 janvier 1989. Un grand nombre de ses anciens élèvent suivirent son convoi funèbre. Elle légua son corps à la science.

     

    [1] A propos des représentations consulaires à Saint-Nazaire lire : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/08/consuls-et-vice-consuls-nazairiens-6142257.html

    [2] Précisons ici, pour les non-hispanophones, que le nom se prononce « léra », en roulant le R.

    [3] A propos de Marc Hélys : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/04/marie-lera-saint-nazaire-iyi-ak%C5%9Famlar-6141565.html

    [4] Cet article, publié initialement dans el numéro 98 de la Revue Histoire & Patrimoine, a été possible grâce à l’amabilité et aux minutieuses recherches en leurs archives et souvenirs, de mesdames Annette Lera et Joëlle Bontempelli, ainsi que de monsieur Adalbert Fontana, qui nous ont fait copie de nombreux documents officiels et intimes, et à qui nous adressons encore une fois nos remerciements.

    [5] Ce n’est qu’en 1886 qu’il y fut supprimé.

    [6] Lettre de Marguerite Lera, baronne Eynard, en date du 5 mai 1977, et recherches généalogiques personnelles.

    [7] Exemple de son éducation aristocratique : pour choisir un cuisinier, il lui faisait réaliser une omelette, partant du principe que celui qui sait sublimer ce qui est en soit le plus simple, mérite son emploi.

    [8] Souvenirs de famille, manuscrit du docteur Enrique Lera Buchy.

    [9] Originaires de Madrid, les Borrells se sont établis au Mexique au XVIIIe siècle.

    [10] Elle était la sœur de monseigneur Laborde, évêque de Blois, et d’Anastase Laborde (Saint-Nazaire29 juillet 1838 – Paris, 21 décembre 1870), lieutenant de vaisseau, tombé au champ d’honneur en défendant la capitale face aux Prussiens, et dont l’une des places de la ville propage encore le nom.

    [11] Frederico Ignacio Juan Borrell (Mexico, le 19 mai 1863 – Marseille, 31 janvier 1899), chancelier du consulat du Mexique à Saint-Nazaire, puis consul du Mexique au Havre ; marié à Bordeaux le 21 octobre 1889 avec Louise-Thérese-Françoise-Isabelle Gufflet (Maurice 9 mai 1862 - Marseille, 25 août 1898), fille d’un agent de change ; d’où : Isabelle Borrell (1890-1890) et Enrique Borrell (1892-1892). Ils étaient tous tuberculeux

    [12] Témoignage olographe rédigé le 8 décembre 1995, de madame Anne-Marie Chiaramonti-Beauvais, d’après lecture de l’autobiographie inédite et disparue de Marie Lera.

    [13] Souvenirs de Marguerite transmis oralement à monsieur Adalbert Fontana.

    [14] Anne-Marie Chiaramonti-Beauvais, op. cit.

    [15] Archives diplomatiques, ministère mexicain des Affaires étrangères.

    [16] Docteur Enrique Lera Buchy, op. cit.

    [17] Les souverains et ministres offraient leur portrait photographique en cadeaux aux diplomates étrangers.

    [18] Dates du calendrier grégorien.

    [19] Docteur Enrique Lera Buchy, op. cit.

    [20] Docteur Enrique Lera Buchy, op. cit.

    [21] Lettre de Marguerite Lera, baronne Eynard, en date du 5 mai 1977, op. cit.

    [22] Lettre de Marguerite Lera, baronne Eynard, en date du 5 mai 1977, op. cit.

    [23] Lettre de Ramón à Roberto, envoyée de Mexico le 7 mai 1936, à l’occasion du règlement de la succession de Fernando.

    [24] Lettre de Marguerite à Roberto datée du 9 août 1962.

    [25] Souvenirs de Joëlle Bontempelli.

    [26] À un monsieur qui sonna chez elle en demandant à voir monsieur Lechat, elle répondit en souriant : « Non vous êtes chez Les rats / Lera. »

    [27] Date du calendrier grégorien, soit le 30 juin du calendrier julien.

    [28] Camille était, entre autres, l’arrière-petit-neveu du banquier et philanthrope Jean-Gabriel Eynard qui participa activement à l’indépendance grecque.

    [29] Maman en espagnol.

  • Ker Jean Léone : la Villa Blancho à Villès-Martin

    Un article de L’Eco de la Presqu’Ile, parut le 25 juin 2021, informe que la villa de l’ancien maire de Saint-Nazaire, François Blancho, va être détruite pour laisser place à un immeuble nomme « Horizon »[1]. Les réactions de nos lecteurs ont été vives et nombreuses.

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    Villa Ker Jean Léone le 14 mai 2021 © Odoevsky Maslov

     

     Ce bâtiment est voué à la démolition depuis 2008, quand les héritiers l'ont vendu à un promoteur. Le permis avait été bloqué par intervention du voisinage, grâce à eux nous avons échappé à une nouvelle tour cages à lapins sur la pointe de Villès-Martin, le projet initial ayant été finalement rabaissé et limité en largeur à l’emprise de la maison actuelle, mais, car il faut toujours un mais dans le tango contraint de concessions de la municipalité avec les promoteurs, l’immeuble sera le double en profondeur et aura son accès commun là où se trouvaient le portail permettant l’accès à la cour et au garage. On nous avait cependant annoncé que la maison serait simplement modifiée, qu’on en garderait la façade, on a surtout raconté beaucoup de choses et jamais rien promis et surtout pas signé d’engagement à faire cela. La villa sera donc rasée pour faire place à un bloc avec loggias et balcons sur l’Estuaire et arrière de parcelle, aveugle, ou presque, sur les côtés, et bien sûr toit plat de rigueur, puisque que les toits d’ardoises n’ont plus le droit de cité depuis l’ère Batteux, maire qui était totalement indifférent au fait que cette maison était un témoignage important de la Reconstruction et la résidence d'un prédécesseur qui a marqué son temps en bien. On crie « au cube ! », mais reconnaissons que tous les bâtiments fonctionnels sont des cubes plus ou moins bien habillés. Le bâtiment est correct à défaut d’être imaginatif, on s’y habituera donc, car après tout il fera moins verrue que d’autres dans le quartier. Certes, nous ne pouvons nous fier au dessin sorti de chez Visiolab, celui-ci comportant notamment des lumières qui n’existent pas et des ombres improbables, le dessin de celles des arbres sur la chaussée qui s’arrêtent nettes au bord du trottoir tel le nuage de Tchernobyl à la frontière française étant un exemple édifiant de ce qui est sur la brochure des promoteurs, mais qu’on ne découvre pas exactement sur place une fois réalisé.

     

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    La future résidence « Horizon » © Visiolab

     

     Voici l’occasion de raconter l’histoire de cette villa, dont les Nazairiens ont oublié qu’elle se nomme Ker Jean Léone, d’après les prénoms du fils et de la fille du commanditaire : Jean-François (Saint-Nazaire 18 octobre 1922 - 7 décembre 2020), et Léone-Valentine (Saint-Nazaire 14 mai 1928 - 20 février 2020 Rueil-Malmaison).

     

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    Adresse des Blancho à la villa Ker  Jean Léone © Fonds Dommée Archives de Saint-Nazaire

     

     François-Valentin Blancho, (Saint-Nazaire 28 juin 1893 - 2 février 1972 Saint-Nazaire), dernier d'une fratrie de trois, qui avait perdu père et mère avant ses huit ans, ouvrier chaudronnier à 1.125 fr de salaire, fit carrière en intégrant le Syndicat de la métallurgie de Saint-Nazaire, puis son initiation à la loge du Trait d’Unions, et se constitua avant-guerre une fortune personnelle grâce, à partir de 1925 à ses mandats de maire, (il multiplia par quatre l’indemnité fixée par son prédécesseur, Vivant Lacour, passant de 10.000 fr à 40.000 fr, au prétexte qu’il lui fallait « se payer des costumes »), en étant conseiller général en 1925, député en 1928, et surtout en devenant sous-secrétaire d'État à la Marine en 1936. Tous ces mandats ne pouvaient le laisser se contenir en la modeste maison au cinq minuscules pièces que son épouse, née Leone-Germaine Leroux, fille d’un célèbre syndicaliste local, lui avait apporté en dote dans le quartier populaire de Cardurand. En 1937 François Blancho acquit à la Villès-Martin une villa avec jardin entouré de grilles, garage et buanderie séparés. La maison comportait salon, salle à manger, cuisine, trois chambres et une salle de bain, et dataient du début du 20ème siècle. Cette maison était un chalet, c’est à dire une maison de plaisance habitable qu’à la belle saison. Elle n’en était pas moins un signe extérieur de richesse et d’adoption des meurs de la bourgeoisie nazairienne qui prenait ses quartiers d’été sur la côte entre Villès-Martin et Pornichet.

     L’Occupation allemande entraîna la réquisition des maisons de la côte pour loger les militaires. La famille Blancho resta à Cardurand. François Blancho ayant été arrêté à titre d’otage, il fut exfiltré avec sa famille en Zone-Libre en février 1942 sur intervention du Marcel Déat, ami de Laval, meneur politique qui avait trahi les Socialistes pour se faire fasciste et zélé collaborateur. Cela sauva aussi les Blancho du bombardement britannique du 28 février 1943 durant lequel disparurent dans les flammes leurs deux maisons. On l’ignore trop souvent, mais la Villès-Martin et Porcé furent aussi ciblés, même si les bombes n'y touchèrent qu’une vingtaine de villas.

     

     A la Libération François Blancho récupéra ses fonctions de maire, et œuvra à la reconstruction de Saint-Nazaire. N’ayant plus de logement, il loua la villa Ker Adrienne A Villès-Martin, dans laquelle il résida jusqu’en 1958, (il la laissa ensuite à son fils), et fit les démarches pour toucher les indemnités de guerre que l’Etat versait pour que les propriétaires reconstruisent immeubles et entreprises.

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    Adresse de François Blancho à la villa Ker Adrienne © Fonds Dommée Archives de Saint-Nazaire

     

    François Blancho s’adressa à l’architecte Claude Dommée, (1902-1985), à qui l’on doit les halles du centre-ville, et dont les archives sont aujourd’hui aux Archives de Saint-Nazaire[2], et qui contiennent un dossier complet des commandes de l’ancien maire.

     Dans une lettre du 28 mai 1953, que nous reproduisons, François Blancho informa son architecte qu’il avait touché 5.588.228 fr pour sa villa de Villès-Martin, et 2.063.043 fr pour sa maison de Cardurand, disposant ainsi de 7.651.271 fr au total, qu’il décida d’investir intégralement dans la construction d’une nouvelle villa à Villès-Martin.

     

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    Lettre de François Blancho annonçant à Claude Dommée le montant de ses dommages de guerre © Fonds Dommée Archives de Saint-Nazaire

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     Claude Dommée proposa deux projets, l’un dans l’esprit de Robert Mallet-Stevens, l’autre inspiré d’une maison de banlieue anglaise.

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    Projet refusé © Fonds Dommée Archives de Saint-Nazaire

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     Ce fut le second qui fut choisi, avec la conception de deux appartements. En effet, pour justifier le rassemblement des indemnités de deux bâtiments sur un seul, il fallait qu’il y ait deux logements. Monsieur et Madame Blancho se réservèrent le rez-de-jardin, et eurent un couple de locataires à l’étage.

    Les plans conservés aux Archives de Saint-Nazaire comprennent de comprendre la disposition.

     

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    Plan du rez-de-jardin © Fonds Dommée Archives de Saint-Nazaire

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     L’appartement des Blancho comportait une chambre, un bureau et un living en façade, une cuisine, une chambre, une salle de bain et WC côté cour.

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    Plan du premier étage © Fonds Dommée Archives de Saint-Nazaire

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     Celui des locataires, deux chambres et un living en façade, une cuisine, une chambre, une salle de bain et WC côté cour.

    Un hall commun donna sur la chaufferie et le garage accessible depuis la cour, et conduisait à un second hall avec montée d’escalier, en chêne teinté à rampe d’acajou, conçue pour desservir une résidence privée et non un immeuble de rapport, avec par-dessous l’accès à une cave.  

     

    La maison fut livrée au printemps 1958, et s’accompagna d’infiltration au niveau de la terrasser du bowwindow.

     

    Au bout de quelques années, le bail du premier étage fut arrêté et la maison entièrement investie par le couple Blancho ; le cuisine du premier étage fut transformée en buanderie.

    Vendue à la Ville après le décès de François Blancho, qui ne la concevra qu'un temps et la revendit à un entrepreneur, elle fut à nouveau vendue en 2008 à un promoteur. La maison était habitée à l’année mais avait depuis longtemps un aspect fantomatique. Le jardin était moussu et rase, la façade piquée par le sel et les embruns, on ne nettoyait plus les vitres et les rideaux, obligeant à conserver quelque soit l’heure du jour des lampes d’appoint allumées.

    A peine vidée, la villa fut vandalisée, comme le montrent ces photographies prises le 13 juin 2008, obligeant le promoteur à faire murer les lieux.

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    Façade © Odoevsky Maslov

     

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    Bowwindow et terrasse © Odoevsky Maslov

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    Hall © Odoevsky Maslov

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    Montée d'escalier © Odoevsky Maslov

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    Détaille de la rampe © Odoevsky Maslov

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    Cheminée du living © Odoevsky Maslov

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    Bureau de François Blancho © Odoevsky Maslov

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    Le living du premier étage devenu chambre de maître © Odoevsky Maslov

     

    S’en suivirent treize années de procédures pour aboutir à projet énoncé le 23 avril 2021 dans l’Echo de la Presqu’Ile.

     

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    Villa Ker Jean Léone le 14 mai 2021 © Odoevsky Maslov

     

    [1] https://actu.fr/pays-de-la-loire/saint-nazaire_44184/saint-nazaire-sur-le-front-de-mer-la-maison-de-lancien-maire-va-etre-rasee-pour-construire-des-logements-haut-de-gamme_42955431.html?fbclid=IwAR0AbuZppZntw_16wSgS4uvRD9tiE4yBHnOMsIxmgehrbpHXlbgPzg3ufn8

    [2] https://archives.saintnazaire.fr/ark:/28388/gjl6zd17cxh4

  • Narcisse Pelletier

    Le don de la moitié du budget nécessaire à la restauration du monument funéraire de Narcisse Pelletier au cimetière de La Briandais à Saint-Nazaire a été voté par le Conseil de Saint-Gilles-Croix-de-Vie le lundi 10 mai 2021 au soir.
     
    La finalisation de l'intervention de la Ville de Saint-Nazaire en cours.

  • Les Joly, une famille de commerçants

    S’il est une famille de commerçants qui marqua durablement la mémoire des Nazairiens, ce sont les Joly, qui durant un siècle furent à la tête de certains de plus grands magasins de confection et vente de vêtements de Saint-Nazaire.

     

    Les Joly sont originaires de la région de Saint-Brieuc, ils s’établirent à Saint-Nazaire en 1855 avec Prosper-Marie Joly, (La Chèze 29 mai 1804 - Saint-Nazaire 27 février 1871), qui fut d'abord appareilleur à Plouër-sur-Rance, puis contremaître à Saint-Julien-de-Concelles, et qui s'établit à Saint-Nazaire où ouvrit un commerce de confection pour homme rue de Villès Martin, à l’emplacement de ce qui fut ensuite le Grand Hôtel des Messageries, actuel Lycée expérimental. Mais le magasin étant trop petit et mal situé à l’époque, il déménagea au 2 rue Villès Martin, à l’angle de la rue de la place des Bassins. Son commerce, sous l’enseigne Au Progrès, était florissant, et il a laissé dans la mémoire nazairienne la figure d’un vieux monsieur sympathique qui se dépassait dans un demi-tonneau[1]  « minuscule » tiré par un poney, et dont les écuries étaient rue de la Gare[2]. Il avait acquis aussi une partie de l’ancienne ferme de Bellefontaine, face au Rocher du Lion, où il se fit construire un chalet de plaisance qu’il baptisa Pro Leo, (Le Lion).

