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La " Vieille-église "

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La « Vieille-église », dessin de Paul Bellaudeau publié dans Le Courrier de Saint-Nazaire du 2 mai 1931.

 

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La Vieille-église en 1830, dessin de Charles Beilvaire d’après un tableau disparu, publié dans Le Courrier de Saint-Nazaire du 7 octobre 1933.

 

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Aquarelle de Charles Beilvaire, Coll. O. M. de S. L.

 

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Nous l’avons expliqué dans notre article précédent, les Nazairiens obtinrent du vicomte, Charles d’Avaugour, de transformer les restes manoir fortifié féodale ruiné durant la Guerre de Cent ans en église. Cela fut entrepris entre 1580 et 1584, date à laquelle le culte est officiellement pratiqué dans ce nouveau lieu consacré.

 

L’emplacement de cette église, et donc de l’ancien manoir féodal des Vicomtes de Saint-Nazaire, se situait à proximité du portereau et de l’estuaire, proche de là où est aujourd’hui le Vieux Môle.

 

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Emplacement de la vieille-église et donc du logis féodal des vicomte de Saint-Nazaire

 

Cette église reprenait des éléments de murailles déjà élevé, on relatait encore au milieu du 18ème siècle l’existence d’anciennes marches saillantes dans une encoignure extérieure du mur Nord, à côté de la porte de la chapelle du Rosaire, et dont on devinait encore l’emplacement au moment de la destruction en 1896. Cette chapelle du Rosaire, latéral à la nef, et contiguë au chœur était la partie où le vicomte et les autres seigneurs de la paroisse avaient leurs bancs, et où ils étaient inhumés, ce qui explique l’existence d’une entrée particulière. Les autres restes du manoir féodal avaient disparu des aveux depuis 1673, ce qui laisse supposer qu’on les avait finalement arasés. En effet, un nouveau cimetière s’était constitué autour de l’église, et fut bientôt délimité par des murs. Ce cimetière servit jusqu'en mai 1783, quand le conseil de fabrique décida la bénédiction d'un nouveau cimetière à l'extérieur de la ville, le cimetière de La Porterie (à l'emplacement du boulevard de la Légion d'Honneur et du terrain des anciens frigos, désaffecté en 1848), mais dans la réalité il fut utilisé par les familles qui y avaient sépultures jusqu'à la destruction de l'église.

Outre l’autel du Rosaire, il existait quatre autres autels dans le style de la Contre-réforme, dédié à la Vierge et à saint Nazaire, encadrant un autel principal, et un cinquième situé dans une seconde chapelle latérale, consacré à la Vraie Croix. La paroisse possédait en effet une relique constituée de deux lamelles du bois de la croix que les Empereurs latins de Constantinople disaient avoir été celle du Christ, et qu’ils avaient gagé auprès de la république de Venise, et rachetée par Saint Louis, qu’il émietta en présent à ses vaisseaux, alliés, et amis. Les deux lamelles étaient collées en tau sur un morceau de parchemin rangé dans un reliquaire. La présence de Saint-relique faisait que nombre de pèlerins venaient à Saint-Nazaire pour l'Exaltation de la Croix chaque 14 septembre, elle était suivit le lendemain par une grande foire. Le droit de la manipuler, et de récolter l'argent des dons dans le tronc quil lui était associé entraîna des querelles. En 1709 on du saisir le Présidial de Nantes à ce propos. Il fut alors interdit au recteur de Saint-Nazaire « de se mêler directement ou indirectement des deniers et de la boyste de la précieuse Vraye Croix  », mais n'ayant que faire de la décision du Présidial, le recteur avait fait réalisé une copie de la clef du tronc, ce dont se lamenta le conseil de la Paroisse dans le compte rendu de son assemblée générale du 3 novembre 1709. Cette relique était enchâssée dans un reliquaire d'argent sculpté.

Le style des autels cités était celui de la contre-réforme, en bois sculpté, peint et doré. On en conserve qu’un seul élément, le retable avec tabernacle qui se trouve sur l’autel du cœur de l’église Saint-Nazaire actuelle. 

En 1790, l'inventaire, dressé par le curé titulaire , Sébastien Bureau, (qui fut le première maire), et le vicaire Pierre Malécot, précise que la sacristie contient six calices, deux ciboires, un ostensoir, une custode (boite à hosties), douze chapes, deux dais, et trois bannières, et que le presbytère était en la rue des sable, hors des fortifications de la ville.

