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Chroniques de Saint-Nazaire - Page 3

  • Trois esclaves à Saint-Nazaire

    Le commerce triangulaire, instauré par Louis XIV, est à l’origine de la Traite négrière française. Nantes fut l’une des villes à vivre de ce commerce qui consistait à envoyer des marchandises manufacturées sur les côtes africaines, où ils étaient entre autres échangés contre des humains à la peau noire que les marchands magrébins[1] ou les chefs de tribus côtières de l’Ouest de l’Afrique, mais aussi de l’Est, avaient réduits en esclavage après les avoir capturés dans les terres. C'est ici un point abominable de l'Histoire africaine, durant des siècles des peuples des l'Afrique-Noire vendirent aux étrangers, qu'ils soient du Maghreb, du Proche-Orient ou de l'Europe de l'Ouest et des colonies d'Amérique, des prisonniers de guerre issus d’ethnies rivales, des victimes de razzias, et des personnes jugées coupables d’adultères. Si un jour vous visitez le mémorial de la Route des esclaves à Ouidah au Benin, vous y apprendrez qu'au marché aux esclaves qui s'y tenait, que « 1 pipe valait 5 esclaves, 1 bouteille d’alcool 10 esclaves, 1 canons 15 hommes ou 21 femmes ». On vous y montrera aussi l'emplacement de l'Arbre de l'oublie, un arbre disparu autour duquel les femmes faisaient neuf tours, et les hommes sept, en signe d'adieu à leur continent. Embarqués de force sur les navires occidentaux, ils étaient ensuite vendus dans les colonies d’Amérique, territoires du Royaume sous administrations privées, où ils se retrouvaient presque tous réduits à des travaux de força dans les plantations, plus rarement à des travaux ménagers dans des conditions de traitement pas plus enviables.

    Les esclaves des colonies du Roi de France ne connurent jamais l’Europe, à quelques exceptions, dont Saint-Nazaire fut témoin pour trois cas, car, outre le fait que Saint-Nazaire était déjà durant l'Ancien-Régime l'avant port de Nantes, le commerce triangulaire nantais rayonna aussi sur Saint-Nazaire, Paimboeuf, et Le Croisic.

     

    Philippe :

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    Acte de Baptême de Philippe, Archives de Saint-Nazaire

     

    Le 9 mai 1728, le père André Moyon, curé de Saint-Nazaire, donna le baptême à un adolescent « d’environs 16 ans », natif de l’Illinois. Désigné comme « négre » dans l’acte, était né esclave dans ce qui était alors encore une colonie française d’Amérique rattachée à la Louisiane, et administrée par la Compagnie d'Occident.

    Son arrivée en Bretagne est due probablement au transport de son propriétaire, qui, même si l’acte ne le précise pas, doit être celui qui se désigne comme son parrain, messire Philippe Anthoine Préval, major de milice, dont l’épouse devait certainement être celle qui fut la marraine de l’adolescent, la demoiselle Elisabeth Duplessis. Aucun des deux n’était de Saint-Nazaire ou de sa région, pas plus que les huit autres signataires de l’acte, dont le révérent père Simon de Rennel, « prédicateur missionnaire », c’est-à-dire un jésuite, originaire de Lorraine, qui fut chargé de présenter Philippe au père Moyon. On peut donc supposer qu’il s’agit d’un débarquement depuis un bateau venu des colonies d’Illinois, qui attendait dans la rade la marée haute pour débarquer à Nantes. Attendu que Philippe avait presque l’âge adulte, le père Moyon appliqua la procédure de l’interrogation sur les mystères de la Foi catholique, afin de déterminer s’il avait reçu l’enseignement nécessaire pour intégrer la communauté catholique.  L’ayant trouvé « suffisamment instruit », le père Moyon donna le baptême.

     Donner le baptême aux esclaves était dans les colonies françaises un acte relativement rare, car si on leur enseignait l’évangile, leur condition d’esclave paraissait incompatible avec la qualité de Chrétien qui sous entendait une condition de liberté en terre chrétienne. On accordait le baptême à ceux-ci quand ils étaient transportés dans les états de la Couronne de France, car seuls les catholiques pouvaient y vivre, et que suivant une ordonnance du roi Henri II, toute personne entrant dans les états de la Couronne devenait automatiquement le sujet du Roi de France, ils étaient donc automatiquement libres. Cela fut nuancé plus tard avec la notion de nationalité, qui obligea à demander la naturalisation au cours du 18ème siècle, mais dans l’absolu, celui qui naissait dans les colonies françaises était sujet français, même s’il était esclave et dépendant des règlements de la colonie. Dans cet univers hypocrite où des territoires étaient conquis au nom d’un souverain, mais administrer par des sociétés qui étaient libres de pratiquer les Lois qu’elles désiraient, du moment qu’elles ne furent pas en contradiction avec les édits royaux, les ailes du paradoxe étaient peu écartées.

    Philippe, à qui on n’accorda pas de nom de famille, mais dont l’usage faisait de lui un Préval, fut donc libéré par le Droit au moment où il posa le pied sur le sol de Bretagne. Cependant, s’il avait plu à Philippe Anthoine Préval de le renvoyer en Illinois ou dans n’importe quelle colonie, Philippe aurait retrouvé immédiatement sa condition d’esclave, et aurait du bénéficier d’un acte d’affranchissement pour être réellement libre.

    Le nom de Préval se rencontre encore en Haïti, on peut donc supposer que Philippe-Anthoine Préval soit reparti aux colonies et que lui, ou sa descendance, se sont établis à Saint-Domingue après que le traité de Paris de 1763 céda l'Illinois à la Grande-Bretagne, et que les Préval d’Haïti sont de son sang, ou des descendants d’affranchis qui ont pris le nom de leur ancien propriétaire pour patronyme. Nous ne pouvons que supposer, car le destin de Philippe nous est hélas inconnu.

     

    Jean Louis :

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    Acte de Baptême de Jean Louis, Archives de Saint-Nazaire

     

    Philippe n’est pas le seul jeune esclave à se retrouver baptisé à Saint-Nazaire. Le 12 mars 1750, c’est un enfant « d’environ 12ans », natif de Guinée, que l’on a nommé Jean Louis, qui fut baptisé en l’église de Saint-Nazaire. Son propriétaire, désigné hypocritement comme son maître dans l’acte, comme s’il en était juste un valet, est le négocient, capitaine de navire et armateur croisicais, est Jean Bocandé[2], (Le Croisic21 avril 1704 - Le Croisic 14 février 1780), actionnaire de la Compagnie de Guinée, l'une des plus importantes sociétés de la traite négrière et du commerce triangulaire du pays nantais, fournisseur d’esclaves à l’île de Saint-Domingue. L’enfant fut certainement rapporté en cadeau à l’épouse de Jean Bocandé, née demoiselle Ursule Le Maugen, (Le Croisic 9 janvier 1703 - Le Croisic 9 décembre 1788). Il était en effet à la mode d’offrir « un négrillon » à sa femme, sa maitresse, ou à une dame de la noblesse dont on espérait une faveur. L’enfant était alors déguisé en page coiffé d’un turban, et servait de valet et de garçon de compagnie, généralement il avait charge des animaux de compagnie de la dame, et se devait de la distraire par ses jeux ou des pitreries. A l’âge adulte, débarrassé de son turban, revêtu d’une livrée, il était relégué comme valet pour monsieur, où devenait valet de pied pour la maison, chargé du vestiaire, summum du chic de l’époque. Pour un homme richissime comme Jean Bocandé, armateur négrier dont les navires accostaient à Paimboeuf, ce qui explique le choix de Saint-Nazaire comme lieu de baptême pour Jean Louis, il convenait de se plier à cette mode qui perdura jusqu’à la Révolution, car, outre madame du Barry à qui on offrit Zamor, la reine Marie-Antoinette reçu Amilcar, dont elle se débarrassa aussitôt en l’affranchissant et en l’envoyant comme son pupille dans une pension[3].

    Le destin de Jean Louis nous est inconnu, mais tout laisse à supposer qu’il fut le valet d’Ursule Bocandé, qui fut aussi sa marraine. Le parrain fut un Nazairien, René Galliot, sieur de Cran, (Saint-Nazaire 1693 – Saint-Nazaire 8 février 1772), avocat à la cour, sénéchal de Saint-Nazaire et de Marcein, subdélégué de l'Intendance à Saint-Nazaire et marguillier, membre de la confrérie Saint-Nicolas de Guérande[4]. Un homme considérable alors dans la petite ville. L’acte de baptême comporte aussi les signatures de quatorze témoins, membre des bourgeoisies de Saint-Nazaire et du Croisic, on y déchiffre notamment celles de Catherine-René Moyon, (1726-1795), épouse de Joseph du Bochet, (1722-1757), fille du seigneur des Boexières[5] ; de Jean-Olivier Kermasson, seigneur de Kerisac, (en 1689- Saint-Nazaire 18 mars 1754), notaire et procureur de la juridiction de Saint-Nazaire ; Un cousine, Jeanne Bocandé, épouse Guiheneuc, (Saint-Nazaire 18 novembre 1706  - Saint-Nazaire 27 octobre 1787), celle de Renée Walsh[6], (Saint-Nazaire 24 janvier 1697 – Saint-Nazaire 24 juillet 1782), d’une famille irlandaise implantée au Croisic et à Saint-Nazaire, parente de l’armateur négrier Antoine Walsh de Nantes actionnaire de la Compagnie de Guinée, Renée Walsh fut l’une des chevilles de l’équipée de prince Charles Stuart[7], dont l’époux, René Guisnel est aussi signataire ; on lit aussi la signature d’un Leray, autre cousin nazairien des Walsh… et une Nazairienne non identifiée, Geneviève Le Breton, qui l’on retrouve trois ans plus tard dans un autre acte de baptême d’esclave.

     

    Jean-Baptiste Ambroise :

     

     

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    Acte de Baptême de Jean-Baptiste », (étalé sur deux pages), Archives de Saint-Nazaire

     

    Le troisième et dernier esclave qui fut baptisé à Saint-Nazaire, le fut le 15 janvier 1753 « avec permission verbale de l’évêque de Nantes ». C’est Jan Baptiste Ambroise, « âgé d’environ 10ans », qui eut pour parrain Bonaventure-Ambroise Lorieux, sieur de La Mainguisserye, seigneur de Tréballe en Saint-Nazaire[8], (Saint-Nazaire 1er décembre 1720 - Saint-Nazaire 5 décembre 1782), avocat, époux de Julienne David de Drézigué, (sœur du maire du Croisic exécuté durant la Révolution), et pour marraine, celle à qui l’enfant était probablement destiné, Marie Masson, (Saint-Nazaire 6 juin 1728 - Saint-Nazaire 3 avril 1759), épouse du capitaine de navires marchands René Michon, (originaire de l’Ile d’Yeu), et sœur du capitaine de navires marchands Jean Masson, (Saint-Nazaire 19 septembre 1720 - Saint-Nazaire 12 avril 1786), signataire de l’acte. On retrouve comme autres signataires Renée Walsh et Jean-Olivier Kermasson ; le vicaire Sébastien Bureau de La Bessardière, par la suite recteur de la paroisse et premier maire de Saint-Nazaire ; et Geneviève Le Breton.

    Encore une fois nous ignorons ce qu’il advint de ce garçon, il semble être encore vivant à la mort de Marie Masson-Michon, décédée quelques jours après avoir mis au monde une fille, Marie-Anne Jeanne-Renée Michon vivante en 1767, mais rien ne prouve que René Michon, remarié en 1766 avec Marie Tourbe, dont il eut une descendance à Saint-Nazaire, où il décéda le 7 septembre 1813, ait gardé le garçon à son service. Il est possible que Jean-Baptiste Ambroise fût confié à Jean Masson ou qu’il soit décédé avant d’atteindre l’âge adulte. Il a cependant vécu un certain temps à Saint-Nazaire, car la mémoire nazairienne garde le souvenir d’un valet noir qui aurait vécu jusqu’à au moins ces 30 ou 35 ans en ville et qui de fait pourrait être Jean-Baptiste Ambroise.

     

     

    [1] Les magrébins, qu’on désignait comme « barbaresques », procédaient à la piraterie et réduisait à l’esclavage aussi des Européens, qu’ils proposaient généralement à la revente aux ordres de Saint-Jean de Jérusalem (chevaliers de Malte), ou à l’ordre de la Très-Sainte-Trinité pour la rédemption des captifs, (ordre des Trinitaires), ou à celui de Notre-Dame-de-la-Merci (ordre des Mercédaires). Cependant certains de ces captifs blancs finissaient au service des beys ou des sultans marocain ou ottoman, et les femmes jeunes dans les harems. Les noirs non vendus aux étrangers étaient cantonnés à des fonctions de serviteurs de conditions inférieures. Les plus jeunes pouvaient s’ils avaient de la chance d'être formés pour devenir soldats des armées des sultans, où pire, être confié à des moines coptes en Egypte, qui procédaient à leur châtrage, (un musulman n’ayant pas le droit de mutiler un homme), « opération » à laquelle peu d’enfants suivaient.

    [2] Il fut aussi conseiller du roi, miseur en titre de la ville et communauté du Croisic en 1756.

    [3] Zamor devint à la Révolution membre du Club des jacobins, inventa des pamphlets sur madame du Barry qui le renvoya de son service. Il s’en vengea en la dénonçant au Comité de Salut Public, la condamnant ainsi à mort. Emprisonné par les révolutionnaires, il subsista en jouant du violon dans des soirées, et décéda dans la misère, détesté de tous, le 7 février 1820. Amicar, devenu par volonté de la Reine Jean Amicar, fut à la Révolution pupille de la Nation, au titre de victime de l’esclavage, il décéda à l’âge de 14ans en mai 1896.

    [4] Le concernant, lui et sa famille, voyez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/27/la-famille-galliot-de-cran.html

    [5] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2014/06/12/famille-moyon-des-bouexieres-5389431.html

    [6] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/16/les-walsh-de-saint-nazaire.html

    [7] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/15/bonnie-prince-charlie-ou-the-young-pretender.html

    [8] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/10/03/la-seigneurie-de-la-treballe.html

  • Revue Histoire & Patrimoine n°99

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    La revue Histoire & Patrimoine, n°99 est en kiosque, mais, en raison de sa situation sanitaire, elle l'est dans un nombre restreint de points de ventes dont voici la lite :

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    Saint-Nazaire  La Civette – Tabac-Presse 4 place des 4 z’horloges 02 40 22 39 20
    Saint-Nazaire  Le P’tit Mousse – Tabac-Presse 8 place Athanase Laborde 02 40 70 50 02
    Saint-Nazaire Nonimag – MagPresse – Tabac-Presse 4 rue Ambroise Paré – Centre Commercial de Kerlédé 02 40 70 04 13
    Saint-Nazaire  SNC Richard-Guedou – Tabac-Presse 29 rue du Commandant Charcot – Saint-Marc 02 40 91 91 26
    Saint-Nazaire  Tabac-Presse – L’Immaculée 12 rue Ernest Lavisse – L’Immaculée 02 28 54 08 96
    Guérande  Le Havane – Tabac-Presse 13 boulevard Emile Pourieux 02 40 24 71 46
    Donges  Le Chiquito – Tabac-Presse 9 rue René Laënnec 02 40 45 22 38
    La Baule  1000 et Une pages – Kiosque de presse Place leclerc – Avenue du Général de Gaulle 02 40 66 39 82
    La Baule  Les Palmiers – Tabac-Presse 39 avenue Louis Lajarrige 02 40 60 38 78
    Mesquer (Quimiac)  Le Mannick – Tabac-Presse Place de l’Orée du Bois – Quimiac 02 40 42 56 03
    Saint-Joachim  Au Gagne Petit – Tabac-Presse 86 rue Joliot Curie 02 40 91 96 50
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  • Le Plessis / Le Plessis-Giffard

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    La seigneurie du Plessis, ou du Plessis-Giffard, était l’une des seigneuries secondaires de la paroisse de Saint-Nazaire, inféodée au vicomte de Saint-Nazaire, dotée de moyenne et basse justice. Le seigneur du Plessis devait en redevance annuelle au vicomte deux moutons et quatre truellées de froment.

    Cette seigneurie se composait du village du Plessis, composé de sept maisons rassemblées autour de ce qui est aujourd’hui la rue (impasse) Nicolas Copernic, et d’un manoir seigneurial était situé à flanc de coteau à l’emplacement du 25 Rue Charles Delescluze, face au hameau. Il était constitué d’un logis rectangulaire à un étage doté d’une tour carrée à l’Est, semblable au logis du château de La Saudraie à La Baule-Escoublac tant pour son architecture que pour sa disposition.  Situé dans un parc clos de murs d’une surface de 3 ha, il comportait à l’ouest une allée bordée d’arbres qui précédait une grille s’ouvrant sur la cour d’honneur. Les dépendances se situaient au sud.

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    Le manoir du Plessis-Giffard en 1924, dessin d'Alexandre Auffray.

     

    Quand Henri Moret le décrivit pour son ouvrage « Histoire de Saint-Nazaire », publié en 1925, le bâtiment avait perdu sa tour dont il ne restait que les fondations, et était fortement dégradé ; sa toiture d’ardoise avait été remplacée par du chaume. On ignore la date de sa destruction, mais elle a probablement eu lieu avant les bombardements. Cette demeure devait dater de la fin du 16ème siècle comme le laisse supposer la description faite par Henri Moret qui précise l’exitance au-dessus d’un écu sculpté identifiable comme celui de la famille Giffard du Plessis : d’argent, à la bande de sable chargée de trois mâcles d’argent. Elle avait subi plusieurs campagnes de transformation et de mutilation pour en faire une ferme après la Révolution. Le dessin réalisé par Alexandre Auffray nous laisse cependant penser que le bâtiment n’était cependant pas dépourvu de charme, et qu’une restauration aurait pu en faire une résidence charmante et élégante.

    Les villages de La Bernerie, (au niveau du 45 et 48 rue Charles Longuet), de La Berthauderie, (au croisement des rue François Villon et Robespierre), et de La Belle-Hautière, faisaient partie de cette seigneurie.  Il faut aussi ajouter un fief situé sur la côte, le Clos du Plessis, constitué de vignes, à l emplacement de la Villa Nelly. 

    L’histoire des seigneurs du Plessis-Giffard est mal connue en raison de la destruction des archives seigneuriales à la Révolution. On a cependant identifié comme seigneurs :

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    Guillaume Giffart, chevalier, seigneur du Plessis-Giffart, vivant en 1469.

    On trouve ensuite un François Giffart qui pourrait être son fils

    Puis, Olivier Giffart vivant en 1561, peut-être fils du précédent.

    La famille Giffard resta propriétaire de la seigneurie du Plessis jusque vers 1636, date après laquelle elle passa par achat à Jan de Rochereul.

     

    plessis-giffard, saint-nazaire-, rochereuil, de-la--haye-de-silz, Le-Pouceau-de-Rollinveau, I° Jan de Rochereui[1], seigneur de Cleuz-Coyau, notaire royal et procureur de la sénéchaussée de Guérande, sénéchal de Saint-Nazaire, obtint d'échanger sa redevance seigneuriale du Plessis contre des baulles de marais salants, (AD44 E536) ; époux de Janne Robert, d'où :

    1° Françoise, baptisée à Guérande le 9 novembre 1615 ;

    2° Jan, baptisé à Guérande le 20 juillet 1617 ;

    3° Thomas, baptisé à Guérande le 16 novembre 1621 ;

    4° Aubin Rochereul, baptisé à Guérande le 1er octobre 1623 ;

    5° Georges, qui suit ;

    6° François, baptisé à Guérande le 13 juillet 1627.

    II° Georges Rochereul de Cleuz, né à Guérande le 8 juin 1627, baptisé le 13, enterré le 27 avril 1688 à Guérande, seigneur du Plessis-Giffard, de Cleuz-Coyau, et de Cleuz-le-Propre par achat à Julien Proust ; il était conseiller du Roi, et procureur au siège royal de Guérande, ces charges lui permirent d'assumer le titre d'écuyer, mais ne lui procura cependant pas la noblesse, ni à ses héritiers, ainsi il fut débouté de noblesse en 1669 lors du recensement de Guérande ; époux de Catherine Huré, d'où :

    1° René, baptisé à Guérande le 7 septembre 1655

    2° Jeanne, dame de Cleux, baptisée à Guérande le 6 février 1659, mariée le 5 février 1687 à Guérande avec René Begaud, sieur de Kervoyer ;

    3° Catherine, baptisée à Guérande le 27 juin 1660, inhumée le 3 juillet 1667 ;

    4° Georges, né à Guérande le 24 avril 1661, baptisé le 31 mai, inhumé le 4 juin ;

    5° Marie, baptisée à Guérande le 22 août 1662, inhumée le 24 août ;

    6° Georges, seigneur de Promarzin et de Cleuz-Coyau, né le 12 novembre 1664, décédé le 18 août 1738, inhumé le 19 août en l'église Saint-Jean de Guérande, conseiller du Roi, procureur au siège royal de Guérande, marié le 21 mai 1697 à Nantes avec Françoise Moriceau, fille de François Moriceau, sieur de La Halquinière, et de Catherine Loquet, d'où postérité branche de Promarzin ;

    7° Jean, seigneur du Plessis-Giffard, né le 20 juin 1666, ondoyé à la naissance, baptisé à Saint-Nazaire le 15 août 1668, inhumé à Guérande le 20 novembre 1684 ;

    8° Charles, baptisé à Guérande le 11 mai 1672, inhumé le 10 juin ;

    9° Rodolphe-Philippe, dit Raoul-Philippe, seigneur de de Cleuz-Coyau, baptisé à Guérande le 9 juin 1676, inhumé à Guérande en l'église Saint-Jean e 29 janvier 1722, capitaine d'une compagnie bourgeoise, époux de Genevieve Fouquer, d’où postérité ;

    10° Angélique, qui suit ;

    11° Marthe, baptisée à Guérande le 24 juin 1677, mariée le 18 février 1710 avec Michel Roger, conseiller du Roi, rapporteur du point d'honneur en la Sénéchaussée de Guérande ;

    12° Marie, baptisée à Guérande le 11 août 1679.

    plessis-giffard, saint-nazaire-, rochereuil, de-la--haye-de-silz, Le-Pouceau-de-Rollinveau, III° Angélique de Rochereul, dame du Plessis-Giffard et de La Cour de Béac, et de Cleuz-le-Propre, décédée en son manoir du Plessis-Giffard, inhumée dans le choeur de l'église de Saint-Nazaire le 4 juin 1754, épouse de Julien Le Pourceau de Rollivaud, écuyer, seigneur de Rollivaud[2], d’où :

    1° Renée-Jeanne, baptisée à Saint-Nazaire le 19 mars 1716, décédée le 25 juin 1716 à la Ville-Allain ;

    2° Julien-François-René, baptisé le 17 juillet 1717 ;

    3° Rosalie-Marguerite, baptisée le 23 août 1718 ;

    4° Jean, baptisé le 4 octobre 1719 ;

    5° Jeanne, qui suit ;

    6° Marie, baptisée le 29 mai 1724.

    IV° Jeanne, dame de Cleuz-le-Propre, (vendu Jean-Baptiste-Elie Camus de  Pontcarré, co-vicomte de Saint-Nazaire), du Plessis-Giffard, et de la Cour de Béac (vendus à Jean-Sébastien de La Haye de Silz) et d'un fief nommé fief du Pourceau, (vendu vers 1780 à François Le Chauff de Kerguennec, maire de Guérande en 1789-1790, ce fief constitue par la suite la métairie de Cleuz dont hérite des Le Chauf Joseph-Aimé comte de Bruc d'Esdrieux qui en est propriétaire en 1850), baptisée le 21 octobre 1722, épouse de Pierre Geoffroy d'Entrechaux, chevalier, colonel d'infanterie, gouverneur de Port-Louis[3].

     

     

    plessis-giffard, saint-nazaire-, rochereuil, de-la--haye-de-silz, Le-Pouceau-de-Rollinveau, Jean-Sébastien de La Haye de Silz, chevalier, issu d'une famille d'ancienne extraction maintenue noble durant la réformation de 1668 qui portait : De gueules à trois coquilles d'argent ; il était seigneur de La Ville-aux-Fèves, seigneurie mitoyenne de celle du Plessis-Giffard. Il s’établit pour ses séjours nazairiens au manoir du Plessis, délaissant celui délabré de La Ville-aux-Fèves à son sénéchal.

     

    I° Jean-Sébastien de La Haye de Silz, chevalier, comte de Larre, seigneur de Silz, de Coscat, de Lauvergnac, de Trescalan, de Clis, Kermoisan, de la Ville-au-Fèvre, de Beaubois, du Plessis-Giffard, et de la Cour de Béac par achat à la famille Le Pourceau, de Saint-Denac en Beac8, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, baptisé le 29 août 1727 à Saint-Nazaire, décédé le 14 juin 1791 à Arzal (56) ; marié : 1° le 5 janvier 1750 à Missillac avec Marie Elie ou Eslye, fille mineure de feu de Jean-Joseph Elie, sieur de Bréal, et d'Anne Payen, décédée au château de Silz la 19 décembre 1774 ; à l’occasion des fiançailles, le 30 décembre 1749 à Missillac, la fiancée est décrétée de majorité par jugement de Penestin ; 2° le 15 mai 1775 à Missilac, avec Jeanne Antoinette Cramezel de Kerhué, (18 septembre 1732 – 19 mai 1789), fille de René de Cramezel, écuyer, seigneur de Kerhué, et de Madeleine Elie, mariage possible après dispense d’affinité au deuxième degré. Ce remariage ne plait pas au fils aîné, Sébastien, car la nouvelle épouse serait autoritaire et dépensière. Jean-Sébastien va devoir vendre des propriétés, notamment celle de Lauvergnac en Assérac, qui est l’héritage du fils aîné ; d'où du premier lit :

    1° Jean-Marie, baptisé le 18 décembre 1750, décédé le 12 mars 1751 ;

    2° Jean-Marie, baptisé le 29 mars 1752, décédé la même année ;

    3° Sébastien-Antoine-Honoré-Marie, né le 14 mars 1756, baptisé le 7 mars 1757, tué à Grandchamps le 28 mai 1795, comte de Silz, dit " Monsieur de Lauvergnac ". Il sert un temps dans un régiment de Dragons, puis devient commandant de la garde nationale de Guérande, il est porté déserteur et, sur dénonciation de son père, capturé à Guérande, chez Me Hardouin, le 8 novembre 1781, par la police du Roi, en vertu d’une lettre de cachet. Il est emprisonné en maison de force à Angers. Il est amnistié le 18 décembre 1785, (les origines de cette situation seraient liées au remariage de son père dont la nouvelle épouse a obligé la vente de Lauvergnac), à partir de 1792 il intègre l’état-major de la conspiration de La Rouërie. Il y est présent en tant que commissaire royal pour le Morbihan. Après l’éclatement de la conspiration, il erre dans le Morbihan et travaille comme simple journalier, reste longtemps chez son frère à Vieille-Roche, et au village du Bot en Sulniac, avant de reprendre la tête des " brigands ". Son signalement est donné à cette époque par l’administration qui le recherche : " Taille 5 pieds, 3,4 pouces, taille fluette, bien étagée, droit. Le visage gravé de petite vérole, le teint bourgeonné comme un ivrogne, physionomie ronde et intéressante. Il mâche beaucoup de tabac, surtout en poudre. " En mars 1793, la colère des paysans explose contre la décision de la Convention d’une levée de 300 000 hommes, et c’est le début de l’insurrection Sébastien prend alors la responsabilité de l’armée royaliste du Morbihan et participe avec ses deux frères Auguste et Jacques au soulèvement de l’ouest de cette région, et organise de nombreuses attaques (Prises de Guérande et du Croisic, coulage d’une frégate, maîtrise de tout le pays de Basse Vilaine). En 1795, des conférences de paix s’ouvrent au printemps. Sébastien y est présent, et sous l’influence des autres chefs chouans, il signe alors, le 20 avril 1795, à regret, les documents de reconnaissance de la République, mais quatre jours plus tard, il signe un autre document, parfaitement hostile celui-ci, appelant de nouveau à la rébellion. C’est au cours de la bataille de Grand Champ, qu'il est atteint d’un coup fatal. Après une courte fuite à cheval, il met pied à terre. Selon la tradition, les "bleus" (les républicains) firent inspecter et reconnaître le cadavre, qui fût enterré près du lieu où on le découvrit, là où le chemin qui conduit à Kervehein arrive sur la route de Loperhet. Sa sépulture a été depuis recherchée, mais plus aucun signe n’en indique l’emplacement ;

    4° Marie-Françoise, née le 18 juin 1757, arrêtée le 21 avril 1793, mais rapidement libérée. Pour éviter la confiscation du château de Silz, elle décide de le vendre à un dénommé Paul-Marie des Néttumières, le 8 prairial An 5, pour 27 000 francs. Epouse de René d’Osmond ;