    Il laissa plusieurs enfants, dont des fils qui furent aussi dans la confection :

     

    1. Prosper Ier Marie Joly, (La Chèze 29 mai 1804 - Saint-Nazaire 27 février 1871), époux de Rosalie-Jeanne-Joséphine-Athalie Glemée, (Plouër-sur-Rance 1820 - Saint-Nazaire 6 mai 1893)[3], d’où :
      • Prosper II Marie-Joseph, (Plouër-sur-Rance 13 septembre 1839 – Saint-Nazaire 10 août 1920), marié le 21 août 1872 à Saint-Nazaire, avec Rose Couronné, (Saint-Nazaire 25 février 1855 – 6 mai 1945)[4], d’où :
        • Prosper III, (Saint-Nazaire 11 septembre 1873 - Saint-Nazaire 16 septembre 1943), clarinettiste doué, il fut le solo de la musique de son régiment[5]; marié le 19 octobre 1901 à Toulouse avec Jeanne-Alexine-Léonie Serville, d’où
          • Marie-Thérèse, (Saint-Nazaire 15 novembre 1904 - Anglet 1er juillet 2006), mariée civilement le 22 septembre 1925 à Saint-Nazaire, et religieusement le 23, avec Charles Alcide Victor Picaud, (Nantes 25 septembre 1897 - Bayonne 26 septembre 1988), administrateur d'immeubles à Paris en 1946, (à l’occasion de leur mariage, son père invita tous ses employés au mariage religieux et n’ouvrit aucune de ses boutiques).
        • Raoul (décédé à l’âge de 10 mois le 2 janvier 1876 à Saint-Nazaire)
        • Raoul (décédé à l’âge de 8 mois le 2 octobre 1876 à Saint-Nazaire)
        • Rose, (Saint-Nazaire 11 décembre 1879- Nice 19 mai 1952), épouse de Simon Arnaud, (1868- Nice 1949), capitaine au long cour, chevalier de la légion d’honneur et officier du mérite maritime, croix de guerre, avec qui elle était établit à Nice, au palais Flora 72 rue Aubert ;
        • Alice (Saint-Nazaire 24 aout 1881 – Saint-Nazaire 21 juillet 1952) ;
        • Karl Joly, (Saint-Nazaire 14 mars 1889 – Saint-Nazaire 8 mai 1974), marié le 3 mars 1920 à Saint-Nazaire avec Geneviève-Jeanne-Marie Moyon, (Nozay 1887- Saint-Nazaire 3 décembre 1973), fille de Euphrem-Marie Moyon, pharmacien, et de Geneviève-Marie-Eugenie Tilly, elle était veuve de l'industriel poulieur nazairien Georges-Louis Certain, (1882- ), dont elle eut un fils :
          • Georges-Gabriel-Euphrem Certain, (Saint-Nazaire 25 mai 1909 - ), marié à Paris 20° le 25 mai 1932 avec Raymonde-Jeanne Huart ;
      • Rosalie (1841 - 15 juin 1869) ;
      • Emile ;
      • Constant ;
      • Philomène-Françoise, épouse de Rosendo-Apollinaire Blanco, (Tapia (province d'Oviédo) 1842 - Saint-Nazaire 10 juillet 1903), consul du Chili à Saint-Nazaire[6];
      • Marie-Françoise-Augustine-Emilie, (Plouër-sur-Rance 24 novembre 1845 - ), rentière, mariée 1er avec Eugene Victor Dulauroy, († à l’âge de 40ans le 23 janvier 1879 à La Roche-sur-Yon), capitaine d’infanterie ; 2ème le 7 septembre 1880 à Saint-Nazaire avec Michel dit Simon Nicolas (Thionville 1834 -  Saint-Nazaire 7 juin 1887), capitaine d’infanterie à la retraite, chevalier de la légion d’honneur ; d’où des deux lit :
        • Alexandre Dulauroy, († 11 jours le 14 aout 1877) ;
        • Jules-Gaston Nicolas, (La Roche-sur-Yon 21 décembre 1881 - Nantes 5 novembre 1965), marié le 24 novembre 1919 à Saint-Denis avec Jeanne-Marie Guerrier ;
        • Jeanne-Marie-Amélie Nicolas, (Saint-Nazaire 1er mars 1884 – Paimboeuf 6 novembre 1960) mariée le 25 avril 1916 au Mans avec Yves Quntin dont elle divorça.
      • Auguste-Joseph, (né à Saint-Julien-de-Concelles 23 janvier 1852 – Saint-Nazaire 2 avril 1884), époux d’Eulalie-Berthe Oland,
      • Joseph-Théogene, (Saint-Nazaire 4 janvier 1856 - L'Île-d'Yeu 14 septembre 1901 marié le 4 mai 1882 à Saint-Nazaire avec Marie Julie Boyée, (Saint-Nazaire le 20 octobre 1856 - ) , d’où :
        • Madeleine-Jeanne, (Saint-Nazaire 17 décembre 1888 - Saint-Nazaire 23 mars 1891) ;
        • Edmond, (L'Île-d'Yeu 10 mars 1900 (samedi) - Le Bourg - Saint-Brevin-les-Pins 7 mai 1975), marié le 14 juin 1924 à Saint-Nazaire avec Hélène Pauline Marie Thoby, (La Chapelle-des-Marais 12 septembre 1893 - Saint-Nazaire 3 février 1981)[7]
      • Amélie (1858 – 1er janvier 1864) ;
      • Natalie (mars 1862-1er septembre 1862)

     

     

    Les fils de Prosper-Marie furent tous dans la confection masculine, (chemisiers, chapelier, tailleur).

    Prosper II ouvrit sa boutique au 46 rue de Nantes, actuelle Henri Gautier, sous l’enseigne La Belle Jardinière, immense magasin qui faisait l’angle avec la rue de l’Amiral Coubert, et qui resta longtemps le plus important de la ville, et il ouvrit sous la même enseigne des succursales à Guérande, Savenay, Pontchâteau et Blain[8].

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    L’enseigne parisienne Belle Jardinière de Paris, qui avait des succursales à Lyon, Bordeaux, Angers, et Nantes, publiait sur ces publicités qu’elle n’avait pas de succursale à Saint-Nazaire. La boutique de Saint-Nazaire resta dans sa descendance en indivision. Les héritiers se partagèrent les autres boutiques, dont la direction fut confiée à Prosper III, et touchèrent des indemnités de guerre pour la destruction du magasin de Saint-Nazaire durant les bombardements. Seul Karl sortit de l’entreprise de Prosper II, préférant reprendre la boutique de ses oncles Constant et Emile. Emile avait repris le commerce paternel de Prosper Ier ; Constant avait ouvert en face, au 1, A Jean Bart, mais peu doué pour le commerce il rejoint rapidement Emile.

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    L’ancien A Jean Bart devint Au printemps propriété de monsieur Aymard, puis de monsieur Laurenceau en 1910. Emile et Constant nommèrent leur commerce commun Au Projet et A Jean Bart qui devint ensuite Au Meilleur Marché de Saint-Nazaire ; ce magasin était spécialisé dans le commerce de confection et nouveautés pour homme et pour la Marine. La dizaine de vendeurs étaient polyglottes, il y avait aussi un atelier d’une quinzaine de couturières. En 1919, Emile et Constant laissèrent le magasin à leur neveu Karl, qui renomma le magasin A la Ville de Saint-Nazaire, qu’il vendit par acte passé chez maître Eugene Baudry à Montoir de Bretagne le 20 octobre 1941, à la société parisienne A. Jacques Molay[9]. Cependant l’entreprise de Karl n’était pas sans lien avec celle de son frère et de sa sœur héritiers de la chaîne A la Belle Jardinière, comme en témoigne un procès gagné par mère, son frère et sa sœur contre la Nouvelle société A la Ville de Saint-Nazaire, qui fut contrainte à leur verser 8.750 fr avec intérêts et droit à la date du 31 mars 1942, en vertu de l’ordonnance du Président du tribunal de Saint-Nazaire en date du 8 juillet 1942. Ajoutons aussi qu’en mai 1923, la municipalité s’adressa à Prosper III et à Karl Joli pour la réalisation de l’habillement de la police municipale.

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    Karl habitait 12 rue Thiers, (rue disparue située à l'emplacement de la place d'Amérique Latine), dans l'hôtel particulier du premier époux de sa femme, mais il avait hérité d’une partie du terrain de la demeure de son grand-père, environ 5000m² et y avait fondé un chenil d’élevage de bassets-bleus et de fox-terrier-à-poils-durs, connu sous le nom de Chenil du Rocher du Lion. le chenil a aujourd'hui disparu pour faire place à l'immeuble Le Cervantes ; la maison existe encore au 1 chemin du Rocher du Lion. C'est Paul Doucet, marchand de cycles, qui en fit l'acquisition à la veille de l'Occupation.

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    Plan de la propriété de Karl Joly chemin du Rocher du Lion, relevé par Jacques Dommée pour monsieur Paul Doucet, Fonds Dommée, Archives de Saint-Nazaire.

     

    Face à La Belle Jardinière, au 46 rue de Nantes, de l’autre côté du carrefour, Joseph-Théogene, fonda Au Bon Diable, qu’elle vendit en 1899 pour aller s’établir sur L'Île-d'Yeu. Ce magasin devient ensuite Les Grands magasins Paris Saint-Nazaire, et fut l’une des plus grosses enseignes de la ville, qui outre de la confection et des nouveautés, vendait aussi du mobilier.

    Auguste fut chapelier, rue du Four Marsain, mais il décéda à 32ans.

     

    La plus art des membres de cette famille sont inhumés au cimetière de La Briandais, dans deux caveaux voisins à l’entrée.

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    [1] Un demi-tonneau est une voiture hippomobile deux roues à caisse arrondie, dotée de deux bancs face à face dans le sens longitudinal. On y monte par l’arrière et la conduite se fait assise en biais. Le modèle à quatre roues se nomme tonneau.

    [2] Cf. Silhouettes Nazairiennes dans Le Courrier du Saint-Nazaire du 17 janvier 1931, signé par Joyeuse, l’un des pseudonymes de Renée Bernard, surtout connue sous celui de Jacqueline Bruno.

    [3] Fille de Joseph Glemée, de Marie Cornouaille.

    [4] Fille de Jean-Jacques-Edouard Couronné, (1814-1858), pilote, et de Rose-Julie Henry, (1824-1866), débitante de Tabac, elle-même fille de pilote.

    [5] Cf. Silhouettes Nazairiennes dans Le Courrier du Saint-Nazaire du 17 janvier 1931.

    [6] A propos des consuls nazairiens : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/08/consuls-et-vice-consuls-nazairiens-6142257.html

    [7] Fille de Jean-Marie Thoby, peintre en bâtiment à Saint-Nazaire.

    [8] Cette succursale héritée par Prosper III, fut vendue le 11 février 1934 chez maitre Fonteny notaire à Savenay, à Henri-Charles-Hyacinthe Grimault, employé de commerce, à Dol de Bretagne, et son épouse Henriette Jestin.

    [9] Siège social 181 rue du Temple à Paris ; la jouissance fixée au 1er novembre 1941.

  • Trains fous en Gare de Saint-Nazaire

    Nous avons tous vu un jour l’image du train ayant traversé la façade de la gare Montparnase du 22 octobre 1895, et dont la locomotive folle alla s’écrasera un étage plus bas sur la place. Mais savez-vous que l’ancienne gare de Saint-Nazaire connu trois accidents semblables ? Oui, vous avez bien lu, il en eut trois ! Il faut dire que jusqu’à la fin de la première-guerre-mondiale ce genre d’accident était commun dans les gares dites « Terminus », c’est-à-dire en impasse, et de façon plus générale les accidents de train sur la ligne de la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans (PO), à qui appartenait les tronçons de la Presqu’Ile étaient réguliers au point qu’on n’en parlait jamais dans la presse sauf quand il était meurtrier ou particulièrement impressionnant.

     

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    Ancienne Gare, état d'origine.

     

    Les trains, quelque soit leur provenance, devaient décélérer au nouveau de la Croix Amisse, et ne pas dépasser les 25 km/h à partir de ce point. Les trains devaient ralentir. En 1892, le mécanicien d’un train venant du Croisic n’avait pu freiner et le train entra en pleine vitesse dans la gare, explosa le butoir, passa par-dessus le quai et au travers de la façade de la Gare de Saint-Nazaire au niveau deux arches qui sont à votre droite quand vous lui faite face. Cela arriva une nouvelle fois en 1907, mais cette fois le train traversa le centre de la façade ; le mécanicien sauta de la locomotive avant l’impact. La même année, la Gare de Guérande vit, elle aussi, un convoi sorti de sa voie et se retrouver sur la route d’Herbignac. Par miracle, il n’eut aucun blessé ou tué dans ces accidents, mais durant l’année 1907, la ligne Paris-Saint-Nazaire connue plusieurs accidents meurtriers, avec des effondrements de viaducs dans la compagne angevine et mayennaise.

     

    Le seul accident en gare de Saint-Nazaire sur lequel nous sommes bien renseignés, et celui du samedi 8 octobre 1927. Ce genre d’événement étant alors devenu rare, la presse locale et la presse parisienne le couvrirent.

    L’Express 115 à destination de Saint-Nazaire, parti de Paris à 16h40, comportant six voitures de première et seconde classe, mais pas de troisième, ce qui était suffisamment rare pour que nous le soulignions. Il devait atteindre son terminus à 23h43. Arrivé à La Croix Amisse, il devrait ralentir fortement pour passer de 70 km/h à 25km/h ; le mécanicien, monsieur Chapineau, du Dépôt d’Angers, s’aperçut que les freins ne fonctionnaient plus. Il tenta de battre machine arrière, et demanda au chef de train, monsieur Barbin, lui aussi du Dépôt d’Angers, de faire fonctionner les freins à main, en le prévenant à l’aide de coups de sifflet, mais les freins à main ne fonctionnèrent pas non plus. Le train arriva dans la gare à la vitesse de 65km/h à 23h37. Sur la voie n°1 se trouvait par chance une rame de wagons de marchandises vides, la Rame 132, dans laquelle s’enfonça la locomotive de l’Express, propulsant les wagons de la rame à l’arrêt contre le butoir d’arrivée qui céda. Les wagons passèrent par-dessus le quai, défoncèrent la façade de la Gare sur une longueur de quinze mètres, soit les deux arches à droite quand on fait face à la façade.  Deux wagons atterrirent dans le jardinet qui la longeait alors le devant, arrachant un arbre et la grille qui séparait le jardinet de la place. Heureusement le premier wagon sorti se mit de travers, empêchant que le matériel ne se retrouvât sur la chaussée. Dans l’Echo de la Loire du 10 octobre 1927, un témoin qui passait au moment où arriva l’accident, dit qu’il avait entendu comme un bruit de tonnerre venant de l’intérieur de la gare, puis quelques secondes plus tard, il vit la masse sombre de la rame tamponnée trouée le mur d’enceinte de la gare et tombe dans le jardin. En même temps que la véranda brisée tombait en mille éclats, d’énormes pierres étaient projetées en l’air sous la violence du choc, et un nuage, « qu’on pouvait croire de fumée », emplissait l’atmosphère. Puis tout retomba dans le calme de la nuit que rompait seul les accords de musicaux arrivant du café Lièvre, situé en face de la gare, sortaient les soupeurs danseurs de « La Flamande des Clochards », organisée par Le Clochard Club[1] , un des fêtards dit que « le train voulait venir danser le Charleston » et que le mécanicien avait « été soudoyé par la Chambre de Commerce pour qu’on réalisât les travaux qu’elle espérait depuis longtemps », (en effet, la Chambre de commerce sollicitait depuis 1925 la Compagnie de chemin de fer pour qu’elle modifiât les accès de la gare afin de les rendre plus fluide). « On se serait cru au cinéma ! » dit un témoin au journal La Presqu’Ile Guérandaise du 16 octobre 1927. La locomotive de l’Expresse eut ses tandems brisés et ses tôles tordues. Il n’y eut aucun blessé. En dehors du mécanicien et du chef de train, il y avait douze passagers dans l’Express. Seul un gendarme de la brigade de Saint-Nazaire eu à se plaindre d’un mal au genou, et une voyageuse d’une éraflure à la main. Le chef de Gare, monsieur Grangien, fit évacuer les passagers, puis les wagons de l’Express, et rédigea le rapport. Le bruit avait réveillé le quartier, et les curieux étaient nombreux dans la nuit. Au matin, la ville défila devant la gare, photographie par monsieur Rébin, photographe du studio Express Photo, prit des vues qui furent publiées dans les journaux.

     

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    Photographie par monsieur Rébin prise le 11 octobre 1927 et publiée dans Le Courrier de Saint-Nazaire du 15 octobre.

     

    Ce fut l’entreprise Audrain qui fut chargée du déblaiement et de la consolidation qui débutèrent dès 7h du matin. La PO délégua pour enquête messieurs Lequoy, inspecteur principal, Coez chef de section, et le Baron, chef de district. Le dernier wagon fut retiré le 13 octobre, on ne publia jamais le résultat de l’enquête, et l’origine de la panne de freins demeure inconnue. L’accident entrainât la modification de l’accès à la gare, le jardinet fut remplacé par un perron, couvert en 1930 par une marquise.

     

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    Façade avec le perron

     

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    Façade avec la marquise

     

    [1] Une flamande est à l’origine une fête donnée entre brigands, par dérision une société de fêtard, et dans les années de l'entre-deux-guerres il était à la mode à Paris de s'encanailler dans des soirées mondaines où tous étaient déguisés en clochards. Le Clochard Club, fondé cette année-là, dont le siège social était l’Hôtel des Colonies, puis à L’Hôtel de la Gare, et à partir de 1930 au Café des Sports de la rue Amiral Courbet, intitula les repas dansants qu’il organisait sous cet adjectif. Un orchestre, le Big Jazz, y jouait les danses contemporaines, il organisait des repas dansant au café Lelièvre, mais aussi des bals masqués à la Salle des Fêtes. Regroupant surtout des gens de moins de 30ans, le comité se composait de chanteurs, de musiciens, de peintre, de décorateur et même d ‘architectes. C’était une sorte de Montparnasse à Saint-Nazaire, image des Années Folles, qui avait des bannières portant la devise : « Rire, santé, gaité ». Le Club se développa suffisamment pour organiser aussi des fêtes sur la côte hors Saint-Nazaire. La réputation de la qualité de ses événements fit que même le maire, François Blancho, y participait régulièrement.

  • Histoire & Patrimoine n°100

    Le numéro 100 de la Revue Histoire & Patrimoine, revue de l’APHRN, se trouve en kiosques ce matin, (ici : la liste des points de ventes : https://aphrn-asso.fr/points-de-vente/ ), elle peut aussi être achetée via le site de l’APHRN, y compris en version numérique.

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    Ce numéro 100, (auquel il nous avons été une fois encore invité à participer, avec la seconde partie d’une biographie du nazairien Gustave Bord), est feuilletable sur le lien suivant : https://online.fliphtml5.com/qnsyv/jiwh/#p=1 ).

    Il rassemble comme toujours des articles intéressants sur l’histoire de Saint-Nazaire et de la Presqu’ile et de l’Estuaire, mais qu’il me soit permis de saluer particulièrement certains contributeurs pour l’excellence et la pertinence de leurs recherches :

    Ainsi, dans l’ordre d’apparition dans la publication :

    • Claude Thoméré, avec son étude historique et onomastique « Le verrou de Méan - Origine du nom de quelques anciennes îles de l’embouchure de la Loire», dont la lecture fera pour la majorité d’entre vous des éléments jusque-là inconnus ;
    • Emmanuel Mary, qui nous apprend des éléments pertinents et inédits dans « Usine élévatoire – Saint-Nazaire, Ville d’Art et d’Histoire - L’inscription au titre des Monuments Historiques », et nous fait ainsi découvrir véritablement un monument nazairien qui était jusqu’à cet article si mal connu ;
    • Daniel Sauvaget, avec ses articles «Sentinelles de la mémoire » et « Georges Bareau, sculpteur nazairien », nous fait comprendre la valeur patrimonial et artistique des monuments aux morts en les resituant dans le contexte du traumatisme de la Grande-Guerre, tout en nous éclairant sur un artiste à redécouvrir ;
    • Christophe M. Josso, avec « Le cépage nommé “Aunis”, de Guérande à Sarzeau I – Introduction : Les cépages connus en Bretagne», qui est une véritable étude de ce patrimoine actuellement perdu, et qui pourtant fut notre quotidien jusque dans la première décennie de la seconde partie du 20ème siècle.
    • Article que complète admirablement celui de Jocelyne Le Borgne, avec « Vignes et vendanges à Mesquer – 1412-1912 », qui replace dans le contexte humain et séculaire, et qui une fois de plus nous délivre la mémoire de Mesquer, qui sans les publications de madame Le Borgne, serait probablement oubliée et inconnue du grand public ;
    • Et enfin, Jean de Saint-Houardon, avec « Conlie : l’humiliation - La terrible aventure de l’Armée de Bretagne (1870-1871) ». Jean de Saint-Houardon, à propos de qui écrire qu’il a une fois de plus dire produit un travail excellant semble une redondance, tant c’est un plaisir à chaque fois de lire ses publications.