La nef centrale de l’église, avaient la particularité d’avoir en sa première partie, et sous le clocher, des colonnes de bois qui étaient en réalité six anciens mats offerts par des marins. Ils supportaient un plafond plat en lambris, que J. Desmars disait être« ignoble ». Un jubé de bois réalisé en 1682 par Pierre Hayard, artisan nazairien, séparai la nef du chœur. Les arcades, mettant en communication les chapelles et le chœur, étaient en plein-cintre et fort larges, de sorte qu’on apercevait sur une seule ligne les cinq autels de face. la nef dans sa partie haute et les chapelles latérales avaient des plafonds à voûte de bois. Plusieurs peintures sur toile décoraient le sanctuaire, celle de l’autel du rosaire avait été réalisée en 1657 par un peintre nantais, Jean Le Coutz, un baptême du Christ avait été peint en 1780 pour orner les fonds baptismaux, par l’atelier des peintre Collet, père et fils, et avait couté la somme astronomique de 300 francs au conseil de fabrique. On leur trouva tous les défauts au 19ème siècle, et elles furent mises au rebut quand on détruisit l’église.

 

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Plan de l’église dressé par Henri Moret, et ici repris par Fernand Gueriff dans "le Vieux Saint-Nazaire ", éditions Jean-Marie Pierre.

 

Du décor on a aussi conservé en statue de bois polychrome, un ange gardien doré qui devait être un ornement de l’autel principal, une stature dite de Notre-Dame du Bon Port, la Vierge de douleur et Saint-Jean priant, œuvres du 15ème siècle, anciens ornements d’une poutre de gloire, qui provenaient de la première église, dite « chapelle Notre-Dame d’Espérance » au 19ème siècle, ainsi que deux reliefs en albâtre anglais, La Jérusalem céleste et Le Couronnement de la Vierge,  acquisitions courantes par les marins bretons durant les ventes qui eurent lieu en Angleterre à la suite de la Réforme. L’ensemble des boiseries étaient donc colorés, dorés, c’était un décor riche même si les éléments étaient de qualité variable.

Le clocher était surmonté d’une croix de fer qui surmontait une girouette de cuivre doré en forme de main, nommée par les Nazairiens « main du bon accueil ». Conservée dans les collections municipales, elle mesure 43 cm de long sur 38 cm de large, pour une épaisseur de 3 mm. La tradition était que quand les couvreurs œuvraient sur le toit de l’église, ceux-ci décrochaient la main, et la baladaient ensuite dans la ville, en la présentant à chaque maison. Les gens donnaient alors quelques pièces qui servaient à payer le redorage.

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La croix du clocher fut détruite par la foudre le dimanche 16 janvier 1739 durant la messe, au moment de l’élévation. L’orage arracha la majeure partie de ardoises de l’église, et y eu plusieurs blessés qui décédèrent des brûlures. On remplaça la croix par une nouvelle commandée au serrurier du Pouliguen, Jean Lamarre, qui fut payer 45 livres, et l'on refit le toit, mais l’ouragan de 1751 causa de nouveaux dommages.

Le clocher comportait plusieurs cloches, trois d'entre-elles nous sont connues : la première d'un poids de 900 livres, fut baptisée le 13 décembre 1734 « Françoise », elle eut pour marraine Perrine de Carné, vicomtesse de Saint-Nazaire et baronne puis baronne de Marcein, épouse de Joseph du Boisbaudry, comte de Langan, et pour parrain Jacques Le Pennec, seigneur du Bois-Joalland ; la seconde, dite la Grosse Cloche, avait un poids de 1065 livres, fut baptisée en 1767 et eut pour parrain René-Jean Bonin, comte de La Villebouquais, co-vicomte de Saint-Nazaire, et pour marraine la co-vicomtesse Louise-Françoise Raoul de La Guibourgère, épousede  Jean-Baptiste-Elis Camus de Pontcarré, seigneur de Viarmes ; la troisième, d'un poids de 200 livres, fut baptisée le 5 juin 1778 « Jeanne-Marie », en hommage à l'une des filles d'Alain-Jacques-René Bonin de La Villebouquais, elle remplaçait une précédente tombée du clocher dans la nef en ayant transpercé le plafond lambrissé en juillet 1772.

 

 

En 1792 le curé Constitutionnel de Saint-Nazaire, nouvellement nommé, Yves Guinoys, voulu prendre pour son usage l'argent déposé dans le tronc de la Vraie-Croix, faisant valoir la sentence du Présidial de Nantes de 1709 qui en attribuait le contenu à la seule paroisse, il fut arrêté par les Gendarmes et mis en prison à Guérande. Le tribunal du district l’acquitta, jugeant qu'il ne pouvait pas savoir.

 

 

En 1794 le culte catholique fut interdit, l'église fermée, et la direction du District de Guérande exigea qu’on lui fasse parvenir tous les objets d’art et précieux ayant servi au culte. Le maire, Jean-François Allançon, pris la décision d’envoyer le reliquaire d’argent, mais conserva chez lui la relique. Il la concevra plusieurs années, et alors que le culte catholique n’était plus autorisé en France, il dressait chez lui chaque 14 septembre un autel dans sa maison, et réunissait secrètement les notables de la ville pour une messe. Craignant des problèmes avec les gendarmes, il finit par la remettre au chapelain de Marsain, l’abbé Rouaud, qui avait refusé de s’assermenter, et s’était caché durant toute la période révolutionnaire. Quand l’église fut rendue au culte en avril 1802, il fallu attendre la fin des tractation entre Napoléon et le Pape pour que puisse être nommé au débit de l'année 1803 Jean Crossay, ancien curé du Croisic, comme curé de Saint-Nazaire. La relique de la Vraie-Croix  fut alors restituée et retrouva son autel.