    5° Auguste-Marie, Chevalier de Silz, chevalier de l’Ordre Royal et Militaire de Saint Louis, né au château de Silz en 1760 et baptisé le 19 novembre. Son père demande pour lui une inscription à l’Institution des Gardes de la Marine de Brest. Les plus strictes conditions y sont exigées. Auguste reçoit sa lettre de nomination comme élève-officier de Marine. Il est incorporé le 7 septembre 1778. Sa carrière a pu être reconstituée grâce aux archives de la Marine. Il a des embarquements successifs sur : Le Sphinx (14/01/1781), L’Alexandre (16/04 au 12/06/1781), La Néréide (12/06 au 12/09/1781), Le Dauphin Royal (16/11/1782), Le Glorieux (01/04/1782 à 12/04/1782), Le Triton (08/09/1782 à 19/05/1783), Le Réfléchi (02/01 au 30/04/1784 et 28/07 au 22/11/1784), La Résolution (13/12/1785 à 11/05/1786), Le Rhône (06/04 au 19/08/1789), L’Auguste (26/06 au 30/12/1790), Le DuguayTrouin (01/01 au 29/06/1791). Enseigne de vaisseau à bord du Glorieux, il participe à la campagne d’Amérique sur le Glorieux. Il est au combat naval des Saintes et de la Dominique, le 12 avril 1782. A la suite de cette bataille, le Glorieux est pris par les Anglais et son équipage est fait prisonnier. Auguste et les autres officiers prisonniers séjournent pendant un mois à la Cité espagnole. Le 19 mai, tous les prisonniers montent à bord du bateau anglais Sandwich, qui appareille le 25 pour l’Angleterre. Ils arrivent à Portsmouth le 2 août. Ils sont enfin libérés et rejoignent la France le 12 août 1782 où un jugement de Conseil de Guerre de L’Orient (Lorient) est porté, et cite les officiers et l‘équipage du Glorieux, en louant leur conduite lors de la journée du 12 avril 1782. Promu lieutenant de vaisseau le 1er mai 1786. En 1791 il est détenu quelque temps au château de Brest pour avoir manifesté des idées royalistes. Le 10 janvier 1792, il épouse en l’église d’Arzal Jeanne Marie Olive Kermasson de Kerval, fille de Cassien Alexis Kermasson de Kerval, seigneur de Kerizel et de Heinlex-Pommeraye, et de Jeanne de Rochereul de Promarzin, promu Lieutenant de vaisseau de 2ème classe, au cours de l’été 1792, il quitte la Marine pour rejoindre son frère et le mouvement chouan, comme son frère Sébastien, il se cache et travaille comme journalier dans les paroisses environnantes. Recherché, son signalement est donné par l’administration : "Taille 5 pieds, 1 pouce (environ 1m68), gros, trapu, bien constitué, jambe forte un peu arquée ; le visage gros, rond, un peu soufflé. Il a une bonne carnation, les yeux un peu enfoncés et petits, la bouche petite, les lèvres épaisses un peu relevées surtout la supérieure. Il porte un chapeau à cuve élevée", un autre signalement de police, contradictoire, mais pas de la même année, le décrit comme suit : " 30 à 40 ans, 5 pieds, cheveux châtains, sourcils idem, yeux bleus, nez court, bouche moyenne, menton long, visage basané, maigre, effilé, vêtu d’une chemise blanche, pantalon de toile, chapeau de paysan", mais bien que se sachant recherché, Auguste accepte le risque de paraître à la demande de ses concitoyens d’Arzal pour faire office, dans certaines circonstances, d’officier public, ce qui laisse supposer une confiance réciproque, et la notoriété et le respect que lui porte la population. En 1793, il participe avec son frère au soulèvement de l’Ouest. C’est lui qui est à la tête des brigands à Rochefort-en-Terre, dénoncés avec son frère comme antirévolutionnaires, la nuit du 21 avril 1793, en vertu d’un mandat, une trentaine de soldats vont à minuit heurter aux portes des inculpés au château de Silz et à Vieille-Roche, les somment d’ouvrir au nom de la Loi. Jeanne Marie Olive, enceinte de 8 mois 1/2, son père Cassien Kermasson, qui est rongé d’infirmité, ainsi que d’autres membres de la famille et des enfants en bas âge, sont arrêtés, dirigés sur Vannes et internés au Petit Couvent. Leur internement est de courte durée, puisque Jeanne Marie Olive accouche quelques jours plus tard, le 3 mai 1793, d’une petite fille, Marie-Cassienne-Augustine, à Vieille-Roche, mais elle sera a nouveau arrêté et internée avec sa fille pendant plus de deux ans. En 1794, il est nommé chef de division de l’armée royale et catholique du Morbihan, il commande la division de Muzillac, de Redon et de la Roche-Bernard. En 1796, il accepte la pacification du 16 juin et dissout ses troupes, il est un des chefs dont l’influence est la plus efficace en faveur du désarment et sa femme contribue avec ardeur à cette tâche. Il écrit au général Hoche en ces termes : "[...] aussitôt que je fus informé le 3 juin dernier que les chefs comme les autres seraient amnistiés pourvu qu’ils ne fussent pas émigrés, je m’empressais de faire toutes les démarches auprès de ceux que nous nommons les membres de notre conseil et auprès des autres chefs pour les déterminer à profiter de la grâce qui nous est si généreusement offerte. Je me tais, Général, sur l’influence que j’ai eu pour la mise à bas des armes, mais j’ose me flatter que ce fût ma jeune épouse qui, par ses démarches dans les campagnes pour y répandre notre amnistie et les bienfaits du gouvernement, ébranla fortement le tout. Au besoin, j’en appellerai au Général Quantin, car il lui donna un passeport et mon amnistie". Néanmoins, l’administration du Morbihan, ayant retrouvé le nom de ce Silz sur la liste officielle des émigrés (alors qu’il ne l’avait jamais été), avait requis sa déportation et obligé le général Quantin à le faire arrêter. Le 14 vendémiaire (5 oct 1796), les bandes du général Quantin arrêtent à Arzal le Chevalier de Silz, cela malgré les supplications des membres de la famille présents. Il est dirigé à Vannes, jugé et condamné au bagne. Il est déporté au bagne de l’Ile de Ré, avant-poste de la Guyane. De sa captivité, il se procure divers certificats, notamment du district de la Roche-Sauveur (nom républicain de La Roche-Bernard) et du commandement militaire de l’arrondissement de Vannes, prouvant que depuis le mois de mars 1793, il n’avait jamais quitté le pays. Il envoie à Hoche une requête des plus respectueuses afin que, lui ayant déjà reconnu les droits accordés aux chefs des chouans non émigrés de rester de France, "il ne souffrit pas de son exportation dans une terre étrangère et perfide, dont il avait toujours et très sincèrement détesté les habitants et leurs manœuvres". L’adjudant général Mermet signala au général en chef que l’emprisonnement de De Silz faisait du bruit, et que si les arrestations de ce genre se multipliaient, il pouvait en résulter de nouveaux troubles dans le Morbihan. Hoche transmit au Directoire cet avis et la requête d’Auguste, ainsi que toutes les pièces sur ce "pacifié", en émettant l’opinion qu’"il serait injuste, peut-être même dangereux, de traiter comme émigré des hommes qui ne l’étaient pas et le prouvaient d’une manière certaine". Cependant, Auguste reste interné 3 ans à l’Ile de Ré. C’est en juillet 1799 qu’il est libéré et assigné sous surveillance à Guérande. Il rentre à Arzal, retrouve sa famille, et part aussitôt avec sa femme et sa fille s’installer à Guérande pour un séjour surveillé. C’est là que le 23 février 1800 naît son 2ème enfant, Clara-Marie. Jeanne Marie Olive meurt à Vieille-Roche le 19 juin 1807 à 34 ans. Avec les effets du Concordat, la paix et le calme revenus, Auguste reprend du service dans la Marine. Il est nommé au grade de Capitaine de Frégate en 1814, puis admis à la retraite le 22 octobre 1817. Il se retire à Vieille-Roche dans la maison héritée de sa femme, appelée de nos jours la caserne des Douaniers. Il meurt à Vieille-Roche le 5 janvier 1822 à l’âge de 61 ans, d'où :

    A°Marie-Cassienne-Augustine, (3 mai 1793 – 15 mars 1831), marié le 10 août 1810 à Hyacinthe-Louis-Victor Piars Deshays ;

    B° Clara-Marie, (23 février 1800 – 5 août 1837), mariée à Guérande le 11 juin 1817 à Henri Le Masne, (1786-1837), négociant.

    6° Anne-Marie, née le 24 janvier 1762, décédée en 1789 ;

    7° Armande-Désiré-Marie, née le 12 octobre 1763, décédée en 1765 ;

    8° Anne-Louise, née le 16 octobre 1764 ;

    9° Jean-Marie, née le 6 février 1771, baptisée le 3 novembre 1772, décédé le 2 mai 1799, marié le 7 février 1792 à Jeanne-Louise-Antoinette Philippe ;

    10° Cassien-Jean-Marie, né le 3 mars 1767 ;

    11° Louis-Marie, né le 29 juillet 1768, marié le 17 août 1799 à Marie-Jeanne Lizeul ;

    12° Antoinette, arrêtée dans la nuit du 21 avril 1793, condamnée à mort et dirigée à Nantes pour y être noyée. Elle échappa à la mort en épousant républicainement un garde national du nom de Robin ;

    13° Eugénie-Armande, née le 6 février 1771, baptisée le 3 novembre 1772, mariée le 13 août 1792 à René-Benjamin Thomas de La Borde, (1745-1804), président de District, inculpé sous la Terreur, d'où Prudent-Marie Thomas de Laborde, (Saint-Nazaire 11 janvier 1793 - Lorient 25 mai 1876), juge au tribunal civil de Vannes ;

    14° Jacques-Marie, né en 1773, guillotiné place du Bouffay à Nantes le 17 mars 1794 ; admis à l’institution des gardes de la marine à Brest, en 1792, il rejoint ses frères en Bretagne dans le mouvement chouan, et participe activement à la contre-révolution. Il se distingue au côté de Michel-François Thomas de Caradeuc, notamment lors de la prise du Croisic en mars 1793. C’est en ce lieu, le 18 mars 1793, qu’il prête serment de fidélité à Louis XVII. Arrêté le 15 pluviôse An II (janvier 94), il est alors dirigé vers Guérande, passe devant un jury militaire et un tribunal civil, de là, il est envoyé à Nantes où il passe devant un tribunal révolutionnaire le 7 février 1794 : " Le tribunal, d'après les dépositions des témoins, aveux et reconnaissances de Jacques-Marie Lahaye Desilz, Déclare que le dit Lahaye se joignit aux brigands dès le commencement de l'insurrection ; qu'il a eu différents grades parmi les brigands ; que lors de la prise de la ville du Croisic, il y entra accompagné de Guérif de Lanouan, leur chef ; — qu'il y prêta entre les mains de Lanouan serment de fidélité à Louis 17 ; que lorsque Caradeuc se présenta pour sommer la ville de Guérande, le même Lahaye y entra ; que le 18 mars, il entra, avec un détachement, chez le citoyen Boujus, aubergiste au Croisic, le menaça et lui enleva un sabre pour en armer un de ses camarades ", il fut alors condamné à mort avec cinq autres habitants du Croisic : " Le mois de mars 1794 apporte aux jacobins du pays la satisfaction d’apprendre le supplice de Jacques de la Haye de Silz, marin, ci-devant noble, natif d’Arzal domicilié à Penestin, guillotiné à Nantes, place du Bouffay, le 17 mars 1794 pour: s’être joint aux brigands dès le commencement de l’insurrection; avoir livré Le Croisic et Guérande avec d’autres chouans; avoir prêté serment de fidélité à Louis XVII. "

     

    En 1841 le manoir appartenait à monsieur Amelot, un Parisien qui spéculait ; en 1924 il appartenait à monsieur Agasse, entrepreneur de travaux publics.

     

     

    [1] Famille bourgeoise déboutée de noblesse à Guérande en 1669. Armoiries : D'azur au rocher d'argent, accompagné de huit yeux en orles.

    [2] Issu d’une famille anoblie en 1436, maintenue noble d'extraction lors de la réformation de noblesse par arrêt du 3 juillet 1669, sur 5 générations, recensement de Guérande (Bibliothèque Municipale de Rennes, Ms. 504 et 505), portant pour armoiries : d'azur à trois dauphins couronnés d'argent, accompagnés d'une étoile du même en cœur, il était veuf de Janne Coquard de Kerougas, (1643-1711) dont il eut cinq enfants),

    [3] Issu d'une famille bourgeoise de Toulon, il fut anobli par le service. - Armoiries Geoffroy d'Entrechaux : Parti ; au 1° d'or à l'aigle de sable ; au 2° de sinople au lévrier rampant d'argent ; au chef général d'azur, chargé de trois étoiles d'or.

  • Le crime de La Vague

    La Vague est l’un de ces charmants chalets balnéaires qui émaillaient la corniche nazairienne et dont il reste, hélas, peu d’exemples. Sa construction fut entreprise entre 1899 et 1905, par le couple Henri Tahier, (Saint-Nazaire le 5 octobre 1845 – Saint-Nazaire 19 février 1924) et Angèle-Désirée Henry, (Saint-Nazaire le 6 mars 1850 – Saint-Nazaire 9 juin 1916), pour leur servir de lieu de villégiature avec leurs cinq enfants, Henri, Gabrielle, Hélène, Madeleine, et Andrée. Les Tahier avait acquis le terrain en décembre 1898 auprès du négociant nantais Honoré-Anatole Martineau.

     

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    La Vague, façade sur estuaire, L'Ouest-Éclair 30 septembre 1932.

     

    Henri et Désirée Tahier formaient un couple de bourgeois respectables, unis d’un amour véritable, qui les avaient fait défrayer la chronique en 1870. Désirée était la sœur de l’épouse du frère aîné d’Henri, amoureux, ils avaient consommé, et Désirée était tombée enceinte d’une petite Angèle, née trois mois avant le mariage de ses parents. L’aventure avait alors fait chasser Désirée par son père, et Henri, clerc de notaire, avait perdu son emploi. Il était devenu grâce à son aîné caissier à la Compagnie Générale Transatlantique, mais ne fit jamais l’effort de monter en grade, se contant d’un revenu relativement modeste au regard des besoins de sa nombreuse progéniture. Sa chance fut d’être issu d’une famille fortunée, (voyez sa généalogie ici : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2020/11/01/tahier-et-tahier-de-kervaret-6273855.html), de laquelle il hérita des fermes et une somme suffisamment importante pour s’offrir le luxe d’une résidence secondaire à l’extérieur de la ville, dans une banlieue alors recherchée où les Nazairiens allaient se détendre le dimanche dans les guinguettes, les cafés-restaurants, et sur les plages, à 2 km du port. La demeure, malgré l'illusion de son aspect extérieur, était à l’époque petite, divisée en de nombreuses pièces peu pratiques par leur plan carré et leur disposition ; la cuisine elle-même tenait plus du couloir aménagé en kitchenette comme dans les logements d’étudiant du 21ème siècle. C’était une construction légère, conçue pour de courts séjours en belle saison. Les jours de tempête le vent passait par le sous-sol au travers du plancher du salon de la salle à manger, soulevant le tapis, ouvrant parfois les fenêtres ; les cheminées, alors présentes dans chaque pièce, étaient plus décoratives qu’efficaces. Le jardin, de 800m², clos de murs, sauf côté rue où était une palissade ajourée peinte en vert clair, avec un puits, domine cependant l’estuaire et était à l’époque doté d’une petite serre sous la terrasse côté océan[1].

     

    En 1915 le couple Tahier décida de quitter le centre-ville, où ils habitaient rue de Montoir, pour s’établir en leur chalet de La Villes-Martin. Depuis que le port était le lieu de débarquement des troupes australiennes et canadiennes, toutes les nuits il y avait des bagarres et des agressions, parfois à coup de révolver. Epuisés par cette insécurité, ils firent de La Vague leur résidence principale. Désirée y décéda en 1916. Henri y demeura seul avec sa fille Madeleine, jusqu’à sa mort en 1924. Les filles Tahier étaient de jolies femmes aux yeux noirs, les deux ainées s'étaient mariées avec des hommes qui avaient du bien et de bonnes situations, la plus jeune, « un peu masculine », menait une vie mystérieuse de modeste vendeuse à Paris, seule Madeleine était restée à Saint-Nazaire, à s’occuper de ses parents, car elle était bossue, chétive, et n’avait du fait de sa difformité jamais trouvée à se marier. Elle avait vieilli prématurément, ayant « le visage chiffonné »[2]. A la mort de son père, elle hérita de La Vague et de la fermette de La Bouletterie, une métairie de 6ha, comprenant corps de bâtiments composés d'une maison, écurie, cave, grande cour devant la maison, un jardin, des terres sous labour divisée en 39 lots éparpillés (nous étions avant le remembrement). Cette ferme exploitée par la famille Bonhommeau, constituait le revenu principal de Madeleine et la pouvait deux fois par semaine en lait. La Vague était alors en mauvais état, Madeline peinait à l’entretenir, elle faisait réaliser les travaux les plus urgents, mais le balcon en fer de la façade d’arrivée avait perdu plusieurs barreaux remplacés par du fil de fer. Tout était à l’économie, y compris sa mise, elle portait ainsi les chaussures de son père, faute de pouvoir s’en offrir une paire pour les jours ordinaires, avait l’air de Pauline carton dans « ces messieurs de la Santé », avec ses mitaines. Endettée au point d’avoir contracté une hypothèque qui lui coutait 1.200 fr le trimestre, (un ouvrier gagnait 1.000 fr par mois à l’époque), ne recevant aucune aide de sa famille ; son frère, qui se faisait nommer monsieur de Kervaret, était vaguement ingénieur à Paris où il faisait des dettes que l’héritage de 1924 avait à peine couvertes ; ses sœurs mariées prétextaient dépendre de la bonne volonté de leurs époux, la plus jeune disait ne pas avoir la possibilité de l’aidée. En fait, Madeleine était une femme isolée qui, en dehors de la fille de ses métayers qui lui apportait du lait deux fois la semaine, et de sa voisine mademoiselle Tremer, tenancière du Café des familles, (ancien café du Fort, aujourd’hui Villa Ker Villès), d’une amie d’enfance, madame Defaille, et d’une tante à la mode de Bretagne, madame Certain, qui vivait de l’autre côté de la ville aux trois-Ormeaux, (boulevard de la Renaissance), elle ne voyait personne.

    Madeleine se contraint à louer les deux chambres se trouvant au second étage, sous les combles, pour un loyer de 50 fr chacune, (l’un se composait d’une vaste pièce, la seconde plus petite avait en sus un grenier qui pouvait servir de rangement supplémentaire. Les locataires étaient invités à prendre pension au restaurant au Café des familles où chez monsieur Balle au Restaurant de la Côte. Elle trouva difficilement hors saison estivale à louer, jusqu’à ce qu’en 1931 arriva un couple.

     

    Thibaud et la Sorcière :

     

    En janvier 1931 débarquèrent deux individus à la drôle d’allure : Une femme prénommée Suzanne, veuve d’un employé de la Compagnie Parisienne du Gaz, nommé Carousse, qui disait avoir 40ans, alors qu’elle en avait 55, hystérique, tyrannique, attifée comme l’as de pique, que le voisinage surnommait « La Sorcière ». Elle n’était pas une inconnue pour Madeleine, cela faisait sept-ans qu’elle lui louait régulièrement une chambre en été. Un homme, de 38ans, Georges-Désiré Thibauld, désigné sous son seul nom de famille par les voisins, son compagnon depuis 1928, au teint noir, qui portait encore les codes vestimentaires des apaches, pourtant alors passé de mode : casquette, chemise avec gilet, pantalon large tenu par une ceinture de flanelle jaune de 20 cm de large et longue d'un mètre, enroulée autour de la taille. Dans l’intérieur bourgeois, quoique défraichi de Madeleine, ces deux énergumènes qui vivaient maritalement, même s’ils y avaient officiellement chacun leur chambre, se tapant dessus chaque soir en s’avinant avant de se réconcilier sous la couette, faisait tache. Parentés et amis de Madeleine lui disaient de se débarrasser d’eux, mais elle s’y refusait, motivée par le fait qu’elle avait besoin d’argent, et que personne ne voulait louer à l’année des pièces qui étaient loin du centre et inchauffables, dans une maison qui n'était au demeurant pas raccordée au réseau électrique. Madeleine, qui craignait l’intrusion dans son intimité ou les vols, nombreux dans les villas non habitées à l’année sur la Corniche, avait fait poser des cadenas à toutes les portes, et pensait que cela était suffisant pour la protéger des excès de ses locataires.

     

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    Georges Thibaut, Le Phare de La Loire du 30 janvier 1932.

     

    En dehors du nom de son époux et de son âge, on ne sait rien de Suzanne, elle est dite née à Candé dans les comptes rendus, mais nous n’avons pas trouvé d’acte de naissance pouvant correspondre à elle dans les actes. Le passé de Georges Thibaut nous est lui bien connu ; il est né le 2 juin 1894 à Nogeant-sur-Loir, huitième de douze enfants, d’un père journalier, dans une famille très pauvre, minée par l’alcoolisme. Son père et l'un de ses frères s'étaient noyés alors qu’ils avaient embarqué sur une barque, totalement saouls. Jeune, il avait été décrit comme « bon travailleur ». Durant l’appel de 1913, il avait intégré le 3ème régiment des Zouaves en Algérie. Durant la guerre il fut blessé deux fois, et cité à l’ordre du jour de son régiment. Les officiers le décrivirent comme très énergique et discipliné, mais il sortit de la guerre très éprouvé et fit deux séjours psychiatriques. Entré au chemin de fer en 1919, il resta dix ans à la gare de Clamart, puis fut muté à la gare de Montrouge, où il fut l’objet de nombreuses plaintes disciplinaire pour ébriété. Il avait en effet rencontré en 1928 Suzanne Garousse qui était une alcoolique notoire depuis la mort de son époux, et qui l’incita à boire. Avec ses antécédants familiaux et psychiatriques, Georges Thibaut sombra rapidement et commença à développer des délires schizophréniques ; il prétendait dans ces moments-là avoir été au bagne pour meurtre, ce qui devait certainement être une confusion avec ce qu’il avait vécu durant la guerre et ses séjours en physiatrie et une volonté de fantasmer une vie qui devait lui être triste, et contrebalancer un caractère effacé et faible. Il fut révoqué de son emploi pour être venus plusieurs fois gravement aviné. Suzanne le persuada de partir pour Saint-Nazaire afin d’y trouver un emploi de mécanicien aux Chantiers. Il fut employé par différentes entreprises, estimé comme actif, robuste bon travailleur, mais désigné comme alcoolique en dehors de ses heures de travail, ce qui à l’époque était commun. Le 14 janvier 1932, il quitta son dernier emploi et prit la décision de quitter Suzanne. Celle-ci fit sa valise avant lui. Elle partit le 18 janvier, en prétextant rentrer à Paris pour y devenir cuisinière, et avoir peur que Georges ne la tue durant un excès d’alcool, et qu’il avait une hache cachée sous le lit. Depuis plusieurs semaines elle disait pis que pendre de celui-ci, montant peu à peu le voisinage contre lui, ainsi que Madeleine à qui elle dit que son amant payerait sa part du loyer, soit 150 fr pour un trimestre non réglé. Madeleine eut un moment de panique. Elle devait verser 1.200 fr à son notaire, maître Labour, la première semaine de février pour le règlement de son hypothèque. Désemparée, elle décida de réclamer les loyers à Thibault qui répondit qu’il ne payerait pas pour Suzanne, d’autant qu’elle s’était sauvée en emportant ses économies, mais qu’il toucherait son salait le 20 et verserait alors ce qui correspondait au prix de sa chambre.

    Madeleine commença à l’assaillir tous les soirs à propos des loyers, et chaque soir Thibaut répondait qu’il ne payerait pas pour Suzanne.

     

    Le meurtre :

    Les évènements ici relatés ont été reconstitués durant l’enquête grâce aux aveux que fit Georges Thibaut aux gendarmes de Nantes et à l’interrogatoire durant le procès.

    Le 25 janvier, vers 17h, au bas de l’escalier, à droite quand on entre dans la maison, se tenait Madeleine très agitée. Elle réclama l’argent des loyers de Madeleine. Thibault lui avait réglé sa part, mais refusait encore de payer la dette de Suzanne. Madeleine partie en direction de son salon, proférant des menaces, il la suivit, tout aussi énervé, la sommant de se taire. Agacé par les cris de sa logeuse, il lui mit un coup de poing dans le nez. Madeleine bascula en arrière, emportant dans sa chute en chaise, et en ayant le réflexe de dire : « que fais-tu là Thibaud ? »

    Allongée sur le sol, le visage ensanglanté, Madeleine n’eut pas le temps de dire plus ; Thibaud se rua sur elle et l’étrangla de ses mains, puis il détacha sa ceinture de flanelle jaune et se mit à étrangler plus encore Madeleine avec. La pauvre femme expira rapidement.

    Thibaut dessaoula. Il réalisa son crime. Il transporta le corps de Madeleine dans le salon, lui posa la tête sous un coussin. Il se rendit dans la chambre de sa victime pour prendre une bouteille d’eau de Cologne et un mouchoir, puis revint lui nettoyer le visage. Après cela il alla chercher un chapelet qui lui mis entre les mains, et un drap avec lequel il la recouvrit.

    Il chercha à brûler le mouchoir et la ceinture de flanelle dans le fourneau de la cuisine, puis retourna de fond en comble les trois chambres qui constituaient l’appartement de madeleine au premier étage. Il lacéra les matelas, déchirant les draps au passage, à la recherche d’argent caché. Il ne trouva rien d’autre que le porte-monnaie de la victime, qui contenait 6fr, et ne vit pas sur la table de sa chambre son portefeuille qui contenant 600fr, et une coupelle contenant quelques petits bijoux en or. Durant plusieurs jours Thibaud continua de vivre comme si de rien n’était. Il nourrissait les poules de Madeleine, allait en alternance au Café des familles et au restaurant de la Côte prendre ses repas et régla ses ardoises. Le soir il achetait une bouteille de vin. Madeleine n’avait pas été vue depuis le 22 janvier par ses voisins, et la fille des métayers dit aux gendarmes n’avoir vu personne le dimanche 24 janvier, ce qui n’était pas habituel. Mademoiselle Tremer passait habituellement ses dimanches soir avec Madeleine, ne la voyant pas, elle interrogea Thibaut qui répondit que sa logeuse était partie voir sa tante aux Trois Ormeaux. Madeleine fut dans son acte de décès déclarée morte depuis le 26 janvier, mais plusieurs choses laissent à penser que le meurtre avait été perpétré entre les 22 et 23 janviers. Le corps commençant à sentir, Thibaut ouvrit la fenêtre du salon, le vent la fit battre bruyamment, ce qui éveilla la curiosité de mademoiselle Tremer. Le jeudi suivant la laitière ne vit que Thibaut qui lui apporta un pot qui n’était pas celui habituellement utilisé par Madeleine pour mettre le lait.

    Thibaut partit le 29 janvier au matin en direction de la ville, et marcha toute la journée jusqu’à arriver à la gendarmerie de Nantes vers 19h45, où il se déclara se constituer prisonnier pour meurtre. On téléphona à la gendarmerie de Saint-Nazaire pour vérifier les dires de Thibaut. Monsieur Balle assista les gendarmes à l’aide d’un phare de sa voiture qu’il démonta pour qu’ils puissent visiter les lieux dans la nuit, faute d'électricité. Les gendarmes posèrent des scellés, et confièrent le gardiennage de la maison à monsieur Balle.

     

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    Monsieur Balle, L'Ouest-Éclair du 30 janvier 1932.

     

    On fit venir le juge Lelièvre le matin suivant. On découvrit près du corps une lettre de Thibaut demandant pardon à madeleine et à Suzanne ; puis le corps fut emporté à l’hôpital où le médecin légiste Cousin procéda aux observations. Thibaut fut conduit à Saint-Nazaire, répéta ce qu’il avait dit aux gendarmes de Nantes, et fut présenté au médecin aliéniste Terrien, venu de La Baule, qui le déclara responsable de ses actes et accusa Suzanne de l'avoir rendu totalement alcoolique.

     

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    Le juge Lelièvre, L'Ouest-Éclair du 30 janvier 1932.

     

    Madeleine fut déclarée morte le 26 janvier, son acte se trouve dans le registre de la mairie de Saint-Marc dont dépendait alors La Villès-Martin, on l’inhuma au cimetière de La Briandais, avec ses parents, mais le caveau semble avoir été depuis été détruit.

     

    Le Procès :

    Maitre Moreau Vagnier l'ainé fut chargé de la défense de Thibaut devant les Assises à Rennes. Suzanne dit au Président du Tribunal qu’il était violent quand il buvait, mais qu’il ne l’avait battu d’une fois. Elle affirma qu’il vivait à ses crochets, ce qui ne fut pas prouvé. Madame Defaille répéta ce que Suzanne disait à chacun dans le quartier à propos de Thibaut, et l’avoir conseillé de partir car « il finirait par la tuer ». Monsieur Balle témoigna que Thibaut était un être faible et dépendant de l’alcool, et que malgré ses airs méchants et agressifs, qu’il « se serait tu devant un enfant de 10 ans s'il lui avait demandé de se taire ».

    Thibaut affirma ne pas savoir la situation financière de Madeleine, et ne pas avoir de fait compris son insistance agressive à lui réclamer le loyer de Suzanne. Il la croyait radine, et non ruinée. Il nia avoir retourner les chambres de l’appartement de Madeleine, et prétendit que le désordre y existait depuis toujours, même s’il avoua avoir fouillé, ce qui provoqua un émoi dans la salle. Il n’expliqua pas son geste, « j’ai perdu la tête », répétait-il. Il affirma qu’il avait fait exprès d’avoir provoqué son renvoi des chemins de fer. Le Président lui rétorqua : « C'est un raisonnement absurde, car vous pouviez démissionner ! ». On le questionna sur la provenance de l’argent qu’il avait employé pour le réglemente de ses notes de restaurant et l’achat de bouteilles de vin. Il dit avoir touché le 20 janvier 128fr de son précédent travail, et fanfaronna en affirmant qu’il avait ensuite erré dans les rues sans se donner la peine de chercher un nouvel emploi. Il reconnut avoir pris les 6fr contenus dans le portemonnaie après avoir tué Madeleine. Le 29 septembre 1932, le jugement fut rendu : comme le meurtre n’avait pas pour but le vol, Thibaut évita la guillotine au profit de vingt années de travaux forcés au bagne de Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane.

     

    Après le meurtre :

    La famille Tahier et maître labour n’attendirent pas le jugement des assises pour procéder à la liquidation des biens de Madeleine. Un jugement rendu par le tribunal de Saint-Nazaire le 30 juillet 1932 ordonna la vente de ses biens, il est vrai qu’il fallait aussi régler l’hypothèque contractée par Madeleine. Le 11 octobre 1932 à 14h, fut misent en adjudication chez maître Labour, l’ensemble des biens de Madeleine. On ne trouva pas preneur pour La Vague et son mobilier que la famille ne désira pas récupérer. Personne ne voulait vivre dans une maison où un meurtre avait été perpétré. Des voisins l’affirmèrent hantée après avoir vu des ombres et des lumières derrière les volets. En fait des curieux s’amusèrent à visiter les lieux la nuit et à emporter des souvenirs. On trouva des locataires qui la fuyaient quand ils apprenaient le meurtre. Le frère de Madeleine arriva à sortir de la succession en faisant racheter sa part par ses sœurs. Occupée pendant la guerre, la maison sortie intacte des bombardements. A nouveau louée, elle finit par être acquise le 28 mai 1947 par la famille Volant qui la revendit deux ans plus tard à la famille qui la possède actuellement, et qui n’en découvrit l’histoire qu’après leur emménagement, par une indiscrétion de l’épicier de la rue Ferdinand Buisson. Amoureusement entretenue, la villa a été agrandie après 1949.

     

    Georges Thibaut décéda au bagne le 6 mars 1948[3].

     

     

     

    [1] Eléments depuis disparus durant les agrandissements réalisés dans les années 1950.

    [2] Cf. L'Ouest-Éclair du 31 janvier 1932.

    [3] La condamnation au bagne fut abolie en 1938, mais les condamnés qui s’y trouvaient furent obligés d’y continuer leur peine. Le dernier bagnard fut libéré en 1953.

  • Tahier et Tahier de Kervaret

    Tahier, voici un nom qui était pour les Nazairiens synonyme d’ancienne bourgeoisie et d’honorabilité. Celle-ci s’étant éteinte en même temps que la ville fut détruite et sa population majoritairement dispersée, elle n’est plus qu’un vague souvenir que parfois ravive la lecture de la liste des anciens maires, où la mention d’un conseiller d’Etat.

    Pourtant, être Tahier s’était être de bon lignage à Saint-Nazaire, être revêtu d’honorabilité, et les membres de cette famille affichaient une certaine fierté, si ce n’est une certaine forme d’arrogance ; les enfants des filles Tahier faisaient en sorte d’associer le patronyme à celui de leur père.

     

    Les origines :

     

    Les Tahier sont originaires de Ploubalay, aujourd’hui une commune de Beaussais-sur-Mer, une paroisse dépendante du diocèse de Saint-Malo, entre Dinard et Dinan. Elle est connue dans les registres paroissiaux depuis Jehan Tahier marié vers 1580 avec Charlotte Agan, née le 15 décembre 1546 à Ploubalay. Leur petit-fils, Bertrand Tahier, marié le 25 juin 1630 avec Gilette Margot, entra en possession du fief de de La Villesgouté, (La Ville-es-Goutte), en Ploubalay. Ses suivants firent carrière dans la magistrature et le droit, et pratiquèrent le partage noble, ce qui leur permis de porter dans les actes le titre d’écuyer, mais aucun ne fit confirmer cette noblesse acquise par comportement noble que permettait la Coutume de Bretagne. On ne lui connait pas non plus d’écu d’armes, élément pourtant indispensable à la noblesse, car « il n’est nulle noblesse sans armoiries ». L’un de ses petits-fils, Julien-Maurice Tahier, né à Ploubalay le 14 janvier 1717, hérita du fief de Villesgouté, et fut contrôleur aux Devoirs à La Roche-Bernard. Il épousa à Guérande, le 2 août 1746, Aimable-Jeanne-Jérômine de Kervéno, (Donges 22 septembre 1719 – Guérande 13 février 1786), dame de Kervaret en Guérande, qui était issue d’une famille de très ancienne noblesse qui portait : d'azur, à dix étoiles d'argent, 4, 3, 2 et 1. Le couple eut au moins douze enfants, dont seuls deux fils atteignirent l’âge adulte.