     

  • Narcisse Pelletier, reportage de France-Culture

     

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    Messieurs Yves Aumont et François Teste, dans le cadre de la série de documentaires « Une histoire particulière », sont venus en janvier dernier à Saint-Nazaire interroger l'auteur de ce blog à propos de Narcisse Pelletier[1], occasion de parler brièvement de la vie de cet homme au destin incroyable, de la restauration de sa tombe qui débutera au printemps 2021 grâce aux co-financement des villes de Saint-Gilles-Croix-de-Vie et de Saint-Nazaire, sur l'initiative de l'auteur et avec l'aide des Amis de Narcisse, association internationale qui a maintenant son antenne à Saint-Nazaire.

     

    Les passages enregistrés à Saint-Nazaire l'ont été au phare de la Tour du Commerce, grâce l'intervention de monsieur Emmanuel Mary, chargé des missions patrimoine de la Ville de Saint-Nazaire, et à la bienveillance de monsieur Michel Ray, adjoint à la Culture ; sur la plage de Porcé, où Narcisse expliqua à la famille Bord, à l’aide d’un grand dessin, un jour de 1877, le Rêve, mythe de la Création selon la nation Aborigène ; et enfin, au cimetière de La Briandais, devant la tombe où repose Narcisse avec son épouse.

     

    Le documentaire, en deux parties, est audible sur les liens suivants :

    Première partie, sa jeunesse à Saint-Gilles, et son naufrage : https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/yukio-mishima-1925-1970-le-labyrinthe-des-masques

     

    et

     

    Seconde partie, son retour en France et sa vie à Saint-Nazaire :

    https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/narcisse-pelletier-laborigene-vendeen-22-le-paria-des-iles

     

     

    [1] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/09/22/narcisse-a-saint-nazaire-6177707.html

  • La croix de Heinleix

    La Croix de Heinlex était une croix de chemin dont la disparition est l’objet de légendes urbaines qui prétendent un renversement par un camion allemand ou un broyage par un char étasunien. Deux affirmations fausses, comme nous allons l’expliquer.

    croix de Heinlex

    Le Croix d’Heinlex avant 1914

     

    La Croix d’Heinlex se trouvait face au portail du parc du château d’Heinlex, portail de pierres et briques, fortement endommagé, disparu il y a quelques années pour laisser place à la voie qui désert la « Résidence Tricastel ».

     

    croix de Heinlex

    Emplacement de la croix vers 1905

     

    croix de Heinlex

    Emplacement de la croix, vue en 2008, © Google Maps

     

    croix de Heinlex

    Emplacement de la croix et du portail, vue en 2019, © Google Maps

     

    Elle fut inscrite à la liste des Monuments Historiques le 18 octobre 1944, car elle était réputée dater du XIIIème siècle. C’était une croix latine simple, au sommet d’une colonne dotée d'un chapiteau et qu'une base de facture grossière, elle-même posée sur un piédestal rectangulaire en moellons, assemblage probablement plus récent. Cependant, quand son classement fut décidé, la croix avait déjà disparue. En effet, elle était tombée de son socle par manque d’entretien, et un article du Courrier de Saint-Nazaire du 6 févier 1941 nous apprend que la croix proprement dite et la colonne, qualifié de incorrectement de  « calvaire [fut] pieusement recueilli et abrité dans une maison voisine ». Une photo du piédestal publiée dans le même journal le 14 novembre 1941 montre le piédestal intact.

    croix de Heinlex

    Piédestal de la croix de Heinlex en 1941, photographie d'Alex Bernard fils,

    publiée dans Le Courrier de Saint-Nazaire du 14 novembre 1941

     

    Malheureusement jamais remise en place, les éléments ont été perdus, car on ne s’y est pas intéressé au moment de la Reconstruction, les priorités étant ailleurs, et la base du monument a disparu avec l’élargissement de la route du Haut Rocher. Ce n’est qu’en 1960 que Ferdinand Guériff remémora aux Nazairiens son existence, mais sans donner de détail à propos de sa disparition autre que « disparue durant la guerre », ce qui entraîna les légendes citées.

     

     

     

  • Trois esclaves à Saint-Nazaire

    Le commerce triangulaire, instauré par Louis XIV, est à l’origine de la Traite négrière française. Nantes fut l’une des villes à vivre de ce commerce qui consistait à envoyer des marchandises manufacturées sur les côtes africaines, où ils étaient entre autres échangés contre des humains à la peau noire que les marchands magrébins[1] ou les chefs de tribus côtières de l’Ouest de l’Afrique, mais aussi de l’Est, avaient réduits en esclavage après les avoir capturés dans les terres. C'est ici un point abominable de l'Histoire africaine, durant des siècles des peuples des l'Afrique-Noire vendirent aux étrangers, qu'ils soient du Maghreb, du Proche-Orient ou de l'Europe de l'Ouest et des colonies d'Amérique, des prisonniers de guerre issus d’ethnies rivales, des victimes de razzias, et des personnes jugées coupables d’adultères. Si un jour vous visitez le mémorial de la Route des esclaves à Ouidah au Benin, vous y apprendrez qu'au marché aux esclaves qui s'y tenait, que « 1 pipe valait 5 esclaves, 1 bouteille d’alcool 10 esclaves, 1 canons 15 hommes ou 21 femmes ». On vous y montrera aussi l'emplacement de l'Arbre de l'oublie, un arbre disparu autour duquel les femmes faisaient neuf tours, et les hommes sept, en signe d'adieu à leur continent. Embarqués de force sur les navires occidentaux, ils étaient ensuite vendus dans les colonies d’Amérique, territoires du Royaume sous administrations privées, où ils se retrouvaient presque tous réduits à des travaux de força dans les plantations, plus rarement à des travaux ménagers dans des conditions de traitement pas plus enviables.

    Les esclaves des colonies du Roi de France ne connurent jamais l’Europe, à quelques exceptions, dont Saint-Nazaire fut témoin pour trois cas, car, outre le fait que Saint-Nazaire était déjà durant l'Ancien-Régime l'avant port de Nantes, le commerce triangulaire nantais rayonna aussi sur Saint-Nazaire, Paimboeuf, et Le Croisic.

     

    Philippe :

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    Acte de Baptême de Philippe, Archives de Saint-Nazaire

     

    Le 9 mai 1728, le père André Moyon, curé de Saint-Nazaire, donna le baptême à un adolescent « d’environs 16 ans », natif de l’Illinois. Désigné comme « négre » dans l’acte, était né esclave dans ce qui était alors encore une colonie française d’Amérique rattachée à la Louisiane, et administrée par la Compagnie d'Occident.

    Son arrivée en Bretagne est due probablement au transport de son propriétaire, qui, même si l’acte ne le précise pas, doit être celui qui se désigne comme son parrain, messire Philippe Anthoine Préval, major de milice, dont l’épouse devait certainement être celle qui fut la marraine de l’adolescent, la demoiselle Elisabeth Duplessis. Aucun des deux n’était de Saint-Nazaire ou de sa région, pas plus que les huit autres signataires de l’acte, dont le révérent père Simon de Rennel, « prédicateur missionnaire », c’est-à-dire un jésuite, originaire de Lorraine, qui fut chargé de présenter Philippe au père Moyon. On peut donc supposer qu’il s’agit d’un débarquement depuis un bateau venu des colonies d’Illinois, qui attendait dans la rade la marée haute pour débarquer à Nantes. Attendu que Philippe avait presque l’âge adulte, le père Moyon appliqua la procédure de l’interrogation sur les mystères de la Foi catholique, afin de déterminer s’il avait reçu l’enseignement nécessaire pour intégrer la communauté catholique.  L’ayant trouvé « suffisamment instruit », le père Moyon donna le baptême.

     Donner le baptême aux esclaves était dans les colonies françaises un acte relativement rare, car si on leur enseignait l’évangile, leur condition d’esclave paraissait incompatible avec la qualité de Chrétien qui sous entendait une condition de liberté en terre chrétienne. On accordait le baptême à ceux-ci quand ils étaient transportés dans les états de la Couronne de France, car seuls les catholiques pouvaient y vivre, et que suivant une ordonnance du roi Henri II, toute personne entrant dans les états de la Couronne devenait automatiquement le sujet du Roi de France, ils étaient donc automatiquement libres. Cela fut nuancé plus tard avec la notion de nationalité, qui obligea à demander la naturalisation au cours du 18ème siècle, mais dans l’absolu, celui qui naissait dans les colonies françaises était sujet français, même s’il était esclave et dépendant des règlements de la colonie. Dans cet univers hypocrite où des territoires étaient conquis au nom d’un souverain, mais administrer par des sociétés qui étaient libres de pratiquer les Lois qu’elles désiraient, du moment qu’elles ne furent pas en contradiction avec les édits royaux, les ailes du paradoxe étaient peu écartées.

    Philippe, à qui on n’accorda pas de nom de famille, mais dont l’usage faisait de lui un Préval, fut donc libéré par le Droit au moment où il posa le pied sur le sol de Bretagne. Cependant, s’il avait plu à Philippe Anthoine Préval de le renvoyer en Illinois ou dans n’importe quelle colonie, Philippe aurait retrouvé immédiatement sa condition d’esclave, et aurait du bénéficier d’un acte d’affranchissement pour être réellement libre.

    Le nom de Préval se rencontre encore en Haïti, on peut donc supposer que Philippe-Anthoine Préval soit reparti aux colonies et que lui, ou sa descendance, se sont établis à Saint-Domingue après que le traité de Paris de 1763 céda l'Illinois à la Grande-Bretagne, et que les Préval d’Haïti sont de son sang, ou des descendants d’affranchis qui ont pris le nom de leur ancien propriétaire pour patronyme. Nous ne pouvons que supposer, car le destin de Philippe nous est hélas inconnu.

     

    Jean Louis :

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    Acte de Baptême de Jean Louis, Archives de Saint-Nazaire

     

    Philippe n’est pas le seul jeune esclave à se retrouver baptisé à Saint-Nazaire. Le 12 mars 1750, c’est un enfant « d’environ 12ans », natif de Guinée, que l’on a nommé Jean Louis, qui fut baptisé en l’église de Saint-Nazaire. Son propriétaire, désigné hypocritement comme son maître dans l’acte, comme s’il en était juste un valet, est le négocient, capitaine de navire et armateur croisicais, est Jean Bocandé[2], (Le Croisic21 avril 1704 - Le Croisic 14 février 1780), actionnaire de la Compagnie de Guinée, l'une des plus importantes sociétés de la traite négrière et du commerce triangulaire du pays nantais, fournisseur d’esclaves à l’île de Saint-Domingue. L’enfant fut certainement rapporté en cadeau à l’épouse de Jean Bocandé, née demoiselle Ursule Le Maugen, (Le Croisic 9 janvier 1703 - Le Croisic 9 décembre 1788). Il était en effet à la mode d’offrir « un négrillon » à sa femme, sa maitresse, ou à une dame de la noblesse dont on espérait une faveur. L’enfant était alors déguisé en page coiffé d’un turban, et servait de valet et de garçon de compagnie, généralement il avait charge des animaux de compagnie de la dame, et se devait de la distraire par ses jeux ou des pitreries. A l’âge adulte, débarrassé de son turban, revêtu d’une livrée, il était relégué comme valet pour monsieur, où devenait valet de pied pour la maison, chargé du vestiaire, summum du chic de l’époque. Pour un homme richissime comme Jean Bocandé, armateur négrier dont les navires accostaient à Paimboeuf, ce qui explique le choix de Saint-Nazaire comme lieu de baptême pour Jean Louis, il convenait de se plier à cette mode qui perdura jusqu’à la Révolution, car, outre madame du Barry à qui on offrit Zamor, la reine Marie-Antoinette reçu Amilcar, dont elle se débarrassa aussitôt en l’affranchissant et en l’envoyant comme son pupille dans une pension[3].

    Le destin de Jean Louis nous est inconnu, mais tout laisse à supposer qu’il fut le valet d’Ursule Bocandé, qui fut aussi sa marraine. Le parrain fut un Nazairien, René Galliot, sieur de Cran, (Saint-Nazaire 1693 – Saint-Nazaire 8 février 1772), avocat à la cour, sénéchal de Saint-Nazaire et de Marcein, subdélégué de l'Intendance à Saint-Nazaire et marguillier, membre de la confrérie Saint-Nicolas de Guérande[4]. Un homme considérable alors dans la petite ville. L’acte de baptême comporte aussi les signatures de quatorze témoins, membre des bourgeoisies de Saint-Nazaire et du Croisic, on y déchiffre notamment celles de Catherine-René Moyon, (1726-1795), épouse de Joseph du Bochet, (1722-1757), fille du seigneur des Boexières[5] ; de Jean-Olivier Kermasson, seigneur de Kerisac, (en 1689- Saint-Nazaire 18 mars 1754), notaire et procureur de la juridiction de Saint-Nazaire ; Un cousine, Jeanne Bocandé, épouse Guiheneuc, (Saint-Nazaire 18 novembre 1706  - Saint-Nazaire 27 octobre 1787), celle de Renée Walsh[6], (Saint-Nazaire 24 janvier 1697 – Saint-Nazaire 24 juillet 1782), d’une famille irlandaise implantée au Croisic et à Saint-Nazaire, parente de l’armateur négrier Antoine Walsh de Nantes actionnaire de la Compagnie de Guinée, Renée Walsh fut l’une des chevilles de l’équipée de prince Charles Stuart[7], dont l’époux, René Guisnel est aussi signataire ; on lit aussi la signature d’un Leray, autre cousin nazairien des Walsh… et une Nazairienne non identifiée, Geneviève Le Breton, qui l’on retrouve trois ans plus tard dans un autre acte de baptême d’esclave.

     

    Jean-Baptiste Ambroise :

     

     

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    Acte de Baptême de Jean-Baptiste », (étalé sur deux pages), Archives de Saint-Nazaire

     

    Le troisième et dernier esclave qui fut baptisé à Saint-Nazaire, le fut le 15 janvier 1753 « avec permission verbale de l’évêque de Nantes ». C’est Jan Baptiste Ambroise, « âgé d’environ 10ans », qui eut pour parrain Bonaventure-Ambroise Lorieux, sieur de La Mainguisserye, seigneur de Tréballe en Saint-Nazaire[8], (Saint-Nazaire 1er décembre 1720 - Saint-Nazaire 5 décembre 1782), avocat, époux de Julienne David de Drézigué, (sœur du maire du Croisic exécuté durant la Révolution), et pour marraine, celle à qui l’enfant était probablement destiné, Marie Masson, (Saint-Nazaire 6 juin 1728 - Saint-Nazaire 3 avril 1759), épouse du capitaine de navires marchands René Michon, (originaire de l’Ile d’Yeu), et sœur du capitaine de navires marchands Jean Masson, (Saint-Nazaire 19 septembre 1720 - Saint-Nazaire 12 avril 1786), signataire de l’acte. On retrouve comme autres signataires Renée Walsh et Jean-Olivier Kermasson ; le vicaire Sébastien Bureau de La Bessardière, par la suite recteur de la paroisse et premier maire de Saint-Nazaire ; et Geneviève Le Breton.

    Encore une fois nous ignorons ce qu’il advint de ce garçon, il semble être encore vivant à la mort de Marie Masson-Michon, décédée quelques jours après avoir mis au monde une fille, Marie-Anne Jeanne-Renée Michon vivante en 1767, mais rien ne prouve que René Michon, remarié en 1766 avec Marie Tourbe, dont il eut une descendance à Saint-Nazaire, où il décéda le 7 septembre 1813, ait gardé le garçon à son service. Il est possible que Jean-Baptiste Ambroise fût confié à Jean Masson ou qu’il soit décédé avant d’atteindre l’âge adulte. Il a cependant vécu un certain temps à Saint-Nazaire, car la mémoire nazairienne garde le souvenir d’un valet noir qui aurait vécu jusqu’à au moins ces 30 ou 35 ans en ville et qui de fait pourrait être Jean-Baptiste Ambroise.

     

     

    [1] Les magrébins, qu’on désignait comme « barbaresques », procédaient à la piraterie et réduisait à l’esclavage aussi des Européens, qu’ils proposaient généralement à la revente aux ordres de Saint-Jean de Jérusalem (chevaliers de Malte), ou à l’ordre de la Très-Sainte-Trinité pour la rédemption des captifs, (ordre des Trinitaires), ou à celui de Notre-Dame-de-la-Merci (ordre des Mercédaires). Cependant certains de ces captifs blancs finissaient au service des beys ou des sultans marocain ou ottoman, et les femmes jeunes dans les harems. Les noirs non vendus aux étrangers étaient cantonnés à des fonctions de serviteurs de conditions inférieures. Les plus jeunes pouvaient s’ils avaient de la chance d'être formés pour devenir soldats des armées des sultans, où pire, être confié à des moines coptes en Egypte, qui procédaient à leur châtrage, (un musulman n’ayant pas le droit de mutiler un homme), « opération » à laquelle peu d’enfants suivaient.

    [2] Il fut aussi conseiller du roi, miseur en titre de la ville et communauté du Croisic en 1756.

    [3] Zamor devint à la Révolution membre du Club des jacobins, inventa des pamphlets sur madame du Barry qui le renvoya de son service. Il s’en vengea en la dénonçant au Comité de Salut Public, la condamnant ainsi à mort. Emprisonné par les révolutionnaires, il subsista en jouant du violon dans des soirées, et décéda dans la misère, détesté de tous, le 7 février 1820. Amicar, devenu par volonté de la Reine Jean Amicar, fut à la Révolution pupille de la Nation, au titre de victime de l’esclavage, il décéda à l’âge de 14ans en mai 1896.

    [4] Le concernant, lui et sa famille, voyez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/27/la-famille-galliot-de-cran.html

    [5] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2014/06/12/famille-moyon-des-bouexieres-5389431.html

    [6] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/16/les-walsh-de-saint-nazaire.html

    [7] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/15/bonnie-prince-charlie-ou-the-young-pretender.html

    [8] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/10/03/la-seigneurie-de-la-treballe.html

  • Tahier et Tahier de Kervaret

    Tahier, voici un nom qui était pour les Nazairiens synonyme d’ancienne bourgeoisie et d’honorabilité. Celle-ci s’étant éteinte en même temps que la ville fut détruite et sa population majoritairement dispersée, elle n’est plus qu’un vague souvenir que parfois ravive la lecture de la liste des anciens maires, où la mention d’un conseiller d’Etat.

    Pourtant, être Tahier s’était être de bon lignage à Saint-Nazaire, être revêtu d’honorabilité, et les membres de cette famille affichaient une certaine fierté, si ce n’est une certaine forme d’arrogance ; les enfants des filles Tahier faisaient en sorte d’associer le patronyme à celui de leur père.