 

Le 19 janvier 1820, le maire, Julien Maurice Tahier de Kervaret, demanda au préfet d’envoyer un ingénieur vérifier le cloché qui était en mauvais état et dont il craignait qu’il ne tombe un jour de grand vent.

 

En 1844, l’évêque, monseigneur de Hercé, fit dont d'une troisième lamelle issue de la Vraie Croix. On l'ajouta à la relique nazairienne en transformant le tau en croix latine. La relique mesurait environ 2 cm de hauteur et de largeur.

 

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En 1867 un poids de l’horloge placée dans le clocher tomba, perça le plancher, et atterrie dans la nef alors qu’on célébrait la messe.

Vers 1880 le suisse, dit le Grand Blancho, fit tomber en pleine messe une pille de chaises, provoquant la frayeurs des paroissiens à qui l'on répétait depuis presque quinze-ans que le clocher leur tomberait sur la tête !

Ce fut prétexte pour dire qu’il fallait une nouvelle église. On se mis à dire qu’elle était aussi laide et sans intérêt patrimonial. En réalité l’église était condamnée par les agrandissements du port, et en 1882 on lança activement le projet d'un autre lieu de culte.

On entreprit ainsi la construction de l’église Saint-Nazaire actuelle, où la messe fut célébrée à partir de juillet 1891, mais ce ne fut qu’en 1895 que la désacralisation de la « Vieille-église » fut prononcée. La destruction eu lieu en 1896. Il fallut employer la dynamite, preuve qu’elle était bien plus solide que ce qu’on avait raconté pour justifier sa destruction. L'église contenait de nombreuses tombes de notables (plusieurs capitaines et sénéchaux seigneuriaux), et d'anciens seigneurs de la paroisse. Dans la crypte de la chapelle du Rosaire, la chapelle seigneuriale réservée à la noblesse, il fut trouvé une urne de plomb contenant le cœur de Perrine de Carnée, vicomtesse de Saint-Mazaire et baronne de Marcein, décédée le 16 février 1754, épouse de Joseph du Boisbaudry, comte de Langan. Elle fut remise à la famille de Carné qui le fit placé dans son enfeu de Saint-Aubain de Guérande. Les ossements des anciens seigneurs connurent la fosse commune au Cimetière de Toutes-Aides, tout comme les ossements issu du curage du cimetière qui fut effectué jusqu'à atteindre la roche. Huit convois par chariot transportèrent les restes à Toutes-Aides. Dans les gravats on trouva des monnaies dont nous avons déjà parlé ici : http://saint-nazaire.hautetfort.com/archive/2015/10/18/des-pieces-chinoises-dans-le-cimetiere-5702134.html

Tous les objets de fer tirés de cette église furent achetés par monsieur Verdier, commerçant en ferraille, rue du Prieuré. La croix du clocher se trouva comprise dans le lot. Il conduisit le tout dans son magasin. Une vingtaine d’année plus tard, il vendit ces ferrailles et y trouva la croix. Ne voulant pas la livrée à son acheteur, mais il vint trouver le curé de la nouvelle église, le chanoine Donatien Joalland, pour me demander s’il lui serait agréable de la reprendre. Verdier avait fait sa première communion en l'ancienne église à l’ombre de cette croix, et il lui répugnait de la vendre comme un objet profane. Le Chanoine accepta son offre et verdier s’empressa de me la faire apporter. Mais le pied de la croix était tordu et déformé, les bras n’étaient plus droits, deux volutes qui en ornaient les angles étaient détachées. Le Chanoine fit réparer le tout par monsieur Fonteneau père, serrurier près de la nouvelle-église. Il accepta ce travail avec grande joie, il ne voulut pas être rétribué.  Le Chanoine manquant de place au presbytère, Fonteneau consentit à la garder au moins trois ou quatre ans dans son atelier. Mais après sa mort, ses enfants envoyèrent la croix au Chanoine, qui la fit monter dans le grenier de la salle de catéchisme. Sur ces entrefaites, la croix de fonte qui se trouvait à la croisée de l'entrée de la Villès-Martin fut brisée un soir par des ivrognes. Plusieurs habitants sollicitèrent l'aide du chanoine Joalland pour la rétablir. Se souvenant de la croix de l'ancienne église, qu'il n'avait jamais fait installée comme il le projetait devant le presbytère,  il la donna pour qu'elle soit érigée en place de celle brisée au croisement des rues des Pinçons et Marcel Sembat, où elle se trouve toujours.

 

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La Croix du clocher à la Villes-Martin.

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Démolition de la vieille église par Paul Bellaudeau

 

 

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