     

    Généalogie en Presqu’Ile guérandaise :

     

    I° Julien-Maurice Tahier, sieur de La Villesgouté, né en 1717 à Ploubalay, décédé en avant la naissance de son second fils, écuyer, contrôleur aux douanes, capitaine des canonniers, contrôleur aux devoirs à La Roche-Bernard ; marié à Guérande le 2 août 1746 à Aimable-Jeanne-Jérômine de Kerveno (Donges 22 septembre 1719 – Guérande 13 février 1786), d'où 12 enfants, dont :

    1° Jacques-René-Claude, qui suit ;

    2° Julien Maurice qui suit branche Tahier de Kervaret.

     

    II° Jacques-René-Claude Tahier, (Guingamp 19 septembre 1748 – Guérande 13 juillet 1816), désigné dans les actes comme rentier et propriétaire, marié civilement à Guérande le 16 septembre 1798, (30 fructidor an VII), avec sa domestique avec qui il vivait maritalement depuis plusieurs années, Françoise Viaud, (Saint-Molf 1er décembre 1764 – Guérande 6 février 1806). Ce mariage civil avec reconnaissance d’une enfant, dérangea longtemps la famille, certes la Révolution avait changé la société, et un « ci-devant [1]» pouvait épouser une femme de condition très inférieure à la sienne, mais le fait que ce mariage civil fut contracté si tard, fit raconter par les Tahier, que le couple avait en réalité contracté un mariage religieux avant le mariage civil, devant un prêtre réfractaire, donc illégale en période révolutionnaire, dont on n’a jamais pu apporter la preuve ; la seule union connue du ce couple est de fait le mariage civile. Il y aurait eu cinq enfants né de ce couple, mais on n’en connait au moins deux :

    A° Françoise née à Guérande le 9 janvier 1796, reconnue par son père lors du mariage civil de ses parents ;

    B° Jacques-François qui suit.

    tahier

    Jacques-François Tahier © Fonds et collections de la famille Fraisse.

     

    III° Jacques-François Tahier, (Guérande 8 novembre 1799 – Saint-Nazaire 24 mars 1875), capitaine au long cours, syndic des gens de mer à Saint-Nazaire, maitre de port, chevalier de la Légion d'Honneur, médaillé de Sainte-Hélène, époux d'Eléonore-Aglaë Blanchard, sœur fille de l’officier de Santé du port, et sœur d’un éphémère maire en 1830[2]. D’où :

    1° Aglaë, (1836-1919), le docteur Hippolyte Durant, (Nantes 9 juillet 1827 – Saint-Nazaire 1892), diplômé docteur en médecine à Paris le 9 octobre 1860, médecin de la Santé, il se spécialisa dans la lutte contre le choléras, et obtint la médaille du Choléras en Meuse en 1854 ; en 1861, il fit le premier diagnostic de l''épidémie de fièvre jaune qui frappa Saint-Nazaire, un patient agité par la fièvre le frappa à l’œil par accident, il dut subir une énucléation, l'Empereur lui décerna une médaille d'honneur le 15 janvier 1862 ; il fut commissaire municipal à la mairie en 1870 et resta conseiller jusqu'en 1888 ; la Croix Rouge lui décerna sa Croix de bronze en 1871 en récompense de son dévouement ; il assura durant la seconde épidémie de fièvre jaune de 1881, le service durant 21 jours au lazaret de Mindin -  une rue porte aujourd'hui son nom, d’où  postérité sous le nom de Durant-Tahier, (voir http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/31/notes-sur-la-famille-durand.html ) ;

    2° François-Alexandre, né à Saint-Nazaire le 12 février 1838, capitaine au long-court, marié le 22 juin 1869 à Saint-Nazaire avec Marie Henriette Henry, fille de Jean-Louis Henry, pilote, (1817-1875), et de Jeanne Marie Audrain, (1817-1867), ; d’où :

    A° Blanche-Marie, (Saint-Nazaire 8 avril 1870 – 1962, inhumée au cimetière de La Briandais), épouse Giraud ;

    3° Louise-Aimée, né à Saint-Nazaire le 30 mai 1839 ;

    4° Henri, qui suit.

    IV° Henri Tahier, (Saint-Nazaire le 5 octobre 1845 – Saint-Nazaire 19 février 1924), d’abord clerc de notaire, il tomba amoureux de sa belle-soeur Angèle-Désirée Henry, (Saint-Nazaire le 6 mars 1850 – Saint-Nazaire 9 juin 1916). Il désira l’épouser, mais elle était mineure ; ils consommèrent leur amour et Désirée se trouva enceinte. Chassée par son père, elle trouva refuge chez la veuve Couronnée, rue de Nantes, où elle accoucha d’une fillette le 9 janvier 1871. Le couple se maria finalement trois mois après que la jeune mère accéda à l’âge adulte, le 26 juin 1871, soit le temps de publication des bans. Cette histoire obligea Henri à quitter l’étude qui l’employait. Heureusement son frère le fit entrer comme caissier à la Compagnie Générale Transatlantique. D’où :

    1° Angèle-Henriette Henry, puis Tahier, légitimée au mariage de ses parents, (Saint-Nazaire 9 janvier 1871 – Saint-Nazaire 6 avril 1877) ;

    2° Henri Tahier, dit de Kervaret, (Saint-Nazaire 26 octobre 1873 – Paris ?), ingénieur, marié le 14 avril 1926 à Paris, avec Jeanne Herviau, dont on ne sait pas grand-chose, mais qui semble avoir eu un style de vie dispendieux et qui s’endetta beaucoup, au point de connaitre une faillite en octobre 1924 ;

    3° Gabrielle-Marie-Alexandrine Tahier, (Saint-Nazaire, 2 septembre 1875 – Château-Thiébeau 2 février 1949), mariée le 25 septembre 1906 à Saint-Nazaire avec Eugène-Joseph-Antoine-Marie Nozières, (Chantenay-sur-Loire (commune de Nantes) en 1879 ou 1880, décédé avant le 28 mai 1947), négociant, puis industriel, demeurants à Paris 45 rue des Ternes ;

    4° Hélène Tahier, - Clichy La Garenne 26 janvier 1962), mariée le 15 janvier 1906 à Saint-Nazaire, avec Théodore-Auguste-Joseph Artaud, (°Vertou 8 avril 1879 - décédé avant le 28 mai 1947)), dessinateur, puis dessinateur-géomètre, demeurants à Villemomble 25 avenue des Roses ;

    5° Madeleine, (Saint-Nazaire le 19 septembre 1881 – Saint-Nazaire 26 janvier 1932) assassinée par son locataire en sa villa La Vague à Villès-Martin ;

    6° Andrée-Emilie Tahier, née à Saint-Nazaire le 30 mai 1886, employée de commerce, demeurant à Paris, 25 rue Henri-Monnier.

     

     

    Branche Tahier de Kervaret :

     

    II° Julien-Maurice Tahier de Kervaret, sieur de Kervaret, (La Roche-Bernard le 20 septembre 1749 – Saint-Nazaire 6 décembre 1832) ; fut nommé lieutenant de Frégate en 1778, puis de de Vaisseau 1786, et à nouveau en 1792, et le 18 Floréal an II ; parti à Philadelphie conduire un ambassadeur et toute sa suite, en l'an V (1796) comme commandant de la corvette Mercury, il fut à son retour nommé capitaine de la station navale de Mindin ; nommé capitaine de Frégate en 1814,il fut mis en retraite le 1er novembre 1817. Il avait été nommé maire de Saint- Nazaire le 13 septembre 1815, et resta en place jusqu'en 1823, date à laquelle il démissionna en raison de son âge et de ses infirmités ; chevalier de Saint-Louis 1821 ; propriétaire du domaine du Parc à l'Eau (situé à l'emplacement des anciens frigos, une rue située plus loin porte le nom de ce domaine en souvenir) ; marié à Saint-Nazaire le 18 juillet 1799 à Françoise Thomas, d'où :

    1° Aimable-Geneviève, (1801 - Nantes 11 novembre 1860), religieuse dans l'Ordre de Saint-Louis de Gonzague en la communauté de La Providence à Nantes, inhumée au cimetière de La Briandais où sa tombe existe encore à droit dans l'allée principale ;

    2° Claire-Eulalie, (1802-1866) ;

    3° Aimée-Gertrude, née à Saint-Nazaire le 23 octobre 1806, hérita du domaine du Parc à l'Eau,  mariée sous le nom de Tahier du Kreset à Saint-Nazaire le 10 mai 1830 avec Pierre-François-René de Brégeot, né à Herbigniac le 14 juin 1801, licencié en droit, juge auditeur à vannes le 10 mars 1825, substitut à Savenay en 1829, juge de paix à Guérande en 1849, conseiller général de la Loire-Inférieure de 1850 à 1853, juge de paix à Briec en 1867, d'où postérité, (voyez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/26/notes-sur-la-famille-de-bregeot.html ).

     

     

    [1] Expression qui désignait durant la période révolutionnaire les gens ayant bénéficier de privilèges nobiliaires ou de charge.

    [2] Claude Alexandre Blanchard, officier de Santé, officier de santé, membre de loge maçonnique nantaise Mars et les Arts, maire de Saint Nazaire du 29 juillet 1830 au 21 décembre 1830.

  • Jean d'Udine

    On vous dira probablement durant un souper en ville que Berlioz est venu séjourner plusieurs fois à Saint-Nazaire chez son fils, alors capitaine à la Compagnie Générale Transatlantique. Cette affirmation n’a rien de nouveau, maître Galibourg se plaisait à le répéter en boucle, en précisant que les Berlioz étaient ses locataires. On omet cependant de préciser à chaque fois qu’en ce temps-là Berlioz était une ombre, qu’il ne composait plus depuis des années. Les plus lettrés, vous parleront d’un charmant courrier qu’écrivit en 1884 Camille Saint-Saëns depuis le Grand-Hôtel, où il séjournait. L’année 1884, fut celle où il dirigea à Nantes la seconde partie de son oratorio « Le Déluge », « L'Arche — Le Déluge », (Op. 45), d’après le poème de Louis Gallet. Il était venu à Saint-Nazaire pour y visiter l’un de ses parents, (à moins que ce ne fut en réalité sa grande amie la pianiste Caroline Montigny-Remaury séjournant à Saint-Marc chez son beau-frère Eugène Wieczffinski ?). Dans cette lettre, qui réjouirait n’importe quel proustien, Camille Saint-Saëns, au faîte de sa gloire, monsieur ventru et longuement barbu, raconte son bonheur de faire des tours de chevaux de bois sur le carrousel de monsieur Guilleux sur la place Marceau, face au Café Américain.

     

    Le Nazairien, le vrai, celui dont les racines s’enfoncent à travers la stratification des siècles, vous comptera le souvenir de Jean d'Udine, charmante personnalité et musicologue qui  marqua son temps, auteur de quelques mélodies aujourd'hui oubliées.

     

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    Jean d'Udine,© fonds famille Gautier-Cozanet

     

    Jean d'Udine est un pseudonyme, celui d’Albert-Guillaume-Marie Cozanet, avocat à Saint-Nazaire. Né à Landivisiau le 1er juillet 1870, ce fils de médecin[1], petit-fils de notaire, il fut licencié en Droit à Rennes en 1890, s’inscrivit au barreau de Saint-Nazaire en 1891, et signa le mémoire de avocats de Saint-Nazaire demandant le monopole de la plaidoirie devant le tribunal de cette ville en 1892. Il préférait la musique et la poésie au Droit qu’il ne pratiquait que pour des raisons financières[2], sans y mettre beaucoup d’entrain. Ses plaidoiries étaient excellentes, mais il n’y mettait jamais de cœur, si bien qu’il perdait les affaires qu’il menait. Il est vrai qu’elles n’étaient généralement pas passionnantes, c’étaient des histoires de bagarres en Brière. Certaines ne manquait pas de piquant, ainsi c’était-il retrouvé, en mars 1893, à défendre Jean-Baptiste Moyon dit Tête Fine, accusé d’avoir donné un « coup de tête » au garde champêtre Moyon dit Bon Dieu, qu’un autre Moyon, dit Le Diable, était venu secourir… En juin suivant il avait défendu Félix-Marie Mausset pour un bras d’honneur avec invitation à la découverte du plaisir anal adressés au maire d’Avessac. Il n’en demeurait pourtant moins apprécié pour sa culture et son esprit ; sur décision du Conseil municipal du 4 novembre 1893, il fut nommé co-conservateur adjoint du Musée[3]. A l’époque de cette nomination, il ne s’illustrait que par des poèmes paraissant dans les journaux et des critiques artistiques, paraissant dans Le Courrier de Saint-Nazaire, La Démocratie de l’Ouest, L’Echo de Saint-Nazaire, Le Sonneur de Bretagne à Rennes, L’Ouest artiste de Nantes, des articles de critiques musicales et artistiques, ainsi que par l’amitié que lui vouait le compositeur Jules Massenet, (1842-1912), superstar de l’époque, mais s’investissait dans toute les manifestations artistiques ayant lieu à Saint-Nazaire. En 1894 il publia une pièce en vers nommée « L’Epée », jouée pour « L ’assaut d’armes du Grand Hôtel du 18 février 1894 », et un recueil de poésies nommé « Bourgeons », édité par la Grande Imprimerie de Saint-Nazaire, et épousa, le 7 août 1894, à Port-Vendres, (Pyrénées-Orientales), Marie-Estelle-Pauline Dardignac, (Fort-De-Franc 8 mars 1871 – Paris 21 décembre 1958). Cette notoriété lui valut une entrée élogieuse dans le Dictionnaire Biographique de la Loire-Inférieure, de Henri Jouvet en 1895, année où il composa une œuvre musicale pour théâtre d’ombres chinoise nommée « Jehanne d’Arc », jouée à Saint-Nazaire au concert de la Société philarmonique, et à Nantes par Le Clou.

    En 1897 il publia « La corrélation du son et des couleurs dans l’art », éditions Fischbacher à Paris.

    Il abandonna le barreau en 1898, et parti à Paris où il fut rédacteur à la Préfecture de la Seine, il y collabora à La Revue internationale de musique, qui hélas ne perdura qu’une année, ainsi qu’au Ménestrel, et au Courrier musical durant quinze ans. Fin musicologue, il publia tour à tour en : 1900 Dissonance, Lettres paradoxales sur la musique, Fischbache ; 1903 Paraphrases musicales sur les grands concerts du dimanche (Colonne et Lamoureux), 1900-1903, A. Joanin, L'Orchestration des couleurs, analyse, classification et synthèse mathématiques des sensations colorées, A. Joanin ; 1904 Le retour à Mozart, Petites lettres pour la jeunesse sur le « Jugend-Album » de Schumann, A. Joanin ; 1905 Les Caractères des musiciens, à la façon de Théophraste et de La Bruyère, A. Joanin, La Meule tourne, (roman), A. Joanin ; 1906 L'école des amateurs, Ed. du Courrier Musical, Gluck (biographie), H. Laurens ; 1908 La musique des syllabes, et les sirènes du docteur Marage, Société Internationale de Musicologie, La Belle musique, entretient pour les enfants, Devambez, La classification des timbres, Société Internationale de Musicologie ; 1909, année où il abandonna ses fonctions administratives pour se faire professeur de danse rythmique, Qu'est-ce que la gymnastique rythmique ? publiée à compte d’auteur ; 1910 L'Art et le geste, F. Alcan ; 1911 La Coordination des mouvements et la culture de la volonté par la gymnastique rythmique de Jaques-Dalcroze, Institut générale de physiologique ; 1912 Les rapports musicaux des unités d'espace et des unités de temps, Les naves et les pulses, à compte d’auteur ; 1914 Sur la danse, à compte d’auteur ; 1918 Dans la grotte féérique, sept contes pour les grandes personnes, G. Crès ; 1921 Qu'est-ce que la danse ?, H. Laurens ; 1922 Les Transmutations rythmiques, Heugel ; 1925 Qu'est-ce que la musique ?, H. Laurens ; 1926 Traité complet de géométrie rythmique, Heugel ;  1929 Qu'est-ce que la peinture et les autres arts plastiques ?, H. Laurens ; 1931 L'Art du lied et les mélodies de Massenet, Heugel ; 1932 Qu'est-ce que l'éloquence et la poésie ?, H. Laurens ; 1936 Qu'est-ce que la beauté ?, H. Laurens.

     

    Il composa en 1917 Apaisement, mélodie sur poésie de Verlaine, et Heures, mélodie sur poème de Tristan Corbière, Valse héroïque ; en 1923 Rondels pour après, cinq mélodies sur des poèmes de Tristan Corbière ; en 1929 Sept poèmes arabes.

     

    Divorcé de Marie-Estelle-Pauline Dardignac, remarié le 8 octobre 1907 à Neuilly-Sur-Seine avec Marie Antoinette Charruit, dont il eut un fils : Guillaume-Claude-Arthur Cozanet, (Paris 17ème 19 novembre 1907 - 9 juillet 1987), d’où postérité. 

     

    Jean d’Urdine affirmera toute sa vie la nécessité de la non-reproduction dans l’Art ; dans « Qu’est-ce que la musique ? », il écrivit : « La beauté d’un meuble, d’une dentelle, d’un vitrail, ne réside pas dans leur conformité à des modèles antérieurs fixés par l’usage, mais bien dans l’invention personnelle de celui qui les crée. »

     

    Mourant, il demanda à un ami de se mettre au piano et de lui faire entendre quelques notes de Beethoven, Gluck, « et surtout du Mozart, du pur, du charmant, du lumineux Mozart.[4] »

     

     

     

    [1] Il en était le troisième fils, quatrième et dernier enfant.

    [2] Son grand-père maternel, Gilbert Villeneuve, était avocat, ainsi que son frère Charle, au barreau de Quimpert.

    [3] Avec l’architecte Henri-Auguste van den Brouke, l'avocat Jean-Marie-Jules Gouzer, suppléant à la Justice de Paix et membre du Conseil municipal, ainsi que Paul-Joseph-Henri Barbara et Octave Fidière des Prinveaux comme co-conservateur ; voyez notre article consacré à l’Ancien musée : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2020/10/01/le-musee-disparu-de-saint-nazaire-6267147.html

    [4] Cf. Dictionnaire des compositeurs de musique en Bretagne, de Vefa de Bellaing, Ouest-Editions, 1992.

  • Un sanglier à la mer !

    Le 12 octobre 2020, on a filmé un sanglier nageant dans le port de Saint-Nazaire. cette video a été publiée sur le site de Ouest-France : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saint-nazaire-44600/saint-nazaire-un-sanglier-en-baignade-dans-le-port-6cf840e4-0e02-11eb-8368-80832aa050d1?fbclid=IwAR2la_CIm65UamS4momGY3SkQytu9UsgBEGRsU5lvdc8oLzPiTle5a6ewhY

     

    Des sangliers, des chevreuils, des renards, des fouines, nous en avons tous vu sur la plage, en réelle ou en vidéo, mais la présence de ces animaux nageurs n'est pas nouvelle, déjà dans son numéro du samedi 11 mai 1872, Le Chasseur Illustré, faisait état d'un sanglier pris en mer face à Saint-Nazaire : 

     

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  • Le musée disparu de Saint-Nazaire

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    L'ancien musée de Saint-Nazaire et l'ancienne Bibliothéque de Saint-Nazaire, carte postale, coll. David Silvestre.

     

    Nombre de Nazairiens ont entendu dire que la ville avait été dotée d'un musée qui fut détruit durant les bombardements. Certains ont aussi eu l'occasion de voir des cartes postales d'avant la première-guerre-mondiale le figurant.

     

    Quelques personnes âgées se souviennent de ses abords, mais très peu l'ont visité avant destruction, étant donné qu'il n'était ouvert que les dimanches après-midi. Le lecteur risque d’être profondément déçus en lisant les lignes qui suivront, nous en sommes désolés, mais nous nous efforçons de ne communiquer que des faits : il n'y avait pas de musée au sens où nous l'entendons au 21ème siècle ; il y avait un espace d'expositions des collections municipales, ensemble comparable aux collections d'un amateur éclairé, d'un érudit, mais pas digne d'être qualifié aujourd'hui de « musée ».

    Beaucoup de mythes perdurent autour de cette institution disparue. Durant la campagne municipale de 2020 il s’est même réinvité dans les débats, avec des cris de bourgeois choqués et des affirmations d’honnêtes gens qui nous assuraient que les collections n’avaient pas été détruites, que l’on nous cachait des choses, pire, que la Ville avait confié à des musées français des trésors de notre patrimoine, tels un chef de village donnant les fétiches et les masques de ses ancêtres à un colon armé d’un fusil. Vision des Nazairiens et déformation des faits très exaspérantes… grossie par l’alimentation des réseaux sociaux où chacun y allant de son commentaire pour le plaisir de commenter, faisant grossir de plus en plus la légende de façon pagnolesque.

     

    Le lecteur comprendra que l’auteur de ce blog s’est abstenu de s’exprimer au milieu de cette cacophonie et des insultes qui ont ponctuées cette triste période d’élections, n’étant pas désireux de faire de la politique municipale et surtout n’étant pas homme à se produire en foire, surtout au risque de ne pas être entendu au milieux des hurlements de quelques excités, ou pire, d'être l'instrument malgré lui d'une contre argumentation n'ayant pour but que des intérêts particuliers au détriment de ceux des Nazairiens.

     

    Maintenant que le calme est revenu, exprimons-nous sur ce sujet en relatant l’histoire de ce musée.

     

    Avertissement :

    Ce blog est un blog de vulgarisation de l’histoire de Saint-Nazaire, il a pour but de rendre accessible l’histoire de notre ville et de permettre à ceux qui le consultent, de s’orienter vers des sources plus détaillées. En l’occurrence le lecteur aura, s’il est désireux de faire une thèse sur le sujet, la possibilité de consulter la très dense documentation conservée aux archives municipales, qui traite de l’ancien musée en question, mais aussi de la suite qu’on a espérée lui donner à la Reconstruction, et de ce qui constitue actuellement la collection municipale d’avant l’ouverture de l’Ecomusée en 1998. Cette documentation est cotée 423W005 à 423W023. Ajoutons ici que la consultation de ces archives nous a été proposée spontanément, avec pour commentaire que personne n’avait encore demandé à étudier.

     

    musée saint-nazaire

    Archives de l'ancien musée de Saint-Nazaire et de la collection municipale actuelle dite « ancien musée » ou « musée de Saint-Nazaire », conservées aux Archive de la ville de Saint-Nazaire.

     

    A cette documentation nous ajoutons des journaux de l'époque : Le Courrier de Saint-Nazaire, Le Phare de la Loire, L'Ouest-Eclair, sur la période allant de 1879 à 1943, consultables sur le site des Archives départementales de Loire-Atlantique.

     

    Histoire de l'ancien musée de Saint-Nazaire :

     

    L'idée de doter la ville de Saint-Nazaire d'un musée est apparue tardivement. Jusque dans les années 1880 la ville avait d'autres priorités ; son développement était totalement dépendant de celui du port et se concentrait sur l'aspect économique de celui-ci.

    A la chute du Second-Empire, seule la vieille-ville, (à emplacement du Petit-Maroc), une part de la rue de Nantes, (avenue Henri Gautier), et de la place Marceau, (Ruban Bleu), étaient urbanisées. C'est durant les vingt premières années de la Troisième-République que la ville commença à prendre sa forme réelle, même si le tracé de ses voies avait déjà été décidé par l'ingénieur en chef des Ponts-et-chaussées, Paul Leferme. Certes, très tôt, on rêva à la constitution d'un musée. Quand il remplaça Paul Leferme, René de Kerviler ne croyait pas que la ville soit un jour en capacité d'avoir un musée. Il préféra inciter la municipalité Desanges[1] à donner au Musée National d'Archéologie le morceau brisé du menhir de La Dermurie qui gisait dans l'herbe, (menhir prétendu phallique de 1,50 m), musée auquel il remit aussi trois épées, une hache, et un poignard, faisant de ce mobilier archéologique des biens nationaux inaliénables, et envoya au Musée Dobrée dix-neuf artéfacts archéologiques trouvés durant le creusement du bassin de Penhoët[2].

     

    Le 26 avril 1889, un mois après la formation de la commission pour la création de la bibliothèque[3], la municipalité Gasnier décida que la ville se doterait d'un musée, mais cette décision ne faut pas suivit d'une mise en forme réelle. On créa la bibliothèque dans une aile de l'immeuble de la Chambre de commerce, à l'angle des rues Thiers, et amiral Courbet, (à l'emplacement du parking qui fait face à la base sous-marine), et l'on entreprit quelques acquisitions d’œuvres, mais le projet du musée resta une nébuleuse.

    Pourtant la famille Bord accomplit un mécénat actif en faisant des dons financiers pour acquisitions, mais aussi en contribuant directement à des dons à la Ville. Gustave Bord fit don de plusieurs œuvres originales du sculpteur nazairien Alfred Caravanniez : « Cathelineau jurant de défendre sa foi en 1793 », plâtre originale qui fut présenté au Salon de 1881 et permis à Caravanniez de recevoir une médaille de troisième classe. Ce plâtre fut déposé au Collège Aristide Briand de Saint-Nazaire. Il disparue durant l’occupation. L’œuvre représentait le général contre révolutionnaire en soldat vendéen, adossé à un calvaire brisé, la croix à ses pieds, la main droite tendu en serment. Exposée prêt du bureau du proviseur, la main gauche avait été brisée avant juin 1929. Il offrit aussi le plâtre original du buste de la statue de Surcouf commandée par la ville de Saint-Malo, et la maquette en plâtre de Bayard sculpté pour le monument dédié à Henri V, (le comte de Chambord), à Sainte-Anne-d'Auray. L'époux de Jeanne Bord,(sœur de Gustave), Octave Fidière des Prinveaux, conservateur au musée du Luxembourg, contribua à l'enrichissement de la collection municipale en sollicitant des dons de la part d'artistes reconnus et des veuves de ceux-ci. Ainsi le 7 mai 1893 la ville de Saint-Nazaire entra en possession du plâtre original de « Jeanne d'Arc à Domrémy » de Henri-Michel Chapu, dont le marbre était au Musée du Luxembourg, (aujourd'hui au Musée d'Orsay). Cette intervention pour l’enrichissement des collections nazairiennes lui valut d'être nommé par le Conseil municipal membre de la commission du Musée et co-conservateur avec Paul-Joseph-Henri Barbara, inspecteur principal des Douanes et peintre amateur[4], et comme co-conservateurs-adjoints l'avocat Albert Cozanet, (critique musicale et essayiste sous le nom de Jean d'Udine), l'architecte Henri-Auguste van den Brouke, (beau-père du peintre Fernand du Puygaudeau et grand-père d'Odette), et l'avocat Jean-Marie-Jules Gouzer, suppléant à la Justice de Paix et membre du Conseil municipal, (décision du Conseil municipal du 4 novembre 1893).  Malgré ces dons et cette nomination rien n'évolua. Autres intervenant : Hippolyte Durand-Tahier, qui comme secrétaire général de la Société des Beaux-Arts fit en sorte que l’État offre en 1894 à la ville une copie (180x225) de « La Liberté guidant le peuple » de Delacroix par Henri Lerolle, (1848-1929). Cette toile fut exposée la salle des délibérations du conseil municipal jusqu'aux bombardements[5].

     

    Il fallut attendre l'année 1901 pour que Étienne Port, (4 novembre 1860 - 11 février 1924), conservateur de la Bibliothèque et professeur au Collège, réussisse à persuader le maire, Baptiste Auguste Lechat, (1848-1928), de la nécessiter de concrétiser le projet. Le site fut proposé par lui, deux pièces de la bibliothèque, composée d’un ancien bureau au rez-de-chaussée, (longue pièce basse de plafond, avec une petite cheminée prêt de la porte et deux fenêtres étroites du même côté, et un autre à l’autre bout), et d’un espace au premier étage. On réfléchir à la constitution de la nouvelle commission et aux sections qui composeraient le musée :

     

    La section des Beaux-Arts fut confiée à Étienne Port, Charles Bergman artiste graveur nazairien, alors élèves aux Beaux-Arts à Paris[6] ; Paul-Joseph-Henri Barbara, (déjà cité) ; et Aimé-Victor-François-Joseph Tertrais, architecte de la ville[7] ;

    L'Ethnographie, à Marie-Théophile Griffon du Bellay, médecin, ancien explorateur, directeur du Service de Santé[8] ;

    L'Histoire naturelle, à monsieur Journet, principal du collège ; au médecin de marine Dauvin ; Thomas, professeur des sciences naturelles au collège ;

    L'Archéologie : revint, bien sûr, à René de Kerviler[9], l'ingénieur des ponts et chaussées Poisson ; au docteur François Merson[10], et le pharmacien nazairien François-Marie Corbineau[11] ;

    Et on ajouta Fernand Gasnier, ancien maire, pour la forme.

     

    Le projet était ambitieux. On s'adressa au Préfet pour avoir l'accord de création, qui fut rendu le 26 décembre 1901,

     

    Le 12 juillet 1902 eut lieu la réunion de la première commission présidée par Lechat. Monsieur Barbara fut nommé premier-vice-précisent ; monsieur du Bellay, second-vice-président ; monsieur Poisson, secrétaire. La présidence revenait au maire.

    Un budget de 1.000 fr fut promis par la municipalité, qui s'engagea à faire les démarches auprès de l'Administration des Beaux-Arts, qui donna 500 fr, et fit dotations de tableaux, sculptures et dessins : et près des artistes fréquentant la région pour l'obtention de dons. Les réunions, projetée trimestrielles, furent en réalité biannuelles. Les œuvres rassemblées par des acquisitions anciennes non répertoriées avec exactitude, et l’envoi par l’Etat de deux tableaux, « Gorges et Montagne » d’Empis et une copie par Nicolas-François Lorrain du « Concert » de Gerard ter Borch.

    Citons parmi les premiers donateurs :

    Monsieur Griffon du Bellay qui donna des pièces ethnologiques rapportées de ses explorations en Afrique de l'Ouest, mais aussi une robe de la reine Pōmare IV de Tahiti, accompagnée d'une lettre de celle-ci  ; monsieur Vié, ancien agent de la Compagnie Générale Transatlantique à Fort de France, en fait celui-ci avait pillé le site de la ville de Saint-Pierre rasée par une éruption volcanique le 8 mai 1902, en récoltant des « souvenirs » qu'il offrit à la ville de Saint-Nazaire, dont une copie en fonte de l'Enfant au dauphin d'Andrea del Verrocchio qui décora la borne fontaine du Jardin des Plantes, (disparue durant l'Occupation) ; monsieur Daigremont[12] offrit un portrait de son grand-père le général baron Guillaume François Daigremont, (1770-1827), avec ses médailles, à la condition qu’elles furent exposées avec dans un cadre sous-verre ; monsieur Bergman offrit la maquette de son affiche pour le casino de Saint-Nazaire, ainsi qu’un cadre contenant trois de ses eaux fortes exposées au salon de 1899, qui sont toujours en possession de la ville[13].

     

    musée saint-nazaire

    Eaux fortes de Charles Bergmann exposées au salon de 1899, (15x19 chacune) ; © Ville de Saint-Nazaire

     

    Monsieur de Kervilers des photographies des travaux du bassin de Penhoët ; il y eut aussi des dons plus éclectiques pour les sections ethnographiques et des sciences naturelles : des briques tunisiennes, un gongue en jade, souvenir d’un voyage en Chine, un lot d’objet celtiques (non détaillé dans le rapport), et un nid de guêpe trouvé à Saint-Brévin à destination. Durant la réunion du 22 novembre 1902 on vota l’acquisition d’aquarelles d’artistes locaux, qui furent mise sur le budget de 1903.

    Il n’y eut aucune activité ni réunion durant l’année 1904.