     

    Les origines :

     

    Les Tahier sont originaires de Ploubalay, aujourd’hui une commune de Beaussais-sur-Mer, une paroisse dépendante du diocèse de Saint-Malo, entre Dinard et Dinan. Elle est connue dans les registres paroissiaux depuis Jehan Tahier marié vers 1580 avec Charlotte Agan, née le 15 décembre 1546 à Ploubalay. Leur petit-fils, Bertrand Tahier, marié le 25 juin 1630 avec Gilette Margot, entra en possession du fief de de La Villesgouté, (La Ville-es-Goutte), en Ploubalay. Ses suivants firent carrière dans la magistrature et le droit, et pratiquèrent le partage noble, ce qui leur permis de porter dans les actes le titre d’écuyer, mais aucun ne fit confirmer cette noblesse acquise par comportement noble que permettait la Coutume de Bretagne. On ne lui connait pas non plus d’écu d’armes, élément pourtant indispensable à la noblesse, car « il n’est nulle noblesse sans armoiries ». L’un de ses petits-fils, Julien-Maurice Tahier, né à Ploubalay le 14 janvier 1717, hérita du fief de Villesgouté, et fut contrôleur aux Devoirs à La Roche-Bernard. Il épousa à Guérande, le 2 août 1746, Aimable-Jeanne-Jérômine de Kervéno, (Donges 22 septembre 1719 – Guérande 13 février 1786), dame de Kervaret en Guérande, qui était issue d’une famille de très ancienne noblesse qui portait : d'azur, à dix étoiles d'argent, 4, 3, 2 et 1. Le couple eut au moins douze enfants, dont seuls deux fils atteignirent l’âge adulte.

     

    Généalogie en Presqu’Ile guérandaise :

     

    I° Julien-Maurice Tahier, sieur de La Villesgouté, né en 1717 à Ploubalay, décédé en avant la naissance de son second fils, écuyer, contrôleur aux douanes, capitaine des canonniers, contrôleur aux devoirs à La Roche-Bernard ; marié à Guérande le 2 août 1746 à Aimable-Jeanne-Jérômine de Kerveno (Donges 22 septembre 1719 – Guérande 13 février 1786), d'où 12 enfants, dont :

    1° Jacques-René-Claude, qui suit ;

    2° Julien Maurice qui suit branche Tahier de Kervaret.

     

    II° Jacques-René-Claude Tahier, (Guingamp 19 septembre 1748 – Guérande 13 juillet 1816), désigné dans les actes comme rentier et propriétaire, marié civilement à Guérande le 16 septembre 1798, (30 fructidor an VII), avec sa domestique avec qui il vivait maritalement depuis plusieurs années, Françoise Viaud, (Saint-Molf 1er décembre 1764 – Guérande 6 février 1806). Ce mariage civil avec reconnaissance d’une enfant, dérangea longtemps la famille, certes la Révolution avait changé la société, et un « ci-devant [1]» pouvait épouser une femme de condition très inférieure à la sienne, mais le fait que ce mariage civil fut contracté si tard, fit raconter par les Tahier, que le couple avait en réalité contracté un mariage religieux avant le mariage civil, devant un prêtre réfractaire, donc illégale en période révolutionnaire, dont on n’a jamais pu apporter la preuve ; la seule union connue du ce couple est de fait le mariage civile. Il y aurait eu cinq enfants né de ce couple, mais on n’en connait au moins deux :

    A° Françoise née à Guérande le 9 janvier 1796, reconnue par son père lors du mariage civil de ses parents ;

    B° Jacques-François qui suit.

    tahier

    Jacques-François Tahier © Fonds et collections de la famille Fraisse.

     

    III° Jacques-François Tahier, (Guérande 8 novembre 1799 – Saint-Nazaire 24 mars 1875), capitaine au long cours, syndic des gens de mer à Saint-Nazaire, maitre de port, chevalier de la Légion d'Honneur, médaillé de Sainte-Hélène, époux d'Eléonore-Aglaë Blanchard, sœur fille de l’officier de Santé du port, et sœur d’un éphémère maire en 1830[2]. D’où :

    1° Aglaë, (1836-1919), le docteur Hippolyte Durant, (Nantes 9 juillet 1827 – Saint-Nazaire 1892), diplômé docteur en médecine à Paris le 9 octobre 1860, médecin de la Santé, il se spécialisa dans la lutte contre le choléras, et obtint la médaille du Choléras en Meuse en 1854 ; en 1861, il fit le premier diagnostic de l''épidémie de fièvre jaune qui frappa Saint-Nazaire, un patient agité par la fièvre le frappa à l’œil par accident, il dut subir une énucléation, l'Empereur lui décerna une médaille d'honneur le 15 janvier 1862 ; il fut commissaire municipal à la mairie en 1870 et resta conseiller jusqu'en 1888 ; la Croix Rouge lui décerna sa Croix de bronze en 1871 en récompense de son dévouement ; il assura durant la seconde épidémie de fièvre jaune de 1881, le service durant 21 jours au lazaret de Mindin -  une rue porte aujourd'hui son nom, d’où  postérité sous le nom de Durant-Tahier, (voir http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/31/notes-sur-la-famille-durand.html ) ;

    2° François-Alexandre, né à Saint-Nazaire le 12 février 1838, capitaine au long-court, marié le 22 juin 1869 à Saint-Nazaire avec Marie Henriette Henry, fille de Jean-Louis Henry, pilote, (1817-1875), et de Jeanne Marie Audrain, (1817-1867), ; d’où :

    A° Blanche-Marie, (Saint-Nazaire 8 avril 1870 – 1962, inhumée au cimetière de La Briandais), épouse Giraud ;

    3° Louise-Aimée, né à Saint-Nazaire le 30 mai 1839 ;

    4° Henri, qui suit.

    IV° Henri Tahier, (Saint-Nazaire le 5 octobre 1845 – Saint-Nazaire 19 février 1924), d’abord clerc de notaire, il tomba amoureux de sa belle-soeur Angèle-Désirée Henry, (Saint-Nazaire le 6 mars 1850 – Saint-Nazaire 9 juin 1916). Il désira l’épouser, mais elle était mineure ; ils consommèrent leur amour et Désirée se trouva enceinte. Chassée par son père, elle trouva refuge chez la veuve Couronnée, rue de Nantes, où elle accoucha d’une fillette le 9 janvier 1871. Le couple se maria finalement trois mois après que la jeune mère accéda à l’âge adulte, le 26 juin 1871, soit le temps de publication des bans. Cette histoire obligea Henri à quitter l’étude qui l’employait. Heureusement son frère le fit entrer comme caissier à la Compagnie Générale Transatlantique. D’où :

    1° Angèle-Henriette Henry, puis Tahier, légitimée au mariage de ses parents, (Saint-Nazaire 9 janvier 1871 – Saint-Nazaire 6 avril 1877) ;

    2° Henri Tahier, dit de Kervaret, (Saint-Nazaire 26 octobre 1873 – Paris ?), ingénieur, marié le 14 avril 1926 à Paris, avec Jeanne Herviau, dont on ne sait pas grand-chose, mais qui semble avoir eu un style de vie dispendieux et qui s’endetta beaucoup, au point de connaitre une faillite en octobre 1924 ;

    3° Gabrielle-Marie-Alexandrine Tahier, (Saint-Nazaire, 2 septembre 1875 – Château-Thiébeau 2 février 1949), mariée le 25 septembre 1906 à Saint-Nazaire avec Eugène-Joseph-Antoine-Marie Nozières, (Chantenay-sur-Loire (commune de Nantes) en 1879 ou 1880, décédé avant le 28 mai 1947), négociant, puis industriel, demeurants à Paris 45 rue des Ternes ;

    4° Hélène Tahier, - Clichy La Garenne 26 janvier 1962), mariée le 15 janvier 1906 à Saint-Nazaire, avec Théodore-Auguste-Joseph Artaud, (°Vertou 8 avril 1879 - décédé avant le 28 mai 1947)), dessinateur, puis dessinateur-géomètre, demeurants à Villemomble 25 avenue des Roses ;

    5° Madeleine, (Saint-Nazaire le 19 septembre 1881 – Saint-Nazaire 26 janvier 1932) assassinée par son locataire en sa villa La Vague à Villès-Martin ;

    6° Andrée-Emilie Tahier, née à Saint-Nazaire le 30 mai 1886, employée de commerce, demeurant à Paris, 25 rue Henri-Monnier.

     

     

    Branche Tahier de Kervaret :

     

    II° Julien-Maurice Tahier de Kervaret, sieur de Kervaret, (La Roche-Bernard le 20 septembre 1749 – Saint-Nazaire 6 décembre 1832) ; fut nommé lieutenant de Frégate en 1778, puis de de Vaisseau 1786, et à nouveau en 1792, et le 18 Floréal an II ; parti à Philadelphie conduire un ambassadeur et toute sa suite, en l'an V (1796) comme commandant de la corvette Mercury, il fut à son retour nommé capitaine de la station navale de Mindin ; nommé capitaine de Frégate en 1814,il fut mis en retraite le 1er novembre 1817. Il avait été nommé maire de Saint- Nazaire le 13 septembre 1815, et resta en place jusqu'en 1823, date à laquelle il démissionna en raison de son âge et de ses infirmités ; chevalier de Saint-Louis 1821 ; propriétaire du domaine du Parc à l'Eau (situé à l'emplacement des anciens frigos, une rue située plus loin porte le nom de ce domaine en souvenir) ; marié à Saint-Nazaire le 18 juillet 1799 à Françoise Thomas, d'où :

    1° Aimable-Geneviève, (1801 - Nantes 11 novembre 1860), religieuse dans l'Ordre de Saint-Louis de Gonzague en la communauté de La Providence à Nantes, inhumée au cimetière de La Briandais où sa tombe existe encore à droit dans l'allée principale ;

    2° Claire-Eulalie, (1802-1866) ;

    3° Aimée-Gertrude, née à Saint-Nazaire le 23 octobre 1806, hérita du domaine du Parc à l'Eau,  mariée sous le nom de Tahier du Kreset à Saint-Nazaire le 10 mai 1830 avec Pierre-François-René de Brégeot, né à Herbigniac le 14 juin 1801, licencié en droit, juge auditeur à vannes le 10 mars 1825, substitut à Savenay en 1829, juge de paix à Guérande en 1849, conseiller général de la Loire-Inférieure de 1850 à 1853, juge de paix à Briec en 1867, d'où postérité, (voyez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/26/notes-sur-la-famille-de-bregeot.html ).

     

     

    [1] Expression qui désignait durant la période révolutionnaire les gens ayant bénéficier de privilèges nobiliaires ou de charge.

    [2] Claude Alexandre Blanchard, officier de Santé, officier de santé, membre de loge maçonnique nantaise Mars et les Arts, maire de Saint Nazaire du 29 juillet 1830 au 21 décembre 1830.

  • Jean d'Udine

    On vous dira probablement durant un souper en ville que Berlioz est venu séjourner plusieurs fois à Saint-Nazaire chez son fils, alors capitaine à la Compagnie Générale Transatlantique. Cette affirmation n’a rien de nouveau, maître Galibourg se plaisait à le répéter en boucle, en précisant que les Berlioz étaient ses locataires. On omet cependant de préciser à chaque fois qu’en ce temps-là Berlioz était une ombre, qu’il ne composait plus depuis des années. Les plus lettrés, vous parleront d’un charmant courrier qu’écrivit en 1884 Camille Saint-Saëns depuis le Grand-Hôtel, où il séjournait. L’année 1884, fut celle où il dirigea à Nantes la seconde partie de son oratorio « Le Déluge », « L'Arche — Le Déluge », (Op. 45), d’après le poème de Louis Gallet. Il était venu à Saint-Nazaire pour y visiter l’un de ses parents, (à moins que ce ne fut en réalité sa grande amie la pianiste Caroline Montigny-Remaury séjournant à Saint-Marc chez son beau-frère Eugène Wieczffinski ?). Dans cette lettre, qui réjouirait n’importe quel proustien, Camille Saint-Saëns, au faîte de sa gloire, monsieur ventru et longuement barbu, raconte son bonheur de faire des tours de chevaux de bois sur le carrousel de monsieur Guilleux sur la place Marceau, face au Café Américain.

     

    Le Nazairien, le vrai, celui dont les racines s’enfoncent à travers la stratification des siècles, vous comptera le souvenir de Jean d'Udine, charmante personnalité et musicologue qui  marqua son temps, auteur de quelques mélodies aujourd'hui oubliées.

     

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    Jean d'Udine,© fonds famille Gautier-Cozanet

     

    Jean d'Udine est un pseudonyme, celui d’Albert-Guillaume-Marie Cozanet, avocat à Saint-Nazaire. Né à Landivisiau le 1er juillet 1870, ce fils de médecin[1], petit-fils de notaire, il fut licencié en Droit à Rennes en 1890, s’inscrivit au barreau de Saint-Nazaire en 1891, et signa le mémoire de avocats de Saint-Nazaire demandant le monopole de la plaidoirie devant le tribunal de cette ville en 1892. Il préférait la musique et la poésie au Droit qu’il ne pratiquait que pour des raisons financières[2], sans y mettre beaucoup d’entrain. Ses plaidoiries étaient excellentes, mais il n’y mettait jamais de cœur, si bien qu’il perdait les affaires qu’il menait. Il est vrai qu’elles n’étaient généralement pas passionnantes, c’étaient des histoires de bagarres en Brière. Certaines ne manquait pas de piquant, ainsi c’était-il retrouvé, en mars 1893, à défendre Jean-Baptiste Moyon dit Tête Fine, accusé d’avoir donné un « coup de tête » au garde champêtre Moyon dit Bon Dieu, qu’un autre Moyon, dit Le Diable, était venu secourir… En juin suivant il avait défendu Félix-Marie Mausset pour un bras d’honneur avec invitation à la découverte du plaisir anal adressés au maire d’Avessac. Il n’en demeurait pourtant moins apprécié pour sa culture et son esprit ; sur décision du Conseil municipal du 4 novembre 1893, il fut nommé co-conservateur adjoint du Musée[3]. A l’époque de cette nomination, il ne s’illustrait que par des poèmes paraissant dans les journaux et des critiques artistiques, paraissant dans Le Courrier de Saint-Nazaire, La Démocratie de l’Ouest, L’Echo de Saint-Nazaire, Le Sonneur de Bretagne à Rennes, L’Ouest artiste de Nantes, des articles de critiques musicales et artistiques, ainsi que par l’amitié que lui vouait le compositeur Jules Massenet, (1842-1912), superstar de l’époque, mais s’investissait dans toute les manifestations artistiques ayant lieu à Saint-Nazaire. En 1894 il publia une pièce en vers nommée « L’Epée », jouée pour « L ’assaut d’armes du Grand Hôtel du 18 février 1894 », et un recueil de poésies nommé « Bourgeons », édité par la Grande Imprimerie de Saint-Nazaire, et épousa, le 7 août 1894, à Port-Vendres, (Pyrénées-Orientales), Marie-Estelle-Pauline Dardignac, (Fort-De-Franc 8 mars 1871 – Paris 21 décembre 1958). Cette notoriété lui valut une entrée élogieuse dans le Dictionnaire Biographique de la Loire-Inférieure, de Henri Jouvet en 1895, année où il composa une œuvre musicale pour théâtre d’ombres chinoise nommée « Jehanne d’Arc », jouée à Saint-Nazaire au concert de la Société philarmonique, et à Nantes par Le Clou.

    En 1897 il publia « La corrélation du son et des couleurs dans l’art », éditions Fischbacher à Paris.

    Il abandonna le barreau en 1898, et parti à Paris où il fut rédacteur à la Préfecture de la Seine, il y collabora à La Revue internationale de musique, qui hélas ne perdura qu’une année, ainsi qu’au Ménestrel, et au Courrier musical durant quinze ans. Fin musicologue, il publia tour à tour en : 1900 Dissonance, Lettres paradoxales sur la musique, Fischbache ; 1903 Paraphrases musicales sur les grands concerts du dimanche (Colonne et Lamoureux), 1900-1903, A. Joanin, L'Orchestration des couleurs, analyse, classification et synthèse mathématiques des sensations colorées, A. Joanin ; 1904 Le retour à Mozart, Petites lettres pour la jeunesse sur le « Jugend-Album » de Schumann, A. Joanin ; 1905 Les Caractères des musiciens, à la façon de Théophraste et de La Bruyère, A. Joanin, La Meule tourne, (roman), A. Joanin ; 1906 L'école des amateurs, Ed. du Courrier Musical, Gluck (biographie), H. Laurens ; 1908 La musique des syllabes, et les sirènes du docteur Marage, Société Internationale de Musicologie, La Belle musique, entretient pour les enfants, Devambez, La classification des timbres, Société Internationale de Musicologie ; 1909, année où il abandonna ses fonctions administratives pour se faire professeur de danse rythmique, Qu'est-ce que la gymnastique rythmique ? publiée à compte d’auteur ; 1910 L'Art et le geste, F. Alcan ; 1911 La Coordination des mouvements et la culture de la volonté par la gymnastique rythmique de Jaques-Dalcroze, Institut générale de physiologique ; 1912 Les rapports musicaux des unités d'espace et des unités de temps, Les naves et les pulses, à compte d’auteur ; 1914 Sur la danse, à compte d’auteur ; 1918 Dans la grotte féérique, sept contes pour les grandes personnes, G. Crès ; 1921 Qu'est-ce que la danse ?, H. Laurens ; 1922 Les Transmutations rythmiques, Heugel ; 1925 Qu'est-ce que la musique ?, H. Laurens ; 1926 Traité complet de géométrie rythmique, Heugel ;  1929 Qu'est-ce que la peinture et les autres arts plastiques ?, H. Laurens ; 1931 L'Art du lied et les mélodies de Massenet, Heugel ; 1932 Qu'est-ce que l'éloquence et la poésie ?, H. Laurens ; 1936 Qu'est-ce que la beauté ?, H. Laurens.

     

    Il composa en 1917 Apaisement, mélodie sur poésie de Verlaine, et Heures, mélodie sur poème de Tristan Corbière, Valse héroïque ; en 1923 Rondels pour après, cinq mélodies sur des poèmes de Tristan Corbière ; en 1929 Sept poèmes arabes.

     

    Divorcé de Marie-Estelle-Pauline Dardignac, remarié le 8 octobre 1907 à Neuilly-Sur-Seine avec Marie Antoinette Charruit, dont il eut un fils : Guillaume-Claude-Arthur Cozanet, (Paris 17ème 19 novembre 1907 - 9 juillet 1987), d’où postérité. 

     

    Jean d’Urdine affirmera toute sa vie la nécessité de la non-reproduction dans l’Art ; dans « Qu’est-ce que la musique ? », il écrivit : « La beauté d’un meuble, d’une dentelle, d’un vitrail, ne réside pas dans leur conformité à des modèles antérieurs fixés par l’usage, mais bien dans l’invention personnelle de celui qui les crée. »

     

    Mourant, il demanda à un ami de se mettre au piano et de lui faire entendre quelques notes de Beethoven, Gluck, « et surtout du Mozart, du pur, du charmant, du lumineux Mozart.[4] »

     

     

     

    [1] Il en était le troisième fils, quatrième et dernier enfant.

    [2] Son grand-père maternel, Gilbert Villeneuve, était avocat, ainsi que son frère Charle, au barreau de Quimpert.

    [3] Avec l’architecte Henri-Auguste van den Brouke, l'avocat Jean-Marie-Jules Gouzer, suppléant à la Justice de Paix et membre du Conseil municipal, ainsi que Paul-Joseph-Henri Barbara et Octave Fidière des Prinveaux comme co-conservateur ; voyez notre article consacré à l’Ancien musée : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2020/10/01/le-musee-disparu-de-saint-nazaire-6267147.html

    [4] Cf. Dictionnaire des compositeurs de musique en Bretagne, de Vefa de Bellaing, Ouest-Editions, 1992.

  • Un sanglier à la mer !

    Le 12 octobre 2020, on a filmé un sanglier nageant dans le port de Saint-Nazaire. cette video a été publiée sur le site de Ouest-France : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saint-nazaire-44600/saint-nazaire-un-sanglier-en-baignade-dans-le-port-6cf840e4-0e02-11eb-8368-80832aa050d1?fbclid=IwAR2la_CIm65UamS4momGY3SkQytu9UsgBEGRsU5lvdc8oLzPiTle5a6ewhY

     

    Des sangliers, des chevreuils, des renards, des fouines, nous en avons tous vu sur la plage, en réelle ou en vidéo, mais la présence de ces animaux nageurs n'est pas nouvelle, déjà dans son numéro du samedi 11 mai 1872, Le Chasseur Illustré, faisait état d'un sanglier pris en mer face à Saint-Nazaire : 

     

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  • La Mécanique, statue disparue

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    La Mécanique vue de dos, carte postale vers 1938.

     

    En 1935, la destruction du palais du Trocadéro, édifié en 1878, fut décidée. Le bâtiment, couvert de statues, de bas-reliefs, attisa alors les appétits des villes de provinces qui espérèrent en avoir un morceau. Nantes fut la plus gâtée, elle hérita de quatre statues de pierre, La Botanique de Jean-Baptiste Baujault, La Forêt d’Edmond Chrétien, La Moisson de Jean-Paul Aubé, La Sculpture de Vital Gabriel Dubray. Hautes de 2m30[1], pesant 2 tonnes chacune, elles étaient à l’origine parmis les trente qui sommaient la rotonde du palais. Elles arrivèrent par la route le mardi 22 janvier 1936, et furent entreposées dans le parc du château. On les avait espérées, on les jugea démodées, et on ne sut pas quoi en faire, et durant le carnaval. Un char, baptisé « Où les mettre ? », défila. Elles sont depuis placée dans le parc de Procé.

    Monsieur Gauthier, conservateur du Musée des Ducs de Bretagne à Nantes, avait fait les démarches pour les obtenir, mais par sympathie pour la ville de Saint-Nazaire[2], il avait aussi obtenu que notre ville soit dotée de l’une de leurs sœurs. Les Beaux-Arts, propriétaires au nom de l’Etat de ces sculptures, hésita entre La Navigation[3] de Léon François Chervet, et La Mécanique du vosgien François Roger, (1843-1898). C’est cette dernière qui fut attribuée à Saint-Nazaire.

     

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    La Mécanique, entourée en rouge à son emplacement sur la rotonde du palais du Trocadéro.

     

    La Ville avait anticipé que si c’était La Navigation ont l’aurait placé dans le parc des douanes (à l’emplacement de l’actuel Ecomusée), et que si c’était La Mécanique, elle serait installée dans le Square de la Marine, face à la gare. Elle n’avait cependant pas compris l’exactitude des dimensions, et l’on demanda aux Beaux Art de ne pas l’envoyer trop rapidement, afin de lui construire un piédestal.

     

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    Construction du piédestal, Ouest Eclair du 10 mars 1936

     

    Le journaliste nazairien, René Geoffroy[4], commenta dans L’Ouest Eclair du 10 mars 1936, à propos de ce choix des Beaux-Arts : « […] n’est-ce pas un symbole frappant de ce qu’est devenue l’activité de notre ville ? La navigation a cédé le pas à la construction et aux réparations. La mécanique trône sans conteste, et ses heures « d’embauche » et de « débauche » passeront devant sa concrétisation, sauvée d’un destin destructeur. »

    La Mécanique fut installée sur son socle durant l’après-midi du 14 mars 1936. Le Populaire la jugea dans son édition du 15 mars 1936 : « pas de la meilleur inspiration ».

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    Le Courrier de Saint-Nazaire, pourtant d’habitude loquasse sur ce type de sujet, ne fit qu’un entrefilet dans son édition du 14 mars 1936, et publia en bas de dernière page une photographie avec son commentaire le 21 suivant.

     

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    Photographie publiée dans Le Courrier de Saint-Nazaire du 21 mars 1936.

      

     

    Cette statue disparue dans les bombardements.

     

     

    [1] Non 2m50 comme le publia plusieurs fois Ouest Eclaire en 1936. Lisez à ce propos la notice consacrée au palais du Trocadéro publiée en 1878 par Ve Morel et Cie, libraires-éditeurs à Paris.

    [2] C’est aussi grâce à lui que le groupe nazairien des Seiz Breur obtint le contrat de réalisation du pavillon de Bretagne à l’exposition universel de 1937.

    [3] Et non nommée La Marine comme l’écrivit à tort l’ensemble de la presse de l’époque.

    [4] Son article est signé « R.G. ».

  • Alphonse Pinguet

    Les halles de Méan sont l’un des rares exemples de l’architecture municipale de la ville datant du 19ème siècle. Si les Nazairiens connaissent le site, Alphonse Pinguet, l’architecte qui les réalisa, demeure encore inconnu de la population. Voici quelques éléments biographiques :

     

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    Les Halles en 1865 (L'Illustration 15 avril 1865).

     

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    Les halles de Méan-Penhoët © Ville de Saint-Nazaire

     

    François-Alphonse Pinguet, dit Alphonse Pinguet, est né à Saint-Benoit-du-Sault 16 décembre 1832, de Jean Pinguet, né en 1805, perruquier, et d’Adélaïde Saller.

    Il fut d’abord professeur de langues à Montmartre, mais ayant rencontré une nantaise, Marie-Constance-Emma Jaudeau, née le 13 décembre 1822, rentière, veuve de Louis-Emile de La Guérandière, il l’épousa à Nantes le 20 octobre 1856, et s’établit en cette ville comme architecte en 1857, et y fit venir sa mère alors veuve. De son union naquirent : Anthime, décédés le 31 décembre 1866, enterré au cimetière de La Briandais ; et François-Joseph, né à Nantes le 2 janvier 1863.

    Il commença à répondre à quelques commandes à Saint-Nazaire et fut rapidement remarqué par l’ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées, Paul Leferme. Il retrouva à Saint-Nazaire l’ingénieur entrepreneur Alcide Bord[1], natif comme lui du Berry. Alcide, qui participait aux travaux du port, et avait acquis pour spéculation la métairie de La Vacquerie et le vallon de Porcé, lui commanda la réalisation de plusieurs villas sur ce site. Ainsi, furent construis en 1858 les villas Les Glycines, Les Camélias, Les Acacias, toujours subsistantes à Porcé, et le château des Charmilles avec ses dépendances, dont il reste les ruines du château et la maison de plage, dite depuis villa les mouettes, dont la restauration va être entreprise par la municipalité. Il est intéressant ici de noter que ces demeures furent réalisées avec des matériaux préfabriques, (carreaux de ciments, briques, etc.), avec l’incorporation pour poutres de fer et de colonnes de fonte, avec des extensions ou dépendances sans fondations, mais simplement posées sur des bordures de granites, sur lesquelles reposent une structure en bois, entre les poutres desquelles sont assemblées des briques. C’est le cas pour les deux ailes encadrant la maison de plage du Château des Charmilles, mais aussi sur des annexes disparues : la menuiserie, les écuries, et le pavillon du gardien. Ce genre de méthodes de construction rapides et peu onéreuses ont été réfléchies par Viollet-le-Duc.

     

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    Le pavillon de plage du château des Charmilles à Porcé en 1905

     

    Alphonse Pinguet devint architecte-voyer de la ville en avril 1866, ce qui le rendit auteur des dessins des égouts de la ville, et l’incita à quitter Nantes pour venir s’établir rue de L’Hôtel de Ville avec sa famille. Il fut chargé de l’édification de nombreuses demeures et immeubles en ville, essentiellement autour de la place Marceau, dont certains pour le comte de l’ancien ministre de la Guerre, Alphonse Henri d'Hautpoul, qui spécula lui aussi à Saint-Nazaire. ces chantiers lui permirent de réaliser les premières fouilles et observations archéologiques nazairiennes. La ville lui fit la commande en 1875 de plans pour la transformation de l’ancienne minoterie en un théâtre de 700 place. Les plans furent exposés à la librairie Blanchet, où les Nazairiens se percèrent, la ville voulait créer une société par actions afin de mener à bien le projet, mais se montra incapable de le faire. Le théâtre ne vit pas le jour. En 1877, la municipalité lui fit la commande des Halles en 1877. Le bâtiment en fonte, est construit suivant la même méthode que les annexe précédemment mentionnées, la fonte remplaçant le bois, ce qui permet le transport sur un autre site de cette structure, en 1936, depuis le centre-ville jusqu’à son empalment actuel à Méan-Penhoët.

    Entre autres commandes notables, citons : la chapelle funéraire de la famille Bord ainsi que celle de la famille Delzieu, et quelques autres au cimetière de la Briandais, l'école (de garçons) de Saillé en 1882, toujours existante, et qui a conservé son aspect originel[2].

     

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    Plaque sur la chapelle Delzieux

     

     

    On lui confia le commandement des sapeurs pompiers de Saint-Nazaire, et il s'illustra particulièrement durant dans la nuit du 3 au 4 avril 1868 durant l’incendie dans le Port du paquebot La Floride, et avait organisé en 1870 un service d’ambulance à Saint-Nazaire. En 1875 il fut le sous directeur de section locale des Hospitaliers Sauveteurs Breton. Il reçut le vénéralat de la Loge l'Etoile des Deux-Monde vers 1872.

    Il fit parti de la commission chargée de trouver un local pour les cholériques en novembre 1884, et en 1887, il fut chargé de l’édification des immeubles entre la vieille-ville et le bassin.

    Alphonse Pinguet était membre de la Société française pour la conservation des monuments historiques et réfuta quelques-unes des affirmations de Léon Maître en question d'archéologie (lui-même en conflit avec René de Kerviler) en s'appuyant sur les observations du sol nazairien qu'il avait pu faire durant ses chantier[3].

    Sa mort, soudaine, fut relatée dans Le Phare de la Loire du 9 janvier 1888 : « On nous écrit de Saint-Nazaire, le 7 janvier : Ce matin à onze heures, dans la rue de Pornichet, monsieur Alphonse Pinguet, architecte-voyer de la ville, était à faire tracer une tranchée avec son fils et le nouvel entrepreneur des travaux d’égouts, lorsqu’il s’affaissa sans prononcer une parole, On s’empressa autour de lui, mais en vain, et monsieur le docteur Griffon du Bellay[4], appelé en toute hâte, ne put que constater le décès. Monsieur Pinguet, âgé de 55 ans, souffrait depuis quelque temps d’une maladie de cœur. Monsieur Pinguet était un homme instruit et laborieux. Il sera généralement regretté. »

    Il fut enterré au cimetière de La Briandais, en présence du sous-préfet Planacassagne ; du secrétaire de sous-préfecture s Bousseau ; de René de Kerviler ; du docteur Griffon du Bellay ; du conservateur des hypothèques Trévédy ; de Henri Duval, président de la chambre de commerce ; de presque tout le corps municipal ; d’un détachement des sapeurs-pompiers ; de messieurs Simon et Breton, officiers du génie ; de l’inspecteur primaire Labeyrie, etc. Le maire de Saint-Nazaire, Fernand Gasnier, fit le discours au cimetière. Sa sépulture a été dessinée par lui.

     

    Durant la séance du Conseil municipal du 22 janvier 1888, on établit l’annonce pour la recherche d’un successeur à Alphonse Pinguet, avec un traitement de 5.000fr l’an. Le 26 octobre suivant, le Conseil vota un secours de 600 fr à sa veuve.

     

    Sa mère décéda le 30 décembre 1892 ; sa veuve mourut à Nantes le 12 septembre 1897 ; elles furent toutes deux inhumées avec lui au cimetière de la Briandais.

     

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    [1] A propos d’Alcide Bord et de Porcé : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/13/le-chateau-de-porce-a-saint-nazaire-premiere-partie.html

    [2] Relevé par la Région Pays de la Loire https://www.patrimoine.paysdelaloire.fr/linventaire/detail-notices/IA44003808/

    [3] Cf. Congrès archéologique de France : séances générales tenues à Nantes en 1886)

    [4] Biographie du docteur Marie-Théophile Griffon du Bellay : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/06/un-explorateur-a-saint-nazaire-6141851.html

  • Le général Marquet

    Parmi les familles qui marquèrent en leur temps Saint-Nazaire, il convint de citer la famille Marquet, dont est issu le général Georges Marquet.

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    Georges Marquet, recevant la réédition des armes de soldats druzes au Djebel el-Druze en 1925.

     

    Les vieux Nazairiens ont encore le souvenir de la villa des Morées[1], vaste demeure en U aux allures de manoir Louis XIII dans un parc avec dépendances autrefois à la Villès-Martin, face à l'Estuaire, à l'angle de la rue des Cormorans et du boulevard Albert Ier, où elle occupait l'emplacement des trois villa qui se trouve aujourd'hui là, plus exactement au niveau du n°85, nommée Océane, (celle sise au 86 a été baptisée Villa des Morées en son souvenir). De la Villa des Morées, aucune image ne nous est parvenue, mais son souvenir éthéré, surtout de son décors intérieur aux murs couverts de boiseries, meublé en Louis XIV et Louis XV, de consoles en bois dorés à dessus de marbre, avec, dans sa salle à manger dans le style Renaissance, garnie de faïences anciennes, avec un grand aquarium sur un empiétement de ce style, qui était la curiosité du lieu, et une importante collections de meubles, tapis, armes et objets syriens et algériens .

    Cette histoire débute sous les hospices d’un homme dont on a aussi oublié la mémoire, et cela à tort, Octave Fidière des Prinvaux, (Versailles le 3 mai 1855 - Pau le 2 mai 1904), le beau-frère de Gustave Bord[2], critique d’art, qui incita plusieurs des ses amis collectionneurs et artistes à venir séjourner à Saint-Nazaire, et à s’y établir. Nous avions, dans notre article consacré à la villa Minne, déjà eut l’occasion de reparler de cet homme de grande culture[3]. Octave Fidière des Prinvaux était entre autres ami de Henri-Georges-Léopold Marquet, (Sens 5 décembre 1843 - Saint-Nazaire 9 février 1931), sculpteur des monuments historiques, officier d'académie, à qui il fit découvrir notre ville. Fils du suisse de la cathédrale de Sens, Henri Marquet avait débuté sa carrière à l’âge de 18 ans sous les ordres d’Eugène Viollet-le-Duc, qui l’avait remarqué sur le chantier de restauration de Notre-Dame de Paris ; il avait ensuite œuvré à la cathédrale de Sens, l’église Saint-Martin d’Aillant-sur-Tholon, en 1867, mais aussi sur les chantiers de création d’églises de style romane, comme la basilique Notre-Dame d'Afrique en 1872, et quelques autres en Algérie jusqu’en 1896, où de style gothique telle que l’église Saint-Antoine-de-Padoue du Chesnay en 1897. Outre la pierre, il sculptait le bois, et réalisa des meubles et des décors intérieurs d’églises et de châteaux.

    Marié avec Marie Amélie Joséphine Lotz, (Chaintreaux 1848 – Saint-Nazaire 29 décembre 1930), il eut pour enfants[4] :

    1. Henri-Georges-Justin-Nicolas, (Sens 8 août 1868 - Paris 7ème arrondissement, 19 mars 1932), dont nous allons parler plus particulièrement ;
    2. Emile-Jules-Ernest-Antoine, dit Antonio, né à Sens 25 janvier 1870, maître d'armes, sculpteur ; marié le 7 octobre 1893, à Sens, avec Blanche-Pauline-Hyacinthe Renard ; remarié le 13 janvier 1923, à Paris 18ème, avec Madeleine Antoinette Noël ; d’où, du second lit :

    a. Agnès.

    1. Blanche-Marguerite, (1878 – 1964), épouse de Pierre Joudrin, (1867-1947), pharmacien à Saint-Nazaire, rue de l’Océan, juge au tribunal de commerce en avril 1926, tout deux inhumé au cimetière de La Briandais dans le caveau Marquet.

     

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    Portrait de Pierre Joudrin par Alexis de Broca, (74x60), © Ville de Saint-Nazaire.