     

    En février 1905, Philippe Delaroche-Vernet, alors chef adjoint du cabinet du ministre de la Justice, et qui espérait faire carrière politique en Loire-Inférieure[14], qui avait fait en 1902 un don numéraire, offrit une gravure par Gautier d’après Horace Vernet, « Zouaves à l’assaut », (toujours en possession de la Ville), et deux autres d’après Paul Delaroche, dont une par Prevost, (toujours en possession), deux artistes peintres dont il était respectivement l’arrière-petit-fils et le petit-fils.

     

    musée saint-nazaire

    Gautier d’après Horace Vernet, « Zouaves à l’assaut », 40x33, © Ville de Saint-Nazaire

     

    La Commission fit acquisition d’une toile d'Auguste Bellanger (1862-1933) : « Au pays du sel », qui reçut la médaille d’or à exposition à Nantes en 1904, choisi pour la valeur de l’œuvre comme du sujet local. L’artiste consentit à descendre le prix de 1200 fr à 800 fr. cette acquisition risquant cependant d’absorber le budget, monsieur Molés[15], offrit 500fr, la Commission acquit grâce à ce don une autre toile, « La chanson de la mariée », qui disparues dans les bombardements[16].

     

    musée saint-nazaire

    Camille Bellanger :« Au pays du sel », (250x150) © Ville de Saint-Nazaire.

     

    Messieurs de Kervilers et Poisson ayant été mutés par les Ponts et chaussées, on les remplaça par messieurs Rabineau, receveur de l'enregistrement, et Beilvaire, conducteur des Ponts et Chaussée, dessinateur, peintre et aquarelliste[17].

     

    Le musée devient rapidement trop petit. On proposa l’achat de collection de minéraux de monsieur Malplâtre, cordonnier au Pouliguen qui avait rassemblé des curiosités géologiques et des fossiles. Monsieur Thomas exprima que ce genre de collection ne convenait pas actuellement pour le musée ; la commission se rangea à son avis. Cependant monsieur Molés acheta au nom du musée la collection et la Commission fut obligée de l’accepter ; elle l’installa à l'étage au-dessus de la bibliothèque et l’on chercha un autre lieu pour le musée.

    Le musée assura l’ensemble de ses collections pour 100.000 fr

    En 1906 le maire, Baptiste Auguste Lechat, obtint de la Chambre de Commerce qu’elle céder l'usage de la salle de la Bourse de commerce, institution qui avait été supprimée.

     

    musée saint-nazaire

     

    On procéda à de nombreux travaux, avec l'idée d'inaugurer la nouvelle salle d'exposition à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle entrée, et de faire de l'ancienne salle du musée une salle pour les expositions temporaires, rebaptisée « salle Greuze ».

     

     

    musée saint-nazaire

    Exposition du 17ème salon du Groupe Artistique photographie en 1934 ; © Archives de la Ville de Saint-Nazaire. (Le nu est de Georgette Nivert, (1900-1960) – On observe aussi un portrait de George Eveillard par Charles Perron)

     

    La salle de la Bourse était dotée d’une verrière, il fallait installer des stores. Elle possédait une galerie qui en faisait le tour au niveau du premier étage, mais cette galerie était dépourvue de plancher et d’escalier ! Il fallait aussi acquérir des vitrines, des cimaises. La grille placée devant la porte vitrée de la salle n’allait pas jusqu’au cintre, il fallut la rehausser.

     

    musée saint-nazaire

    L’ancienne Bourse, au centre, à droite la bibliothèque musée, à gauche la chambre de commerce, carte postale J.-B. Joubier, Saint-Nazaire, coll. David Silvestre

     

    Monsieur Daigremont retira le portrait de son grand-père et ses médailles en échange d’une huile de Picou, (disparue dans les bombardements). La commission procéda à son premier achat d’une aquarelle du peintre Alexis de Broca[18], pour la somme de 200 fr. De Broca donna en plus une petite aquarelle figurant des marais. Monsieur Journet, décédé, fut remplacé au poste de principal, monsieur Cognel, qui le remplaça aussi à la Commission du musée, mais il décéda quelques mois plus tard, et ce fut monsieur Delâtre, professeur de dessin au collège qui pris sa place au conseil. Fernand Gasnier lui aussi décédé, ne fut pas remplacé malgré la sollicitation de la Commission.

    Monsieur Tertrais fut nommé secrétaire en remplacement de monsieur Poisson.

     

    Le manque de budget fit que qu'on repoussa l'ouverture et il fallut l'intervention d'Aristide Briand, alors ministre de l’Éducation publique et des Beaux-Arts. On se pressa de finir les travaux, d’autant que monsieur Port devait partir à Paris, où il devait devenir inspecteur général de l’Université. Il accepta de retarder son départ jusqu’en août 1907. Afin de mieux doter le musée, et de lui donner un caractère pédagogique, Aristide Briand fit offrir par son ministère un lot de 139 pièces issues des collections du musée de Sèvres, d’une valeur de 10.209 Fr, composé autant d’élément enseignant la fabrication de la porcelaine et de la céramique, que d’autres ayant un caractère décoratif, lot qui est encore dans son intégralité possession de la Ville. Cadeau empoisonné, il fallut payer le transport, et acheter pour 8.000 fr de vitrines. Il fut ajouté par les Beaux-Arts cinq tableaux, (non détaillés), quatre bustes en plâtres, (Buffon, Condorcet, Pécheur napolitain, La Pérouse (toujours en possession de la Ville), et la statue d’un jaguar dévorant un lièvre, plus un dessin et d’un lot d’estampes (non détaillé).

     

    En mai 1908, un comité formé de Nazairiens, avec sa tête monsieur Bonin, pilote, força la municipalité de Saint-Nazaire à accepter dans le cadre des fêtes de l’inauguration de la Nouvelle-entrée les 21, 22, et 23 septembre 1907, un grand plâtre, désignée comme « maquette de la statue La Glorification du Travail », qui fut placée à titre de décoration provisoire à côté du pont des Frégates. On l’entreposa au musée, en attendant de l’exposer dehors durant la fête ; elle finit au sous-sol, et fut perdue durant les bombardements.

     

    Les travaux trainèrent, la Ville, malgré des sacrifices pour acquisition et financement des travaux, n’avait pas de moyens à consacrer à l’installation du musée. Étienne Dujardin-Beaumetz, artiste peintre et sous-secrétaire d'état aux Beaux-Arts, à la demande d'Aristide Briand, qui était passé à la Justice, de visiter à l'improviste le chantier le 3 août 1908 pour vérifier la réalisation des travaux. Le résultat était pitoyable ; outre la médiocrité des collections municipales, rien n’était achevé. La Commission décida de cacher le plafond avec une toile tendue.

    Il fut convenu que l’inauguration le 30 septembre 1908, ce qui dispensa les ministres de venir se compromettre, mais que le Ministère financerait une partie des travaux.

     

    Étienne Port, devenu chef de cabinet du nouveau ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, Gaston Doumergue et Inspecteur général de l'économat des lycées et collèges, fut remplacé le 14 mai 1908 par Aimé Tertrais comme conservateur par choix de la préfecture pour le remplacer, au détriment de Charles Bergman, avec un traitement annuel de 400 fr[19]. Il décréta que les horaires d'ouverture seraient le dimanche de 13 h à 16 h, que l’entrée serait gratuite, mais qu’il faudrait aller chercher la clef chez le concierge de la Chambre de Commerce qui logeait de l’autre côté de la rue ! En hiver, on déplaçait le calorifère de la bibliothèque dans la grande salle du musée…

    Le 19 février 1910 la Commission décréta : « Au sujet de l’achat d’un tableau de monsieur du Puygaudeau, la Commission décide en principe l’acquisition d’une œuvre de l’artiste monsieur du Puygaudeau demande que le tableau présenté soit acquis par le musée jusqu’au moment où il le remplacera part « un effet de lumière ». Cette demande est refusée. La Commission choisira entre plusieurs tableaux de l’artiste et décidera si l’un d’eux doit être acquis. » Monsieur Singer, commerçant nazairien qui peignait en amateur, offrit un tableau figurant l’ancienne église, et un autre composé de plusieurs vues de la ville, (ce dernier est exposé à l’Ecomusée, l’autre a disparu dans les bombardements).

     

    29 novembre 1910 : « La Commission, décide l’achat de deux tableaux de monsieur du Puygaudeau, intitulés Kervodu et La Vigie romaine pour le prix de 800 fr », ces deux toiles sont toujours en possession de la Ville[20].

     

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    La Vigie Romaine, photographie prise le 18 septembre 2020.

     

    Etienne Port sollicita le mécéna du baron Edmond de Rothschild, membre de l’Institut, qui accepta d’offrir un paysage de Le Poitevin, et « Effet du soir » de Bissy, perdue durant les bombardements. Il fut aussi accepté le don d’un portrait de gentilhomme du début du 18ème siècle, pris pour celui de Louis XIV, alors qu’il n’en a pas le visage, toujours en possession de la ville[21].

     

    Durant toute l'entre-deux-guerres on se plaignit plusieurs régulièreent dans la presse de l'état du bâtiment du musée, de ses dimensions trop petites, que la salle d'exposition provisoire, ancienne salle du musée, affectée aux vernissages de Groupe Artistique, était sombre et basse. Le musée achetait chaque année trois toiles, mais cela obligeait d'en décrocher trois autres et de les descendre à la cave. La conservation même des œuvres laissait à désirer en raison de l’absence de chauffage en hiver, les effets caniculaires de la verrière en été. Edmond de Rothschild offrit en 1912 « Invitation » de Bernard, Venise par Alfred Smith, et « Chemin de la ville », par Langée, deux toiles encore en possession de la Ville. Le budget d’achat fut, en raison d’absence d’acquisition durant l’année 1911, d’un montant de 2.000 fr en 1913. Le Comité choisissait des toiles contemporaines très classiques, paysages, natures mortes ; rien n’était esthétiquement osé, on ne dépassait pas les choix d’un père de famille pour décorer son salon.

    Les acquisitions se poursuivirent durant la première guerre mondiale, avec jamais plus de 600 fr de dépense. Notons qu’en 1916, année durant laquelle il fut acheté pour 300f « Zouave », (perdu), par

    Georges Eveillard[22], peintre Nantais affecté aux services d'illustration des armées, il fut affecté à la réalisation d'aquarelles des troupes débarquant et stationnées à Saint-Nazaire. A l’armistice, il intégra le Groupe Artistique de Saint-Nazaire[23], et devient le premier professeur de peinture et de dessin de notre ville.

     

    Le 17 février 1921, en raison de l’arrête du Oréfet du 31 janvier 1920, il fut décidé par voix de tirage au sort à la désignation des membres, dans une première série qui devaient sortir au bout de cinq ans, et une seconde au bout de 10 ans.

    A l’issu du tirage au sort, devait sortir dans 5 ans : messieurs Devéria, Thomas, Despêcher, Leborgne, Cousin, Lebreton ;

    dans 10ans : messieurs Delâtre, Méloche, Guichard, Lamoureux, Lainé, Pasquier.

     

    24 février 1921, la Commission sollicita un envoi de l’Etat, ce qui ne fut pas entendu.

     

    le 27 septembre 1923, sur décision du Maire, les collections d'histoire naturelle fut répartie dans les établissements scolaires de la ville ; ces collections se détérioraient au Musée où elle étaient décrite comme entassées par la Commission du Musée.

     

    Le 3 février 1924 fut faite l’acquisition d’une collection de pièce oléographiques appartenant à monsieur Merlon, pour la somme de 2000 fr. C’était en réalité la moitié de la collection, le budget ne permettait pas d’en acquérir l’intégralité, et aucun mécène ne fut démarché.

    En février 1925 messieurs Lecomte et Eveillard entrèrent au Comité, remplaçant monsieur Thomas, démissionnaire, et Leborgne, décédé. Ils avaient été précédés en 1921 par messieurs Lamoureux et Méloche, membre du bureau du Groupe Artistique. Les acquisitions se firent à partir de cette date uniquement auprès des membres du Groupe Artistique. Ces achats par copinage furent, en dehors des acquisitions d’œuvre d’Alexis de Broca, dont le travail est l’alliance de l’excellence de la maitrise et d’un tallent indéniable[24], ces achats, donc, furent des très mauvaises opérations. Le Comité achetait cher des œuvres qui n’auraient jamais de côte, toujours dans les goûts d’un conventionnel petit bourgeois. Pire, alors qu’il aurait pu acquérir, même au sein du Groupe Artistique, des œuvres régionalistes dans leur figuration, qui auraient pu constituer une collection cohérente, les choix étaient sans logique muséale. Pour se donner une idée de la situation et de l'absurdité des achats, il suffit de lire un article en date du 2 février 1926 et publié en L’Ouest-Eclair :

    « La commission d'achat pour le musée de Saint-Nazaire réunie sous la présidence de M. Tertrais, avait à faire l’acquisition d’un tableau. On hésita longtemps entre Les nymphes s’amusent de Chautron et La vallée de la Loire de Deltombe. Les personnes de la commission étaient fort perplexes. Je ne sais si, comme cela se pratique à d’autres endroits, on joua à pile ou face, mais finalement c’est Deltombe et sa vallée qui furent choisis. » 

    Le registre de la commission ne retranscrit pas la façon dont le choix fut fait, mais il précise que ce tableau de Paul Deltombe fut acquis pour 2.000 fr., ce qui corresponde à-peu-près à deux mois de salaire d'un ouvrier de 1926.

    Le musée, qui depuis sa fondation ressemblait à une salle des ventes, devint un fourretout. Ces mauvais choix d’achat eurent un effet désastreux quand l’Etat demanda une évaluation des œuvres détruites pour procéder à la distribution des dommages de guerre. De façon général, sous le contrôle de des dirigeant du Groupe artistique, le musée se sclérosa, s’embourbant définitivement, bien que des expositions de grande qualité furent organisées par eux au musée, mais toujours tournées vers le 18ème siècle.

     

     Le 31 janvier 1926 madame Port, veuve, offrit une série de gravure du Vieux Saint-Nazaire.

     

    Entre les 1er février 1931 et 1er mars 1931, la Commission demanda augmentation de crédit pour achat de tableaux d’un montant de 13.000 fr ! La Municipalité refusa. Après plusieurs années de négociation, le budget qui était de 1.700 fr passa à 2500fr le 29 janvier 1933, ce qui n’empêcha pas une nouvelle demande de crédit à auteur demandent de crédit.

    Une nouvelle difficulté se présentât : la Chambre de Commerce désirait reprendre la salle. Déjà elle occupait pour diverse manifestation l’espace en semaine.

     

    Le 30 octobre 1934 la ville se vit héritière de la collection de mademoiselle Lehuédé, qui composait le « muséum d'histoire naturelle de Batz », composée d'oiseaux, de poissons, et de crustacés naturalisés, de pierres et fossiles. Les héritiers naturels n'ayant pas émis d’opposition à ce lègue, le don fut accepté par la municipalité en juin 1935. En dehors de l’acceptation de ce dont, il n’y eu plus d’autre lègue, don, ou acquisition. La situation s’empira avec une discorde née entre les dirigeants du Groupe Artistique, et ce qui allait constituer le groupe de Seiz Breur, dirigé par René-Yves Creston, entré en dissidence en 1936. Les dirigeant du Groupe Artistique furent forcés par le maire, François Blancho, de se réconcilier avec les Seiz Breur, fort d’avoir obtenus le contrat pour la réalisation du pavillon de Bretagne à l’exposition de 1937, en acceptant les courants contemporains.

     

    En 1935 la municipalité Blancho inaugura une nouvelle salle d'exposition muséale au premier étage des halls rue du Bois Savary.

     

    musée saint-nazaire

     

    La salle d’exposition des halls en 1935, parue dans Le Populaire, © Archive de Saint-Nazaire.

     

     

    Le musée se divisa en plusieurs site, les beaux-arts aux halls, l'ancien site devant conserver la salle de minéralogie et devenir un musée ethnologique local avec exposition des maquettes de navires et des installations portuaires, sous la direction de la Chambre de commerce.

     

    La nouvelle salle permit à la ville d'obtenir le prêt de tapisseries anciennes du Mobilier nationales pour une grande exposition, qui fut la dernière, notable, d'avant-guerre. Si l’espace des salles d’exposition était formidable, il faut cependant avouer que c’était d’une froideur effroyable, les collections municipales ne pouvant occuper l’espace sans paraître perdues dans l'immensité. En 1938, année ou monsieur Tertrais démissionnât de ses fonctions de conservateur, et fut remplacé par monsieur Eveillard, qui se faisait nommer par chacun et sur son papier à lettre : « Maître Eveillard ».

    En 1938 le musée n’avait que 28 sculptures, (dont 25 en plâtres, un buste en marbres intitulé « Sortie des vêpres » d’Agathon Léonard, une tête en bronze de Saint-Jean-Baptiste d'Edmond Decas, et une sculpture d’Antonin Larroux, figurant une bretonne, en bois (ces trois dernières toujours en possession de la Ville), mais dont 10 étaiebnt à l'Etat) ; 137 tableaux, (dont 31 à l'Etat), 44 aquarelles et dessins, (dont 1 aquarelle à l'Etat), et 39 gravures, (dont 2 à l'Etat). La ville n’avait pas de véritable fonds muséal, juste une collection dont les trois quarts n’avaient de véritable intérêt artistique. La section de sciences naturelles et ethnologique était d’une pauvreté affligeante, on y avait entré depuis qu’une massue indigène de Nouvelle-Guinée offerte en 1922 en même temps qu’une collection de coquillages à la condition qu’ils soient mis sous étiquette « don de madame Pontallier ». Fait consternant : nombre d’œuvres décrochées par manque de place, avait été remisées dans la cave de la Chambre de commerce, où l’humidité les détériorait !

     

    François Blancho enfonça le clou vis-à-vis de la Commission du musée en imposant d’accepter une gravure de Creton, et d’acheter pour 1500 fr une peinture du nazairien et Seiz Breur Émile Guillaume, que ces messieurs avaient jusque-là snobé en le considérant comme un décorateur de restaurants et un affichiste. La couleuvre à avaler se nommait : Les Chômeurs, (perdu[25]). Si le geste de monsieur Blancho mérite un salut, car il se voulait faire entrer le musée dans le 20ème siècle, il faut cependant reconnaitre que cela se limita à pousser en avant deux artistes locaux qui avaient pour eux l’instant d’une mode pour les mettre en lumière, dont la survivance sur le marché de l’art ne pouvait être que sur un moyen terme, et que ce geste ne fut pas renouvelé. Monsieur Blancho finit par faire dissoudre le Commission. Il laissa les pleins pouvoirs en matière d’acquisition à monsieur Eveillard, qui, libéré des désirs et visions étroites qui lui avaient été imposées jusque-là par les membres de la Commission, fit entre 1939 et 1943 une dizaine de tableaux par achat, d'un gout sûr, mais plus avec un regard d’enseignant que de peintre, et toujours sans logique muséale, faisant primer que les collections du musée devaient servirent à l’école municipale des Beaux-Art qu'il dirigeait[26]. Il fit entrer dans les collections des nues, type pictural jusque-là absent.

     

    La disparition du musée et les œuvres rescapées :

     

    Saint-Nazaire fut transformée en un fleuve de feu le 28 février 1943. Trois cents quadrimoteurs étasuniens larguèrent durant plus de deux heures des bombes explosives et incendiaires créant six-cents foyers d’incendies, détruisant près de la moitié de la ville, terrorisant une population déjà très éprouvée depuis 1942. Les photographies des ruines ne peuvent laisser imaginer le cauchemar de fut le 28 février 1943. Le phosphore des bombes incendiaires était une lave visqueuse qui s’écoulait par les ouvertures des bâtiments éventrés, s’insinuant dans les moindres interstices. Les nazairiens perdirent tout ce qu’ils possédaient. Charles Beilvaire, ancien membre de la Commission, peintre, aquarelliste et dessinateur, alors âgé de 82 ans en 1943, ne récupéra à la Libération qu’un seul de ses dessins dans les ruines de sa maison[27]. L’évacuation de la Population et des biens municipaux avait déjà été organisée depuis fin 1942. On avait ainsi envoyé à Nantes les vitraux de l’église Saint-Gohard, (ils sont entreposés aujourd’hui dans une réserve de la ville), les archives anciennes, antérieur à 1800, avaient été aussi envoyées à Nantes, mais les archives récentes, surtout celles du 19ème, étaient dans des caisses qui attendaient un lieu de stockage à l’extérieur de l’agglomération, tout comme le contenu de la bibliothèque. Le musée avait été vidé, seules dans la cave de la Chambre de Commerce restaient ce qui était trop lourd, et qu’on avait souvent entassé là depuis le début, comme le mobilier archéologique retiré du sol au moment de l’urbanisation du site de l’ancien Prieuré, qui était devenu la place Marceau, (Ruban Bleu). Cependant, par absence encore une fois de lieu de stockage hors Saint-Nazaire, les œuvres avaient été réparties en plusieurs lots dispatchés dans différents lieux, généralement des caves ou des garages des Administration[28]. Le bombardement du 28 février 1943 ne laissa aucune chance de survie aux œuvres, sauf une trentaine de tableaux et aquarelles encadrées, une dizaine de plâtres, un lot d’aquarelles et de gravure non encadrés, rescapés miraculeusement d’une cache, et rassemblés par la municipalité dans les sous-sols de la caserne de La Briandais. Le 8 mars 1945, quelques mois avant la Libération, il fut mis à disposition de la Ville six salles au Musée Dobrée à des fins d’exposition, mais on n’avait rien à y exposer, bien que la ville reçue le 4 juin 1945 pour la reconstruction de son musée 31 tableaux, de la part d’artistes liés au Groupe Artistique, (Yvonne Carro, Henry Vollet, Emile Gauthier, Noéls Cuillaud, Michel Colle, Michel Brun, Xavier Josse, Emile Simon, Georges Lhermitte, Henry Prévost, Paul Lemasson, Laure Martin, Henry Leray, Alice Carissan, Charles Perron, Vincent Cermignani), ou de famille d’artistes, (Lauthe, Chautron, Lerolle), mais aussi un tableau de Volot offert parmonsieur Gautiers, instituteur nazairien ; et le sculpteur Henry Drop’Sy deux plaques de bronze[29].

    La survivance de la collection fut laissée à la caserne de la Briandais, et l’ont entrepris après l’institution de la Loi du 28 octobre 1946 d’obtenir les indemnités de guerre dues pour les pertes et détériorations, ce qui concernait à la fois les collections, le mobilier d’exposition, (vitrines, encadrements, etc.), et le bâtiment. La Ville prouva qu’elle avait tout mis en œuvre pour la mise en sécurité des collections, et prévu l’évacuation.

    Il y eu alors un moment de désintéressement, entre 1952 et 1954. La Municipalité avait à reloger les nazairiens et reconstruire ses bâtiments et structures, le musée n’était pas la priorité, mais le directeur des musées de France s’en inquiéta de ces deux années de silence le 3 décembre 1954. De son côté R.Y. Creston envoya la même semaine à François Blancho le projet d’une création d’un musée national de la construction naval… 

    La procédure pour l’obtention de dommage de guerre se poursuivit cependant, mais l’Etat jugea que les collections étaient sans valeur marchande véritable, qu’on s’était contenté à tort de choisir des artistes régionaux, ce qui à l’époque était presque synonyme d’insulte dans les milieux parisiens, mais qui n’était pas sans fondement dans la mesure où ses artistes n’avaient pas de côte marchande ; quant aux œuvres muséales acquises avant 1920, elles correspondaient à des peintres passés de mode, si non oubliés, jugés « pompiers » ou « bons pour un couvercle de boite de chocolat » par les conservateurs des grands musées d’alors.

    Si l’Etat rechignait à indemniser à la hauteur des montants espérés par la ville, il encourageait à la recréation d’un musée, et pour ce faire, fit en 1949 l’envoi de quinze tableaux, comprenant un Matisse, via la Direction des Musées de France (DMF). Cet envoi obligea la municipalité à confier celui-ci, ainsi que les œuvres rescapées, aux Pompiers, afin de garantir une sécurité incendie. Les Pompiers d'abord logé dans la caserne de La Brindais avec les autres services municipaux, transportèrent la collection au grès des relogements, et finirent par entreposer dans un appartement de leur caserne, tableaux, aquarelles, gravures et dessins, et reléguant les plâtres dans un caveau dans la cour. La Ville était désireuse de ce musée qui aurait dû être construit place Laborde, côté Nord, avec une passerelle par-dessus l’avenue de Lesseps pour le relier par le dernier étage à celui de l’école municipale des Beaux-Arts. Le projet fit long feu, pourtant jusqu’à sa retraite en 1959, monsieur Eveillard démarcha tous les musées français pour aider à la reconstitution de celui de Saint-Nazaire. Celui d’Angers donna 16 tableaux. Monsieur Eveillard démarcha aussi les anciens consulats nazairiens repliés à Nantes en vain, le plus part de ces pays étant ruinés. Monsieur Eveillard parcourait la région pour tenter d’acheter des œuvres qu’on lui proposait à la vente, à une époque où le marché de l’Art en France ne reprenait pas en dehors de Paris. Ses efforts n’aboutirent pas ; on ne le remplaça pas à son départ en 1959, et en 1963 le musée était l’eau. Un inventaire des œuvres gardées par les Pompiers fut alors dressé sur une seule feuille, accompagné de commentaires sur les dégradations subies.

    On envoya ce qui restait du musée dans la cave de la bibliothèque qui avait été logée au manoir du Sable, au jardin des Plantes. L’Etat récupéra son envoi de 1979. A partir de cette période, les lieux de stockage changèrent régulièrement, avec des conditions de conservation alarmantes.

     

    Pourtant la Ville continua à espérer des indemnités de guerre conséquentes, indemnité qui concernait le Musée, mais aussi les collections municipales hors musée. Mauvaise surprise, sur décision ministériel du 13 novembre 1961, l’indemnité espérée depuis 1946 fut fixée à 48.330 fr, une misère ! Recours de la Ville le 5 janvier 1962, face à un Etat qui signifia que la Ville n’était pas en mesure d’espérer plus. De pourvoi en pourvoi, d’expertises, en contre-expertises, l’affaire perdura. Le Ministère de l’équipement et du logement se montrât tout aussi radin, et ferma les négociations le 19 aout 1971. Le 10 novembre 1971 devant la Commission Régionale des Dommages de Guerre de Paris qui ne voulue pas ajouter un centime malgré les cris de la municipalité nazairienne qui estimait que ces peintres « régionalistes », était sous-estimés par l’Etat, mentionnant que ces peintre régionaliste, tels Mauffra ou du Puygaudeau, se monnayaient alors 20.000 fr et 10.000 fr respectivement, et que des canons de marine, appartenant aux collections hors musée, se vendaient alors 5.000 fr, et cria à l’injustice, non sans raison, argumentant que Saint-Nazaire ne pouvait envisager de reconstituer un musée sans des indemnités honnêtes et à hauteur de la valeur marchandes de ce qu’elle avait perdu et quand une aide du ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, elle n’arriverait à rien. Constatons cependant que la Ville fit dans ces démarches deux erreurs : la première est qu’elle se débrouilla mal en choisissant pour experts des commissaires-priseurs, alors qu’il aurait fallu des historiens de l’Art et des critiques pour fait poids devant une intelligentsia parisienne méprisante par nature ; la seconde fut de confondre dommages de guerre et besoin de subvention pour réalisation d’un nouveau musée. Il en résulte une confusion qui est d’autant plus difficile à comprendre pour le chercheur par le contenu parcellaire du dossier.

     

    En 1972 la municipalité se décida à renommer un conservateur, afin de constituer une collection. Ce fut monsieur Emile Gautier, (1920-2013), artiste peintre, connu pour ses tableaux de la Presqu’ile, qui fut désigné. Il fit quelques acquisitions, acceptant surtout des dons, sans trop réfléchir, augmentant le bric-à-brac des réserves qu’il ne sut pas organiser. Une grande restauration des tableaux les plus importants, tant pour leur valeur historique que monétaire, fut entrepris en 1987 après la nomination de Jean François Pierre en 1986 comme conservateur qui procéda à récolement accompagné de photographies malgré le manque de moyens octroyé à ce monumentale travail. Mais le travail de monsieur Pierre ne connue pas de suite. On exposa à certaines occasion certaines pièces, une partie considérée comme historisante fut durant des années présente dans les couloirs de l'Hôtel de ville ; entre la création de l’Ecomusée qui réorienta la politique d’acquisition, une indifférence des élus successifs durant ce qu’il convient aujourd’hui, sans rire, de nommer « l’ère Batteux », et que chacun jugera à sa guise, il résulte qu’on se désintéressa totalement de ce qui restait de l’Ancien musée, mais aussi de tout ce qui avait été rassemblé depuis 1946 par achat ou dons. Précisons que ce qui constitue la collection de l’Ecomusée est sous une responsabilité et une gestion différentes, et que les collections ne sont pas stockées ensembles, quoique certains éléments de la collection dite de l'Ancien musée, se trouvent exposés à l'Ecomusée. La dernière exposition d'œuvres artistiques de la collection se déroula en 1997. On confia le fonds municipal à une administration différente entre 2000 et 2014, dont le travail est plus que discutable, même si la réalité des financements médiocres entre dans en ligne. Ce que  l'auteur de ce blog vit durant une visite d'une ancienne réserve en 2008 était à faire hurler. Pour ne rien arranger, à cette époque, à la fin de la municipalité Batteux, il était impossible de savoir qui avait la responsabilité véritable du fonds, tant l’organigramme et les délégations à des tiers extérieurs, prestataire privés ou agents d’autre administrations, étaient dignes des plus grandes absurdités d’une dictature communiste. On émit que cela relevait de celle de la Documentation, service qui avait à charge les Archives, et l'on commanda un inventaire à ce service, inventaire mélangeant aussi le contenu des réserves de l’école d’art, sans raisonnement scientifique, car on n’avait finalement demandé qu’un catalogue avec photographies à rendre rapidement. Composé dans un classeur bleu, que l’auteur de ce blog eut l’occasion de feuilleté un matin qu’on l’oublia sur la table où il avait pris place, il disparue avec sa version numérisée de l’intranet municipale au départ de la municipalité Batteux pour des raisons ignorées.

     

    La collection dit de l’ancien musée en 2020 :

     

    Aujourd’hui la Ville de Saint-Nazaire procède à un récolement scientifique, documenté, avec restauration des œuvres issue de l’ancien Musée, et aussi de ce qui constitue la collection municipale, dont l’usage comprend des pièces muséales et décoratives à destination des bureaux et salles municipales. Ces travaux prendront des années, auront un coût important, mais ils ont pour but, outre la conservation et la pérennité, de faire redécouvrir prochainement aux Nazairiens ce qui constitue le patrimoine de la Ville.

     

     

     

     

    [1] Auguste-Joseph Desanges, maire de 1875 à 1884.

    [2]Alcide Bord donna trois bols trouvé durant ces travaux.

    [3] 21 mars 1889.

    [4] Né à Orléans le 26 juin 1844, époux de Marie-Joseph Giraud, il fit l’essentiel de sa carrière en  Gironde, et arriva à Saint-Nazaire en 1886. Il eut plusieurs enfants, dont le dernier, Louis-Léopold, futur curé à Dieppe, naquit le 17 août 1894 à Saint-Nazaire.

    [5]  Registre des délibérations du conseil municipal de la ville de Saint-Nazaire du 6 mars 1894 : Cette copie a été offerte par l’état à la ville de Saint-Nazaire en 1894 pour décorer la salle des délibérations du conseil municipal, grâce aux actives démarches auprès de l’administration des Beaux-Arts de M Hippolyte DURAND de Saint-Nazaire, secrétaire de la société des artistes libres- afin d’obtenir pour sa ville natale, la toile dont il s’agit. La toile est encore en possession de la Ville.