     

    Georges Marquet, sortit sergent de l’Ecole spéciale militaire en 1890, sous-lieutenant aux Tirailleurs algériens le 1er octobre 1891, lieutenant le 1er octobre 1893. Il intégra la Justice militaire au 1er conseil de guerre d'Oran en 1894, comme substitut du rapporteur, puis substitut du commissaire du Gouvernement du 9 janvier 1895 au 31 mars 1995. Il épousa le 25 mai 1895, à Oran, Séraphine-Emilie Commandeur, (Oran 1er avril 1868 - Oran 10 janvier 1958), riche propriétaire de domaines agricoles. Lieutenant officier instructeur à l’Ecole supérieur de guerre le 22 octobre 1895, puis au 130ème régiment d'infanterie à l’Ecole de guerre le 23 octobre 1895, au 102ème le 20 août 1896, le 130ème le 30 septembre 1898. Il eut une fille : Napoléonne-Marcelle, née en 1900. Il retourna en Algérie au 2ème régiment de tirailleurs algériens le 20 nombre 1900, y fut aussi substitut du capitaine rapporteur près du 2ème conseil de guerre de la division d'Oran du 8 mars 1901 au 5 mai 1902. Il fit un stage au groupe de batteries montées de la division d'Oran du 6 mai au 15 juillet 1902 avec grade de lieutenant de première classe, puis au régiment des tirailleurs algériens, au 2ème chasseur d'Afrique du 16 août au 27 septembre 1902, il quitta l'Algérie et devint capitaine au 15ème régiment d'infanterie le 30 décembre 1902, puis au 10ème le 18 1904. Affecté à l'état-major du 19 corps pour y accomplir le stage de deux ans prescrit par la Loi du 20 mars 1880, il entra comme stagiaire au service géographique de l’Armée le 24 novembre 1905, il accomplit une période d'instruction au bataillon d'artillerie de la 1ère division de cavalerie du 15 mai au 15 août 1906. Il fit affecté à l’état-major de la 30ème division à Avignon le 29 septembre 1909. Il fut fait chevalier de la Légion d'Honneur le 12 juin 1910, et fut appelé à l’état-major du Ministère de la guerre avec le général Goirand, il fut envoyé au Maroc comme chef de bataillon, il rentra en France en 1914 à la déclaration de guerre, commandant de régiment, puis de bataillon il reçut une blessure à Tracy-Leval, ce qui lui valut la Croix de guerre. Après rétablissement, il fut envoyé au Maroc pour commander la colonne de Casbahbella, comme adjoint de la subdivision de Zadla, avec le grade de lieutenant-colonel d'infanterie et fut promu au grade d'officier de la Légion d'Honneur. Il y fonda deux postes,puis demanda à retourner sur le front, et y commanda, à partir du 18 décembre 1917, le 171e régiment d’infanterie, avec lequel il se distingua pour avoir, durant 7 jours, conservé ses positions sous le bombardement et les attaques ininterrompus, faisant échouer l’attaque du 4 avril 1918 d’une division allemande, qui subit des pertes plus sanglantes, (citation à l’ordre des armées du 6 juin 1918). Le régiment reçut fourragère aux couleurs de la croix de guerre, et eut deux citations Avec le le capitaine Lhuillier, Georges Marquet reçut les pénitentiaires allemands à La Capelle. Il commanda un temps un régiment mixte de tirailleurs et de zouaves en Pologne, et combattit avec Weygand lors de l’attaque russe contre la Pologne, puis fut nommé à la mission interalliée en Posnanie. Retourné en France avec le grade de colonel, en poste à Rennes[5], il fut chargé en mai 1920 de mener à la caserne gendarmerie du Teilleul, une enquête à propos du meurtre par empoisonnement perpétré par le gendarme Le Borgne sur sa femme[6]. Il fut à l’origine d’un service des fiches de gendarmeries. Il divorça de son épouse, par jugement du tribunal de première instance d'Avignon le 27 janvier 1921. Sa fille, décéda peut après, et fut inhumée au cimetière de La Briandais.

    Apprécier pour ses capacités de commandement objet de la confiance et de l’affection de ses hommes, il fut nommé en cette même année 1921 au commandement de la 65 R. I. de Nantes. Envoyé en Syrie en 1923.

     

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    Au Djebel el-Druze en 1925.

     

    Les Druzes s'étant révoltés, sous la conduite du Sultan al-Atrach, (1891-1982), contre les troupes mandataires, révolte qui perdura jusqu'en 1927, aujourd'hui nommée en Syrie " Révolution nationale ", il combattit dans le Djebel el-Druze, et défendit la citadelle de Damas du 18 au 20 octobre 1925 durant les émeutes qui eurent lieu dans la ville ; puis, le 5 décembre 1925, il  prit d’assaut Hasbaya[7], cité libanaise qui avait été prise par les Druzes le 27 novembre précédent, et libéra le Sud-Est du territoire libanais.

    general Marquet

    Entrée dans Hasbaya, 5 décembre 1925.

     

    general Marquet, Hasbaya

    Ville et citadelle de Hasbaya avant la prise par les Druzes.

     

    Ces actes lui valurent d'être nommé commandant des troupes du Grand Liban, la médaille d’honneur de 1ere classe du Mérite libanais par arrête du 23 décembre 1925, « Prenant son commandement où de fort contingents de rebelles mettaient en péril sa sécurité de l’Etat, a galvanisé ses troupes par son énergie, sa confiance et sa bravoure. Les a personnellement conduites à l’assaut de la position fortifiée de Hasbaya qu’il a enlevée après un rude combat. A complétement disloqué les bandes ennemies et libéré le territoire libanais. A bien mérité du Grand Liban », et le 25 décembre il reçut sa quatrième citation à l’Ordre de l’Armée, avec croix de guerre des Théâtres d'opérations extérieurs.

    Il fut promu général de brigade en 1926.

     

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    Signature du général Marquet.

     

    Il prit le commandement du groupe de subdivision n°2 de la 11ème région le 25 février 1927, attaché à l’amiral Préfet maritime à Lorient. A l’occasion des fêtes pour l’inauguration du monument du débarquement des troupes étasuniennes à Saint-Nazaire, en juillet 1926, la ville organisa une exposition d’art ancien et moderne au collège de jeune filles, rue de La Villes-Martin ; Henri Marquet prêta une crédence à deux corps de style Louis XIII, qu’il avait sculpté, et des fauteuil Louis XIV et une bergère Louis XV, alors que Georges prêtât une commode Louis XIV et deux fauteuils Louis XV, ainsi que des objets syriens.

    Le 26 mars 1927 il assistât avec sa sœur aux festivités organisée pour les noces de diamant de leurs parents, dont une messe prononcer le matin en l’église Saint-Nazaire. Il dirigea les manœuvres de l’instruction à Lorient, les 22, 23, et 24 avril 1927. Le 9 février 1928 il reçut la cravate de commandeur de la Légion d’Honneur. Cadre de réserve le 8 août 1929 il quitta le commandement du groupe de subdivision n°2 de la 11e région et partagea sa vie entre la villa des Morées et Paris.

    Il fut président d’honneur de la société d’escrime de Saint-Nazaire en 1929 et membre de la société d’archéologie d’Ille et Vilaine, et se distinguait dans les rues de Saint-Nazaire, par les chaleureuse poignées de mains qu’il adressait aux anciens combattants qu’il croisait, s’enquérant de leur santé et de leur famille. Il épousa à Paris le 29 avril 1930, dans le 18ème arrondissement, Adèle-Anna-Victorine de Murat, (Paris 18ème 16 avril 1871 - Paris 1948), fille de l’architecte Antoine-Victor de Murat, (1840-1895), épouse divorcée le 31 décembre 1929 de Paul-Alphonse Delange, dont elle avait une fille, Madeleine.

    Les décès de ses parents le laissèrent particulièrement affecté.

    Le général Marquet décéda à Paris 7ème le 19 mars 1932. Son corps fut transporté par train à Saint-Nazaire, le cercueil recouvert du drapeau français.

     

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    L’Ouest-Eclair du 25 mars 1932.

     

    De la gare, un char funèbre le conduit en l’église Saint-Nazaire, suivit d’une foule nombreuse, regroupant toute la liste des notables nazairiens de l’époque. Les cordons du poële furent tenus par le docteur Diet, Cambiaggio, directeur de la Compagnie Générale Transatlantique, le docteur Tholon, et le lieutenant-colonel de Saint-Julien, du 65ème régiment d’infanterie, représentant le général comandant du 11ème corps d’armée à Nantes. Le cortège fut précédé par une délégation de la caserne de gendarmerie de Saint-Nazaire, du peloton mobile de la Garde républicaine, et des délégations des Anciens combattants.

    Après la messe de funérailles, son corps fut déposé à La Briandais, sans discours.

     

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    Tombeau de la famille Marquet, dont les sculptures furent réalisées par Henri Marquet

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    Incapable de s’entendre avec son beau-frère et sa belle-sœur pour la conservation de la Villa des Morées, son épouse fit procéder à la vente du mobilier aux enchères le mardi 7 juin 1932, durant laquelle on se pressa, puis de la mise en vente de la maison qui trouva acquéreur en juin 1933[8].

     

     

     

    [1] Du nom des rochers faisant face à la pointe de La Villès-Martin, où se trouve depuis une balise homonyme construite en 1756.

    [2] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/13/le-chateau-de-porce-a-saint-nazaire-premiere-partie.html

    [3] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2020/09/02/la-villa-minne-6260718.html

    [4] Henri-Georges avait eu de sa cousine germaine, Eléonore Leotet, lingère, Henri-Paul (Sens 27 janvier 1867 – 26 octobre 1959), légitimé sous le nom de Gauchet en 1869, par l’époux de se mère, Charles Gaucher, ouvrier boulanger.

    [5] Il y habitait 12 rue Brizeux.

    [6] Le Borgne avait commis ce crime pour épouser sa maitresse, la jeune fille d’un collègue, il fut condamné à mort.

    [7] Ville du Liban, chef-lieu du caza du même nom, dominée par une citadelle, à 58 km au sud-est de Beyrouth. les Français l'avaient délivrée une première fois des Druzes en mai-juin 1860.

    [8] Le décor était composé de mobilier Louis XV, renaissance, provençale, Louis XIV, de meuble en bois dorés, de tapis d’orients, gravures, cadres, lustres, panneaux de bois sculpté, d’un aquarium avec support renaissance dans la salle à manger, collection d’assiettes anciennes, lits à baldaquin, meuble dessus de marbre, boukhara tapis, tapis syriens, meubles syriens et algériens, armes arabes, coussins d’orient, le notaire Labour fut en charge de liquidation de la succession. La vente de la maison fut assurée par l’agent immobilier J. Lemesle, qui s’en fit sa publicité durant plusieurs semaines.

  • Acquisition de La Tour du Commerce par la mairie de Saint-Nazaire

     On le murmurait depuis quelques temps, on ne pouvait pas assurer que cela se ferait, les élections avaient mis en péril le projet, cela n’était pas au programme des candidats, mais c’est officiel ce matin : la Mairie de Saint-Nazaire fait l’acquisition de La Tour du Commerce et de son logis.

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     Initialement construites au 18ème siècle, par l'ingénieur de Marine Michel Alexandre Magin, sur financement des commerçants de la ville, d’où son nom, les bâtiments actuels datant du 19ème, la Tour est la troisième en réalité ; en effet, la première fut édifiée à partir de 1756 et achevée 12ans après sur financement des commerçants maritimes de Nantes, Paimboeuf et Saint-Nazaire, d'où son nom ; la seconde en 1829 ; et l'actuel date de 1856.

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    La Tour du Commerce dans sa première version, ici nommée incorrectement tour d'Aiguillon, sur la Carte géométrique de l'Entrée de la Rivière de Loire par l'ingénieur de la Marine et de l'Académie de Marine, Michel Alexandre Magin, en 1757.

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    Seconde tour sur le cadastre de 1829

     

    Ce feu fixe, « tour de paradis », fut éteint en novembre 1898 avec son remplacement par celui de la Tour de Kerlédé et des feux de Porcé. La Tour fut conservée pour servir d'amer. Ouverte à tous les vents, elle devint un lieu d'excursion pour les nazairiens et les touristes qui montaient les 176 marches pour voir d'en haut l'ensemble de l'estuaire, le marais de Brière et la Presqu'ile. En novembre 1930 on y voyait encore les noms de soldats étasuniens qui avaient marqué leur passage sur les murs, (cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 22 novembre 1930).

     Le logis, surélevé d’un étalage vers 1880, vit durant 150ans défilé des générations de gardiens, en charge de La Tour du commerce, puis de Kerlédé et des feux de Forcé, et de leurs familles. C’est dans ce logis que naquit, le 10 janvier 1877, Pitre Grenapin, résistant et maire de Saint-Nazaire.

     En mai 1938 la tour devint un radio phare, par déplacement du poste émetteur initialement situé au Ford de Villès-Martin, l'accès fut alors interdit au public et le haut modifier.

     Les Phares et Balises, avaient vendu l’ensemble à un particulier en 2006. L’entretient de la Tour entraîna des frais que celui-ci n’arriva pas à couvrir totalement, et en novembre 2019 le site fut proposé à la vente, dans une annonce qui ne précisait pas qu’en plus du logis, la tour était comprise dans l’état. Deux acheteurs contactèrent la mairie pour savoir ce que l’acquisition aurait comme impacte sur leur vie. Ils furent surpris d’apprendre qu’ils ne pourraient pas raser la tour (oui l’un d’entre eux y songeait), et qu’un arrêt de péril était envisagée, la tour menaçant de s’effondrer si des travaux n’étaient pas entrepris, (en cas d’effondrement, une dizaine de maisons seraient impactée, ainsi que le centre de Bonne Anse et la route de la Côte d’Amour). C’est monsieur David Samzun, maire de Saint-Nazaire, qui a proposé l’acquisition par la ville. La restauration va s’inscrire dans le projet de restauration et de mise en valeur des villa Ker Louis (centre de Bonne Anse), et le pavillon de plage du château des Charmilles, (villa bordant la plage de Porcé). Ajoutons que la Tour a conservé son « mobilier technique », ce qui est important pour la compréhension de son fonctionnement et une future muséographie.

     

     Agréable surprise et soulagement pour les Nazairiens, inquiets depuis plusieurs mois de ce qu’allait devenir ces bâtiments chers à leur cœur, qui démontre que la labellisation de la Saint-Nazaire, comme Ville et Pays d’Arts et d’histoire, n’est pas « un label en l’air » (sic !), et que monsieur David Samzun, accompagné de l’équipe de l’administration municipale en charge des patrimoines, a aujourd’hui conscience des enjeux future en matière de patrimoine historique et culturel, de leur pérennisation et de leur transmission. Une évolution et des travaux sur l’ensemble de la ville qui auront une véritable visibilité d’ici deux ans. Après des années d’inertie, de décisions calamiteuses de la part de plusieurs municipalités successives, ce tournant dans la politique municipale est une très bonne chose pour les Nazairiens. L'acquisition a été faite pour la somme de 590.000 euros, plus 10.000 euros de frais.

     

     

  • La villa Minne

     La villa Minne, avec deux N, et non un seul comme la plaque de la voirie le comporte, se situe chemin de la Villa Mine, au Petit-Gavy. Elle domine la plage plage de Virechat[1].

     

     Le nom de cette villa était le surnom de la maîtresse du comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky.

     

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    Vue aérienne de la villa Minne © Denis Pillet, Patrimoine des Pays de la Loire.

     

     Cette demeure et sa dépendance principale ont été construites en moellons, avec toiture débordante en tuile mécanique, dans un vaste parc dont l’accès se fait par un portail de style japonisant dans le goût des années 1895-1900. Le commanditaire en fut Emile Joly, commerçant en tissus et habillements, dont la famille, qui fit fortune à Saint-Nazaire dans ce négoce, arriva en notre ville en 1855. 

    Quand on observe ses façades, on s'aperçoit qu'elle a été érigée en trois campagnes. En effet, il y eut une première maison, large de deux travées, dont le plan au sol de la partie centrale est très semblable à ceux de la villa Victor[3] à Porcé, construite en 1896. Il y a des similitudes comme la porte d’entrée étroite, la disposition des services ; le salon avec bowwindows vers l’Estuaire dans un pavillon qui se détache de l’ensemble ; la salle à manger avec porte fenêtre. La Villa Mine a cependant des volumes plus importants, et est en miroir par rapport au plan de la Villa Victor. La maison fut agrandie d’une travée, correspondante à un cinquième de de sa longueur actuelle, vers le Nord, et de deux cinquième vers le sud par l'adjonction d'un pavillon à grandes baies vitrées qui abrite une salle haute d'un étage avec un escalier majestueux, galerie, et une remarquable cheminée en grée émaillé brun-jaune, de style art-nouveau. Cette salle est désignée aujourd'hui comme « le grand hall ». A l’époque d’Emile Joly, elle comportait déjà des écuries et logements d’employés dont les dimensions ne nous sont pas connues, mais qui sont ont été probablement agrandis après 1909.

    La villa Minne, malgré sa composition de volumes assemblés, offre une homogénéité d’aspect extérieur, des volumes à taille humaine, tout en étant majestueux, décorés sans une faute de goût. Mais surtout cette demeure possède les qualités de l’idéale des celles de collectionneurs du début du 20ème siècle : elle se situe à proximité d’une ville, dans une campagne vallonée, au sommé d’un promontoire, regardant vers le large, telle une acropole de beauté.

     

    Emile Joly avait repris le magasin de son père, et vivait quelque peu au dessus de ses moyens. En 1900, il fit faillite, et alla travailler dans le magasin de son frère Constant. Il décida de louer sa maison du Petit-Gavy au comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky.

     

    Le comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky :

     Le comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky, dit Benoit de Tyszkiewicz, appartenait à une famille Lituanienne, possédant des biens en Ukraine et en Pologne, dont la noblesse remonte au commencement du 15ème siècle. Le nom Tyszkiewicz signifie « fils de Tyszko » (forme lituanienne de Thimothé). Investie de grande charges en Lituanie et en Ukraine, alliée au dernier roi de Pologne, cette famille était la plus opulente de Lituanie.

     

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    Armoiries des comtes Tyszkiewicz-Logoisky :

    d'azur à l'étoile d'or soutenue d'un croissant du même ; à la bordure aussi d'or.

     

     En 1839, Henryk Tyszkiewicz-Logoisky, (1792-1854), reçu de l’Empereur Nicolas Ier de Russie le titre héréditaire de comte, ce qui dans la noblesse russe s’étend à tous les descendants, et se transmet par tous les fils. Henryk en eut cinq ; l’avant dernier, Michal, décédé de tuberculose à Paris le 27 avril 1853, fut le père de Benedykt, né le 11 décembre 1852 au château de Niemież en Lituanie, issu de son union avec sa cousine Wanda Tyszkiewicz, (1833-1860), elle aussi décédée de tuberculose. Inhumés à Paris, leur tombeau est orné d’un haut relief de Henri Chapu, sculpteur dont Octave Fidière des Prinvaux, beau-frère de Gustave Bord, propriétaire du château des Charmilles à Porcé[2], réalisa le catalogue raisonné en 1894. Lié à Octave Fidière des Prinvaux qui était conservateur au musée du Luxembourg. C'est par son intermédiaire que Benedykt découvrit la corniche nazairienne.

     Orphelin, Benedykt fut confié à son grand-père maternelle, Benedykt Tyszkiewicz, mécène et collectionneur, propriétaire du château de Czerwony Dwór en Lituanie, maréchal du gouvernorat de Kaunas, qui lui donna le goût de la voile.