    [6] Il avait exposé au Salon à Paris en 1899, mais c'est pour ses lithographies publicitaires qu'il est aujourd'hui encore connu. Son père possédait les vapeurs faisant, à partir de 1885, la liaison entre Saint-Nazaire, Mindin et Paimboeuf, et qui perdit son activité en janvier1911 quand la concession fut cédée aux Messageries de l'Ouest. Un caveau au cimetière de La Briandais porte le nom de cette famille, mais est dépourvu de prénoms et de dates.

    [7] Aimé-Victor-François-Joseph Tertrais, (Vertou 14 mai 1869 – 24 janvier 1952 Vannes), fils d’un négociant établit au village de Beautour en Vertou, élève architecte écoles des Beaux-Arts promotion 1892-3, élève de Guadet. Diplômé en 1897. On lui doit le bâtiment du Service Sanitaire maritime, qui existe toujours derrière l'Usine élévatoire, réalisé en 1908 ; il réalisa la maternité de la ville inaugurée en février 1923, le pavillon vénéréalique de l’hôpital en 1924 ; l'école de fille (vers 1927), des maisons pour l'Office d'habitations à bon marché ; la restauration de l'église de Montoir et son école de fille en 1930. Célibataire, il habitait 14 place Marceau et fut à partir de 1922 membre du Conseil de l'Œuvre anti-tuberculeuse.

    [8] Le concernant, voyez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/06/un-explorateur-a-saint-nazaire-6141851.html

    [9] Le concernant, voyez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/24/rene-de-kerviler.html

    [10] Croisicais, Francois Merson, (1880-1948), était le fils du peintre et illustrateur parisien Luc-Olivier Merson, (1846-1920), chef d'atelier à l'École des Beaux-Arts de 1905 à 1910.

    [11] François-Marie Corbineau, né au cellier le 4 octobre 1845, reçu pharmacien à Nantes en 1872, conseiller municipal et adjoint au maire de 1889 à 1892, secrétaire du conseil d'hygiène et de salubrité de l'arrondissement de Saint-Nazaire, président du syndicat des commerçants en 1894.

    [12] George-Pierre-Joseph Daigremont, (Reggio 8 novembre 1857 – Saint-Nazaire 1 mars 1907), rentier, fit d'un lillois ingénieur des Pont et chaussées, et d’une mère était italienne, possédait un hôtel particulier au 68 boulevard Wilson, (ancienne numérotation), sa veuve, née Berthe de Montreuil du Clavier décéda en 1934.

    [13] Il offrit aussi un tableau en 1903, disparu durant les bombardements.

    [14]Philippe Delaroche-Vernet, (Paris10 novembre 1878 à Paris – Le Pecq le 12 septembre 1935), maire du Pouliguen de 1907 à 1922 ; conseiller général de la Loire-Atlantique de 1907 à 1925 ; député de la Loire-Atlantique du 8 mai 1910 au 31 mai 1928.

    [15] Il était entrepreneur de travaux publics et participa à la construction de la Nouvelle entrée du Port.

    [16] La Ville possède aussi une gouache signée A. Bellanger une gouache, « les bruleurs de goëmons » (25x40), mais c'est Adhémar Bellanger, non Auguste.

    [17]Le concernant, lisez : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2014/12/08/charles-beilvaire-un-peintre-nazairien-oublie-5505901.html

    [18]Alexis de Broca, (Le Havre le 3 septembre 1868 – Nantes 10 novembre 1948), peintre et dessinateur, membre du Groupe Artistique de Saint-Nazaire, il fut l'élève de Luc-Olivier Merson, dont le fils faisait partie de la commission du musée. La collection municipale actuelle conserve de lui trois toiles achetées durant les expositions du Groupe Artistique : Femme Arabe, 1922 ; portrait de monsieur Jourdrain (membre de la commission du Groupe artistique, et président du syndicat des commerçants),1924 ; portrait du maire Vivian Lacour, 1938 ; et une quatrième achetée après-guerre : Ruine de Zaghouan, 1951. Il est le grand-père du réalisateur Philippe de Broca.

    [19] Arrêté municipal du 15 août 1908.

    [20] La Vigie Romaine fut représentée au public par monsieur Emmanuel Mary, Chargé de mission - Ville d'Art et d'Histoire - Ville Éducative et Créative - Mission des Patrimoines, durant une conférence consacrée à F. du Puygaudeau, le 18 septembre 2020. Cette toile, dont le vernis s’est fortement assombri, doit faire prochainement l’objet d’une restauration ; elle mesure 50x81. Kervaudu, mesure 73x60.

    [21] Don Picard, accepté le 10 février 1910.

    [22] Georges Eveillard (Nantes le 2 juillet 1879 - Nantes le 25 février 1965), était un peintre d’inspiration postimpressionniste, représente essentiellement des marines et paysage bretonnant de l’estuaire de la Loire et quelques scènes de genre, décoré de la médaille d'Argent de l'Ecole d'Art des Batignolles, lauréat du Concours général de la ville de Paris en 1900, grande médaille d'argent de l'école d'Art de Montparnasse en 1901, premier prix de l'Ecole des Beaux-Arts de Nantes en 1902, premier prix de l'Ecole des beaux Art de Rouen en 1903, il fut officier d'Académie en 1911. Il devint durant l’entre-deux-guerres le portraitiste des officiels laïc, militaire ou religieux du département, comme Aristide Briand ; le maire de Nantes, Paul Bellamy ; Brichaud, maire de Saint-Nazaire ; le père Ricodel, le chanoine Guillon. En 1923 il devient officier de l'Instruction publique en 1923, chevalier la Légion d'Honneur en 1936, puis officier en 1953.

    [23] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2018/07/30/le-groupe-artistique-de-saint-nazaire-et-le-groupe-de-indepe-6069504.html

    [24]

    [25] La ville fit acquisition en 1975 d’une toile intitulée « L’Effort », en 1973.

    [26] Monsieur Eveillard manquait de sens administratif, ses papiers sont un désordre mélangeant papier personnels et documents ayant attrait au Musée, ce qui rend difficile leur analyse à la première lecture.

    [27] Ce dessin à la plume, figurant le Vieux Saint-Nazaire et le port jusqu’à la Vieille-Entrée, vus d’un bateau stationné dans l’estuaire, daté de 1897, est en la possession de l’auteur de ce blog.

    [28] La « Jeanne d'Arc à Domrémy » de Henri-Michelle Chapu, se retrouva sur une étagère du garage municipale, ce qui fit hurler dans Le Courrier de Saint-Nazaire, la journaliste Jacqueline Bruno (Pseudo de Renée Bernard), qui ne comprenait pas qu’on ne l’ait pas mise en une église ! Cette œuvre ets rementionnée dans une lettre du 3 juin 1930 signée du Commissaire Général de la Société des Artistes Français, qui l’évaluait à 300.000 fr.

    [29] Les locaux furent mis à la disposition de la Trésorerie Générale d’octobre 1946 à octobre 1954.

     

     

  • La Mécanique, statue disparue

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    La Mécanique vue de dos, carte postale vers 1938.

     

    En 1935, la destruction du palais du Trocadéro, édifié en 1878, fut décidée. Le bâtiment, couvert de statues, de bas-reliefs, attisa alors les appétits des villes de provinces qui espérèrent en avoir un morceau. Nantes fut la plus gâtée, elle hérita de quatre statues de pierre, La Botanique de Jean-Baptiste Baujault, La Forêt d’Edmond Chrétien, La Moisson de Jean-Paul Aubé, La Sculpture de Vital Gabriel Dubray. Hautes de 2m30[1], pesant 2 tonnes chacune, elles étaient à l’origine parmis les trente qui sommaient la rotonde du palais. Elles arrivèrent par la route le mardi 22 janvier 1936, et furent entreposées dans le parc du château. On les avait espérées, on les jugea démodées, et on ne sut pas quoi en faire, et durant le carnaval. Un char, baptisé « Où les mettre ? », défila. Elles sont depuis placée dans le parc de Procé.

    Monsieur Gauthier, conservateur du Musée des Ducs de Bretagne à Nantes, avait fait les démarches pour les obtenir, mais par sympathie pour la ville de Saint-Nazaire[2], il avait aussi obtenu que notre ville soit dotée de l’une de leurs sœurs. Les Beaux-Arts, propriétaires au nom de l’Etat de ces sculptures, hésita entre La Navigation[3] de Léon François Chervet, et La Mécanique du vosgien François Roger, (1843-1898). C’est cette dernière qui fut attribuée à Saint-Nazaire.

     

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    La Mécanique, entourée en rouge à son emplacement sur la rotonde du palais du Trocadéro.

     

    La Ville avait anticipé que si c’était La Navigation ont l’aurait placé dans le parc des douanes (à l’emplacement de l’actuel Ecomusée), et que si c’était La Mécanique, elle serait installée dans le Square de la Marine, face à la gare. Elle n’avait cependant pas compris l’exactitude des dimensions, et l’on demanda aux Beaux Art de ne pas l’envoyer trop rapidement, afin de lui construire un piédestal.

     

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    Construction du piédestal, Ouest Eclair du 10 mars 1936

     

    Le journaliste nazairien, René Geoffroy[4], commenta dans L’Ouest Eclair du 10 mars 1936, à propos de ce choix des Beaux-Arts : « […] n’est-ce pas un symbole frappant de ce qu’est devenue l’activité de notre ville ? La navigation a cédé le pas à la construction et aux réparations. La mécanique trône sans conteste, et ses heures « d’embauche » et de « débauche » passeront devant sa concrétisation, sauvée d’un destin destructeur. »

    La Mécanique fut installée sur son socle durant l’après-midi du 14 mars 1936. Le Populaire la jugea dans son édition du 15 mars 1936 : « pas de la meilleur inspiration ».

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    Le Courrier de Saint-Nazaire, pourtant d’habitude loquasse sur ce type de sujet, ne fit qu’un entrefilet dans son édition du 14 mars 1936, et publia en bas de dernière page une photographie avec son commentaire le 21 suivant.

     

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    Photographie publiée dans Le Courrier de Saint-Nazaire du 21 mars 1936.

      

     

    Cette statue disparue dans les bombardements.

     

     

    [1] Non 2m50 comme le publia plusieurs fois Ouest Eclaire en 1936. Lisez à ce propos la notice consacrée au palais du Trocadéro publiée en 1878 par Ve Morel et Cie, libraires-éditeurs à Paris.

    [2] C’est aussi grâce à lui que le groupe nazairien des Seiz Breur obtint le contrat de réalisation du pavillon de Bretagne à l’exposition universel de 1937.

    [3] Et non nommée La Marine comme l’écrivit à tort l’ensemble de la presse de l’époque.

    [4] Son article est signé « R.G. ».

  • Alphonse Pinguet

    Les halles de Méan sont l’un des rares exemples de l’architecture municipale de la ville datant du 19ème siècle. Si les Nazairiens connaissent le site, Alphonse Pinguet, l’architecte qui les réalisa, demeure encore inconnu de la population. Voici quelques éléments biographiques :

     

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    Les Halles en 1865 (L'Illustration 15 avril 1865).

     

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    Les halles de Méan-Penhoët © Ville de Saint-Nazaire

     

    François-Alphonse Pinguet, dit Alphonse Pinguet, est né à Saint-Benoit-du-Sault 16 décembre 1832, de Jean Pinguet, né en 1805, perruquier, et d’Adélaïde Saller.

    Il fut d’abord professeur de langues à Montmartre, mais ayant rencontré une nantaise, Marie-Constance-Emma Jaudeau, née le 13 décembre 1822, rentière, veuve de Louis-Emile de La Guérandière, il l’épousa à Nantes le 20 octobre 1856, et s’établit en cette ville comme architecte en 1857, et y fit venir sa mère alors veuve. De son union naquirent : Anthime, décédés le 31 décembre 1866, enterré au cimetière de La Briandais ; et François-Joseph, né à Nantes le 2 janvier 1863.

    Il commença à répondre à quelques commandes à Saint-Nazaire et fut rapidement remarqué par l’ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées, Paul Leferme. Il retrouva à Saint-Nazaire l’ingénieur entrepreneur Alcide Bord[1], natif comme lui du Berry. Alcide, qui participait aux travaux du port, et avait acquis pour spéculation la métairie de La Vacquerie et le vallon de Porcé, lui commanda la réalisation de plusieurs villas sur ce site. Ainsi, furent construis en 1858 les villas Les Glycines, Les Camélias, Les Acacias, toujours subsistantes à Porcé, et le château des Charmilles avec ses dépendances, dont il reste les ruines du château et la maison de plage, dite depuis villa les mouettes, dont la restauration va être entreprise par la municipalité. Il est intéressant ici de noter que ces demeures furent réalisées avec des matériaux préfabriques, (carreaux de ciments, briques, etc.), avec l’incorporation pour poutres de fer et de colonnes de fonte, avec des extensions ou dépendances sans fondations, mais simplement posées sur des bordures de granites, sur lesquelles reposent une structure en bois, entre les poutres desquelles sont assemblées des briques. C’est le cas pour les deux ailes encadrant la maison de plage du Château des Charmilles, mais aussi sur des annexes disparues : la menuiserie, les écuries, et le pavillon du gardien. Ce genre de méthodes de construction rapides et peu onéreuses ont été réfléchies par Viollet-le-Duc.

     

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    Le pavillon de plage du château des Charmilles à Porcé en 1905

     

    Alphonse Pinguet devint architecte-voyer de la ville en avril 1866, ce qui le rendit auteur des dessins des égouts de la ville, et l’incita à quitter Nantes pour venir s’établir rue de L’Hôtel de Ville avec sa famille. Il fut chargé de l’édification de nombreuses demeures et immeubles en ville, essentiellement autour de la place Marceau, dont certains pour le comte de l’ancien ministre de la Guerre, Alphonse Henri d'Hautpoul, qui spécula lui aussi à Saint-Nazaire. ces chantiers lui permirent de réaliser les premières fouilles et observations archéologiques nazairiennes. La ville lui fit la commande en 1875 de plans pour la transformation de l’ancienne minoterie en un théâtre de 700 place. Les plans furent exposés à la librairie Blanchet, où les Nazairiens se percèrent, la ville voulait créer une société par actions afin de mener à bien le projet, mais se montra incapable de le faire. Le théâtre ne vit pas le jour. En 1877, la municipalité lui fit la commande des Halles en 1877. Le bâtiment en fonte, est construit suivant la même méthode que les annexe précédemment mentionnées, la fonte remplaçant le bois, ce qui permet le transport sur un autre site de cette structure, en 1936, depuis le centre-ville jusqu’à son empalment actuel à Méan-Penhoët.

    Entre autres commandes notables, citons : la chapelle funéraire de la famille Bord ainsi que celle de la famille Delzieu, et quelques autres au cimetière de la Briandais, l'école (de garçons) de Saillé en 1882, toujours existante, et qui a conservé son aspect originel[2].

     

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    Plaque sur la chapelle Delzieux

     

     

    On lui confia le commandement des sapeurs pompiers de Saint-Nazaire, et il s'illustra particulièrement durant dans la nuit du 3 au 4 avril 1868 durant l’incendie dans le Port du paquebot La Floride, et avait organisé en 1870 un service d’ambulance à Saint-Nazaire. En 1875 il fut le sous directeur de section locale des Hospitaliers Sauveteurs Breton. Il reçut le vénéralat de la Loge l'Etoile des Deux-Monde vers 1872.

    Il fit parti de la commission chargée de trouver un local pour les cholériques en novembre 1884, et en 1887, il fut chargé de l’édification des immeubles entre la vieille-ville et le bassin.

    Alphonse Pinguet était membre de la Société française pour la conservation des monuments historiques et réfuta quelques-unes des affirmations de Léon Maître en question d'archéologie (lui-même en conflit avec René de Kerviler) en s'appuyant sur les observations du sol nazairien qu'il avait pu faire durant ses chantier[3].

    Sa mort, soudaine, fut relatée dans Le Phare de la Loire du 9 janvier 1888 : « On nous écrit de Saint-Nazaire, le 7 janvier : Ce matin à onze heures, dans la rue de Pornichet, monsieur Alphonse Pinguet, architecte-voyer de la ville, était à faire tracer une tranchée avec son fils et le nouvel entrepreneur des travaux d’égouts, lorsqu’il s’affaissa sans prononcer une parole, On s’empressa autour de lui, mais en vain, et monsieur le docteur Griffon du Bellay[4], appelé en toute hâte, ne put que constater le décès. Monsieur Pinguet, âgé de 55 ans, souffrait depuis quelque temps d’une maladie de cœur. Monsieur Pinguet était un homme instruit et laborieux. Il sera généralement regretté. »

    Il fut enterré au cimetière de La Briandais, en présence du sous-préfet Planacassagne ; du secrétaire de sous-préfecture s Bousseau ; de René de Kerviler ; du docteur Griffon du Bellay ; du conservateur des hypothèques Trévédy ; de Henri Duval, président de la chambre de commerce ; de presque tout le corps municipal ; d’un détachement des sapeurs-pompiers ; de messieurs Simon et Breton, officiers du génie ; de l’inspecteur primaire Labeyrie, etc. Le maire de Saint-Nazaire, Fernand Gasnier, fit le discours au cimetière. Sa sépulture a été dessinée par lui.

     

    Durant la séance du Conseil municipal du 22 janvier 1888, on établit l’annonce pour la recherche d’un successeur à Alphonse Pinguet, avec un traitement de 5.000fr l’an. Le 26 octobre suivant, le Conseil vota un secours de 600 fr à sa veuve.

     

    Sa mère décéda le 30 décembre 1892 ; sa veuve mourut à Nantes le 12 septembre 1897 ; elles furent toutes deux inhumées avec lui au cimetière de la Briandais.

     

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    [1] A propos d’Alcide Bord et de Porcé : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/13/le-chateau-de-porce-a-saint-nazaire-premiere-partie.html

    [2] Relevé par la Région Pays de la Loire https://www.patrimoine.paysdelaloire.fr/linventaire/detail-notices/IA44003808/

    [3] Cf. Congrès archéologique de France : séances générales tenues à Nantes en 1886)

    [4] Biographie du docteur Marie-Théophile Griffon du Bellay : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/06/un-explorateur-a-saint-nazaire-6141851.html

  • Le général Marquet

    Parmi les familles qui marquèrent en leur temps Saint-Nazaire, il convint de citer la famille Marquet, dont est issu le général Georges Marquet.

    general Marquet

    Georges Marquet, recevant la réédition des armes de soldats druzes au Djebel el-Druze en 1925.

     

    Les vieux Nazairiens ont encore le souvenir de la villa des Morées[1], vaste demeure en U aux allures de manoir Louis XIII dans un parc avec dépendances autrefois à la Villès-Martin, face à l'Estuaire, à l'angle de la rue des Cormorans et du boulevard Albert Ier, où elle occupait l'emplacement des trois villa qui se trouve aujourd'hui là, plus exactement au niveau du n°85, nommée Océane, (celle sise au 86 a été baptisée Villa des Morées en son souvenir). De la Villa des Morées, aucune image ne nous est parvenue, mais son souvenir éthéré, surtout de son décors intérieur aux murs couverts de boiseries, meublé en Louis XIV et Louis XV, de consoles en bois dorés à dessus de marbre, avec, dans sa salle à manger dans le style Renaissance, garnie de faïences anciennes, avec un grand aquarium sur un empiétement de ce style, qui était la curiosité du lieu, et une importante collections de meubles, tapis, armes et objets syriens et algériens .

    Cette histoire débute sous les hospices d’un homme dont on a aussi oublié la mémoire, et cela à tort, Octave Fidière des Prinvaux, (Versailles le 3 mai 1855 - Pau le 2 mai 1904), le beau-frère de Gustave Bord[2], critique d’art, qui incita plusieurs des ses amis collectionneurs et artistes à venir séjourner à Saint-Nazaire, et à s’y établir. Nous avions, dans notre article consacré à la villa Minne, déjà eut l’occasion de reparler de cet homme de grande culture[3]. Octave Fidière des Prinvaux était entre autres ami de Henri-Georges-Léopold Marquet, (Sens 5 décembre 1843 - Saint-Nazaire 9 février 1931), sculpteur des monuments historiques, officier d'académie, à qui il fit découvrir notre ville. Fils du suisse de la cathédrale de Sens, Henri Marquet avait débuté sa carrière à l’âge de 18 ans sous les ordres d’Eugène Viollet-le-Duc, qui l’avait remarqué sur le chantier de restauration de Notre-Dame de Paris ; il avait ensuite œuvré à la cathédrale de Sens, l’église Saint-Martin d’Aillant-sur-Tholon, en 1867, mais aussi sur les chantiers de création d’églises de style romane, comme la basilique Notre-Dame d'Afrique en 1872, et quelques autres en Algérie jusqu’en 1896, où de style gothique telle que l’église Saint-Antoine-de-Padoue du Chesnay en 1897. Outre la pierre, il sculptait le bois, et réalisa des meubles et des décors intérieurs d’églises et de châteaux.

    Marié avec Marie Amélie Joséphine Lotz, (Chaintreaux 1848 – Saint-Nazaire 29 décembre 1930), il eut pour enfants[4] :

    1. Henri-Georges-Justin-Nicolas, (Sens 8 août 1868 - Paris 7ème arrondissement, 19 mars 1932), dont nous allons parler plus particulièrement ;
    2. Emile-Jules-Ernest-Antoine, dit Antonio, né à Sens 25 janvier 1870, maître d'armes, sculpteur ; marié le 7 octobre 1893, à Sens, avec Blanche-Pauline-Hyacinthe Renard ; remarié le 13 janvier 1923, à Paris 18ème, avec Madeleine Antoinette Noël ; d’où, du second lit :

    a. Agnès.

    1. Blanche-Marguerite, (1878 – 1964), épouse de Pierre Joudrin, (1867-1947), pharmacien à Saint-Nazaire, rue de l’Océan, juge au tribunal de commerce en avril 1926, tout deux inhumé au cimetière de La Briandais dans le caveau Marquet.

     

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    Portrait de Pierre Joudrin par Alexis de Broca, (74x60), © Ville de Saint-Nazaire.

     

    Georges Marquet, sortit sergent de l’Ecole spéciale militaire en 1890, sous-lieutenant aux Tirailleurs algériens le 1er octobre 1891, lieutenant le 1er octobre 1893. Il intégra la Justice militaire au 1er conseil de guerre d'Oran en 1894, comme substitut du rapporteur, puis substitut du commissaire du Gouvernement du 9 janvier 1895 au 31 mars 1995. Il épousa le 25 mai 1895, à Oran, Séraphine-Emilie Commandeur, (Oran 1er avril 1868 - Oran 10 janvier 1958), riche propriétaire de domaines agricoles. Lieutenant officier instructeur à l’Ecole supérieur de guerre le 22 octobre 1895, puis au 130ème régiment d'infanterie à l’Ecole de guerre le 23 octobre 1895, au 102ème le 20 août 1896, le 130ème le 30 septembre 1898. Il eut une fille : Napoléonne-Marcelle, née en 1900. Il retourna en Algérie au 2ème régiment de tirailleurs algériens le 20 nombre 1900, y fut aussi substitut du capitaine rapporteur près du 2ème conseil de guerre de la division d'Oran du 8 mars 1901 au 5 mai 1902. Il fit un stage au groupe de batteries montées de la division d'Oran du 6 mai au 15 juillet 1902 avec grade de lieutenant de première classe, puis au régiment des tirailleurs algériens, au 2ème chasseur d'Afrique du 16 août au 27 septembre 1902, il quitta l'Algérie et devint capitaine au 15ème régiment d'infanterie le 30 décembre 1902, puis au 10ème le 18 1904. Affecté à l'état-major du 19 corps pour y accomplir le stage de deux ans prescrit par la Loi du 20 mars 1880, il entra comme stagiaire au service géographique de l’Armée le 24 novembre 1905, il accomplit une période d'instruction au bataillon d'artillerie de la 1ère division de cavalerie du 15 mai au 15 août 1906. Il fit affecté à l’état-major de la 30ème division à Avignon le 29 septembre 1909. Il fut fait chevalier de la Légion d'Honneur le 12 juin 1910, et fut appelé à l’état-major du Ministère de la guerre avec le général Goirand, il fut envoyé au Maroc comme chef de bataillon, il rentra en France en 1914 à la déclaration de guerre, commandant de régiment, puis de bataillon il reçut une blessure à Tracy-Leval, ce qui lui valut la Croix de guerre. Après rétablissement, il fut envoyé au Maroc pour commander la colonne de Casbahbella, comme adjoint de la subdivision de Zadla, avec le grade de lieutenant-colonel d'infanterie et fut promu au grade d'officier de la Légion d'Honneur. Il y fonda deux postes,puis demanda à retourner sur le front, et y commanda, à partir du 18 décembre 1917, le 171e régiment d’infanterie, avec lequel il se distingua pour avoir, durant 7 jours, conservé ses positions sous le bombardement et les attaques ininterrompus, faisant échouer l’attaque du 4 avril 1918 d’une division allemande, qui subit des pertes plus sanglantes, (citation à l’ordre des armées du 6 juin 1918). Le régiment reçut fourragère aux couleurs de la croix de guerre, et eut deux citations Avec le le capitaine Lhuillier, Georges Marquet reçut les pénitentiaires allemands à La Capelle. Il commanda un temps un régiment mixte de tirailleurs et de zouaves en Pologne, et combattit avec Weygand lors de l’attaque russe contre la Pologne, puis fut nommé à la mission interalliée en Posnanie. Retourné en France avec le grade de colonel, en poste à Rennes[5], il fut chargé en mai 1920 de mener à la caserne gendarmerie du Teilleul, une enquête à propos du meurtre par empoisonnement perpétré par le gendarme Le Borgne sur sa femme[6]. Il fut à l’origine d’un service des fiches de gendarmeries. Il divorça de son épouse, par jugement du tribunal de première instance d'Avignon le 27 janvier 1921. Sa fille, décéda peut après, et fut inhumée au cimetière de La Briandais.

    Apprécier pour ses capacités de commandement objet de la confiance et de l’affection de ses hommes, il fut nommé en cette même année 1921 au commandement de la 65 R. I. de Nantes. Envoyé en Syrie en 1923.

     

    general Marquet

    Au Djebel el-Druze en 1925.

     

    Les Druzes s'étant révoltés, sous la conduite du Sultan al-Atrach, (1891-1982), contre les troupes mandataires, révolte qui perdura jusqu'en 1927, aujourd'hui nommée en Syrie " Révolution nationale ", il combattit dans le Djebel el-Druze, et défendit la citadelle de Damas du 18 au 20 octobre 1925 durant les émeutes qui eurent lieu dans la ville ; puis, le 5 décembre 1925, il  prit d’assaut Hasbaya[7], cité libanaise qui avait été prise par les Druzes le 27 novembre précédent, et libéra le Sud-Est du territoire libanais.

    general Marquet

    Entrée dans Hasbaya, 5 décembre 1925.

     

    general Marquet, Hasbaya

    Ville et citadelle de Hasbaya avant la prise par les Druzes.

     

    Ces actes lui valurent d'être nommé commandant des troupes du Grand Liban, la médaille d’honneur de 1ere classe du Mérite libanais par arrête du 23 décembre 1925, « Prenant son commandement où de fort contingents de rebelles mettaient en péril sa sécurité de l’Etat, a galvanisé ses troupes par son énergie, sa confiance et sa bravoure. Les a personnellement conduites à l’assaut de la position fortifiée de Hasbaya qu’il a enlevée après un rude combat. A complétement disloqué les bandes ennemies et libéré le territoire libanais. A bien mérité du Grand Liban », et le 25 décembre il reçut sa quatrième citation à l’Ordre de l’Armée, avec croix de guerre des Théâtres d'opérations extérieurs.

    Il fut promu général de brigade en 1926.

     

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    Signature du général Marquet.

     

    Il prit le commandement du groupe de subdivision n°2 de la 11ème région le 25 février 1927, attaché à l’amiral Préfet maritime à Lorient. A l’occasion des fêtes pour l’inauguration du monument du débarquement des troupes étasuniennes à Saint-Nazaire, en juillet 1926, la ville organisa une exposition d’art ancien et moderne au collège de jeune filles, rue de La Villes-Martin ; Henri Marquet prêta une crédence à deux corps de style Louis XIII, qu’il avait sculpté, et des fauteuil Louis XIV et une bergère Louis XV, alors que Georges prêtât une commode Louis XIV et deux fauteuils Louis XV, ainsi que des objets syriens.

    Le 26 mars 1927 il assistât avec sa sœur aux festivités organisée pour les noces de diamant de leurs parents, dont une messe prononcer le matin en l’église Saint-Nazaire. Il dirigea les manœuvres de l’instruction à Lorient, les 22, 23, et 24 avril 1927. Le 9 février 1928 il reçut la cravate de commandeur de la Légion d’Honneur. Cadre de réserve le 8 août 1929 il quitta le commandement du groupe de subdivision n°2 de la 11e région et partagea sa vie entre la villa des Morées et Paris.

    Il fut président d’honneur de la société d’escrime de Saint-Nazaire en 1929 et membre de la société d’archéologie d’Ille et Vilaine, et se distinguait dans les rues de Saint-Nazaire, par les chaleureuse poignées de mains qu’il adressait aux anciens combattants qu’il croisait, s’enquérant de leur santé et de leur famille. Il épousa à Paris le 29 avril 1930, dans le 18ème arrondissement, Adèle-Anna-Victorine de Murat, (Paris 18ème 16 avril 1871 - Paris 1948), fille de l’architecte Antoine-Victor de Murat, (1840-1895), épouse divorcée le 31 décembre 1929 de Paul-Alphonse Delange, dont elle avait une fille, Madeleine.

    Les décès de ses parents le laissèrent particulièrement affecté.

    Le général Marquet décéda à Paris 7ème le 19 mars 1932. Son corps fut transporté par train à Saint-Nazaire, le cercueil recouvert du drapeau français.

     

    general Marquet

    L’Ouest-Eclair du 25 mars 1932.

     

    De la gare, un char funèbre le conduit en l’église Saint-Nazaire, suivit d’une foule nombreuse, regroupant toute la liste des notables nazairiens de l’époque. Les cordons du poële furent tenus par le docteur Diet, Cambiaggio, directeur de la Compagnie Générale Transatlantique, le docteur Tholon, et le lieutenant-colonel de Saint-Julien, du 65ème régiment d’infanterie, représentant le général comandant du 11ème corps d’armée à Nantes. Le cortège fut précédé par une délégation de la caserne de gendarmerie de Saint-Nazaire, du peloton mobile de la Garde républicaine, et des délégations des Anciens combattants.

    Après la messe de funérailles, son corps fut déposé à La Briandais, sans discours.

     

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    Tombeau de la famille Marquet, dont les sculptures furent réalisées par Henri Marquet

    general Marquet

     

    Incapable de s’entendre avec son beau-frère et sa belle-sœur pour la conservation de la Villa des Morées, son épouse fit procéder à la vente du mobilier aux enchères le mardi 7 juin 1932, durant laquelle on se pressa, puis de la mise en vente de la maison qui trouva acquéreur en juin 1933[8].

     

     

     

    [1] Du nom des rochers faisant face à la pointe de La Villès-Martin, où se trouve depuis une balise homonyme construite en 1756.

    [2] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/13/le-chateau-de-porce-a-saint-nazaire-premiere-partie.html

    [3] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2020/09/02/la-villa-minne-6260718.html

    [4] Henri-Georges avait eu de sa cousine germaine, Eléonore Leotet, lingère, Henri-Paul (Sens 27 janvier 1867 – 26 octobre 1959), légitimé sous le nom de Gauchet en 1869, par l’époux de se mère, Charles Gaucher, ouvrier boulanger.

    [5] Il y habitait 12 rue Brizeux.

    [6] Le Borgne avait commis ce crime pour épouser sa maitresse, la jeune fille d’un collègue, il fut condamné à mort.

    [7] Ville du Liban, chef-lieu du caza du même nom, dominée par une citadelle, à 58 km au sud-est de Beyrouth. les Français l'avaient délivrée une première fois des Druzes en mai-juin 1860.