     

     Entré à sa majorité en possession de l’immense fortune de son père, Benedykt mena une vie internationale, mêlant voyages, sports nautiques, archéologie égyptienne, (ce qui le fit mécène du Louvre), photographie et bibliophilie, (plus de 10 mille livres). Il épousa en 1874 à Boston avec Claire Elisabeth Bancroft, (1857-1883), fille d’Edward Payson Bancroft, (1823-1865), et de Clara Elizabeth Peabody, (1826-1882), qui avait elle aussi été éduquée à Paris, et dont la famille maternelle était une lignée d'armateur. De leur union naquirent :

    1° Benedikt Jan (11 décembre 1875 à Paris - 18 février 1948 à Paris), marié à Róża Branicki d’où

    1a° Benedykt, (2 août 1905 – 6 février 1956), qui ne laissa pas de postérité de son mariage avec la princesse Eleonora Maria Aniela Alberta Renata Karolina Radziwiłł, qui se remaria avec Roger de Froidcourt ;

    2° Edwarda dit Edouard, (23 avril 1880 à Paris - 10 juillet 1951 à Cracovie), marié à Adela Dembowska, d’où :

    2a° Marija, Adelė Elžbieta

    2b° Edvardas Tiškevičius (né le 6 avril 1911 à Cracovie, époux de Sofia Zdienskasdont il eut trois filles ;

    3° Elżbieta Maria, (2 décembre 1882 à Funchal, ile de Madère - 2 décembre 1969  à Valduce, Belgique),  mariée 1er avec Stanisław Witold Plater Zyberk, (mort à Paris le 18  novembre 1926) ; 2ème Vladislav Jezersky ; d’où quatre enfants.

     

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     Benedykt et sa famille en 1882.

     

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    Portrait de Benedykt par Benque & Co. à Paris © Rijksmuseum Amsterdam.

     

     En 1876, âgé de 24 ans, Benedykt commanda aux chantiers Augustin Normand au Havre, une goélette, restée mythique, baptisée sous le nom de Żemajtej, (qui était celui de son domaine en Lituanie, hérité de sa mère), primée à l’exposition universelle de Paris en 1878, mais qui est passée à la postérité sous celui de Velox, nom que lui donna son second propriétaire le baron de Bellet, (ancien député des Alpes-Maritimes), qui l’acheta en 1879. Initialement, Benedykt prévoyait de faire un tour du monde sur son yacht, mais en raison du déclenchement de la guerre russo-ottomane en 1877, il n'a atteint que Gibraltar et Alger. Il resta intéressé cependant au yachting, et fut jusqu'en 1881 membres du comité des régates de Nice.

     

     L’autre passion de Benedykt était la photographie, il développa son intérêt durant son escale forcée en Algérie, pays qu’il parcouru en tous sens. Il exposa ses clichés à Philadelphie en 1878. Il se mit alors à voyager de part le monde, photographiant et exposant à son retour en Europe. En plus de ses prises de vues en extérieur, il s’exerça à la mise en scène en atelier. Devenu membre du Paris Photo-Club, son travail fut reconnu internationalement, et il reçut pour celui-ci la médaille d'or à la Grande exposition industrielle de Berlin en 1899. L’essentiel de sa production a été détruite pendant la Première-guerre-mondiale, mais le musée Nicéphore Niepce à Chalon-sur-Saône en conserve une grande part.

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    Autoportrait au fusil.

     

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    Portrait de son fils aîné.

     

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    Portrait de sa fille.

     

     De son grand-père maternel, il avait hérité une collection de tableaux comprenant des Canaletto, Bacciarelli, Czechowicz, Wańkowicz, Rustem, ainsi qu’un nombre important de tapisseries et de pièces d’orfèvrerie.

    Amateur chasses, bon tireur, possédant une meute, cela le liait d'autant plus à Octave des Prinvaux qui s'adonnait lui aussi à ces sports, avait une petite meute, et était dans le même club de tir aux pigeons à Paris.

     

    Veuf, dès 1883, Benedykt eut plusieurs liaisons. Vers 1895, il se passionna pour une femme mariée, Marie-Augustine de Beaumont d’Autichamp, (Paris 8 juillet 1847 - 8 février 1923 Lhoumois), épouse de Henri-Joseph-René Aymer marquis de La Chevallerie, (Poitiers 24 septembre 1841 - 18 octobre 1897 Lhoumois), avec lequel elle avait été unie le 14 décembre 1865.

    La comtesse était la fille du propriétaire du château de La Roche Faton à Lhoumois, Marie-Gabriel-Joseph de Beaumont comte d'Autichamp, (Écouflan 24 juin 1813 - 21 janvier 1902 Lhoumois), qui jugeait négativement que sa fille soit séparée d'un gendre qu'il appréciait. Père et mari laissèrent Augustine sans moyens de subsistance. Augustine, surnommée Minne, vécu des largesses de son amant. Celui-ci, loua d'abord la villa d’Emile Joly, dès 1900. Augustine ayant été déshéritée par son père au profit de ses enfants, Thérèse Aymer de La Chevalerie, (1er novembre 1866 – 1946), et Louis-Amblard-Charles-Gabriel Ayme marquis de La Chevalerie, (Lhoumois 15 novembre 1871 – 17 septembre 1931 Lhoumois), Benedykt acquit pour Augustine la maison qu’il louait pour elle, l’agrandit et la baptisa Villa Minne. Dans le pavillon, dit « grand hall », furent installées des vitrines le long de la galerie qui occupe deux-côtés de la salle, dans lesquelles fut placée une surprenante collection de souliers de célébrités, dont Marie-Antoinette et Napoléon… Il faut cependant préciser qu'Augustine s'entendait très bien avec ses enfants. Sa fille vient vivre à la Villa avant 1911.

     La déclaration de guerre en 1914 fit retourner dans leurs domaines tous les membres de l’aristocratie russe. Augustine suivit son amant, et vendit alors la villa à Marcelle Beraud. 

    Le coup d’état de décembre 1926 qui instaura la dictature en Lituanie, finit d’ébranler sa fortune, il vit ses châteaux confisqués. Retiré à Menton, il y décéda le 13 mai 1935. Il repose au cimetière de Cimiez à Nice.

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    Tombeau au cimetière de Cimiez.

     

     

    Madame Beraud revendit la Villa Minne en 1920/21 à l’ancien maire de Saint-Nazaire, l’industriel Louis Brichaux, dont la descendance conserve encore la propriété, (elle fut réquisitionnée pendant l'occupation par l'armée allemande).

     

    [1] Virechat est l’abréviation déformée de Virée-Richard.

    [2] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/13/le-chateau-de-porce-a-saint-nazaire-premiere-partie.html

    [3] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2018/06/21/la-villa-victor-a-porce-6061203.html

     

  • Henri Moret

    Henri Moret, tout nazairien qui s’intéresse à l’histoire de Saint-Nazaire connait ce nom, connait son œuvre intitulée « Histoire de la Ville de Saint-Nazaire et de la région environnante ». Mais qui est Henri Moret, et savez-vous qu’une rue lui doit son nom ?

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    Signature de Henri Moret © Archives municipales de Saint-Nazaire.

     

    Voici quelques éléments :

     

    Henri-François-André Moret est né à Nantes le 13 février 1854, au 36 quai de La Fosse, dans un immeuble aujourd’hui remplacé par le musée de l’imprimerie, non loin de la Capitainerie, à une époque où les cabarets et la prostitution étaient l’économie nocturne de ce quartier.

    Son père, André, né à Nantes le 8 octobre 1824, était gabarier. Lui-même était le fil d’un portefaix prénommé François, et d’une bretonne vivant au faubourg Saint-Jacques à Paris, Egalité Orière. Ses frères étaient eux aussi gabariers à Nantes.

    Sa mère, Françoise Devay, née en 1820, était journalière. Elle décéda le 16 mai 1857.

    André Moret se remaria le 27 février 1860 à Sainte-Luce-sur-Loire, avec Victorine Rousseau, née à Sainte-Luce-sur-Loire le 31 décembre 1828, cultivatrice sur l’exploitation de ses parents au Trois-Chênes. Après ce second mariage, André parti vivre avec sa famille reconstituée à Chantenay et se fit marin.

    Eduqué dans un milieu modeste et profondément républicain, Henri Moret fit un service militaire de cinq ans en raison du tirage au sort institué par la Loi Cissey qui rendait aléatoire la durée de celui-ci. C’est à Vincennes, aux services administratifs, qu’il fit son service. Il y resta deux années supplémentaires afin de se former et de pouvoir postuler un emploi dans l’administration, devenant de fait élève de l'Ecole Militaire. Ses années à Vincennes le marquèrent profondément, le château, où il travaillait, l’impressionna durablement.

     

    Retour en Loire-Inférieure :

     

    Après sept années au service de l’administration militaire, Henri obtint un poste d’employé à la Préfecture de Nantes. Il y prit un logement quai de La Fosse, renouant avec ses premières années. C’est à Nantes qu’il épousa, le 26 janvier 1880, sa cousine, Louise-Marie Moret, née à Nantes le 26 août 1858, tailleuse, fille d’Auguste-François Moret, gabarier, et de Louise Blin, ménagère, domiciliés rue Fourcroy.

    De cette union naquirent :

    1. Henri Louis né le 20 janvier 1881 à Nantes, marié à Nantes le 8 aout 1905 avec Jeanne-Noémie-Elise Loisel :
    2. Louise-Henriette, le 12 novembre 1882 à Nantes, mariée le 16 mai 1902 à Nantes avec Guillaume Marie Lefloch ;
    3. Yves-Georges, (Saint-Nazaire 24 mars 1892 – Aiguillon 1er septembre 1966), employé à la Banque de France ; marié à Bordeaux avec Marie-Joséphine-Benjamine-Marguerite Coste le 6 septembre 1915.

     

    L’installation à Saint-Nazaire, la rue de Vincennes, et l’incendie des Archives :

     

    En 1884, Fernand Gasnier, fraîchement élu maire, chercha un nouveau secrétaire de marie qui soit républicain. Son choix se porta sur Henri Moret, qui devient rapidement un habile collaborateur, et monta en grade jusqu’au poste de secrétaire en chef. Il s’établit au 11 rue de Nantes, où son épouse ouvrit un commerce de mercerie.

    Henri profita de ses fonctions pour consulter les archives et entreprendre la constitution du manuscrit d’une histoire de la ville.

     

    Désireux de posséder un chalet dans la campagne nazairienne, comme tous les notables et bourgeois de la ville, il fit l’acquisition d’une parcelle sur la colline dominant la Villès-Martin. La maison était isolée au bout d’un chemin vicinale, et fut longtemps la seule sur cette hauteur désertique, se distinguant au loin par une haie de cyprès, et surtout par un chêne que Moret avait planté, et qui fut longtemps l’unique haute futée de la zone. La maison avait été baptisée « Ker Vincennes », écrit en grande lettres sur un portique enjambant le portail. Les amis de la famille Moret, mais aussi les gens se baladant le dimanche sur la colline, prirent l’habitude de dire qu’ils allaient « à Vincennes », si bien que le nom devint celui de la rue par la suite tracée[1].

     

    Gasnier était notoirement connu pour pratiquer des détournements de fonds par l’intermédiaire des chantiers de travaux de voiries. Face à l’annonce d’une enquête, les bureaux de la voirie, situés au second étage de l’immeuble « Guilouzo[2] », 8 rue des Quatre-Vents, mitoyen du jardin de l’Hôtel de ville et de l’immeuble du journal La Démocratie, prirent feu le matin du 14 février 1893 vers 6 heures[3]. Les bureaux de la Caisse d’Epargne se situaient au 1er étage, et le siège de l’Octroi au rez-de-chaussée, avec un second local qui servait de salle de conservation pour les Archives de la mairie. Le panache de fumée s’éleva haut au-dessus de la ville. La fumée rendait impossible l’entrée dans l’immeuble, cependant les employés de la Caisse d’épargne forcèrent le passage afin de vider le contenu du coffre et évacuer les registres. Les pompiers municipaux arrivèrent, brisant les fenêtres pour pouvoir arroser l’intérieur du bâtiment.  Henri arriva presque immédiatement, suivit du préposé en chef de l’Octroi, Bertho, et du directeur de La démocratie, Lucciardi. N’écoutant que son courage, Henri pénétra dans l’immeuble enfumé pour en ressortir les archives municipales qui se trouvaient dans le local du rez-de-chaussée. Il en sorti d’abord les registres et les plans du cadastre, qui furent entreposés à La Démocratie, puis rentra plusieurs fois dans l’immeuble enfumé pour en sortir registres, cartons et chemises. Les pompiers municipaux installèrent des pompes dans le jardin de l’hôtel de ville, et furent rejoint par le 64ème piquet d’incendie avec sa pompe, bientôt arrivèrent ceux de la Compagnie Générale Transatlantique avec leur pompe à vapeur, qu’ils installèrent dans la rue de l’Hôtel de ville. Henri Moret continuait à sortir des archives municipales ; il finit par tomber inanimée dans l’immeuble. C’est Lucciardi qui le secouru, sous le regard du sous-préfet, Pizot, des adjoints Serin et Lusseaud, du président du Tribunal, Bouhier, du procureur de la République, Lelepvrier, et d’autres huiles locales restées sur le trottoir à contempler le spectacle avec tout le quartier.

    Cet acte de bravoure lui valut une médaille d’argent du travail, une mention honorable sur son dossier, par décret présidentiel le 28 avril 1895 ; puis on le fit officier d’Académie et officier d'administration territorial.

     

    L’exile et le retour :

    Fernand Gasnier ayant perdu la municipalité, celui-ci se replia sur son mandat de député. On épura alors l’administration municipale en éjectant tous ceux qui avaient été ses proches collaborateurs. Moret fut alors renvoyé en juillet 1896 car considéré comme « l'homme de Gasnier ». Il appela l'ancien maire à l’aide. Fernand Gasnier écrivit à Hippolyte Durand-Tahier pour qu’il plaide à la faveur de Moret pour une réembauche, en argumentant sur le fait qu'il se retrouvait sans revenu avec trois enfants, dont un en bas âge [4].

     

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    Une lettre de Fernand Gasnier du 29 juillet 1896 à Hippolyte Durand-Tahier à propos de la situation de Moret, rédigée à Saint-Nazaire sur papier de la Chambre des député, © Archives municipales de Saint-Nazaire.

     

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    Lettre de Henri Moret en date du 3 septembre 1896 adressée à Hippolyte Durant-Tahier © Archives municipales de Saint-Nazaire

     

    Moret fut reclassé comme percepteur des contributions directes à Saint-Georges de Noisné (Deux-Sèvres) en septembre 1896[5]. En 1902 il était en poste à Riaillé, où il rédigea un « Précis élémentaire du service de perception, à l'usage des nouveaux percepteurs, des aspirants à la fonction et des commis de percepteurs », publié en 1902 par l’imprimeur Oberthur à Rennes, et qui connut trois rééditions. Muté au Croisic à la veille de la première-guerre-mondiale, il y rédigea « Le Croisic, précis historique sur la presqu'île croisicaise et la région environnante », publié en 1917 par l’imprimeur Oberthur, ouvrage hélas d’une qualité médiocre.

     

    Mis en retraite, il retourna vivre à Saint-Nazaire avec son épouse en 1921[6], au seconde étage du 21 rue Neuve, dans un appartement doté d’un grand balcon s’ouvrant sur l’estuaire.

     

    Henri Moret, Saint-Nazaire

    L’immeuble du 21 rue Neuve côté Estuaire et quai de Kervilers (aujourd’hui quai des Marées)

     

    Il devint membre de la Ligue Antialcoolique fondée par Campredon[7]. C’est alors qu’il décida d’entreprendre l’écriture de « Histoire de Saint-Nazaire et de la région environnante », une importante somme parue en deux tomes de 500 pages chacun, en février 1925 à Nantes à l’Imprimerie du Commerce, et illustré par le peintre nazairien Alexandre Auffray[8]. Henri Moret avait hésité à écrire ce précis historique, ne voulant pas entrer en conflit avec maître Galibourg[9] qui en 1904 avait annoncé son attention d’écrire un ouvrage sur le sujet, mais qui finalement ne fit rien[10]. Cette publication lui valut l’inimitié de maître Galibourg qui quelques mois encore avant son décès pestait à propos de Moret en dénigrant dans la presse son ouvrage.

    A la parution de ce monument qui est aujourd’hui la seule source complète et détaillée concernant l’histoire nazairienne d’avant 1925, du fait de la destruction d’une grande partie des archives municipales durant les bombardements, la municipalité fit l’acquisition de deux exemplaires[11]… La Chambre de commerce fut généreuse dans ses achats en faisant l’acquisition de vingt-cinq exemplaires, tout comme le Conseil général[12].

     

    Henri Moret décéda le 6 mai 1928 dans son appartement du 21 rue Neuve. Il fut enterré le 9 mai 1928 au cimetière de Toutes Aides.

     

    L’oubli et la redécouverte :

     

    « Les morts sont silencieux », dit un vieux proverbe. On pourrait ajouter aussi que « le bien ne fait pas de bruit ». La mort d’Henri Moret passa inaperçue ou presque. L’Ouest Éclair publia des condoléances en trois phrases à sa veuve le jour de son enterrement, titrées cependant : « L’historien de Saint-Nazaire est mort ». Le Courrier de Saint-Nazaire publia une courte nécrologie le 12 mai 1928 fournissant quelques détails biographiques.

    Son Histoire de Saint-Nazaire resta une référence, dans les années qui suivirent. Marthe Barbance dans sa célèbre thèse consacrée au port et à la ville, le cite toutes les cinq pages comme source. On le citait aussi régulièrement dans la presse pour sourcer une information historique, mais le style de son écriture, déjà un peu passée, et qui aujourd’hui la rend pénible à certains, par ses formulations d’ancien style, peut parfois être incomprise. Ainsi, le 21 septembre 1933, dans un article non signé, le stagiaire en charge de remplir un trou, affirma qu’Henri Moret avait écrit qu’on avait déplacé le Dolmen à un emplacement différent ! Le président du Syndicat d’initiative, André Guillet, adressa une lettre le 28 septembre suivant au Rédacteur en chef, l’informant de l’absurdité du propos. En fait, Henri Moré explique dans son ouvrage, que depuis son arrivé en 1892 à Saint-Nazaire, la ville s’est étendue jusqu’à Dolmen qui était auparavant en périphérie dans un pré. La phrase est cependant écrite dans le style un peu alambiqué de la Belle époque, ce qui prête à confusion. Mais par cet article absurde et par de mauvaises lectures, on a entendu parfois la municipalité et ses élus affirmer aux Nazairiens que le Dolmen était sur roulettes…

     

    La guerre ravagea Saint-Nazaire, détruisant au passage les bibliothèques, dispersa sa population qui ne revint pas totalement, peut d’exemplaires de l’ouvrage de Moret consacrés à Saint-Nazaire, et dont le tirage avait été initialement limité, survécurent à cette période. On n’en retrouva que chez quelques lettrés dont les maisons de Méans ou de Saint-Marc avaient échappées aux bombes et aux pillages. Fernand Guériff, qui possédait les deux tomes s’en servit pour la rédaction de sa propre histoire de Saint-Nazaire publiée, en deux parties elle aussi, en 1960 et 1963. Pour toute la période d’avant 1925, abondamment détaillées, sa source est presque exclusivement Henri Moret, presque mot à mot parfois. Il est cependant regrettable de Guériff ait recopié certains passages de travers, propageant de fausses informations à plusieurs endroits[13].