    [8] Le décor était composé de mobilier Louis XV, renaissance, provençale, Louis XIV, de meuble en bois dorés, de tapis d’orients, gravures, cadres, lustres, panneaux de bois sculpté, d’un aquarium avec support renaissance dans la salle à manger, collection d’assiettes anciennes, lits à baldaquin, meuble dessus de marbre, boukhara tapis, tapis syriens, meubles syriens et algériens, armes arabes, coussins d’orient, le notaire Labour fut en charge de liquidation de la succession. La vente de la maison fut assurée par l’agent immobilier J. Lemesle, qui s’en fit sa publicité durant plusieurs semaines.

  • Paul Emile Conard

    Dans l’allée principale du Cimetière de La Briandais, il est difficile d’ignorer un haut et beau caveau de marbres, gravé d’un patronyme qui interpelle, c’est celui de Paul-Emile Conard, de son épouse, et Jacqueline, l’une de leurs filles. Mais qui se souvient de cet homme qui fut pourtant très important à Saint-Nazaire ?

    paul-Eùmile Connard, chantiers de Penouet

     

    Paul-Emile Conard, est né à Conflans Sainte Honorine, le 21 septembre 1887. Il était le fils de Paul-Ernest Conard, peintre en bâtiment, né en 1861 et de Louise-Emilie Huet, née en 1868. Rien ne prédestinait ce garçon né dans une famille pauvre, au patronyme offrant flancs aux quolibets, mais élève doué, il sortie de sa misère en se faisant engagé volontaire pour quatre ans le 7 octobre 1907, à la mairie du 9ème arrondissement de paris, au 32ème régiment d’artillerie, Brigadier le 11 avril 1908, maréchal des logis le 28 septembre 1908, il fut alors admis à suivre les cours à l’Ecole Polytechnique à compté du 12 octobre 1908, promu ingénieur de 3ème classe au Génie maritime par décret du 3 octobre 1909 pour premier rang le 1er octobre 1909 et entré à l’école d’application du Génie maritime, ingénieur de 2ème classe le  1er octobre 1910 à Brest, il y épousa, le 30 mai 1914, avec Anne-Marie Denis, (née à Brest le 17 mars 1891), fille d’un médecin de marine. Ingénieur de 1ère classe le 1er octobre 1914, ingénieur principale le 25 novembre 1919, en congé sans solde et hors cadre du 31 décembre 1920 au 31 décembre 1923, rayé du cadre actif, affecté spécial aux Chantier de Penhoët sur décision ministérielle du 26 octobre 1929, sous-directeur des Chantiers de Penhoët administré par le Bureau maritime de Lorient et ingénieur en chef des coques.

    Il s’établit au 70 rue de Villès-Martin, (avenue Général de Gaulle), avec son épouse et leurs trois premiers enfants :

    1. Robert, (Brest 28 novembre 1915 – Paris 17 janvier 1993), qui épousa le 29 mars 1939, à Megève, Marguerite-Marie-Lucie Peltier, (née le 7 juillet 1913 à Chatenois les Forges), infirmière, puis assistante sociale ;
    2. Suzanne, (née à Brest en 1918), qui fut secrétaire de direction ;
    3. Jacqueline (née à Brest le 31 décembre 1920 – Saint-Nazaire 9 mars 1927, inhumée à La Briandais).

    C’est à cette adresse que naquit :

    1. Monique, (Saint-Nazaire mars 1928).

    Anne-Marie décéda à Saint-Nazaire le 20 mars 1933. Le 5 novembre suivant, alors qu’il stationnait devant le collège de jeune fille rue de Villès-Martin, il recula sans regarder et percuta monsieur Riva qui venait de la direction de Pornichet sur une moto, et tenait tenant sa droite. Grièvement blessé, monsieur Riva fut amputé d’une jambe. Le tribunal de Saint-Nazaire, après plaidoirie de maitre Russacq, condamna Paul-Emile Conard à 25fr d’amande avec sursis, maitre Licimaque, parti civil aux débats, obtint 12.000 fr pour la victime, de provision et de commission du docteur Cousin. Paul-Emile il fit appel pour le sursis d’amande, car cela l’empêcherait d’être impétrant à l’Ordre de La Légion d’Honneur, mais fut condamné par arrêt de la Cour d’Appel de Rennes, chambre correctionnelle, le 29 mars 1934 à 25 francs d’amande.

    paul-Eùmile Connard, chantiers de Penouet

    Le Courrier de Saint-Nazaire du 4 mai 1935

     

    Il présida la remise de prix des cours professionnels de Saint-Malo-de-Guersac le 26 septembre 1936.

     

    paul-Eùmile Connard, chantiers de Penouet

    Le Courrier de Saint-Nazaire le 24 décembre 1938

     

    Sur décision de décembre 1938, le 1er janvier 1939, il fut promu directeur des Chantiers de Penhoët, en remplacement de monsieur Coqueret, (nommé administrateur- inspecteur-général membre du commuté de direction) ; l’ingénieur en chef section machine Caldagues le remplaça comme sous-directeur, mais garde sa fonction aux machines, c’est l’ingénieur Haurie qui le remplaça comme ingénieur en chef de la section coque. A l’occasion du 1er mai 1939, Paul-Emile Conard s’opposa à ce que les ouvriers chôment à l’occasion de la Fête du travail, avançant que cela engendrait une rupture de contrat pour le travailleur, suivant une convention signée le 11 décembre 1938. Il s’en suivit un bras de fer avec la CGT, avec manifestation et chants que son patronyme inspira… Il organisa, au prétexte de crise économique, le licenciement de 120 ouvriers le 10 juin 1939.

    paul-Eùmile Connard, chantiers de Penouet

    Durant la guerre, il participa aux différents événements municipaux tel que l’inauguration du stade de Goumelon le 7 novembre 1941 avec PierreToscer, maire malgré lui de Saint-Nazaire[1], et le sous-préfet pétainiste Michel Douay[2].

    Membre de droit du bureau de la Chambre de Commerce, il signa l’adhésion à la Chartre du travail exigée par le gouvernement de Vichy le 23 février 1942, à la sous-préfecture, avec les autres chefs d’entreprise de la métallurgie. Il fut démis avec les autres membres le 20 novembre 1942, mais fut imposé au nouveau bureau par le sous-préfet Douay en janvier 1943.

    Évacue à La Baule, à la suite des bombardements, il s’y fit discret à la Libération, et y décéda le 30 mai 1949.

     

     

    [1] Voir notre article : http://saint-nazaire.hautetfort.com/pierre-toscer/

    [2] Voir notre article : http://saint-nazaire.hautetfort.com/sous-prefet/

     

  • Acquisition de La Tour du Commerce par la mairie de Saint-Nazaire

     On le murmurait depuis quelques temps, on ne pouvait pas assurer que cela se ferait, les élections avaient mis en péril le projet, cela n’était pas au programme des candidats, mais c’est officiel ce matin : la Mairie de Saint-Nazaire fait l’acquisition de La Tour du Commerce et de son logis.

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     Initialement construites au 18ème siècle, par l'ingénieur de Marine Michel Alexandre Magin, sur financement des commerçants de la ville, d’où son nom, les bâtiments actuels datant du 19ème, la Tour est la troisième en réalité ; en effet, la première fut édifiée à partir de 1756 et achevée 12ans après sur financement des commerçants maritimes de Nantes, Paimboeuf et Saint-Nazaire, d'où son nom ; la seconde en 1829 ; et l'actuel date de 1856.

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    La Tour du Commerce dans sa première version, ici nommée incorrectement tour d'Aiguillon, sur la Carte géométrique de l'Entrée de la Rivière de Loire par l'ingénieur de la Marine et de l'Académie de Marine, Michel Alexandre Magin, en 1757.

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    Seconde tour sur le cadastre de 1829

     

    Ce feu fixe, « tour de paradis », fut éteint en novembre 1898 avec son remplacement par celui de la Tour de Kerlédé et des feux de Porcé. La Tour fut conservée pour servir d'amer. Ouverte à tous les vents, elle devint un lieu d'excursion pour les nazairiens et les touristes qui montaient les 176 marches pour voir d'en haut l'ensemble de l'estuaire, le marais de Brière et la Presqu'ile. En novembre 1930 on y voyait encore les noms de soldats étasuniens qui avaient marqué leur passage sur les murs, (cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 22 novembre 1930).

     Le logis, surélevé d’un étalage vers 1880, vit durant 150ans défilé des générations de gardiens, en charge de La Tour du commerce, puis de Kerlédé et des feux de Forcé, et de leurs familles. C’est dans ce logis que naquit, le 10 janvier 1877, Pitre Grenapin, résistant et maire de Saint-Nazaire.

     En mai 1938 la tour devint un radio phare, par déplacement du poste émetteur initialement situé au Ford de Villès-Martin, l'accès fut alors interdit au public et le haut modifier.

     Les Phares et Balises, avaient vendu l’ensemble à un particulier en 2006. L’entretient de la Tour entraîna des frais que celui-ci n’arriva pas à couvrir totalement, et en novembre 2019 le site fut proposé à la vente, dans une annonce qui ne précisait pas qu’en plus du logis, la tour était comprise dans l’état. Deux acheteurs contactèrent la mairie pour savoir ce que l’acquisition aurait comme impacte sur leur vie. Ils furent surpris d’apprendre qu’ils ne pourraient pas raser la tour (oui l’un d’entre eux y songeait), et qu’un arrêt de péril était envisagée, la tour menaçant de s’effondrer si des travaux n’étaient pas entrepris, (en cas d’effondrement, une dizaine de maisons seraient impactée, ainsi que le centre de Bonne Anse et la route de la Côte d’Amour). C’est monsieur David Samzun, maire de Saint-Nazaire, qui a proposé l’acquisition par la ville. La restauration va s’inscrire dans le projet de restauration et de mise en valeur des villa Ker Louis (centre de Bonne Anse), et le pavillon de plage du château des Charmilles, (villa bordant la plage de Porcé). Ajoutons que la Tour a conservé son « mobilier technique », ce qui est important pour la compréhension de son fonctionnement et une future muséographie.

     

     Agréable surprise et soulagement pour les Nazairiens, inquiets depuis plusieurs mois de ce qu’allait devenir ces bâtiments chers à leur cœur, qui démontre que la labellisation de la Saint-Nazaire, comme Ville et Pays d’Arts et d’histoire, n’est pas « un label en l’air » (sic !), et que monsieur David Samzun, accompagné de l’équipe de l’administration municipale en charge des patrimoines, a aujourd’hui conscience des enjeux future en matière de patrimoine historique et culturel, de leur pérennisation et de leur transmission. Une évolution et des travaux sur l’ensemble de la ville qui auront une véritable visibilité d’ici deux ans. Après des années d’inertie, de décisions calamiteuses de la part de plusieurs municipalités successives, ce tournant dans la politique municipale est une très bonne chose pour les Nazairiens. L'acquisition a été faite pour la somme de 590.000 euros, plus 10.000 euros de frais.

     

     

  • La villa Minne

     La villa Minne, avec deux N, et non un seul comme la plaque de la voirie le comporte, se situe chemin de la Villa Mine, au Petit-Gavy. Elle domine la plage plage de Virechat[1].

     

     Le nom de cette villa était le surnom de la maîtresse du comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky.

     

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    Vue aérienne de la villa Minne © Denis Pillet, Patrimoine des Pays de la Loire.

     

     Cette demeure et sa dépendance principale ont été construites en moellons, avec toiture débordante en tuile mécanique, dans un vaste parc dont l’accès se fait par un portail de style japonisant dans le goût des années 1895-1900. Le commanditaire en fut Emile Joly, commerçant en tissus et habillements, dont la famille, qui fit fortune à Saint-Nazaire dans ce négoce, arriva en notre ville en 1855. 

    Quand on observe ses façades, on s'aperçoit qu'elle a été érigée en trois campagnes. En effet, il y eut une première maison, large de deux travées, dont le plan au sol de la partie centrale est très semblable à ceux de la villa Victor[3] à Porcé, construite en 1896. Il y a des similitudes comme la porte d’entrée étroite, la disposition des services ; le salon avec bowwindows vers l’Estuaire dans un pavillon qui se détache de l’ensemble ; la salle à manger avec porte fenêtre. La Villa Mine a cependant des volumes plus importants, et est en miroir par rapport au plan de la Villa Victor. La maison fut agrandie d’une travée, correspondante à un cinquième de de sa longueur actuelle, vers le Nord, et de deux cinquième vers le sud par l'adjonction d'un pavillon à grandes baies vitrées qui abrite une salle haute d'un étage avec un escalier majestueux, galerie, et une remarquable cheminée en grée émaillé brun-jaune, de style art-nouveau. Cette salle est désignée aujourd'hui comme « le grand hall ». A l’époque d’Emile Joly, elle comportait déjà des écuries et logements d’employés dont les dimensions ne nous sont pas connues, mais qui sont ont été probablement agrandis après 1909.

    La villa Minne, malgré sa composition de volumes assemblés, offre une homogénéité d’aspect extérieur, des volumes à taille humaine, tout en étant majestueux, décorés sans une faute de goût. Mais surtout cette demeure possède les qualités de l’idéale des celles de collectionneurs du début du 20ème siècle : elle se situe à proximité d’une ville, dans une campagne vallonée, au sommé d’un promontoire, regardant vers le large, telle une acropole de beauté.

     

    Emile Joly avait repris le magasin de son père, et vivait quelque peu au dessus de ses moyens. En 1900, il fit faillite, et alla travailler dans le magasin de son frère Constant. Il décida de louer sa maison du Petit-Gavy au comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky.

     

    Le comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky :

     Le comte Benedykt Henryk Tyszkiewicz-Logoisky, dit Benoit de Tyszkiewicz, appartenait à une famille Lituanienne, possédant des biens en Ukraine et en Pologne, dont la noblesse remonte au commencement du 15ème siècle. Le nom Tyszkiewicz signifie « fils de Tyszko » (forme lituanienne de Thimothé). Investie de grande charges en Lituanie et en Ukraine, alliée au dernier roi de Pologne, cette famille était la plus opulente de Lituanie.

     

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    Armoiries des comtes Tyszkiewicz-Logoisky :

    d'azur à l'étoile d'or soutenue d'un croissant du même ; à la bordure aussi d'or.

     

     En 1839, Henryk Tyszkiewicz-Logoisky, (1792-1854), reçu de l’Empereur Nicolas Ier de Russie le titre héréditaire de comte, ce qui dans la noblesse russe s’étend à tous les descendants, et se transmet par tous les fils. Henryk en eut cinq ; l’avant dernier, Michal, décédé de tuberculose à Paris le 27 avril 1853, fut le père de Benedykt, né le 11 décembre 1852 au château de Niemież en Lituanie, issu de son union avec sa cousine Wanda Tyszkiewicz, (1833-1860), elle aussi décédée de tuberculose. Inhumés à Paris, leur tombeau est orné d’un haut relief de Henri Chapu, sculpteur dont Octave Fidière des Prinvaux, beau-frère de Gustave Bord, propriétaire du château des Charmilles à Porcé[2], réalisa le catalogue raisonné en 1894. Lié à Octave Fidière des Prinvaux qui était conservateur au musée du Luxembourg. C'est par son intermédiaire que Benedykt découvrit la corniche nazairienne.

     Orphelin, Benedykt fut confié à son grand-père maternelle, Benedykt Tyszkiewicz, mécène et collectionneur, propriétaire du château de Czerwony Dwór en Lituanie, maréchal du gouvernorat de Kaunas, qui lui donna le goût de la voile.

     

     Entré à sa majorité en possession de l’immense fortune de son père, Benedykt mena une vie internationale, mêlant voyages, sports nautiques, archéologie égyptienne, (ce qui le fit mécène du Louvre), photographie et bibliophilie, (plus de 10 mille livres). Il épousa en 1874 à Boston avec Claire Elisabeth Bancroft, (1857-1883), fille d’Edward Payson Bancroft, (1823-1865), et de Clara Elizabeth Peabody, (1826-1882), qui avait elle aussi été éduquée à Paris, et dont la famille maternelle était une lignée d'armateur. De leur union naquirent :

    1° Benedikt Jan (11 décembre 1875 à Paris - 18 février 1948 à Paris), marié à Róża Branicki d’où

    1a° Benedykt, (2 août 1905 – 6 février 1956), qui ne laissa pas de postérité de son mariage avec la princesse Eleonora Maria Aniela Alberta Renata Karolina Radziwiłł, qui se remaria avec Roger de Froidcourt ;

    2° Edwarda dit Edouard, (23 avril 1880 à Paris - 10 juillet 1951 à Cracovie), marié à Adela Dembowska, d’où :

    2a° Marija, Adelė Elžbieta

    2b° Edvardas Tiškevičius (né le 6 avril 1911 à Cracovie, époux de Sofia Zdienskasdont il eut trois filles ;

    3° Elżbieta Maria, (2 décembre 1882 à Funchal, ile de Madère - 2 décembre 1969  à Valduce, Belgique),  mariée 1er avec Stanisław Witold Plater Zyberk, (mort à Paris le 18  novembre 1926) ; 2ème Vladislav Jezersky ; d’où quatre enfants.

     

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     Benedykt et sa famille en 1882.

     

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    Portrait de Benedykt par Benque & Co. à Paris © Rijksmuseum Amsterdam.

     

     En 1876, âgé de 24 ans, Benedykt commanda aux chantiers Augustin Normand au Havre, une goélette, restée mythique, baptisée sous le nom de Żemajtej, (qui était celui de son domaine en Lituanie, hérité de sa mère), primée à l’exposition universelle de Paris en 1878, mais qui est passée à la postérité sous celui de Velox, nom que lui donna son second propriétaire le baron de Bellet, (ancien député des Alpes-Maritimes), qui l’acheta en 1879. Initialement, Benedykt prévoyait de faire un tour du monde sur son yacht, mais en raison du déclenchement de la guerre russo-ottomane en 1877, il n'a atteint que Gibraltar et Alger. Il resta intéressé cependant au yachting, et fut jusqu'en 1881 membres du comité des régates de Nice.

     

     L’autre passion de Benedykt était la photographie, il développa son intérêt durant son escale forcée en Algérie, pays qu’il parcouru en tous sens. Il exposa ses clichés à Philadelphie en 1878. Il se mit alors à voyager de part le monde, photographiant et exposant à son retour en Europe. En plus de ses prises de vues en extérieur, il s’exerça à la mise en scène en atelier. Devenu membre du Paris Photo-Club, son travail fut reconnu internationalement, et il reçut pour celui-ci la médaille d'or à la Grande exposition industrielle de Berlin en 1899. L’essentiel de sa production a été détruite pendant la Première-guerre-mondiale, mais le musée Nicéphore Niepce à Chalon-sur-Saône en conserve une grande part.

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    Autoportrait au fusil.

     

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    Portrait de son fils aîné.

     

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    Portrait de sa fille.

     

     De son grand-père maternel, il avait hérité une collection de tableaux comprenant des Canaletto, Bacciarelli, Czechowicz, Wańkowicz, Rustem, ainsi qu’un nombre important de tapisseries et de pièces d’orfèvrerie.

    Amateur chasses, bon tireur, possédant une meute, cela le liait d'autant plus à Octave des Prinvaux qui s'adonnait lui aussi à ces sports, avait une petite meute, et était dans le même club de tir aux pigeons à Paris.

     

    Veuf, dès 1883, Benedykt eut plusieurs liaisons. Vers 1895, il se passionna pour une femme mariée, Marie-Augustine de Beaumont d’Autichamp, (Paris 8 juillet 1847 - 8 février 1923 Lhoumois), épouse de Henri-Joseph-René Aymer marquis de La Chevallerie, (Poitiers 24 septembre 1841 - 18 octobre 1897 Lhoumois), avec lequel elle avait été unie le 14 décembre 1865.

    La comtesse était la fille du propriétaire du château de La Roche Faton à Lhoumois, Marie-Gabriel-Joseph de Beaumont comte d'Autichamp, (Écouflan 24 juin 1813 - 21 janvier 1902 Lhoumois), qui jugeait négativement que sa fille soit séparée d'un gendre qu'il appréciait. Père et mari laissèrent Augustine sans moyens de subsistance. Augustine, surnommée Minne, vécu des largesses de son amant. Celui-ci, loua d'abord la villa d’Emile Joly, dès 1900. Augustine ayant été déshéritée par son père au profit de ses enfants, Thérèse Aymer de La Chevalerie, (1er novembre 1866 – 1946), et Louis-Amblard-Charles-Gabriel Ayme marquis de La Chevalerie, (Lhoumois 15 novembre 1871 – 17 septembre 1931 Lhoumois), Benedykt acquit pour Augustine la maison qu’il louait pour elle, l’agrandit et la baptisa Villa Minne. Dans le pavillon, dit « grand hall », furent installées des vitrines le long de la galerie qui occupe deux-côtés de la salle, dans lesquelles fut placée une surprenante collection de souliers de célébrités, dont Marie-Antoinette et Napoléon… Il faut cependant préciser qu'Augustine s'entendait très bien avec ses enfants. Sa fille vient vivre à la Villa avant 1911.

     La déclaration de guerre en 1914 fit retourner dans leurs domaines tous les membres de l’aristocratie russe. Augustine suivit son amant, et vendit alors la villa à Marcelle Beraud. 

    Le coup d’état de décembre 1926 qui instaura la dictature en Lituanie, finit d’ébranler sa fortune, il vit ses châteaux confisqués. Retiré à Menton, il y décéda le 13 mai 1935. Il repose au cimetière de Cimiez à Nice.

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    Tombeau au cimetière de Cimiez.

     

     

    Madame Beraud revendit la Villa Minne en 1920/21 à l’ancien maire de Saint-Nazaire, l’industriel Louis Brichaux, dont la descendance conserve encore la propriété, (elle fut réquisitionnée pendant l'occupation par l'armée allemande).

     

    [1] Virechat est l’abréviation déformée de Virée-Richard.

    [2] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/13/le-chateau-de-porce-a-saint-nazaire-premiere-partie.html

    [3] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2018/06/21/la-villa-victor-a-porce-6061203.html

     

  • Henri Moret

    Henri Moret, tout nazairien qui s’intéresse à l’histoire de Saint-Nazaire connait ce nom, connait son œuvre intitulée « Histoire de la Ville de Saint-Nazaire et de la région environnante ». Mais qui est Henri Moret, et savez-vous qu’une rue lui doit son nom ?

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    Signature de Henri Moret © Archives municipales de Saint-Nazaire.

     

    Voici quelques éléments :

     

    Henri-François-André Moret est né à Nantes le 13 février 1854, au 36 quai de La Fosse, dans un immeuble aujourd’hui remplacé par le musée de l’imprimerie, non loin de la Capitainerie, à une époque où les cabarets et la prostitution étaient l’économie nocturne de ce quartier.

    Son père, André, né à Nantes le 8 octobre 1824, était gabarier. Lui-même était le fil d’un portefaix prénommé François, et d’une bretonne vivant au faubourg Saint-Jacques à Paris, Egalité Orière. Ses frères étaient eux aussi gabariers à Nantes.

    Sa mère, Françoise Devay, née en 1820, était journalière. Elle décéda le 16 mai 1857.

    André Moret se remaria le 27 février 1860 à Sainte-Luce-sur-Loire, avec Victorine Rousseau, née à Sainte-Luce-sur-Loire le 31 décembre 1828, cultivatrice sur l’exploitation de ses parents au Trois-Chênes. Après ce second mariage, André parti vivre avec sa famille reconstituée à Chantenay et se fit marin.

    Eduqué dans un milieu modeste et profondément républicain, Henri Moret fit un service militaire de cinq ans en raison du tirage au sort institué par la Loi Cissey qui rendait aléatoire la durée de celui-ci. C’est à Vincennes, aux services administratifs, qu’il fit son service. Il y resta deux années supplémentaires afin de se former et de pouvoir postuler un emploi dans l’administration, devenant de fait élève de l'Ecole Militaire. Ses années à Vincennes le marquèrent profondément, le château, où il travaillait, l’impressionna durablement.

     

    Retour en Loire-Inférieure :

     

    Après sept années au service de l’administration militaire, Henri obtint un poste d’employé à la Préfecture de Nantes. Il y prit un logement quai de La Fosse, renouant avec ses premières années. C’est à Nantes qu’il épousa, le 26 janvier 1880, sa cousine, Louise-Marie Moret, née à Nantes le 26 août 1858, tailleuse, fille d’Auguste-François Moret, gabarier, et de Louise Blin, ménagère, domiciliés rue Fourcroy.

    De cette union naquirent :

    1. Henri Louis né le 20 janvier 1881 à Nantes, marié à Nantes le 8 aout 1905 avec Jeanne-Noémie-Elise Loisel :
    2. Louise-Henriette, le 12 novembre 1882 à Nantes, mariée le 16 mai 1902 à Nantes avec Guillaume Marie Lefloch ;
    3. Yves-Georges, (Saint-Nazaire 24 mars 1892 – Aiguillon 1er septembre 1966), employé à la Banque de France ; marié à Bordeaux avec Marie-Joséphine-Benjamine-Marguerite Coste le 6 septembre 1915.

     

    L’installation à Saint-Nazaire, la rue de Vincennes, et l’incendie des Archives :

     

    En 1884, Fernand Gasnier, fraîchement élu maire, chercha un nouveau secrétaire de marie qui soit républicain. Son choix se porta sur Henri Moret, qui devient rapidement un habile collaborateur, et monta en grade jusqu’au poste de secrétaire en chef. Il s’établit au 11 rue de Nantes, où son épouse ouvrit un commerce de mercerie.

    Henri profita de ses fonctions pour consulter les archives et entreprendre la constitution du manuscrit d’une histoire de la ville.

     

    Désireux de posséder un chalet dans la campagne nazairienne, comme tous les notables et bourgeois de la ville, il fit l’acquisition d’une parcelle sur la colline dominant la Villès-Martin. La maison était isolée au bout d’un chemin vicinale, et fut longtemps la seule sur cette hauteur désertique, se distinguant au loin par une haie de cyprès, et surtout par un chêne que Moret avait planté, et qui fut longtemps l’unique haute futée de la zone. La maison avait été baptisée « Ker Vincennes », écrit en grande lettres sur un portique enjambant le portail. Les amis de la famille Moret, mais aussi les gens se baladant le dimanche sur la colline, prirent l’habitude de dire qu’ils allaient « à Vincennes », si bien que le nom devint celui de la rue par la suite tracée[1].

     

    Gasnier était notoirement connu pour pratiquer des détournements de fonds par l’intermédiaire des chantiers de travaux de voiries. Face à l’annonce d’une enquête, les bureaux de la voirie, situés au second étage de l’immeuble « Guilouzo[2] », 8 rue des Quatre-Vents, mitoyen du jardin de l’Hôtel de ville et de l’immeuble du journal La Démocratie, prirent feu le matin du 14 février 1893 vers 6 heures[3]. Les bureaux de la Caisse d’Epargne se situaient au 1er étage, et le siège de l’Octroi au rez-de-chaussée, avec un second local qui servait de salle de conservation pour les Archives de la mairie. Le panache de fumée s’éleva haut au-dessus de la ville. La fumée rendait impossible l’entrée dans l’immeuble, cependant les employés de la Caisse d’épargne forcèrent le passage afin de vider le contenu du coffre et évacuer les registres. Les pompiers municipaux arrivèrent, brisant les fenêtres pour pouvoir arroser l’intérieur du bâtiment.  Henri arriva presque immédiatement, suivit du préposé en chef de l’Octroi, Bertho, et du directeur de La démocratie, Lucciardi. N’écoutant que son courage, Henri pénétra dans l’immeuble enfumé pour en ressortir les archives municipales qui se trouvaient dans le local du rez-de-chaussée. Il en sorti d’abord les registres et les plans du cadastre, qui furent entreposés à La Démocratie, puis rentra plusieurs fois dans l’immeuble enfumé pour en sortir registres, cartons et chemises. Les pompiers municipaux installèrent des pompes dans le jardin de l’hôtel de ville, et furent rejoint par le 64ème piquet d’incendie avec sa pompe, bientôt arrivèrent ceux de la Compagnie Générale Transatlantique avec leur pompe à vapeur, qu’ils installèrent dans la rue de l’Hôtel de ville. Henri Moret continuait à sortir des archives municipales ; il finit par tomber inanimée dans l’immeuble. C’est Lucciardi qui le secouru, sous le regard du sous-préfet, Pizot, des adjoints Serin et Lusseaud, du président du Tribunal, Bouhier, du procureur de la République, Lelepvrier, et d’autres huiles locales restées sur le trottoir à contempler le spectacle avec tout le quartier.

    Cet acte de bravoure lui valut une médaille d’argent du travail, une mention honorable sur son dossier, par décret présidentiel le 28 avril 1895 ; puis on le fit officier d’Académie et officier d'administration territorial.

     

    L’exile et le retour :

    Fernand Gasnier ayant perdu la municipalité, celui-ci se replia sur son mandat de député. On épura alors l’administration municipale en éjectant tous ceux qui avaient été ses proches collaborateurs. Moret fut alors renvoyé en juillet 1896 car considéré comme « l'homme de Gasnier ». Il appela l'ancien maire à l’aide. Fernand Gasnier écrivit à Hippolyte Durand-Tahier pour qu’il plaide à la faveur de Moret pour une réembauche, en argumentant sur le fait qu'il se retrouvait sans revenu avec trois enfants, dont un en bas âge [4].

     

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    Une lettre de Fernand Gasnier du 29 juillet 1896 à Hippolyte Durand-Tahier à propos de la situation de Moret, rédigée à Saint-Nazaire sur papier de la Chambre des député, © Archives municipales de Saint-Nazaire.

     

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    Lettre de Henri Moret en date du 3 septembre 1896 adressée à Hippolyte Durant-Tahier © Archives municipales de Saint-Nazaire

     

    Moret fut reclassé comme percepteur des contributions directes à Saint-Georges de Noisné (Deux-Sèvres) en septembre 1896[5]. En 1902 il était en poste à Riaillé, où il rédigea un « Précis élémentaire du service de perception, à l'usage des nouveaux percepteurs, des aspirants à la fonction et des commis de percepteurs », publié en 1902 par l’imprimeur Oberthur à Rennes, et qui connut trois rééditions. Muté au Croisic à la veille de la première-guerre-mondiale, il y rédigea « Le Croisic, précis historique sur la presqu'île croisicaise et la région environnante », publié en 1917 par l’imprimeur Oberthur, ouvrage hélas d’une qualité médiocre.

     

    Mis en retraite, il retourna vivre à Saint-Nazaire avec son épouse en 1921[6], au seconde étage du 21 rue Neuve, dans un appartement doté d’un grand balcon s’ouvrant sur l’estuaire.

     

    Henri Moret, Saint-Nazaire

    L’immeuble du 21 rue Neuve côté Estuaire et quai de Kervilers (aujourd’hui quai des Marées)

     

    Il devint membre de la Ligue Antialcoolique fondée par Campredon[7]. C’est alors qu’il décida d’entreprendre l’écriture de « Histoire de Saint-Nazaire et de la région environnante », une importante somme parue en deux tomes de 500 pages chacun, en février 1925 à Nantes à l’Imprimerie du Commerce, et illustré par le peintre nazairien Alexandre Auffray[8]. Henri Moret avait hésité à écrire ce précis historique, ne voulant pas entrer en conflit avec maître Galibourg[9] qui en 1904 avait annoncé son attention d’écrire un ouvrage sur le sujet, mais qui finalement ne fit rien[10]. Cette publication lui valut l’inimitié de maître Galibourg qui quelques mois encore avant son décès pestait à propos de Moret en dénigrant dans la presse son ouvrage.