    La destruction des exemplaires, leur non-republication, firent que Moret fut oublié, et ces écrits présentés comme quelque chose qui aurait été publié au 19ème siècle. Guériff eu la force d’avoir vécu plus longtemps que lui, et il occupa la scène historique nazairienne durant des décennies.

    On ne s’indigna pas quand en 1972 sa tombe fut l’objet d’une reprise de concession et ses restes jetés dans la fosse de l’ossuaire. Plus personne ne savait qui avait été Henri Moret et combien la ville de Saint-Nazaire lui doit.

     

    En 1998, un éditeur dont la mère était native de Saint-Nazaire, et qui possédait un exemplaire original de l’histoire de Saint-Nazaire de Henri Moret, réédita la publication, profitant que l’œuvre était tombée dans le domaine public. Une seconde réédition fut réalisée en 2007, suivit de plusieurs autres, en 2011, 2014 et 2020.

     

    Henri Moret est injustement oublié par les Nazairiens, y compris dans les plaquettes du label ville d’art et d’histoire, et l’on espère que la municipalité aura à cœur de réparer cette injustice et de donner un jour prochain son nom à une rue de la ville ou un une salle, comme elle l’a fait pour Barbance[14] et Guériff[15] qui, nous le répétons, ont puisé très largement dans ses ouvrages.

     

     

     

    [1] Cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 20 juillet 1929. La maison fut détruite dans les années 1960.

    [2] Du nom de l’ancien maire qui l’avait fait construire durant le Second Empire :

    [3] Lire à ce sujet Le Phare de la Loire du 16 février 1895 qui donne de nombreux détails.

    [4] Lettres non signées, mais identifiables à la mention du nom de beau-père de Gasnier, conservées aux Archives municipales de Saint-Nazaire dans le fond Hillemand.

    [5] Lettre du 3 septembre 1896 adressée à Hyppolite Durand-Tahier, Archives municipales de Saint-Nazaire, fond Hillemand.

    [6] Cf. nécrologie publiée dans Le Courrier de Saint-Nazaire le 12 mai 1928.

    [7] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/02/une-figure-nazairienne-louis-campredon-6140914.html

    [8] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/04/alexandre-auffray-peintre.html

    [9] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/11/02/maitre-alexandre-galibourg.html

    [10] Cf. préface de ladite publication.

    [11] Cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 21 mars 1925.

    [12] Cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 17 octobre 1925.

    [13] Fernand Guériff a recopié de nombreuses publications inexactement, donnant parfois pour source des articles de presse inexistants dans les journaux qu’il indique, confondant les revues et les auteurs. La plus fameuse de ses confusions a alimenté l’absurdité légende de la Petite-Californie-Bretonne, véritable honte pour notre ville : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/03/19/saint-nazaire-petite-californie-bretonne-6137164.html

    [14] Son nom a été donné à une salle de l’université.

    [15] Une place sans bâtiments au bord de l’Etang du Bois-Joalland porte son nom depuis 2017.

  • L’église de Saint-Marc-sur-Mer

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    L’église de Saint-Marc, avec son clocher à la française et son chevet à la bretonne, est, par sa silhouette, l’un des bâtiments les plus charmants du quartier de Saint-Marc-sur-Mer. On devine de loin cette église, mais sa situation à flanc de coteau, dans la courbe d’un large virage, son esplanade pentue encombrée de voiture, et surtout deux grands tilleuls la dissimulent au regard du passant. Cette église est aussi la plus mal connue des Nazairiens, car elle est dans un quartier à vocation balnéaire, dont la population, pour l’essentiel, n’y vit pas à l’année, et plus encore, en périphérie du centre du charmant bourg blottie contre la plage qui porte initialement le nom de Saint-Marc, et qui au fil des décennies fut rebaptisée plage du gorille, en raison de la forme d'un rocher aujourd’hui érodé, et depuis une vingtaine d’année, plage de Monsieur Hulot, en souvenir du personnage principale que Jacques Tati filma ici les extérieurs des vacances durant l’été 1951. Nous l’avions déjà écrit dans un article précédent concernant le Château de Saint-Marc[1], la station balnéaire se nommait à l’origine Le Crépelet ; c’était un village de vignerons situé au bas du coteau où se trouve l’actuelle église, et c’est parce qu’il y avait initialement une chapelle dédiée à Saint Marc au bord de la plage, à l’emplacement de la Place de la Chapelle, plus exactement devant le jardin du n°36, que la station balnéaire fondée durant le Second Empire pris son nom actuel.

     

    L’ancienne chapelle Saint-Marc :

     

    Il y avait donc une chapelle, depuis des temps immémoriaux, au bord de la plage. On ne connait de celle-ci qu’un dessin de Charles Beilvaire, publié le 19 mars 1932 dans Le Courrier de Saint-Nazaire figurant un bâtiment qui comportait à l’intérieur une poutre portant le millésime 1643 d'après un relevé effectué en 1790.

     

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    La chapelle sur la Carte géométrique de l'Entrée de la Rivière de Loire par l'ingénieur de la Marine et de l'Académie de Marine, Michel Alexandre Magin, en 1757.

     

    Longue et basse, très simple, orientée à l’Est, avec une porte double à l’Ouest surmonté d’un clocheton en arche comportant une seule cloche, trois fenêtres au nord, une porte basse et deux fenêtres au Sud, vers la plage, dotée d’une sacristie au nord, et accompagné d’une croix de bois sur un large piédestal remontant à la fin du 17ème siècle ou au début du 18ème ; croix qui existe encore et surveille les voitures que l’on parque ici. Cette église était le siège de la frairie de Saint-Marc et servait de lieu de culte ordinaire à la population environnantes éparpillées en plusieurs villages et hameaux, (Le Crépelet, Béac, Verdun, La Ville Cresneau, La Villès Molé, Berrien, Le Grand Pez, Le Prasilun, La Fin, etc.). Seule bâtiment à proximité de cette chapelle, une ferme en longère posée en parallèle à l’Est, qui lui était dépendante et fournissait le revenu à son chapelain, qui en 1790, était André Bertho, natif de Saint-André-des-Eaux. L'inventaire de 1790 précise qu'il y avait messe le dimanche et jours de fête, et qu'il y avait quatre chasubles. A proximité était une source canalisée en fontaine dont on buvait l'eau dans l'espoir de luter contre les fièvres et les maladies des yeux.

    Saint Marc bénéficiait chaque 25 avril, jour de la saint-Marc, d’une procession qui faisait venir à une messe spéciale à 11h toute la population de la frairie, mais aussi de celle de Gavy et Saint-Sébastien. Les fidèles se réunissait au bas de la Colline du château[2], la contournait en direction de la plage. Après la messe, ils piqueniquaient sur des tables devant la ferme et sur le sable de la plage, puis rentraient chez eux. Il était de coutume que ceux de Gavy prennent une chaloupe pour se faire déposer à Port-Charlotte. La chapelle passa la Révolution sans encombre malgré la suppression des cultes et la nationalisation des biens du clergé. Elle fut rendue au culte au moment du Concorda en 1801, et fut desservie jusqu’en 1857, date de la création de la Paroisse de l’Immaculée, qui vida les chapelles séculaires des banlieues de Saint-Nazaire, et en entraina la ruine, même si celle de Saint-Marc fut toujours considérée comme une chapellenie, et donc encore desservie occasionnellement jusqu’en 1870. La création de la station balnéaire, après la création à la demande de la Société de Sauvetage d'une station de sauvetage avec un canot en février 1866, pour lequel la Ville concéda gratuitement en juin suivant un terrain pour y construire le hangar sur la plage, entraina la création de la station balnéaire, dont le rapide développement touristique fit qu’on eut besoin d’un lieu de culte avec des messes et un service régulier. Le cimetière actuel y avait été fondé par mademoiselle Marie-Joseph Mollé[3], le 1er janvier 1885. L’Evêché et la Préfecture fondèrent la paroisse Saint-Marc le 1er juin 1888.  La chapelle étant dans un état de délabrement avancé, le conseil de fabrique vota la construction d’une église, loin de la chapelle qui devait laisser place au développement de la station, au bourg même du Crépelet.

     

    L’église de Saint-Marc :

     

    L’église de Saint-Marc fut rapidement construite. Edifiée sur les plans de l'architecte Henri van den Brouk, (grand-père d'Odette du Puygaudeau), elle comporte un clocher porche, sommet d'un coq girouette perché sur une croix, accolé d'une tourelle d'escalier qui va jusqu'au niveau de la tribune, une porte latérale, et dix-sept baies, dont cinq dans le chœur. Sa bénédiction solennelle eut lieu le 22 décembre 1889. elle fut rapidement décrite comme « si grande en hiver, si petite en été ».

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    Sortie de la messe vers 1903.

     

    Elle est constituée d’une simple nef, précédée d’une entrée, le chœur se trouve orienté au Nord, car il fut décidé que l’entrée se ferait face à la route en contre bas, par la base du clocher, ce qui oblige à gravir un escalier pour y entrer, et allonge sa façade Sud en lui procurant un aspect étroit disgracieux de part de cake oublié sur un coin de table à la fin d’un banquet. Une sacristie se trouve à l’Ouest, elle est séparée du jardin du presbytère par un petit chemin. Le sentiment d’étroitesse est accentué quand on passe l’entrée sous le clocher, et il se trouve alors suivit d’un sentiment d’écrasement. En effet, la majesté du lieu, songé comme une ouverture à la Foi après le passage du chameau dans le chas d'aiguille, a été totalement détruit par la construction d’une tribune démesurée et pensée dans aucun bon sens en 1964. La mairie, qui possède le bâtiment depuis 1905, (le presbytère restant propriété de la paroisse), avait accordé à l’abbé Jaunin, curé de 1953 à 1967, la construction de cet étage démesuré de 50 places, car à l’époque l’église se trouvait incapable de contenir tous les fidèles qui y venaient l’été. cette structure est posée trop bas et pire s'abaisse encore de 60 cm à la moitié.

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    L'intérieur de l'église, sous la tribune, en avril 2020, © L.O.M.

     

    Une fois passé sous ce plafond oppressant, on retrouve les proportions initiales qui sont, elles, gracieuses et dotées d’un décor sobre et élégant sous une voûte lambrissée en coque de navire renversée.

     

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    La nef et le chœur en avril 2020, © L.O.M.

     

    L’église de Saint-Marc a en effet bénéficié du goût réfléchit de deux de ses curées.  D’abord l’abbé Jean Blois, (1858 – Saint-Marc en Nazaire 18 décembre 1926)[4], ancien professeur au Petit Séminaire de Guérande, curé de Saint-Marc de 1904 à sa mort. Celui-ci a doté le clocher de quatre cloches bénies par monseigneur Rouard, évêque de Nantes. Celle nommé Maria Anna, fut refondue en 2010. L’abbé Blois fit l’acquisition en 1912 d’une chaire en chêne de style Louis XVI finement sculptée de panneau figurants les quatre évangélistes et de fleurons et des palmes, et un panneau gravé du mot « Veritas », au-dessus d’un trophée composé des tables de la Loi, d’une page d’Evangile, et d’une trompe de la renommée. Cette chaire a depuis été déposée à même le sol du chœur). Son successeur, l’abbé Guisnel[5], curé de 1927 à 1955, dès 1935 il fit remplacer l’autel du chœur en pin peint en blanc par l’actuel en chêne, ajouta des lambris bas du même bois tout au long de la muraille, avec, enchâssés de chaque côté de l’entrée des coquilles de bénitier. Il modifia aussi en parti le dallage, en faisant ajouter entre les carreaux de terre cuite sous les bancs, (qui remplacent les chaises paillées qui meublaient  autrefois), les carreaux de ciment qui tracent l’allée traversante, et celle menant à la porte latérale, et ceux qui délimitent le chœur. Il y avait aussi initialement deux autels de chaque côté de l’entrée, mais ils furent supprimés, ainsi que le chemin de croix et toutes les statues en plâtre du 19ème [6], par l’abbé Jaunin.

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    Intérieur de l'église vers 1905

     

    En 1955, l’abbé Guisnel fit maroufler sur la voûte du chœur la peinture qui représente la pêche miraculeuse, (l'auteur nous en est inconnu, mais il pourrait s'agir d'un couple nantais nommé Leroy).

     

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    L'a tribune, en avril 2020, © L.O.M. ; on l’ose espérer qu’elle sera un jour détruite et que l’on rendra à cette ravissante église son aspect d’avant le massacre Jaunin.

     

     

    La tribune actuelle date, nous l’avons écrit plus haut, de 1964. On y accède par deux escaliers, le premier est par de la nef via une porte percée exprès, conduisant à un escalier construit dans un appentis disgracieux et débouche par l’une des baies baie reconvertie en passage ; le second par l’escalier du clocher, depuis le hall, à droite en entrant, en passant sous la plaque posée en 1920, faisant liste des paroissiens morts et disparus au champs d’honneurs durant la première-guerre-mondiale. Cet escalier qui conduisait dès la construction à une tribune qui aurait dû être doté d’un orgue, à la particularité de comporté dans sa chaux qui le crépi, des graffitis allant de 1926 à 1968. Ce sont essentiellement des patronymes typiquement nazairiens, (Cavarro, Lejeune, Berthaud, Gouard, Fuelle, Noblé, etc.), mais aussi une bicyclette et des personnages des années 1930, (un enfant au béret qui fume, un cycliste sur son vélo, des trois policiers), mais aussi une figure du Diable, avec sa fourche et sa queue pointue...

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    Exemple de graffitis, © L.O.M.

     

    La tribune se décompose en deux plateaux pentue descendant vers le chœur. 

     

    L’église avait été dotée dès sa construction de vitraux, qui n’étaient en réalité que des verrières claires peintes de fleurons en grisailles. Ces verrières furent détruites par le souffle d’une bombe tombée sur la place la nuit du 28 juin 1942. La déflagration avait été si forte que les porte de l’église avaient elles aussi été arrachées. On les remplaça par du verre martelé, dont sont encore pourvues les quatre baies latérales qui éclairent la tribune. En 1964, nous l’avons écrit, l’une des baies fut transformée en accès pour la nouvelle tribune, quatre autres virent leur ouverture entravée par la nouvelle tribune. En 1977, onze des baies furent doté de vitraux non figuratifs, interprétables de mille façon pour celui qui s'ennuie durant l’homélie, aux tons jaunes, orangés et rouges, signé par Colin Leroux à Béac.

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    Signature sur l'un des vitraux, © L.O.M.

     

    A la suite du Concile Vatican II, on suréleva le chœur d’un planché haut de trois marches, on y plaça une table de chêne pour servir la messe, et l’on posa la chaire à même ce nouveau planché. Le baptistaire, qui se trouvait à l’entrée de l’église, fut placé devant le chœur.

     

    Le dernier curé résident fut le père Pierre Brétéché, (1928-2020), parti en 1997. Depuis 2005 l’église est rattachée à la paroisse Saint-Pierre de l’Océan.

     

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    Le chevet en avril 2020, © L.O.M.

     

     

     

     

    [1] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/25/le-chateau-de-saint-marc.html

    [2] A propos de cette colline et de l’origine de son nom : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/01/18/l-allee-du-chateau-a-saint-marc-6121661.html

    [3] Née le 20 octobre 1845 à la ferme du Petit Verdun propriété de ses parents laboureurs, elle avait hérité, n’était qu’une fille, des terres les plus proche de l’océan, et qui étaient déconsidérées mauvaise pour l’agriculture. La mode des bains de mer fit décupler la valeur de ces terrains considérés ingrats, la rendant riche, et lui permettant de jouer un rôle dans l’urbanisation du quartier.

    [4] Il repose au cimetière de Saint-Marc dans le caveau des religieux de la paroisse. La plaque qui le mentionne comporte des dates erronées.

    [5] Lui aussi ancien professeur au Petit Séminaire de Guérande, il dirigea l’école libre de garçon de Saint-Marc, qui comportait une institutrice, mademoiselle Boya, âgée de 53ans en 1927, et le prêtre instituteur Bouché. Cette école était préférée des habitants de Saint-Marc, dès son ouverture en septembre 1927, si bien que l’école public du bourg perdit à son profit les trois quarts de ses élèves, et ceux malgré le fait que l’école publique était gratuite et fournissait, livres, blouse, et sabots. Le Travailleur de l’Ouest entama le 26 novembre 1927, une attaque contre cette école, à travers un article de quarante-huit alinéas, non signé, l’accusant de faire concurrence à l’école publique, prétendit que l’abbé Guisnel avait fait pression pour cela sur les familles, prétendit que l’école était à une distance non réglementaire du cimetière, que l’eau qu’on y consommait était impropre, (ce qui fut contredit par une analyse de l’institut Pasteur), et qualifiant son personnel « d’illettrés ». En réalité, le problème était que les habitants de Saint-Marc étaient en conflit avec la municipalité qui imposait aux enfants un règlement d’école trop strict et avec des exigences que la population qualifiait de « chinoiseries ». Par ailleurs le maire François Blancho, dès son élection, cherchait à empêcher les processions et autres manifestations religieuses, ce qui déplaisait à cette population fortement religieuse. Quelques mois auparavant, le curé de Méan avait écopé d’une amande de 1 Fr. pour en avoir organisé une, et s’était retrouve emprisonné durant 48h pour avoir refusé de la payer ; l’affaire était remontée jusqu’au Conseil d’Etat et au président Poincaré en mars 1927, et l’on se battait régulièrement à coup de poing devant l’église Saint-Gohard place Marceau. Le prédécesseur de l’abbé Guisnel, l’abbé Blois, avait bravé en juillet 1925 à l’occasion de la Fête Dieu l’arrêté municipal Blancho, et en avait écopé 25 centimes d’amande. L’abbé Guisnel eut aussi à faire aux délires d’une pauvre folle, la demoiselle Berthe, qui lui asséna des coups de parapluie en 19 février 1936, au prétexte que sa T.S.F. la dérangeait. L’abbé n’ayant pas de radio chez lui, et ne tolérant pas qu’on le frappa, porta plainte contre la femme.

    [6] La Vierge, Jeanne d’Arc, saint Michel, Jésus au Sacré Cœur, saint Joseph, sainte Anne, un petit saint Pierre sur son trône, et deux très petit saints Antoine et François