    A la parution de ce monument qui est aujourd’hui la seule source complète et détaillée concernant l’histoire nazairienne d’avant 1925, du fait de la destruction d’une grande partie des archives municipales durant les bombardements, la municipalité fit l’acquisition de deux exemplaires[11]… La Chambre de commerce fut généreuse dans ses achats en faisant l’acquisition de vingt-cinq exemplaires, tout comme le Conseil général[12].

     

    Henri Moret décéda le 6 mai 1928 dans son appartement du 21 rue Neuve. Il fut enterré le 9 mai 1928 au cimetière de Toutes Aides.

     

    L’oubli et la redécouverte :

     

    « Les morts sont silencieux », dit un vieux proverbe. On pourrait ajouter aussi que « le bien ne fait pas de bruit ». La mort d’Henri Moret passa inaperçue ou presque. L’Ouest Éclair publia des condoléances en trois phrases à sa veuve le jour de son enterrement, titrées cependant : « L’historien de Saint-Nazaire est mort ». Le Courrier de Saint-Nazaire publia une courte nécrologie le 12 mai 1928 fournissant quelques détails biographiques.

    Son Histoire de Saint-Nazaire resta une référence, dans les années qui suivirent. Marthe Barbance dans sa célèbre thèse consacrée au port et à la ville, le cite toutes les cinq pages comme source. On le citait aussi régulièrement dans la presse pour sourcer une information historique, mais le style de son écriture, déjà un peu passée, et qui aujourd’hui la rend pénible à certains, par ses formulations d’ancien style, peut parfois être incomprise. Ainsi, le 21 septembre 1933, dans un article non signé, le stagiaire en charge de remplir un trou, affirma qu’Henri Moret avait écrit qu’on avait déplacé le Dolmen à un emplacement différent ! Le président du Syndicat d’initiative, André Guillet, adressa une lettre le 28 septembre suivant au Rédacteur en chef, l’informant de l’absurdité du propos. En fait, Henri Moré explique dans son ouvrage, que depuis son arrivé en 1892 à Saint-Nazaire, la ville s’est étendue jusqu’à Dolmen qui était auparavant en périphérie dans un pré. La phrase est cependant écrite dans le style un peu alambiqué de la Belle époque, ce qui prête à confusion. Mais par cet article absurde et par de mauvaises lectures, on a entendu parfois la municipalité et ses élus affirmer aux Nazairiens que le Dolmen était sur roulettes…

     

    La guerre ravagea Saint-Nazaire, détruisant au passage les bibliothèques, dispersa sa population qui ne revint pas totalement, peut d’exemplaires de l’ouvrage de Moret consacrés à Saint-Nazaire, et dont le tirage avait été initialement limité, survécurent à cette période. On n’en retrouva que chez quelques lettrés dont les maisons de Méans ou de Saint-Marc avaient échappées aux bombes et aux pillages. Fernand Guériff, qui possédait les deux tomes s’en servit pour la rédaction de sa propre histoire de Saint-Nazaire publiée, en deux parties elle aussi, en 1960 et 1963. Pour toute la période d’avant 1925, abondamment détaillées, sa source est presque exclusivement Henri Moret, presque mot à mot parfois. Il est cependant regrettable de Guériff ait recopié certains passages de travers, propageant de fausses informations à plusieurs endroits[13].

    La destruction des exemplaires, leur non-republication, firent que Moret fut oublié, et ces écrits présentés comme quelque chose qui aurait été publié au 19ème siècle. Guériff eu la force d’avoir vécu plus longtemps que lui, et il occupa la scène historique nazairienne durant des décennies.

    On ne s’indigna pas quand en 1972 sa tombe fut l’objet d’une reprise de concession et ses restes jetés dans la fosse de l’ossuaire. Plus personne ne savait qui avait été Henri Moret et combien la ville de Saint-Nazaire lui doit.

     

    En 1998, un éditeur dont la mère était native de Saint-Nazaire, et qui possédait un exemplaire original de l’histoire de Saint-Nazaire de Henri Moret, réédita la publication, profitant que l’œuvre était tombée dans le domaine public. Une seconde réédition fut réalisée en 2007, suivit de plusieurs autres, en 2011, 2014 et 2020.

     

    Henri Moret est injustement oublié par les Nazairiens, y compris dans les plaquettes du label ville d’art et d’histoire, et l’on espère que la municipalité aura à cœur de réparer cette injustice et de donner un jour prochain son nom à une rue de la ville ou un une salle, comme elle l’a fait pour Barbance[14] et Guériff[15] qui, nous le répétons, ont puisé très largement dans ses ouvrages.

     

     

     

    [1] Cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 20 juillet 1929. La maison fut détruite dans les années 1960.

    [2] Du nom de l’ancien maire qui l’avait fait construire durant le Second Empire :

    [3] Lire à ce sujet Le Phare de la Loire du 16 février 1895 qui donne de nombreux détails.

    [4] Lettres non signées, mais identifiables à la mention du nom de beau-père de Gasnier, conservées aux Archives municipales de Saint-Nazaire dans le fond Hillemand.

    [5] Lettre du 3 septembre 1896 adressée à Hyppolite Durand-Tahier, Archives municipales de Saint-Nazaire, fond Hillemand.

    [6] Cf. nécrologie publiée dans Le Courrier de Saint-Nazaire le 12 mai 1928.

    [7] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/04/02/une-figure-nazairienne-louis-campredon-6140914.html

    [8] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/04/alexandre-auffray-peintre.html

    [9] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/11/02/maitre-alexandre-galibourg.html

    [10] Cf. préface de ladite publication.

    [11] Cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 21 mars 1925.

    [12] Cf. Le Courrier de Saint-Nazaire du 17 octobre 1925.

    [13] Fernand Guériff a recopié de nombreuses publications inexactement, donnant parfois pour source des articles de presse inexistants dans les journaux qu’il indique, confondant les revues et les auteurs. La plus fameuse de ses confusions a alimenté l’absurdité légende de la Petite-Californie-Bretonne, véritable honte pour notre ville : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/03/19/saint-nazaire-petite-californie-bretonne-6137164.html

    [14] Son nom a été donné à une salle de l’université.

    [15] Une place sans bâtiments au bord de l’Etang du Bois-Joalland porte son nom depuis 2017.

  • L’église de Saint-Marc-sur-Mer

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    L’église de Saint-Marc, avec son clocher à la française et son chevet à la bretonne, est, par sa silhouette, l’un des bâtiments les plus charmants du quartier de Saint-Marc-sur-Mer. On devine de loin cette église, mais sa situation à flanc de coteau, dans la courbe d’un large virage, son esplanade pentue encombrée de voiture, et surtout deux grands tilleuls la dissimulent au regard du passant. Cette église est aussi la plus mal connue des Nazairiens, car elle est dans un quartier à vocation balnéaire, dont la population, pour l’essentiel, n’y vit pas à l’année, et plus encore, en périphérie du centre du charmant bourg blottie contre la plage qui porte initialement le nom de Saint-Marc, et qui au fil des décennies fut rebaptisée plage du gorille, en raison de la forme d'un rocher aujourd’hui érodé, et depuis une vingtaine d’année, plage de Monsieur Hulot, en souvenir du personnage principale que Jacques Tati filma ici les extérieurs des vacances durant l’été 1951. Nous l’avions déjà écrit dans un article précédent concernant le Château de Saint-Marc[1], la station balnéaire se nommait à l’origine Le Crépelet ; c’était un village de vignerons situé au bas du coteau où se trouve l’actuelle église, et c’est parce qu’il y avait initialement une chapelle dédiée à Saint Marc au bord de la plage, à l’emplacement de la Place de la Chapelle, plus exactement devant le jardin du n°36, que la station balnéaire fondée durant le Second Empire pris son nom actuel.

     

    L’ancienne chapelle Saint-Marc :

     

    Il y avait donc une chapelle, depuis des temps immémoriaux, au bord de la plage. On ne connait de celle-ci qu’un dessin de Charles Beilvaire, publié le 19 mars 1932 dans Le Courrier de Saint-Nazaire figurant un bâtiment qui comportait à l’intérieur une poutre portant le millésime 1643 d'après un relevé effectué en 1790.

     

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    La chapelle sur la Carte géométrique de l'Entrée de la Rivière de Loire par l'ingénieur de la Marine et de l'Académie de Marine, Michel Alexandre Magin, en 1757.

     

    Longue et basse, très simple, orientée à l’Est, avec une porte double à l’Ouest surmonté d’un clocheton en arche comportant une seule cloche, trois fenêtres au nord, une porte basse et deux fenêtres au Sud, vers la plage, dotée d’une sacristie au nord, et accompagné d’une croix de bois sur un large piédestal remontant à la fin du 17ème siècle ou au début du 18ème ; croix qui existe encore et surveille les voitures que l’on parque ici. Cette église était le siège de la frairie de Saint-Marc et servait de lieu de culte ordinaire à la population environnantes éparpillées en plusieurs villages et hameaux, (Le Crépelet, Béac, Verdun, La Ville Cresneau, La Villès Molé, Berrien, Le Grand Pez, Le Prasilun, La Fin, etc.). Seule bâtiment à proximité de cette chapelle, une ferme en longère posée en parallèle à l’Est, qui lui était dépendante et fournissait le revenu à son chapelain, qui en 1790, était André Bertho, natif de Saint-André-des-Eaux. L'inventaire de 1790 précise qu'il y avait messe le dimanche et jours de fête, et qu'il y avait quatre chasubles. A proximité était une source canalisée en fontaine dont on buvait l'eau dans l'espoir de luter contre les fièvres et les maladies des yeux.

    Saint Marc bénéficiait chaque 25 avril, jour de la saint-Marc, d’une procession qui faisait venir à une messe spéciale à 11h toute la population de la frairie, mais aussi de celle de Gavy et Saint-Sébastien. Les fidèles se réunissait au bas de la Colline du château[2], la contournait en direction de la plage. Après la messe, ils piqueniquaient sur des tables devant la ferme et sur le sable de la plage, puis rentraient chez eux. Il était de coutume que ceux de Gavy prennent une chaloupe pour se faire déposer à Port-Charlotte. La chapelle passa la Révolution sans encombre malgré la suppression des cultes et la nationalisation des biens du clergé. Elle fut rendue au culte au moment du Concorda en 1801, et fut desservie jusqu’en 1857, date de la création de la Paroisse de l’Immaculée, qui vida les chapelles séculaires des banlieues de Saint-Nazaire, et en entraina la ruine, même si celle de Saint-Marc fut toujours considérée comme une chapellenie, et donc encore desservie occasionnellement jusqu’en 1870. La création de la station balnéaire, après la création à la demande de la Société de Sauvetage d'une station de sauvetage avec un canot en février 1866, pour lequel la Ville concéda gratuitement en juin suivant un terrain pour y construire le hangar sur la plage, entraina la création de la station balnéaire, dont le rapide développement touristique fit qu’on eut besoin d’un lieu de culte avec des messes et un service régulier. Le cimetière actuel y avait été fondé par mademoiselle Marie-Joseph Mollé[3], le 1er janvier 1885. L’Evêché et la Préfecture fondèrent la paroisse Saint-Marc le 1er juin 1888.  La chapelle étant dans un état de délabrement avancé, le conseil de fabrique vota la construction d’une église, loin de la chapelle qui devait laisser place au développement de la station, au bourg même du Crépelet.

     

    L’église de Saint-Marc :

     

    L’église de Saint-Marc fut rapidement construite. Edifiée sur les plans de l'architecte Henri van den Brouk, (grand-père d'Odette du Puygaudeau), elle comporte un clocher porche, sommet d'un coq girouette perché sur une croix, accolé d'une tourelle d'escalier qui va jusqu'au niveau de la tribune, une porte latérale, et dix-sept baies, dont cinq dans le chœur. Sa bénédiction solennelle eut lieu le 22 décembre 1889. elle fut rapidement décrite comme « si grande en hiver, si petite en été ».

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    Sortie de la messe vers 1903.

     

    Elle est constituée d’une simple nef, précédée d’une entrée, le chœur se trouve orienté au Nord, car il fut décidé que l’entrée se ferait face à la route en contre bas, par la base du clocher, ce qui oblige à gravir un escalier pour y entrer, et allonge sa façade Sud en lui procurant un aspect étroit disgracieux de part de cake oublié sur un coin de table à la fin d’un banquet. Une sacristie se trouve à l’Ouest, elle est séparée du jardin du presbytère par un petit chemin. Le sentiment d’étroitesse est accentué quand on passe l’entrée sous le clocher, et il se trouve alors suivit d’un sentiment d’écrasement. En effet, la majesté du lieu, songé comme une ouverture à la Foi après le passage du chameau dans le chas d'aiguille, a été totalement détruit par la construction d’une tribune démesurée et pensée dans aucun bon sens en 1964. La mairie, qui possède le bâtiment depuis 1905, (le presbytère restant propriété de la paroisse), avait accordé à l’abbé Jaunin, curé de 1953 à 1967, la construction de cet étage démesuré de 50 places, car à l’époque l’église se trouvait incapable de contenir tous les fidèles qui y venaient l’été. cette structure est posée trop bas et pire s'abaisse encore de 60 cm à la moitié.

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    L'intérieur de l'église, sous la tribune, en avril 2020, © L.O.M.

     

    Une fois passé sous ce plafond oppressant, on retrouve les proportions initiales qui sont, elles, gracieuses et dotées d’un décor sobre et élégant sous une voûte lambrissée en coque de navire renversée.

     

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    La nef et le chœur en avril 2020, © L.O.M.

     

    L’église de Saint-Marc a en effet bénéficié du goût réfléchit de deux de ses curées.  D’abord l’abbé Jean Blois, (1858 – Saint-Marc en Nazaire 18 décembre 1926)[4], ancien professeur au Petit Séminaire de Guérande, curé de Saint-Marc de 1904 à sa mort. Celui-ci a doté le clocher de quatre cloches bénies par monseigneur Rouard, évêque de Nantes. Celle nommé Maria Anna, fut refondue en 2010. L’abbé Blois fit l’acquisition en 1912 d’une chaire en chêne de style Louis XVI finement sculptée de panneau figurants les quatre évangélistes et de fleurons et des palmes, et un panneau gravé du mot « Veritas », au-dessus d’un trophée composé des tables de la Loi, d’une page d’Evangile, et d’une trompe de la renommée. Cette chaire a depuis été déposée à même le sol du chœur). Son successeur, l’abbé Guisnel[5], curé de 1927 à 1955, dès 1935 il fit remplacer l’autel du chœur en pin peint en blanc par l’actuel en chêne, ajouta des lambris bas du même bois tout au long de la muraille, avec, enchâssés de chaque côté de l’entrée des coquilles de bénitier. Il modifia aussi en parti le dallage, en faisant ajouter entre les carreaux de terre cuite sous les bancs, (qui remplacent les chaises paillées qui meublaient  autrefois), les carreaux de ciment qui tracent l’allée traversante, et celle menant à la porte latérale, et ceux qui délimitent le chœur. Il y avait aussi initialement deux autels de chaque côté de l’entrée, mais ils furent supprimés, ainsi que le chemin de croix et toutes les statues en plâtre du 19ème [6], par l’abbé Jaunin.

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    Intérieur de l'église vers 1905

     

    En 1955, l’abbé Guisnel fit maroufler sur la voûte du chœur la peinture qui représente la pêche miraculeuse, (l'auteur nous en est inconnu, mais il pourrait s'agir d'un couple nantais nommé Leroy).

     

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    L'a tribune, en avril 2020, © L.O.M. ; on l’ose espérer qu’elle sera un jour détruite et que l’on rendra à cette ravissante église son aspect d’avant le massacre Jaunin.

     

     

    La tribune actuelle date, nous l’avons écrit plus haut, de 1964. On y accède par deux escaliers, le premier est par de la nef via une porte percée exprès, conduisant à un escalier construit dans un appentis disgracieux et débouche par l’une des baies baie reconvertie en passage ; le second par l’escalier du clocher, depuis le hall, à droite en entrant, en passant sous la plaque posée en 1920, faisant liste des paroissiens morts et disparus au champs d’honneurs durant la première-guerre-mondiale. Cet escalier qui conduisait dès la construction à une tribune qui aurait dû être doté d’un orgue, à la particularité de comporté dans sa chaux qui le crépi, des graffitis allant de 1926 à 1968. Ce sont essentiellement des patronymes typiquement nazairiens, (Cavarro, Lejeune, Berthaud, Gouard, Fuelle, Noblé, etc.), mais aussi une bicyclette et des personnages des années 1930, (un enfant au béret qui fume, un cycliste sur son vélo, des trois policiers), mais aussi une figure du Diable, avec sa fourche et sa queue pointue...

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    Exemple de graffitis, © L.O.M.

     

    La tribune se décompose en deux plateaux pentue descendant vers le chœur. 

     

    L’église avait été dotée dès sa construction de vitraux, qui n’étaient en réalité que des verrières claires peintes de fleurons en grisailles. Ces verrières furent détruites par le souffle d’une bombe tombée sur la place la nuit du 28 juin 1942. La déflagration avait été si forte que les porte de l’église avaient elles aussi été arrachées. On les remplaça par du verre martelé, dont sont encore pourvues les quatre baies latérales qui éclairent la tribune. En 1964, nous l’avons écrit, l’une des baies fut transformée en accès pour la nouvelle tribune, quatre autres virent leur ouverture entravée par la nouvelle tribune. En 1977, onze des baies furent doté de vitraux non figuratifs, interprétables de mille façon pour celui qui s'ennuie durant l’homélie, aux tons jaunes, orangés et rouges, signé par Colin Leroux à Béac.

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    Signature sur l'un des vitraux, © L.O.M.

     

    A la suite du Concile Vatican II, on suréleva le chœur d’un planché haut de trois marches, on y plaça une table de chêne pour servir la messe, et l’on posa la chaire à même ce nouveau planché. Le baptistaire, qui se trouvait à l’entrée de l’église, fut placé devant le chœur.

     

    Le dernier curé résident fut le père Pierre Brétéché, (1928-2020), parti en 1997. Depuis 2005 l’église est rattachée à la paroisse Saint-Pierre de l’Océan.

     

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    Le chevet en avril 2020, © L.O.M.

     

     

     

     

    [1] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/07/25/le-chateau-de-saint-marc.html

    [2] A propos de cette colline et de l’origine de son nom : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2019/01/18/l-allee-du-chateau-a-saint-marc-6121661.html

    [3] Née le 20 octobre 1845 à la ferme du Petit Verdun propriété de ses parents laboureurs, elle avait hérité, n’était qu’une fille, des terres les plus proche de l’océan, et qui étaient déconsidérées mauvaise pour l’agriculture. La mode des bains de mer fit décupler la valeur de ces terrains considérés ingrats, la rendant riche, et lui permettant de jouer un rôle dans l’urbanisation du quartier.

    [4] Il repose au cimetière de Saint-Marc dans le caveau des religieux de la paroisse. La plaque qui le mentionne comporte des dates erronées.

    [5] Lui aussi ancien professeur au Petit Séminaire de Guérande, il dirigea l’école libre de garçon de Saint-Marc, qui comportait une institutrice, mademoiselle Boya, âgée de 53ans en 1927, et le prêtre instituteur Bouché. Cette école était préférée des habitants de Saint-Marc, dès son ouverture en septembre 1927, si bien que l’école public du bourg perdit à son profit les trois quarts de ses élèves, et ceux malgré le fait que l’école publique était gratuite et fournissait, livres, blouse, et sabots. Le Travailleur de l’Ouest entama le 26 novembre 1927, une attaque contre cette école, à travers un article de quarante-huit alinéas, non signé, l’accusant de faire concurrence à l’école publique, prétendit que l’abbé Guisnel avait fait pression pour cela sur les familles, prétendit que l’école était à une distance non réglementaire du cimetière, que l’eau qu’on y consommait était impropre, (ce qui fut contredit par une analyse de l’institut Pasteur), et qualifiant son personnel « d’illettrés ». En réalité, le problème était que les habitants de Saint-Marc étaient en conflit avec la municipalité qui imposait aux enfants un règlement d’école trop strict et avec des exigences que la population qualifiait de « chinoiseries ». Par ailleurs le maire François Blancho, dès son élection, cherchait à empêcher les processions et autres manifestations religieuses, ce qui déplaisait à cette population fortement religieuse. Quelques mois auparavant, le curé de Méan avait écopé d’une amande de 1 Fr. pour en avoir organisé une, et s’était retrouve emprisonné durant 48h pour avoir refusé de la payer ; l’affaire était remontée jusqu’au Conseil d’Etat et au président Poincaré en mars 1927, et l’on se battait régulièrement à coup de poing devant l’église Saint-Gohard place Marceau. Le prédécesseur de l’abbé Guisnel, l’abbé Blois, avait bravé en juillet 1925 à l’occasion de la Fête Dieu l’arrêté municipal Blancho, et en avait écopé 25 centimes d’amande. L’abbé Guisnel eut aussi à faire aux délires d’une pauvre folle, la demoiselle Berthe, qui lui asséna des coups de parapluie en 19 février 1936, au prétexte que sa T.S.F. la dérangeait. L’abbé n’ayant pas de radio chez lui, et ne tolérant pas qu’on le frappa, porta plainte contre la femme.

    [6] La Vierge, Jeanne d’Arc, saint Michel, Jésus au Sacré Cœur, saint Joseph, sainte Anne, un petit saint Pierre sur son trône, et deux très petit saints Antoine et François

  • La Croix de Saint-Nazaire

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    La Croix de Saint-Nazaire, au cimetière de La Briandais, photographie V.D.M.

     

    Au milieu de l’allée principale du cimetière de La Briandais est une croix de pierre au sommé d’une colonne posée sur un piédestal. Cette croix est la Croix de Saint-Nazaire, oubliée des plaquettes historiques municipales. Sculptée au temps de la duchesse Anne, elle figure d’un côté le Christ crucifié, entouré de deux personnages que le temps a rendu inidentifiables, mais qui sont probablement Marie et Jean, et de l’autre côté le corps du Christ sur les genoux de sa mère ; le tout est soutenu par quatre têtes angéliques.

     

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    La Croix de Saint-Nazaire, au cimetière de La Briandais, photographie L.O.M.

     

    La Croix de Saint-Nazaire était initialement une croix de chemin. Elle se trouvait initialement au lieudit Le Grand Pré, à l’emplacement des croisements de la rue du Bois Savary, de La Petite Californie, et Henri Gautier, (endroit qui sera réemployé en 1820 pour édifier un calvaire dont Beilvaire fit un dessin connu des Nazairiens). C’est cette croix, vers laquelle les navires allant à Nantes tiraient une salve d’honneur, dont parle Edouard Richer dans son Voyage pittoresque en Loire-Inférieure, publié à Nantes en 1820, par Mellinet-Malassis. Mais contrairement à ce que croyait Edouard Richet, la croix ne fut pas détruite à la révolution, elle fut en réalité déplacée en 1783.

     

    Du Grand Pré au cimetière de La Porterie :

     

    En 1783 Saint-Nazaire avait deux cimetières : le Grand, autour de l’église primitive, au sommet sur rocher, qui n’était plus utilisé que pour les corps échoués sur la plage ou les suicidés ; et le cimetière de l’église, qui se trouvait plein. En effet, en comté de Nantes, on ne pratiquait le curage des cimetières avec dépose en ossuaire, comme cela était le cas dans l’Est de la Bretagne. Comme il était hors de question de déplacer les morts, il fallut faire le choix d’un nouveau lieu d’inhumation. On demanda au maître chirurgien de la ville, le docteur Jean-Philippe-Emmanuel Pierre[1], son avis, et celui-ci recommanda que l’on choisisse un lieu éloigné de la ville, des sources et fontaines, afin de préserver la population d’épidémie. Le choix se porta sur un jardin, clos de trois côtés de murs, s’ouvrant sur la Loire qui le baignait les jours de forte marée. Son emplacement correspond au boulevard de La Légion d’Honneur et au terrain des anciens frigos, ce qui explique pourquoi, aujourd’hui encore, il n’est pas rare que les cantonniers, quand ils ouvrent une fosse dans cette zone, découvrent des ossements.  Le jardin répondait au nom de La Porterie et appartenait au sieur Dubocher[2] qui l’avait mis en fermage. L’acquisition, avec dédommagement du fermier, fut décidée par le conseil de fabrique le 4 mai 1783, il fut béni le 17 mai, et il y eut en même temps l’interdiction d’inhumer en un autre lieu de la paroisse que celui-ci[3]. Sur délibération du 22 juin 1783, le conseil de fabrique décida le déplacement de la Croix de Saint-Nazaire dans le nouveau cimetière, avec démolition pour réemploi des pierres, du piédestal original. En 1856, il fallut déplacer à nouveau le cimetière qui se trouvait trop près de ce qui allait devenir le port.

     

    De La Porterie à La Briandais :

     

    Le cimetière de La Briandais fut ouvert en 1856. Son acquisition et les travaux qui furent nécessaires à sa fondation coutèrent 20.000 fr[4]. On vida progressivement l’ancien cimetière de La Porterie, et la croix fut déplacée à La Briandais. Mais, parce qu’elle n’était plus dans le goût de l’époque, elle fut déposée démontée le long d’un mur, et rapidement prise par les ronces. En 1890, le cimetière de La Briandais était dominé par un grand crucifix de bois érigé en 1884[5], mais il menaçait de tomber. Par prudence on le démonta. C’est alors que Charles Beivaire[6] suggéra au maire, Fernand Gasnier, de remplacer ce crucifix par la croix ancienne qu’on avait totalement oublié. Le maire fit ériger à nouveau la Croix de Saint-Nazaire, et elle veille depuis à nouveau sur le repos des Nazairiens[7]. Un bombardement, qui toucha le cimetière, la renversa, on la remit en place à la Reconstruction.

    La Croix de Saint-Nazaire est la seule croix ancienne de la ville à ne pas être protégée au titre des Monuments Historiques.

     

     

    [1] Originaire d’Ancenis, il avait épousé Jeanne-Philippe Bouveron. En 1796 il était qualifié d’officier de santé.

    [2] Il ne nous a pas été possible de déterminer s’il s’agit de Mathieu ou de Thomas.

    [3] Notons ici que le terrain dépendait de la seigneurie de La Ville-au-Fèves : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/15/la-ville-aux-feves.html

    [4] Cf. Henri Moret, Histoire de Saint-Nazaire.

    [5] La date figure encore aujourd’hui à l’arrière du piédestal de la croix se trouvant au milieu de l’allée principale.

    [6] Lire à ce sujet : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2014/12/08/charles-beilvaire-un-peintre-nazairien-oublie-5505901.html

    [7] Voir à ce sujet l’article du Courrier de Saint-Nazaire du 27 mai 1939, mais qui comporte des erreurs de date.

  • Un irlandais gouverneur de Saint-Nazaire

    Les 20 octobre 1758, Louis XV, roi de France, duc en Bretagne, donna le gouvernent militaire de Guérande, du Croisic et du port de Saint-Nazaire à Richard-Edmond de Cusack, maréchal de camp et armées du Roi, commandeur de l’Ordre militaire de Saint-Jacques, (couronne d’Espagne), chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis. Le nouveau gouverneur prêta serment pour cette charge le 18 mars 1759.

     

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    Cusack (de) : Partie d’or et d’azur ; à la fasce de l’un en l’autre. Couronne de marquis. Tenants deux triton portant chacun un badelaire sur l’épaule. Cimier : une sirène portant d’une main un sceptre fleurdelisé, de l’autre une épée. Devise : Dieu est mon espoir.

     

    La presqu’île guérandaise, tout comme Nantes, était un foyer jacobite. Nombre d’Irlandais, d’écossais, et quelques anglaises, de confession catholique, ou attaché à la dynastie légitime, avaient préféré s’y exiler après la fuite en France du roi Jacques II en décembre 1688. On le sait, le 2 juillet 1745, c’est de Saint-Nazaire que Charles Stuart, dit Bonnie Prince Charlie, ou The Young Pretender, parti à la reconquête du trône de ses ancêtres, aidé par la famille Walsh[1].

     

    Cependant, Richard-Edmond de Cusack n’était pas l’un de ces exilés de 1688. En effet, l’exil de sa famille avait débuté à l’avènement d’Olivier Cromwell en 1653, et aux persécutions qu’il fit subir aux catholiques. Le père de Richard-Edmond, Richard de Cusack de Gerards-Town, était entré au service d'Espagne, et fit carrière aux Pays-Bas-Espagnoles, où il devint capitaine dans le régiment irlandais d'O’Byrne en 1690. De son union avec Anne-Catherine Martyn, ont lui connait trois fils et une fille. Richard-Edmond était le troisième fils et on le suppose né à Aire-sur-la-Lys, en 1687. Tout comme ses frère, il embrassa la carrière militaire, entrant comme cadet volontaire au régiment d’infanterie irlandaise de Dorington, (plus tard renommé de Rothe), à l’âge de seize ans.

    Il participa au siège de Kehl, au combat de Munderkinghen et à la première bataille d'Hochstoedt en 1700, à la seconde bataille en 1704, et fut fait lieutenant réformé dans le cours de la même année.

    Il fit les campagnes de 1705, 1706, 1707 et 1708 à l'armée du Rhin. Nommé capitaine réformé au même régiment par commission du 21 mai 1 709, il se trouva, le 11 septembre suivant, à la bataille de Malplaquet, marcha en Flandre en 1710, combattit à l'attaque d'Arleux en 1711, et se trouva à la bataille de Denain et aux sièges de Douay, du Quesnoy et de Bouchain en 1712. En 1713, il servit aux sièges de Landau et de Fribourg, ainsi qu'à l'attaque des retranchements du général Vaubonne. Il devint aide-major de son régiment (alors renommé Rothe), par brevet du 20 août 1720, y eut rang de capitaine en second le 21 juin 1721, puis de capitaine en pied le 19 juin 1729, et obtint, le 9 janvier 1701, une compagnie qu'il commanda au siège de Kehl en 1735, à l'attaque des lignes d'Etlingen et au siège de Philisbourg en 1734 à la bataille de Clausen en 1735, puis à l'armée de Flandre en 1742.

    Fait chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis en 1736 ; il fut fait capitaine de grenadiers le 24 janvier 1742, et lieutenant-colonel le 4 avril suivant. Le 27 juin il combattit à la bataille de Dettingen, sous les ordres du maréchal de Noailles. Il servit, en 1744, aux sièges de Menin, d'Ypres, de Furnes et du fort de la Knocke, que Louis XV fit en personne, et finit la campagne au camp de Courtray. Le Roi, en considération de ses services et de sa conduite distinguée à la bataille de Fontenoy, le 11 mai 1744, lui assigna une pension de 600 livres sur le trésor royal[2]. Dans la même année, Richard-Edmond de Cusack assista aux sièges des villes et citadelles de Tournay, Oudenarde, Denderinonde et Ath. Créé brigadier d'infanterie par brevet du 20 mars 1747, il commanda au pont de Walheim, poste important, où il se maintint pendant six semaines avec 600 hommes qui étaient relevés tous les cinq jours. A la bataille de Lawfeld, gagnée par le Roi le 2 juillet de la même année, il donna les plus grandes preuves de sang-froid et de valeur, et, en considération des nouveaux services qu'il avait rendus dans cette occasion, Louis XV porta à 1.000 livres sa pension sur le trésor royal[3]. Après la campagne, le régiment de Rothe fut mis dans Berg-op-Zoom, où Richard-Edmond commanda les convois pendant tout l'hiver. Il eut à soutenir de fréquentes attaques de l'ennemi, mais il sut toujours le repousser et assurer l'arrivage des approvisionnements de l'Armée. Il fut employé au siège de Maëstricht en 1748, au camp d'Aimeries en 1704, au camp de Calais en 1756, et à l'armée de Flandre en 1757 et 1758, et fut créé maréchal-de-camp par brevet du 10 février 1758. Se démettant alors de la lieutenance-colonelle du régiment de Rothe, et se retira après avoir servi pendant 56 ans sans interruption, le Roi lui accorda en remerciement le 20 octobre 1758 le gouvernement de Guérande, du Croisic et de Saint-Nazaire. Le souverain espagnol, Charles III, lui avait pour sa part, accordé, par brevet du 10 août 1758, la commanderie de l'hôpital de Mancied, dans l’Ordre militaire de Saint-Jacques de l’Epée.

    De son union avec Marie-Anne-Isabelle-Brigitte Fitz-Gérald, il eut plusieurs enfants, dont seule survécu Marie-Madelaine-Josèphe-Aglaé de Cusack, née à Lille  le 25 octobre 1727, mariée avec Etienne Joseph de Lespinasse, marquis de Langeac, comte de Saint-llpize , chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, gouverneur de Pierrepertuse, commandant pour Sa Majesté des ville et citadelle du Pont-Saint-Esprit et en Bas-Languedoc, maréchal des camps et armées du Roi, et commandeur des ordres royaux, militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem qui engendra Auguste-Louis-Joseph-Fidèle-Armand de Lespinasse, comte de Langeac, né à Paris, le 9 octobre 1748, pour qui Richard-Edmond de Cusack abandonna, avec consentement du Roi, le gouvernement de Guérande, du Croisic, et de Saint-Nazaire, le 1er septembre 1765.

    Il avait épousé en secondes noces Marie-Louise de La Rasse, veuve du marquis de Moulins, de laquelle il n'eut pas d'enfants. Il est décédé à Corbeil le 14 décembre 1770, à l'âge de 82 ans.

     

     

     

    Le dernier gouverneur de Saint-Nazaire :

     

    Petit-fils du précédent, Auguste-Louis-Joseph-Fidèle-Armand de Lespinasse, comte de Langeac, entra au service, le 1er février 1767, comme cornette dans le régiment de Bauffremont, dragons. En 1765, il fut nommé capitaine d'infanterie dans le régiment de recrues de la ville de Paris. Le 1er septembre, sur démission de son grand-père maternel, Richard-Edmond de Cusack, reçu du Roi le gouvernement des villes de Guérande, du Croisse et de Saint-Nazaire, en Bretagne. Le 15 décembre 1766, il obtint la survivance du gouvernement de la ville de Rue en Picardie, et, le 21 mai 1767, celle du gouvernement de la ville du Puy-en-Velay. Nommé capitaine de dragons dans le régiment de Bauffremont , le 16 août suivant, il fut employé en 1768 à l'Ecole royale d'équitation des dragons, à Cambray. Il fit la guerre de Corse, en 1769, en qualité d'aide-de-camp du général en chef comte de Vaux[4]. Il gagna alors le Ponte-Nuovo du Golo contre les Corses, anéantissant le dernier obstacle pour marcher sur Corté, alors capitale de l'île. Avec les vicomtes de Custine et de Vioménil[5], à la tête de quinze cents grenadiers et chasseurs,il fut chargé d'aller par les montagnes et l'intérieur de l'île, à la poursuite des troupes Corses, entraînant la fuite de Paoli.

    Nommé colonel au corps des Grenadiers de France le 3 janvier 1770, puis le 25 décembre suivant, commandeur de la commanderie de l'hôpital de Mancied, de l’Ordre militaire de Saint-Jacques de l'Épée à la suite de son grand-père maternel, il reçut, le 13 mars 1771, la croix de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, et fut chargé la même année, sous les ordres du comte de Mailly[6], de l'inspection des frontières de France, des Pyrénées, des côtes de la Méditerranée, des Alpes, etc. Le corps des grenadiers de France ayant été réformé en 1771, le comte de Lespinasse-Langeac fut attaché, avec son grade de colonel en second du régiment de l'Ile-de-France. A la réforme des colonels en second, il fut attaché à la garnison de la ville de Valenciennes. En 1772, le roi Louis XV le pourvut de la charge de capitaine des gardes de la porte de son petit-fils, monseigneur le comte de Provence[7]. Il obtint alors les entrées de la chambre, et l’année suivante celles du cabinet. En 1775, il fut nommé commandeur de l'ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem. Après avoir été témoin des journées des 5 et 6 octobre 1789, et des événements qui en furent la suite, il partit en Lorraine. Ayant appris que Louis XVI s’était enfui de Paris, il se mit en marche pour rejoindre le monarque ; mais, arrivé à Neufchâteau, il apprit l’arrestation de Varennes, et fut lui-même arrêté à Neufchâteau, comme suspect d'opinions anti-révolutionnaires, et accusé do courir de château en château pour favoriser le départ du Roi, et opérer une contre-révolution.

    Désarmé et conduit par la maréchaussée dans la ville de La Marche, il y fut détenu pendant deux mois dans une prison que la population, agitée par les révolutionnaires, menaçait de forcer toutes les nuits. On était sur le point de le conduire à la haute cour, à Orléans, lorsque l'acceptation de la Constitution par le Roi le fit rendre à la liberté. Après s'être offert inutilement en otage pour Louis XVI et sa famille, il émigra, et alla rejoindre le comte d’Artois à Coblence. Il servit dans l’armée de Condé en qualité d'aide-maréchal-général des logis de la cavalerie, suivit les princes à Dusseldorff, et ne prit congé d’eux qu'à l'époque de leur départ pour la Westphalie. Retiré au Provinces-Unies, il allait passer en Angleterre, lorsqu'il fut fait prisonnier par un corps de troupes sur les glaces du Texel. Après avoir été dépouillé de tout, il aurait été infailliblement fusillé, s'il n'avait eu la chance de s'échapper. Muni de l'autorisation écrite de monseigneur le comte d'Artois, il servi dans divers corps, au service des Provinces-Unies et du souverain britannique. Après la réforme de ces corps, il se fixa à Hambourg, et s’y trouvait pendant le siège qu'en firent les alliés, en 1813, et ne put rentrer en France qu'après l'évacuation de cette place par les troupes françaises, le 8 juin 1814.

    Mis à la retraite le 25 septembre 1816, il décéda à Paris en 1832, sans avoir contracté d’alliance.

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    Lespinasse (de) : Ecartelé ; au 1 d'or au dauphin pâmé d'azur ; au 2 d'or au gonfalon de gueules ; au 3 d'azur semé de fleurs de lys d'or à la tour d'argent, brochante sur le tout ; au 4 d'or à 6 fleurs de lys d'azur ; sur le tout fascé d'argent et de gueules de huit pièces, et au centre un écusson de gueules, à la bande d'argent et au lambel du même. L'écu timbré d'une couronne de marquis. Supports : Deux lions. Devise : Sans chimères et sans reproches.

     

     

    [1] http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2012/06/15/bonnie-prince-charlie-ou-the-young-pretender.html

    [2] Lettre de M. d'Argenson, datée du camp de Tournay, le 29 mai 1746.

    [3] Lettre de M. d'Argenson, du 27 juillet 1747.

    [4] Futur maréchal et gouverneur de Corse.

    [5] Futur maréchal.

    [6] Futur maréchal.

    [7] Futur Louis XVIII.

  • Les Nazairiens en Turquie, (1928-1930)

    En septembre 1924, le fondateur de la République turque, que l’histoire à retenu sous le nom de Mustafa Kemal Atatürk, se rendit sur les bords de la mer Noire, à la frontière soviétique, pour inspecter le croiseur de guerre Yavuz Sultan Selim, (L’audacieux sultan Sélim[1]), ancien SMS Goeben.

     

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    Le SMS Goeben en 1911.

     

    Ce navire de 25.400 tonnes, d’une longueur de 186,6 mètres pour 30 mètres de large, avait été conçu à l’origine pour la Kaiserliche Marine par les chantiers Blohm & Voss à Hambourg.

    Au début du premier conflit mondiale, l’Empire ottoman, alors nation neutre, s’était vu confiés le 16 août 1914, avec le SMS Breslau, le SMS Goeben, au prétexte que tombés en panne de charbon en Méditerranée, l’Empire allemand n’avait, du fait de son entrée en guerre, n'avait pas possibilité de les ravitailler. Le gouvernement des Jeunes turcs avait annoncé qu’ils seraient postés à chaque entrée du Bosphore afin d’empêcher toute intrusion des belligérants dans ce détroit qui coupe en deux İstanbul, alors Constantinople, capitale du pays. Mais le gouvernement des Jeunes turcs avait conclus un accord secret à l’Allemagne le 2 août 1914, promettant une entrée en guerre à ses côtés, ce qui se réalisa le 29 octobre 1914.

    Rebaptisés Yavuz Sultan Selim et le Midilli, ils furent les terreurs des Alliés, empêchant toute intrusion dans le Bosphore, et si le Yavuz Sultan Selim n’avait été gravement endommagé le 20 janvier 1918, durant un combat contre les HMS Raglan et HMS M28 de la Royal Navy, en défendant les Dardanelles, il est probable que l’Empire serait sorti sans encombre de la guerre. Mais le destin en voulu autrement. Contraint à l’échouage à pointe de Nagara, où il fut attaqué par l’aviation, il fut remarqué par le Turgut Reis, autre navire acquis après des Allemands, qui le sauva de justesse de l’attaque projetée par le sous-marin HMS E14.

    Amarré à Constantinople dans un état lamentable, le traité de Brest-Litovsk, signé le 30 mars 1918 entre l’Allemagne et la République soviétique, fit qu’on le remorqua jusqu’aux chantiers de Sébastopol, où il subit une série de réparations entre les 7 août au 19 octobre 1918.

    L’Empire ottoman capitula le 30 octobre 1918. Dans l’espoir de relancer la guerre, le 2 novembre, l’Allemagne, à bout de souffle, donna les deux navires à l’Empire Ottoman, action vaine, car la république fut proclamée le 9, et l’armistice fut signée le 11, mettant fin à la guerre en Europe.

    Selon les termes du Traité de Sèvres, conclu le 10 août 1920, le Yavuz Sultan Selim devait être remis à la Royal Navy eau titre de dommage de guerre. Cependant, l'accord de Sèvres n'ayant pas pu être mis en œuvre en raison de la Guerre d'Indépendance turque, (1919-1923), dirigée par Mustafa Kemal Atatürk, dont il fut victorieux, et qui se conclue avec la signature du traité de Lausanne le 24 juillet 1923, le navire fut conservé par la Turquie.

    Le Yavuz Sultan Selim, resta en mer noir, oublié jusqu’à ce qu’Atatürk entreprenne la création de la nouvelle marine militaire turque. L’URSS étant devenu une alliée infréquentable, Atatürk ayant pour ambition de faire de son pays un état moderne, indépendant, et industrialisé, il fallut créer chantier naval en Turquie. Le traité de Lausanne ayant démilitarisé le Bosphore, le choix se porta sur le lieu d’un projet impérial avorté dans la baie d’Izmir, Gueuldjuk[2], nommé Gölcük en turc moderne.

     

    En effet, en 1911, l’Empire avait projeté de fonder 122 arsenaux et chantiers le long de ses côtes qui allaient de la Géorgie à l’Egypte, avec en plus la côte libyenne. Des imbroglios administratifs dans les expropriations nécessaires à la réalisation du projet, les guerres balkaniques, puis l’invasion de la Libye par l’Italie, avaient retardé le projet dont la britannique Armstrong Company était le partenaire. La première-guerre-mondiale avait remisé le projet.

    Au début de l’année 1925, Atatürk obtint qu’on expropriât İsmail Pasha, le propriétaire d’un domaine agricole au bord sur de la baie d’Izmir. Le 23 juin 1925 débuta la réalisation d’une cale sèche flottante pour loger le Yavuz Sultan Selim, rebaptisé Yavuz Selim, qu’ont construisit structures nécessaires à la navale, et dépôt de charbon.

     

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    Le Yavuz Selim dans sa cale flottante en 1929.

     

    On assécha les marais environnants, construisit routes et voie ferrée, et une ville fut fondée. Les travaux s’achevèrent le 14 septembre 1927. Faute d’ingénieur turc compétant, on alla chercher un en Allemagne un pour la réparation et la modernisation du Yavuz Selim, mais qui se révéla incapable de diriger des ouvriers turcs qui n’avaient aucune formation. Atatürk se résolu à lancer un appel d’offre auprès des autres pays. Ce fut la Société des Ateliers et Chantiers de Saint-Nazaire, dit Chantiers de Penhoët, qui remporta le contrat[3]. Il fut convenu de faire venir pour la durée d’une année et demie des ouvriers nazairiens, et leur famille s’ils le désiraient[4], pour qu’ils assurent les travaux et forment les ouvriers turcs. Deux ingénieurs des Chantiers de Penhoët furent choisis pour superviser[5]. Seules conditions imposées : en raison du secret militaire, il était interdit aux Nazairiens d’aller au-delà de 8 km autour d’Izmir et de raconter ce qu’ils faisaient, même aux familles restées au pays.

     

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    Les chantiers en 1928.

     

    Partis pour la Turquie :

    Le 29 août 1927, 50 ouvriers métallurgistes des chantiers de Penhoët, certains accompagnés de leur famille, partirent à 20 h 40 de la gare de Saint-Nazaire en direction de Marseille, afin de s’embarquer pour Izmir.

     

    En février 1928 il courut la rumeur que les ouvriers étaient maltraités en Turquie, ce qui fut rapidement démenti. Le 25 du même mois, 5 femmes partirent rejoindre leurs époux. En août suivant 40 autres ouvriers partirent ; 30 le 17 septembre 1928 ; 50 le 12 novembre, etc. Ce furent finalement 250 ouvriers qui partirent en Turquie, formant une colonie bretonne de 400 personnes avec leurs familles, qui lisaient les journaux nazairiens et vivait en autarcie. Le nombre des ouvriers turcs était de 250 ; la population de la ville de Gölcük était alors de 1.500 âmes.

     

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    Famille d'ingénieur à Gölcük le 5 avril 1929.

     

    En février 1928, Raymond-Charles-Louis Le Dahéron, ouvrier ajusteur, habitant du quartier de Toutes Aides, décédas de maladie à Gueuldjuk. Sa dépouille fut rapatriée à Saint-Nazaire, enterrée en grande pompe au cimetière de Toutes Aides, le mardi 28 février, en présence de la direction des chantiers et des syndicats, après une messe à Saint-Gohard.

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    Les chantiers durant l'été 1929.

     

    En mai 1929, trois ouvriers métallurgistes, Halgand, Viaud, et Mahé, voulurent faire une excursion à İstanbul, mais à peine arrivés ils furent arrêtés par la police, et renvoyé par le premier bateau en direction de Marseille. Les Chantiers de Penhoët avancèrent l’argent pour leur retour à Saint-Nazaire, sous réserve de retenu sur salaire. Le syndicat métallurgiste tenta de contester en affirmant qu’il n’y avait pas rupture de contrat, mais le non-respect des limites de déplacement était une faute professionnelle, et les ouvriers durent rembourser.

    Une affaire fit les choux gras de la presse nazairienne : le mécanicien Olivier Haspot[6], avait laissé son épouse, Marie-Augustine[7], dans leur domicile du 5 Grand’Rue avec leurs cinq enfants. Il lui envoyait de Turquie 1.400 fr à 1.900 fr par mois, argent qu’elle dépensait en alcool. Couverts de vermine, en guenilles, enfermés dans une maison d’une saleté repoussante, les enfants étaient livrés à eux-mêmes, nourris par des voisins charitables. L’ainée, Hélène[8], avait 19ans, et n’osaient s’opposer à sa mère à laquelle elle se substituait pour l’éducation de ses cadets ; c’est alors que le 7 juin 1929, le second de la fratrie, Alexandre, âgé de 16ans[9], se révolta, et blessa leur mère à la main avec un couteau. Les voisins s’en mêlèrent, appelant la police. Marie-Augustine racontât que l’adolescent vivait à ses crochets, lui réclamait chaque jour plus d’argent que ce qu’elle lui donnait, qu’il lui avait déjà lancé un jour son couteau qui s’était planté dans un mur, et se fit passer pour une victime. On n’écouta pas Alexandre, il fut condamné à six mois de maison de correction. Heureusement, le commissaire Pacaud veilla, il intervint en faisant dresser un procès-verbal pour maltraitances d’enfants. Les quatre frères et sœurs d’Alexandre envoyés à l’hôpital le 4 février 1930. Alexandre sortit rapidement de la maison de correction pour bonne conduite, et Marie-Augustine fut arrêtée le 3 juillet 1930, provoquant une manifestation de voisins qui se refusaient à la croire mauvaise. Elle écopa de cinq mois de prison, puis retourna vivre avec son mari revenu de Turquie[10].

     

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    photographies extraites de L’Animateur des Temps Nouveaux de juin 1931.

     

    Retour à Saint-Nazaire, l’Amical des anciens de Gueuldjuck :

    Les travaux du Yavuz Selim s’achevèrent le 31 mars 1930. On commença le rapatriement, certains Nazairiens restèrent jusqu’à la fin août, afin de former les chauffeurs ottomans qui manquaient d’expérience et n’auraient pas pu pratiquer une chauffe de 220 kg de charbon par m2 de grille soit une consommation par heure de 54 t. Les Chantiers de Penhoët transfèrent les installations au gouvernement turc et quittent le pays. Huit nazairiens naquirent à Gueuldjuck, : Jacques Leroux , (fils d'un  manœuvre), en 1928; Yvette Le Borgne, (fille d'un ajusteur), Yvette Legoffic, (fille d'un frappeur), Jacques Georges, (fils d'un charpentier), Léonie Mougenot, (fils d'un grossiste), Guy Colino, (fils d'un tourneur), Monique Chedorge, (fille d'un machiniste), en 1929 ; Micheline Dupont en 1930, (fille d'un chanfreineur).

    .

     

    Durant leur séjour en Turquie, les ouvriers nazairiens se constituèrent en amicale. A leur retour à Saint-Nazaire, ils firent don de 1.103 fr 65, au bureau de Bienfaisance de la ville, le 18 août 1930.

    Après quelques tergiversations, il fut décidé de constituer l’Amicale des anciens de Gueuldjuck. Ainsi, le 20 septembre 1930, au café Hébert, rue du palais, se tient une grande réunion des anciens de Gueuldjuck. Marcel Blanchard exposa les buts de l’amicale : un groupe resserrant les liens qui les unissaient en Turquie, organisant des distractions, (concerts, bals, promenades, banquets), et surtout aider les membres des familles en cas de blessure, mort, ou chômage. Le président du bureau provisoire fut Rocheteau ; les vice-présidents Pipault et Tanguy ; le secrétaire Blanchard ; le secrétaire adjoint Brosseau ; le trésorier C. Alletz ; le trésorier adjoint Guilloré ; les commissaires Guillouet, Le Prévost, Bonhommeau, Viaud, Georges Coléno.

    La première réunion générale eut lieu le dimanche 28 septembre 1930 à l’hôtel du Berry, pour adoption des statuts avant déclaration en préfecture

     

    Le samedi 8 novembre 1930 l’amical donna sa première soirée, à 20 heures, dans la salle de L’Eden-Cinéma. La fanfare de l’UMP donna une pièce militaire, suivit d’un buffet de sandwichs, bière et vin, puis d’un bal. Ce fut la seule soirée donnée, malgré la bonne volonté des membres. Seule subsistât la caisse d’aide. Après une crise en août 1935, qui manqua d’entraîner sa dissolution, l'amical subsista jusqu'à la Seconde-guerre-mondiale.

     

    Le destin du Yavuz :

    Devenu en 1936 Yavuz , le croiseur remis en état et modernisé par les nazairiens, était considéré à la veille de la seconde-guerre-mondiale comme un navire dangereux. La Turquie resta neutre durant le conflit, et le navire fut affecté à empêcher des intrusions dans le Bosphore. Il resta en service jusqu’au 20 décembre 1950. Transféré aux services de l’OTAN sous le numéro B70 en novembre 1954. Le gouvernement turc proposa au gouvernement allemand de le racheter en 1963, ce qui fut refusé ; il fut alors vendu à MKE Seyman pour démantèlement en 1971. Le démantèlement débuta le 7 juin 1973 et s’acheva en février 1976. Le MKE Sanayi ve Teknoloji Müzesi, (Musée de l’Industrie et de Technologie), à Ankara, en conserve deux sections de blindage de coque et un tronçon de canon. Il est exposé au MKE

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    Médaille commémorative de la fondation des chantiers de Gölcük.

     

     

    Sources : Le Courrier de Saint-Nazaire, Le Phare de la Loire et L’Ouest Eclaire d’août 1928 à novembre 1930 ; Donanma ve Gölcük Tersanesinín Taríhi, F. Yavuz Ulugün ; The Hunters and the Hunted - The Elimination of German Surface Warships Around the World 1914-1915, Bryan Perrett, Pen&Sword Maritime, South Yorkshire, 2012.

    Remerciements particuliers à madame B.G.

     

     

    [1] (10 octobre 1470-20 septembre 1520) ; 9e sultan ottoman, du 24 avril 1512 au 22 septembre 1520, son successeur fut Soliman le Magnifique.

    [2] Littéralement : lagune.

    [3] La Turquie était alors considérée par les autorités françaises comme « un pays vierge au point de vue économique » (cf. discours de Mario Roustan, sénateur ancien ministre).

    [4] Un collège français, nommé Sainte Barbe existait à Izmir et devait assurer la scolarité de leurs enfants.

    [5] Deux sous-marins devaient aussi faire l’objet de réparations et modernisation, on les confia à une compagnie néerlandaise.

    [6] Né à Saint-Nazaire le 5 décembre 1877, fils naturel de Marie Louise Haspot, tailleuse.

    [7] Née Marie Augustine Denis, à Saint-Nazaire 2 décembre 1883, ancienne tailleuse pour dame, fille d’un cuisinier ; ils s’étaient mariés à Saint-Nazaire le 11 septembre 1909.

    [8] Née à Saint-Nazaire, le 30 juillet 1910

    [9] Alexandre-Daniel, né à Saint-Nazaire le 4 avril 1913.

    [10] Les enfants furent à jamais traumatisés ; Alexandre, devenu cuisinier au 3ème dépôt de la Marine à Lorient, tira en janvier 1935, dans la rue L’Enclos du Port, sur le tenancier d’une maison close, et traduit devant le conseil de guerre de la marine à Brest.

  • Géorama

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    Géorama, façade d'arrivée

     

    « […]

    Quittez l’Océan. C'est la Belle côte

    Qui vient égayer le panorama.

    Les brisants jolis quand la mer est haute

    Devant Chemoulin et Géorama.

    […] »

    (extrait de « La butte du château », poème anonyme publié en février 1929 par le journal paroissial « Le trait d'union de Saint Marc sur Mer ».

     

     

    La villa Géorama a été construite pour Gabrielle-Charlotte Mougin, (née vers 1863), entre 1908 et 1910, à la demande de son amant, Paul Blavier, par l'architecte nantais Paul Devorsine, (Nantes 1859 – Nantes 1935), à qui l'on doit plusieurs villas à Pornic et La Baule, et les bâtiments de la Biscuiterie Nantaise.

     

    Paul-Édouard Blavier, (Angers 11 août 1856 - Saint-Pierre-Montlimart1 22 février 1916), fils d'un sénateur royaliste du Maine-et-Loire, partageait sa vie entre son château de La Bellière à Saint-Pierre-Montlimart, (construit par la famille de son épouse, il avait racheté les parts des autres héritiers)2, et son hôtel parisien du 35 rue de La Bienfaisance. Il était marié depuis 1880 avec Jeanne Langois, dont il avait eu un fils, Jean-Charles, (1882-1959), et une fille, Simone, (1881-1901). En 1905 Paul découvrit sur ses terres de La Bellière un gisement d'or déjà exploité par les Romains. Il ouvrit une mine et exploita ce filon, augmentant plus encore sa fortune3. Il fonda aussi une usine hydroélectrique à Bohardy, puis, en 1911, à Saint-Pierre-Montlimar, une manufacture de fabrication d’ampoules électriques, à main-d’œuvre exclusivement féminine4.

     

    Richissime, Paul Blavier s'ennuyait, un jour, il rencontra, vers 1887, une Gabrielle-Charlotte Mougin, née vers 1863, qui lui réveilla les sens. Ils eurent un fils, Charles Mougin, née à Paris le  12 février 1888, et déclaré de père inconnu.

    Ne pouvant la loger avec sa famille au château, il décida de faire édifier une villa pour sa maîtresse, à l’emplacement d'une vigne d'un peu moins d'un hectare, dominant l'océan, à Saint-Marc en Saint-Nazaire, qu'il avait acquis en cinq lots, le 21 août 1898 de Julien Gobichet, chez maître Marcussen5, au lieu dit Les Grandes Vignes, au dessus de la plage des Gabourelles sur une pointe.

    La villa, construite dans un style d'inspiration Gothique tardif, revisité de Renaissance et d'Art nouveau, est en moellon et ardoises. Elle se compose d'un rez-de-chaussée carré sur cave et d'un étage sous combles à longs pans et demi-croupes, avec pavillon central flanqué de deux ailes, et dotée du côté de l'océan d'une loggia avec vue sur l'océan et l'estuaire, d'un jardin empli de roses en terrasse et un escalier à rampe de fer descendant jusqu'à la plage en contrebas de la falaise, qui n'est accessible à marée haute que par ce chemin. La maison est précédée d'un puits-fontaine massif, et d'un pavillon de gardien au portail d'entré constitué d'une arche de pierre. Le décor intérieur et fait de boiseries néogothiques et de plafonds à la françaises polychromes dans le goût renaissance. Le panorama avec sa vue à 180° fit qu'il décida de nommer la demeure « Géorama »6 .

     

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    Se sentant vieillir, Paul décida en 1914, afin de laissait à son amante une rente, de lui racheter la villa par l'intermédiaire d'un viager en nue-propriété, à charge pour ses héritiers poursuivre le versement de la rente. Leur fils, Charles Mougin, avait épousé le 23 mai 1912 à Nantes Marie-Andrée Meignin. Il fut envoyé au front comme soldat de 2ème classe au 265ème Régiment d'Infanterie, et décéda de maladie contractée au service le 21 janvier 1915 à l'hôpital de Pierrefonds.

     

    En 1917, la veuve de Paul, scandalisée à l'idée d'entretenir la maîtresse de son époux, décida de renoncer à la donation des biens que lui avait faite Paul, au profit de leur fils Jean.

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    L'ancienne amante ne vivait pas à Géorama, elle loua la maison à diverses personne, dont le maire Louis Brichaux, qui trouvait l'habitation peu pratique malgré sa situation et ses volumes, et finit par acquérir la Villa Minne au Petit Gavy.
    Jean-Charles Blavier finit par obtenir l'acquisition de la propriété en rachetant à Gabrielle-Charlotte Mougin sa rente viagère, ainsi que quatre parcelles de vignes l'autre côté de la route, en 1921. La villa était alors louée à l'industriel et ancien maire de Saint-Nazaire, Louis Brichaux, qui acquit en 1921 la villa Minne au Petit Gavy.

    Non désireux de vivre dans les meubles de l'ex-maîtresse de son père, Jean fit l'acquisition, au début de l'année 1928, après des héritiers de l'industriel Charles Puget, de la villa mitoyenne Stella Maris Ave, et s'y établit, n’utilisant de Géorama que pour des réceptions.

    Quoique millionnaire, Jean-Charles Blavier était d'une pingrerie peu commune, y compris avec ses gitons. On murmurait qu'il faisait resservir plusieurs fois les reliquats des soupers qu'il donnait et remettre en bouteille les fonds de verre de vin, vin qu'il faisait servir chichement, ne buvant pour sa part que de l'eau de Vichy. Il ne donnait jamais plus de 5fr70 aux œuvres des tuberculeux de Saint-Nazaire, et uniquement parce qu'il se sentait forcé de le faire au sortir de la messe de Saint-Marc, et veillait à ce qu'on lui rendit bien la monnaie sur les 6 francs qu'il avait rendu.

    Durant la guerre Géorama abrita l’état-major du M.A.A. 280. Deux tobrouks furent construit en direction du large, et deux abris de surveillance le long de la route d’accès. La villa sortie de la guerre en bon état.

    Jacques Tati loua la villa pour lui à l'occasion du tournage de « Les vacances de Monsieur Hulot » en 1952-1953.

     

    Jean-Charles vendit Géorama en 1957 aux villes de Trappes, Guyancourt et Saint-Cyr-l'École7. la villa devint un centre à vocation sociale, destiné à accueillir les familles et les enfants de ces trois communes des Yvelines. Le réaménagement en colonie de vacances, entraînant d'importantes destructions du décor intérieur, seul le plafond peint de l'entrée fut conservé en état ; la loggia fut fermée pour agrandir la salle à manger collective, dénaturant en partie la façade côté océan ; le parc perdit tous ses rosiers et massifs.

    Dans les années 1960, les capacités d'accueil furent augmentées par la construction de dortoirs en matériaux préfabriqués sur la parcelle située de l'autre côté de la rue sur les anciennes parcelles de vignes, et d'annexes dans le parc de la villa, sur plans de l'architecte nazairien Georges Vachon. La villa fut alors réservée à la restauration et aux bureaux8.

     

    De 1992 à 2005, le syndicat intercommunal de colonies de vacances des villes de trappes Trappes, Guyancourt et Saint-Cyr-l'École, (SICV), confia la gestion des lieux au Centres d'Entraînement aux Méthodes d'Éducation Active Pays de Loire (CEMEA). Les lieux furent ouverts toutes l'année aux écoles désireuses de faire des classes de découvertes marines.

    En 2006 le SICV décida un changement de prestataire et choisi Échange et découvertes. Il s'en suivit un imbroglio juridique de 14 mois, et les huit salariés des lieux ne furent pas payés, chacun des deux prestataires se renvoyant la responsabilité. La capacité d’accueil était alors de 120 enfants.

    En 2008 le SICV décida de vendre le domaine à Échange et découvertes à condition que cela reste un centre à vocations éducatives, et non que cela soit transformé en hôtel. Mais en 2012, au prétexte que les coûts d'entretien et que la mise aux normes d'acceptabilité étaient trop élevés, l'ensemble fut vendu à un investisseur qui fit procéder à la restauration complète de la villa, la destructions des annexes Vachons, et l'ajout d'une piscine devant la façade côté océan. Il procéda aussi à la transformation des anciens dortoirs en dix logements.

     

    Des vues réalisées en 2009 par la Région des Pays de la Loire sont consultable ici : https://www.patrimoine.paysdelaloire.fr/ressources/diaporama/detail-diaporamas/diaporama-maison-de-villegiat-49/

     

     

     

     

    1 C'est aujourd'hui une commune de Montrevault-sur-Èvre, au Sud-Ouest d'Ancenis.

    2 Légué à madame d'Halluin, celle-ci ne pouvant l'entretenir et ne trouvant pas acquéreur, le fit démolir en 1960, il n'en reste que la ferme.

    3 Cette mine comptait 750 salariés dont 430 mineurs travaillant entre 150 et 180 mètres de fond. Elle ferma en 1953.

    4 Cette usine évolua après la seconde-guerre en usine de téléviseur, puis en usine informatique.

    5 C'était une vente aux enchères de d'une maison située près de la plage et de sept lots de vignes. La vigne acquise par Blavier avait été mise à la vente à 1.800 fr pour prix de départ.

    6 Un géorama est une sorte de planisphère inversé tapisser à l'intérieur d'une sphère dans laquelle on introduisait le public. C'était entre 1830 et 1900 une attraction en vogue comme les panoramas.

    7 Stella Maris Ave fut construite pour l'industriel Charles Pluget, (1874 – 1927), Puget ; il vendit en 1950 l'un de ses cousins issu de germain, Hubert Blavier, (Fontainebleau 23 juin 1903 – Paris 28 septembre 1988), et son épouse, née Hélène Marie Paule Henriette Jamar, (Saint-Gilles-Bruxelles 3 mai 1903 - Saint-Marc-sur-Mer 18 avril 1981).

    8 Un second bâtiment fut construit de l'autre côté de la route, pour servir de dortoirs, le site a été réaménagé après 2012 pour devenir la Résidence Ker Annette.